A l’autre bout de la chaîne.

A l’autre bout de la chaîne.

Les mois ont passé depuis le lancement en grande pompe de la miniature. Il est loin le temps du présentoir en carton et de l’affichette qui expliquait que la miniature sortait en même temps que la vraie voiture.

Bien sûr, le succès a été au rendez-vous. Mais les concurrents ne sont pas restés inactifs. Solido a depuis présenté sa première miniature avec portes ouvrantes, sonnant ainsi le début de la fin pour Dinky Toys qui mettra trop de temps à trouver une solution à cette équation : comment réaliser des ouvrants fonctionnels, fiables et qui ne déforment pas la silhouette de la miniature. Liverpool sombrera très rapidement, Bobigny résistera un peu.

L’entêtement à vouloir rester sur le créneau de la reproduction de la voiture familiale a accéléré le déclin.  Avec ses sportives et sa fantastique gamme militaire, Solido grignote petit à petit des parts de marché.

Cependant, notre Renault 4L connaîtra une carrière honnête. La base est excellente. Je vous invite à découvrir les multiples variantes dans le livre de Jean-Michel Roulet.

Dinky Toys se servira de son modèle pour compléter son offre sur le thème « autoroutes ». Les châssis plastique viennent de faire leur apparition à Bobigny. La 4L hérite donc d’un chassis vissé en plastique de couleur noire. Sur quelques exemplaires de pré-série il est de couleur ivoire.

Je suis ému au souvenir de ce modèle. Enfant, je revois la vitrine d’un petit magasin qui vendait des Dinky Toys et des Norev à deux pas du magasin de mes parents.

Un matin, j’ai aperçu ces trois modèles autoroutes en vitrine. Ce fut un choc. Le Peugeot J7 me faisait rêver avec ses personnages et ses accessoires. L’univers de ces véhicules « orange » me fascinait au point que je souhaitais en faire mon métier, comme d’autre veulent être pompier. J’entraînais mon père devant la vitrine. Les prix étaient élevés. Je suis ressorti avec la Renault 4L.

Le Peugeot J7, je l’aurai plus tard, d’abord en Norev puis enfin, en Dinky Toys. Le diorama m’avait beaucoup marqué.

Un détail ne vous a pas échappé sur la Renault 4L autoroutes. Un indice montre que Meccano est à bout de force. Monsieur Jouin, l’illustrateur patenté durant cette période, a dessiné sur l’étui la nouvelle calandre (1968) qui vient tout juste d’apparaître. Pourtant c’est bien l’ancienne calandre qui équipe la miniature. Dinky Toys aurait pu trouver là matière à rajeunir son modèle de base, et répondre à la la demande, qui, sur ce type d’auto populaire, devait encore être conséquente.

Quelques années plus tard, en 1972, le même cas de figure va se reproduire, avec ce que l’on peut considérer comme la dernière Dinky Toys France, la version postale de la Renault 4L. Là encore, la nouvelle calandre ne figure que sur l’étui.

L’idée est très bonne. Elle devait être dans les tiroirs du bureau d’étude depuis un moment. Claude Thibivilliers qui a quitté Meccano en 1971 semble être à l’origine de ce modèle. Il a réalisé la fameuse version avec châssis en tôle (vissé ou serti) qui sera ensuite distribuée dans des boutiques spécialisées comme Multisport boulevard de Sébastopol.

Mon ami Charles se souvenait très bien l’avoir aperçue dans les tiroirs. Quelle importance accorder à cette miniature ?  Elle a une place dans l’histoire Dinky Toys. On ne peut cependant  la placer sur le même plan que les modèles réalisés avec l’accord de la direction et les prototypes. Je doute beaucoup du fait que la direction ait été informée de la commercialisation de ces séries « parallèles ».

Chez Monsieur Badaroux, j’ai pu récupérer le modèle qui a servi à la validation du projet. Il est réalisé sur la base de la version autoroutes, et possède donc une antenne.

Le dernier modèle que je souhaite vous présenter est émouvant à plus d’un titre.

C’est la dernière version. Elle se situe à l’autre bout de la chaîne, à l’opposé du présentoir vu dans le dernier blog qui avait été conçu pour le lancement du modèle. C’est la fin de production avant que la chaîne ne s’arrête.

Le modèle est photographié dans le catalogue général Meccano de 1975 : il apparaît sur une des pages consacrées aux Dinky Toys spain.

Monsieur Badaroux qui m’a confié tous ses trésors m’a expliqué que Dinky Toys utilisait en usage interne ce type de boîtage blanc. Cependant, le plus important est ailleurs, il est sur le tampon de la languette. Ce tampon signifiait la validation par le bureau d’étude de la taille du carton à envoyer au cartonnier.

Une fois rentré chez moi, je me suis souvenu des pages présentant les modèles espagnols dans le catalogue général de 1975.

Quelle ne fut pas ma surprise de constater que l’exemplaire photographié était celui que je tenais en main. On y voit nettement les deux petits éclats de peinture. La plaque minéralogique en papier a été perdue.

 

Dans la même logique, j’ai récupéré d’autres modèles qui, sans preuve à l’appui toutefois, sont les modèles pressentis pour le catalogue, dont cette belle Simca 1100 vert bouteille. La couleur définitive de série sera le vert métallisé.

 

 

 

 

L’empire contre attaque ?

L’empire contre-attaque ?

Un empire. Un véritable empire. Il est loin le modeste hangar en bois, au fond de la propriété familiale de Billancourt qui servit à la construction de la première Renault.

Après la seconde guerre mondiale, la Régie Renault a développé un empire. Ses usines produisent des autos, des camions, des utilitaires, des tracteurs, des métros, des autorails, des moteurs d’avion, de bateau mais également des produits dérivés comme les lubrifiants.

Renault symbolise l’essor économique de la France du 20 ème siècle. Quand on veut parler croissance, exportation, productivité du pays, c’est très souvent Boulogne-Billancourt qui sert d’exemple. Dans la même logique, quand Renault tousse c’est la France qui s’enrhume. En 1936, c’est du côté de chez Renault que naissent les revendications syndicales.

Le même phénomène se produira en 1968. Léo Ferré dans sa chanson « Le conditionnel de variété » aura ce couplet:

« Comme si je vous disais que les cadences chez Renault sont exténuantes

Comme si je vous disais que les cadences exténuent les ouvriers jamais les présidents ».

Renault concentre la lutte des classes. Pour connaitre la température sociale du pays, les dirigeants n’ont qu’à se tourner vers ses usines.

Mais Renault va également servir de laboratoire social et artistique. Des artistes, proches de courants progressistes, vont tenter une communion entre l’art moderne et les travailleurs, à l’image de ce qu’ont réalisé les artistes soviétiques.

Le peintre Fernand Léger n’hésitera pas à venir accrocher une de ses oeuvres, « les constructeurs » (version définitive) dans la cantine des usines. Il viendra sur place recueillir l’avis des travailleurs. Le photographe Robert Doisneau sera aussi un familier de la Régie, immortalisant avec tout son talent le rapport entre la machine et l’homme.

Tout cela peut faire sourire, mais démontre combien Renault avait une place particulière dans notre pays. Je n’ai pu m’empêcher de relier ce passé à une série d’articles parus dans le journal « Le Monde  » du 30 mai 2020 consacré au constructeur.

Le titre est révélateur : « La potion-choc du patron de Renault ».

Résumons: le nouveau patron, Jean-Dominique Senard, est soucieux de « la sous utilisation des usines françaises ». Il veut réduire les capacités de production pour améliorer la marge industrielle, et attirer des productions partenaires ce qui fera augmenter les volumes… J’avoue humblement que ces discours ne me parlent pas beaucoup et demeurent assez abstraits. J’ai parfois l’impression qu’en économie, avec les même chiffres on peut tout dire et son contraire.

Le chiffre qui a retenu mon attention, c’est le nombre de salariés à Flins en 2020 : 2600 !

Je ne peux n’empêcher de penser aux publications que la Régie imprimait dans les années cinquante. Afin de montrer toute la puissance de sa machine industrielle, la Régie avait publié un fascicule : « 24 heures chez Renault » où elle expliquait que chez Renault, l’activité ne s’arrêtait jamais.

Chaque tranche horaire se voyait attribuer une activité. Le publiciste en profitait pour utiliser les fuseaux horaires. Ainsi , il nous entrainait chez Hino au Japon, en Afrique du Sud à Johanesbourg, en Espagne… On était impressionné par cet empire où le temps ne s’arrêtait jamais.

Peu après, en 1957, la Régie a rompu son contrat d’exclusivité avec la C-I-J pour la reproduction de la Renault Dauphine ce qui a conduit à un rapprochement entre Dinky Toys et Renault. La Floride, et l’Estafette ont logiquement suivi.

En 1961, Renault joue gros. Comment va être accueillie la nouvelle 4L ? Visiblement satisfaite de ses rapports avec Dinky Toys, la Régie, va réaliser une grande opération médiatique commune.

Quand on réfléchit, il fallait oser confier les plans originaux d’un nouveau modèle près d’un an avant la sortie presse. On peut imaginer que d’importantes précautions ont été prises afin qu’il n’y ait pas de fuites.

Pour l’occasion Dinky Toys a fait éditer un présentoir en carton afin de placer la nouvelle auto en vitrine et d’attirer l’attention du grand public.

Qu’a-t’-elle choisi pour communiquer ? Une usine et sa chaîne de production. On retrouve là encore l’idée que la Régie est bien un symbole de la production de masse.

Une petite cheminée en carton finit d’habiller le diorama . Un emplacement est réservé à la boîte, qui pourrait faire penser à une caisse avec une auto finie à l’intérieur. J’ai récupéré le présentoir auprès de Robert Goirand.

C’est celui qui était dans la vitrine du magasin du Bébé Lorrain. J’ai eu une émotion particulière en apprenant cela. Je l’ai laissé dans l’état dans lequel Robert Goirand l’a récupéré. je n’ai pas voulu changer la boîte de la 4L, ni effacer la trace de ruban adhésif. Je le conserve telle une relique.

L’affichette publicitaire expliquant le tour de force de Meccano est évocatrice. Quelle époque ! Quelle prouesse que d’avoir réussi cet excercice ! Les gens ont-ils apprécié l’exploit à sa juste mesure ?

Pourtant le vent a tourné pour les fabricants de miniatures. La demande a évolué. Les sportives et les autos de course commencent à fasciner la jeune clientèle avide de sensations .

Cependant, laissons nous encore surprendre par cette petite berline qui est une superbe réussite. C’est incontestablement une digne héritière des séries 24. Elle connaitra une très longue carrière.

Cette époque d’après-guerre semble loin. Il va falloir des arguments solides pour persuader les salariés et l’opinion publique du bien fondé d’un énième plan de redressement chez Renault. Pour utiliser une image liée au cinéma on pourrait titrer : « l’empire contre-attaque ». Je me demande pourtant si le combat n’est pas perdu d’avance, au regard de l’avenir bien sombre de l’automobile dans notre société. 

Rendez-vous dans 15 jours le dimanche 13 Décembre pour la suite  et la fin de l’aventure de la 4L chez Dinky Toys.

 

 

 

Déjà 10 ans.

Déjà 10 ans.

L’eau a coulé sous les ponts.Il paraît déjà loin le voyage de noces à Madrid de 1956 avec la Fiat 1400. (voir le blog : Un Amour de Fiat.)

Quelques kilos de plus, un cheveu gris qu’on arrache, des lunettes, les signes du temps qui a passé sont bien là.

Une petite fille est venue agrandir la famille.

L’année 1966 a commencé sous de bons auspices. L’inter de Milan vient de remporter un second Calcio d’affilée. Trois en quatre ans, de quoi satisfaire notre homme, qui, bien qu’habitant Rome, demeure un fervent supporter du club milanais. La logique est familiale. C’est l’oncle qui a transmis au neveu la passion pour le club lombard.

Et c’est donc le coeur léger que la petite famille s’apprête à fêter les dix ans de mariage du couple.

Côté professionnel, la progression a été linéaire. Nouvel appartement dans le quartier du Trastevere, une télévision, un nouvel aspirateur et surtout, nouvelle auto. Ils ont revendu la vieille 1400 qui fut un bon achat et laissera de bon souvenirs : elle les a véhiculés pendant plus de dix ans sans aucune panne. Elle n’a à son passif qu’un changement de pare-brise.

Du coup, ils sont restés fidèles à la Fiat et ont commandé une 1500L…sera-t-‘elle aussi fiable ?

Cette auto est dérivée de la Fiat 1800, le haut de gamme de la marque. Elle possède un « petit » moteur 4 cylindres très sobre.

Et puis avec la naissance, il fallait une auto plus moderne, plus confortable. D’ailleurs ils vont pouvoir la tester sur un vrai trajet. En effet, pour les dix ans de mariage, quoi de mieux qu’un retour aux sources, un séjour à Madrid !

Le voyage a été long. le moteur a chauffé. Dès l’arrivée à Madrid, notre conducteur est allé dans un garage Seat afin de faire vérifier le radiateur et diagnostiquer les éventuels dégâts dus à la surchauffe.

Seat fabrique sur place des 1500, similaires à leur Fiat. C’est dire que cette mécanique n’a pas de secrets pour un concessionnaire Seat.

L’amabilité légendaire des espagnols, et du garagiste en particulier remontent le moral. La panne est-elle grave ? Le joint de culasse a-t-‘il été touché ? La petite fille a la mine déconfite et pour lui redonner le sourire, le garagiste lui offre un petit découpage : une Seat 1500, comme celle de papa, à découper et à assembler.

En attendant, pour oublier les déboires mécaniques, quoi de mieux qu’une visite au Prado. Si les galeries du musée sont trop longues pour la petite, elle pourra s’atteler à son découpage .

Il y a dix ans, nos amoureux n’avaient pu admirer les chefs-d’oeuvre de la peinture flamande se trouvant à l’étage inférieur.

La descente de croix de Van Der Weyden a de quoi émouvoir le visiteur le plus blasé. La beauté de ces primitifs flamands a redonné un peu de baume au coeur à nos amis car le moral était bien bas à la perspective d’un retour compliqué en Italie.

Il faut repasser à la concession Seat pour connaitre le diagnostic du garagiste. En poussant la porte du garage, c’est avec un grand sourire, que le mécanicien les accueille. « Ce n’est rien, dit-il, juste le manomètre de température d’eau qui était déficient. Il indiquait une température erronée ! »

C’est avec soulagement qu’ils quittent le garage. Sur le chemin les conduisant à l’hôtel le père repère un grand magasin de jouets.

Un souvenir d’enfance lui revient à l’esprit : celui d’une journée mal entamée qui avait bien fini, son père lui ayant offert un splendide coffret PM.

Il entre dans le magasin comme pour donner corps à ce souvenir enfoui qui vient de lui remonter à la mémoire.

La petite fille chagrinée d’avoir saboté le découpage de la Seat jette son dévolu sur une belle reproduction en métal de cette même auto : une fabrication ibérique de chez Dalia aux couleurs chatoyantes. Elle gardera de cette journée ce merveilleux souvenir. Comme pour son père, la journée a mieux fini qu’elle n’avait commencé.

Cette miniature Dalia, de belle qualité, reste un mystère.

On connait les liens étroits entre la firme espagnole et Solido. Toutes deux ont en commun d’avoir très tôt développé la fabrication d’objets injectés sous pression en zamac. Elles maîtrisent parfaitement cette technique quand en 1933 elles ajoutent à leur catalogue déjà fourni des jouets sous la forme de miniatures automobiles.

Même concept toutes les deux. Des autos transformables. Cela prouve bien que les deux entités avaient des liens. Dalia a créé son propre modèle, qui a l’avantage de se décliner aussi en petit utilitaire alors qu’à cette même période Solido ne propose que des autos modulables.

Les modèles espagnols n’ont rien à envier aux français. Mieux, la qualité du zamac injecté est supérieure à celle des Solido. Très peu souffrent de fatigue du métal. Dalia avait aussi pour objectif de produire des objets de qualité, qui devaient bien évidement avoir un prix de vente conséquent. Dalia avait donc les capacités de créer, de produire et de diffuser des produits haut de gamme.

Les années ont passé, la guerre civile a fait des ravages. Les deux firmes sont restées liées. Dans ce pays dévasté, remonter la pente prend du temps. C’est avec la série 100 que les deux entités se retrouvent au début des années soixante. Un accord est conclu entre les deux firmes.

Bertrand Azéma reste très flou dans son livre. Je pense que l’on peut scinder en deux parties cette collaboration, jusqu’à l’apparition des châssis plastique qui marqueront une nouvelle étape.

Simultanément, en fonction des modèles, on distingue deux cas.

Premier cas. Dalia assemble et peint des carrosseries importées de France. Elle injecte uniquement le châssis indiquant les deux marques « Dalia-Solido ». Ce qui semble logique.

Second cas, Solido a dupliqué son moule. Le modèle est alors entièrement produit en Espagne. Seule l’inscription Dalia figure sur le châssis, le modèle étant produit entièrement en Espagne.

C’est une hypothèse qui me parait convaincante et permet d’expliquer ces variantes.

La Seat est gravée Dalia uniquement. Elle a donc été produite entièrement en Espagne. La dernière question qui se pose est la suivante : qui a conçu cette miniature ? le bureau d’étude de Dalia, celui de Solido ou les deux en collaboration ?

Nous avons vu plus haut que Dalia avait les capacités techniques pour graver et injecter aussi bien que Solido. Concevoir le modèle ? pourquoi pas. Cependant, en examinant la reproduction de la Seat, certains détails parlent. La gravure ens relief des porte, capot et malle est similaire à celle des premières Solido.

Mieux, le châssis est conçu de la même manière : il comporte une plateforme avec un décrochement au niveau de l’axe arrière, renforcée par deux triangles, caractéristique des premières séries 100.

Je pense que cette auto est le fruit d’une collaboration entre les deux bureaux d’étude. Celui de Solido a semble -t’-il participé à l’élaboration de cette auto.

Un détail me plaît particulièrement. Le traitement du pot d’échappement est une petite merveille.

En effet ce modèle connaîtra une seconde version, la 1500. Dalia se contentant de changer la gravure sur le châssis et d’ajouter des phares diamants.

Malgré les années écoulées, preuve de la qualité du moule et de sa conception, cet accessoire ne sera pas déformé. Il résistera au temps.

Mes remerciements pour l’aide  de José Andrade dans l’élaboration de ce blog. Prochain blog le dimanche 29 Novembre.

Une vie rythmée par les familiales.

Une vie rythmée par les familiales.

Il en était fier de cette Talbot Baby. C’était celle de son grand-père. Avant la seconde guerre mondiale, elle symbolisait la petite réussite sociale d’un commerçant. L’auto avait marqué mon père, et pour cause. Durant l’exode de 1940, alors qu’il avait quelques mois, elle les avait conduits à bon port, dans la maison familiale, à Saignes, dans le Cantal.

Jusqu’à la fin de ses jours, il m’en a parlé avec du soleil dans les yeux. Enfant, je pensais donc que c’était une auto prestigieuse, de la trempe d’une Bugatti ou d’une Delage. Ce n’était pas le cas.

Quand j’ai rentré la très importante collection de RD Marmande en 2019, il était tout étonné qu’elle ne soit pas dans le lot. Quelques mois après sa disparition, j’en ai trouvé une ressemblant à la leur, avec sa modeste carrosserie berline. Il aurait adoré pouvoir la mettre dans son musée miniature, là où il avait posé une photo en noir et blanc prise en Auvergne après la guerre.

En 1975, au début de notre aventure de collectionneur, lorsque j’ai acheté la Dinky Toys Talbot Lago, j’ai fait le lien entre la Talbot familiale et celle de Louis Rosier, auvergnat, vainqueur avec son fils au Mans en 1950.

La Dinky Toys reproduit une version monoplace. Je suis admiratif de la façon dont Bobigny a su traiter la position si particulière du pilote sur cette monoplace : enfoncé, les bras pliés en deux sur cet énorme volant.

Dinky Toys Liverpool qui a pourtant réalisé une belle série, n’a pas su capter cette impression avec sa copie. Les photos d’époque parlent d’elles-mêmes.

Qu’on le veuille ou non, l’automobile est un puissant marqueur social. Une fois son diplôme de technicien du cuir en poche, mon père commença comme salarié dans le magasin de mes grands- parents. Il pu ainsi acquérir une Dauphine d’occasion. C’est le plus vieux souvenir de ses voitures que j’ai gardé en mémoire.

Pendant longtemps il évoquait la nécessité de donner régulièrement un coup de polish sur la carrosserie car la teinte brique avait tendance à virer sous les effets du soleil et de la lune. J’ai surtout en mémoire le porte-étui à cigarettes qu’il avait fabriqué pour être autonome au volant, et le mal qu’il s’était donné pour le décoller et l’installer dans sa nouvelle auto, une Simca 1501, également achetée d’occasion.

Ce sont de bien modestes autos, celles que lui permettait son salaire. Mais ses autos, il les entretenait méticuleusement, comme beaucoup d’autres d’utilisateurs à l’époque. On savait apprécier ce que l’on avait, notamment l’auto qui faisait encore rêver. Elle était associée à un sentiment de liberté, aujourd’hui disparu. Nous subissons désormais des injonctions contradictoires : acheter des autos neuves pour soutenir l’économie mais les laisser au garage pour préserver l’environnement.

Le souvenir des départs en grandes vacances me revient, avec ses préparatifs méticuleux, la thermos de café par exemple. On avait l’impression de partir pour une véritable aventure. En fait, l’aventure c’était le trajet Compiègne-Romans par la nationale 7. La réussite du voyage était fonction de la sagesse des enfants assis à l’arrière. La phrase préférée de mon frère était : « Quand est-ce qu’on arrive ? « .

La vue de la Saône puis du Rhône à la sortie du tunnel de Fourvières à Lyon était un premier signe d’approche de la destination, suivi une  dizaine de kilomètres plus loin des torchers de la raffinerie Elf à Feyzin. Aujourd’hui encore, le passage devant ce qu’il reste de ce complexe industriel me redonne des forces pour poursuivre mon chemin.

On savait qu’une heure après, on était arrivé à Romans….et un trajet exemplaire, sans énervement, pouvait être récompensé par une petite Norev.

En 1970, une fois à la tête de l’affaire familiale il s’autorisa à commander sa première voiture neuve. Dans ces années là, l’acquisition d’une auto accompagnait souvent un changement de statut.

Il m’expliqua plus tard qu’il avait hésité entre l’Alfa Romeo Giulia TI et la BMW 2000Tii. Il a choisi l’Allemande.

Il opta pour une carrosserie type « berline », bien moins élégante que la version coupé de la 2002, mais l’auto avait pour vocation première de transporter la famille, tant pis pour l’aspect visuel.

Aimant la belle mécanique il avait choisi cette rare version 2000 tii, avec la fameuse injection Kügelfisher, identique à la 2002Tii. L’auto était cependant bien moins performante que cette dernière du fait du poids de l’ensemble qui atteignait 1150Kg. Le freinage pâtissait d’ailleurs de ce surpoids, d’autant que l’équipement mixtant freins à disques et à tambours était sous-dimensionné. Pour résumer, elle allait vite, mais il fallait anticiper le freinage.

On ne peut pas dire que le choix de la couleur beige « Africakorps » était heureux même si les allemands l’avait pudiquement rebaptisé « Sahara Beige ». Leur restait-il des stocks de peinture ?

Elle ne restera pas longtemps de cette couleur. Mon grand-père, installé à Nice où il venait tout juste d’entamer sa retraite tomba gravement malade. Mon père et son frère firent de nombreux allers-retours, se relayant au volant, roulant de nuit, bref, sollicitant fortement la mécanique. l’auto ne supporta pas un tel traitement. Le moteur cassa. Mon père fit faire un échange standard. Je me souviens du moteur arrivant dans une caisse en bois chez le garagiste.

Mais par la suite, un problème récurrent de pas de vis à la sortie du collecteur d’huile nous immobilisa à trois reprises. Les deux premières fois sans trop de dégâts, mais à la troisième, un incendie se déclencha. Bien que vite maîtrisé, les faisceaux électriques avaient souffert et surtout le capot moteur avait besoin d’un passage en cabine de peinture.

Mon père passa du tout au tout dans le choix de la nouvelle teinte, avec une logique certaine d’ailleurs. Il s’était aperçu que la couleur sable n’était pas très visible par les autres automobilistes. Il consulta le catalogue BMW de l’époque. Le constructeur de Munich avait un jaune « Golfgelb » qui convenait parfaitement aux 2002, et à leur allure sportive. Mais sur une berline assez pataude, il fallait oser. Il osa.

Observez cette extraordinaire photo, de notre familiale BMW ainsi repeinte, remontant la ligne droite des stands lors de l’édition 1978 des 24 heures du Mans, quelques heures avant le départ de l’épreuve. Les préposés autour de la Ferrari 512BB de l’écurie Francorchamps, n’en reviennent pas :

C’est quoi ça ? Qui a laissé passer cet objet de mauvais goût ?

La photo nécessite quelques explications. Nous sommes le samedi 10 juin 1978. Il est 11 heures. Dans 5 heures ce sera le départ des 24 heures du Mans. Mon père est au volant. Il est concentré sur le sujet. Il ne s’agit pas de se faire remarquer plus. Je suis assis à sa droite et mon frère est sur la banquette arrière.

Mon père avait fait connaissance, dans son magasin, d’un client qui était membre du directoire BMW. Ils avaient noué une relation d’amitié. Sachant que mon père s’intéressait à la course automobile, il lui avait proposé une inscription à une opération organisée à l’intérieur du réseau BMW. Elle se nommait « 48 heures BMW ». Nous étions entourés de concessionnaires avec de gros coupés série 6 .

Après coup, mon père expliquait comment il avait dû lever le pied dans les Hunaudières à cause de l’eau du moteur qui chauffait. L’auto était un peu fatiguée. Nous nous étions fait doubler par la plus part des autres autos.

Ce dont je me souviens, c’est la joie que mon père éprouva d’avoir pu nous faire découvrir les 24 Heures du Mans dans ces conditions. Nous avions eu ,comme lors de l’édition  1977, des places au-dessus des stands de ravitaillement BMW. Quels souvenirs ! Quel privilège pour un enfant !

J’ai trouvé cette vidéo exceptionnelle enregistrée par Porsche durant les essais de l’édition 1977  (l’auto avait encore des rétroviseurs carénés). C’est bien le même tour, la même configuration de circuit … mais l’auto ne roule pas à la vitesse de 130km/h comme la nôtre! La piste est étroite, sale. C’est une autre époque. voir la vidéo https://youtu.be/Ba-QD3wnfF8

Que dire de cette photo? J’y tiens énormément. J’ai gardé la plaque avec notre numéro, un modeste 352 et même le bracelet pour accéder aux stands.

Cette édition restera à jamais la plus belle pour moi.

Mon père commanda quelque temps plus tard une 528i. C’était une belle progression. Il était attaché à cette marque et par conséquent, il entreprit d’élargir notre collection de voitures de course  miniatures aux reproductions de BMW.

La BMW 1500 Dinky Toys sera donc avec la Talbot Lago de Grand prix les deux premières Dinky Toys France qui entrèrent dans notre collection. En 1979, il acheta les deux versions Poch, en boîte bien sûr. Il fallait déjà avoir le goût du rare et du beau pour aller dans une telle direction.

Bien plus tard, j’ai acquis d’autres versions de pré-série. La première devait appartenir à Jean-Michel Roulet qui l’avait eue rue du Maroc. L’auto est curieusement barbouillée et retouchée. Le plus intéressant est ailleurs.

C’est une pré-série : Dinky Toys a oublié de graver deux montants de portières et la grille d’aération  sur le capot devant le pare-brise. L’auto eut un curieux destin. Cédée à Jean Vital-Remy, elle fut mise avec des dizaines d’autres, constituant un lot de modèles en état d’usage comme il est si joliment indiqué dans les catalogues de salle de vente.

L’autre vient aussi de cette collection belge. Elle est intéressante au regard d’une caractéristique particulière. L’auto est peinte dans le bleu métallisé de la Mercedes 300, cela n’a pu vous échapper. Les finitions ne sont pas faites, et l’auto n’est pas sertie. La carrosserie est vierge. Je n’ai que deux autos finies ainsi. En discutant avec d’anciens employés de chez Dinky, j’ai appris que cette pratique était très commune. Peu d’exemplaires ont survécu en raison de la conception de ces objets qui ne servaient qu’à faire un premier choix : aucune finition, pas de sertissage. J’ai vu la série de Peugeot 203 de Robert Goirand. Elles sont de la même veine. Aucun doute sur leur authenticité, les carrosseries n’ont pas été bouterollées.

Je finirai par celle qui me tient le plus à coeur. Mon père était habile de ses mains. Le cuir demande de la dextérité. Il aimait faire des maquettes, des « kits en white metal ».

Nous nous répartissions le travail. Il préparait les carrosseries et les peignait au pistolet, je faisais le montage et la finition. Il acheta un modèle de la 1500 Dinky Toys, modifia la face avant et arrière, et la peignit en jaune « Golfgelb ».

Je finis de la décorer dans sa livrée 48 heures du Mans 1977. Le montage est loin d’être fantastique. Elle resta à ses côtés jusqu’à la fin de ses jours.

Prochain blog le dimanche 15 Novembre 2020.

Une union sans passion.

Une union sans passion.

En feuilletant les catalogues Solido du milieu des années soixante, peut- être avez-vous été étonnés de voir apparaître des miniatures provenant d’autres fabricants : des Tekno danoises, des Mebetoys et des Dugu italiennes et même des Lone Star anglaises.

Transposons cela dans l’univers automobile de la même époque : c’est comme si le catalogue publicitaire de la Peugeot 204 de 1966 consacrait deux pages à la Fiat 124 !

Impensable. A cette époque, les constructeurs européens n’avaient pas encore inventé les plates-formes et les motorisations communes. Une Peugeot était une Peugeot et une Fiat une Fiat. En 2020 la situation a changé à la suite du rapprochement de ces deux marques.

Comme bien d’autres secteurs industriels, les fabricants de jouets européens ont profité de la  création de la CEE (communauté économique européenne) en 1957, entre l’Allemagne de l’Ouest, la Belgique, le Luxembourg, les Pays-Bas, l’Italie et la France. L’union douanière et la politique économique commune ont facilité les rapprochements entre eux.

Les accords entre fabricants de jouets ont porté sur deux axes : la production mais surtout la distribution.

Certains fabricants ont donc mis à profit leur réseau de distribution national pour diffuser des produits étrangers. Ainsi, au lieu d’affronter de front la concurrence, cela leur a permis de mieux la gérer et surtout d’en tirer un substantiel profit financier. Ces alliances ont été à géométrie variable.

Dans le triangle formé par Tekno, Solido et Mebetoys, seuls Solido et Tekno ont pratiqué des accords de distribution dans les deux sens. Mebetoys n’importera pas les Tekno en Italie. C’est son concurrent, Mercury, qui le fera. Par contre Tekno profitera des liens tissés entre Solido, son partenaire, et Dalia, dans un accord portant sur le montage en Espagne de quelques miniatures danoises. (voir le blog consacré aux Tekno Dalia)

M. Juge m’a souvent parlé de sa fierté d’avoir distribué les Mercury en France.

En effet, Safir importera les miniatures de la marque italienne pendant quelques années. Il m’a raconté comment, lors d’une virée en Italie à l’occasion du salon du jouet avec M Becqué son patron, ils avaient réussi à signer quatre contrats d’importations : Mercury, Rio, Dugu et Togi. Rien que cela.

Un tour de force pour une firme qui en était encore à ses débuts. On mesure la reconnaissance et la confiance des Italiens envers la firme française. Pour l’occasion elle éditera des affichettes en français. Safir sera même à l’origine d’une série promotionnelle pour le vin Primior.

Ne cherchez pas ce vin parmi les grands crus, mais en échange des points collectés sur les bouteilles, le consommateur avait droit à une petite Mercury décorée d’ une étiquette portant le nom du breuvage et ornée de damiers noir et blanc, symbole de la course automobile.

Les firmes italiennes ont très rapidement compris l’intérêt économique, et ont su profiter de l’ouverture des frontières. Elles y ont vu une opportunité d’expansion. Les fabricants de jouets espagnols suivront cette voie peu de temps après.

Les firmes citées plus haut étaient complémentaires, leur association avait de l’allure. Ce ne fut pas le cas partout. L’association entre Märklin et Mercury fut assez déconcertante.

Reprenons l’histoire. Märklin est une des plus anciennes et sans aucun doute la plus renommée des firmes de jouets. Dans le monde entier, des collectionneurs lui vouent un véritable culte. La firme est née en 1859. Au début de son activité elle s’est concentrée sur le mobilier de poupée, puis rapidement elle s’est s’orientée vers les machines à vapeur et naturellement vers le modèlisme ferroviaire.

Ce sont pourtant des mécanismes à ressort qui équipent les premières motrices. L’histoire est en marche, d’innovation en innovation la firme devient la référence dans ce domaine. Märklin est synonyme de grande qualité. Elle pratique des tarifs élevés, sa production semble réservée à une certaine élite.

Photo originale de Jacques Greilsamer "la grande époque des Marklin"
Photo originale de Jacques Greilsamer « la grande époque des Marklin »

Au milieu des années trente, suivant en cela de très près Meccano avec ses Dinky Toys, la firme allemande offrira à sa clientèle une gamme de miniatures automobiles destinée à animer ses réseaux de chemin de fer à l’échelle « O ».

Une unité d’échelle de reproduction entre les véhicules ainsi qu’une très belle qualité d’exécution font de cette série un must, qu’après-guerre déjà, les collectionneurs s’acharneront à vouloir réunir. C’est l’acquisition d’une Auto Union type D de chez Märklin qui nous a fait entrer, mon père et moi dans le cercle des collectionneurs « avertis ».

La guerre va bien sûr interrompre cette série. Märklin revient à la production de miniatures automobiles dès 1949, avec une nouvelle gamme dominée par la reproduction de miniatures de marque allemande. Seul le premier modèle, une Buick Roadmaster, destinée on s’en doute à l’occupant américain fera exception. Ce sera une constante pour les fabricants de jouets allemands, Gama, Schuco, Märklin et Siku notamment, d’incorporer après-guerre quelques reproductions de voitures américaines.

A la lecture des catalogues, on comprend que les miniatures automobiles n’étaient pas la priorité de Märklin. Le développement après guerre du modélisme ferroviaire à l’écartement HO, qui correspond à l’échelle 1/87, va absorber une grande partie de l’énergie de Marklin. De ce fait, la vocation première des miniatures au 1/43, n’a plus lieu d’être.

Märklin continue cependant sa production mais sans la véritable volonté de développer une gamme de miniatures autonome et sans  liens avec le modèlisme ferroviaire, comme Meccano avec ses Dinky Toys.

La fabrication est certes de qualité, mais rustique. Les châssis sont vissés. la finition est manuelle : les argentures sont réalisées au pinceau. Si la gravure est exceptionnelle du fait de l’expérience acquise avec la reproduction des matériels de chemin de fer à l’échelle HO, les modèles ne brillent pas par l’innovation technique.

Quand vont apparaître les miniatures avec vitrages, suspensions et parties ouvrantes au début des années soixante, la firme de Göppingen ne pourra riposter aux attaques de la concurrence et devra changer d’orientation.

En 1959 sort la dernière miniature automobile au 1/43, la Mercedes 190SL.

A partir de là et sans beaucoup de conviction Märklin va se concentrer sur les miniatures de poids lourds, domaine dans lequel elle peut encore affronter la concurrence. Au début des années soixante la course aux gadgets a encore épargné ce secteur bien particulier.

Ce sera le Mercedes semi-remorque citerne en 1960, puis un beau Krupp ridelles (on appréciera la gravure exceptionnelle de la face avant), et, en 1964 le superbe Kaelble benne, un must et une référence pour les graveurs. Le catalogue est un concentré de beaux modèles, de beaux modèles qui datent : au milieu des années soixante, on y trouve encore la monoplace Mercedes W196 carénée de 1954 !

La direction de Märklin a pris conscience de la situation. Elle ne peut rester ainsi, à la traîne des autres fabricants de miniatures. Elle prépare son retour. J’avance l’idée que Märklin est allé chercher Mercury afin d’étoffer son catalogue, en attendant, que le bureau d’étude riposte avec une nouvelle gamme, prévue pour 1966-1967.

Les miniatures y seront équipées de vitrages, suspensions et parties ouvrantes : ce n’est qu’une mise à niveau par rapport à la concurrence. Le programme sera encore une fois axé sur la reproduction d’autos germaniques.

L’accord avec Mercury ne portera que sur l’importation en Allemagne de miniatures italiennes. Il ne concerne pas la distribution de produits Märklin en Italie. Märklin, avait déjà implanté son réseau il y a fort longtemps.

Cet accord avec la firme de Turin, est contemporain de celui signé avec Safir en France. N’en déplaise à certains, en 1964, Mercury est déjà sur le déclin.

Amusez-vous à comparer les portes des deux Fiat 2300S de Solido et de Mercury : celles de la Solido sont fines, bien gravées et joignent parfaitement lors de la fermeture. Celles de la Mercury sont épaisses et ferment mal. La miniature est certes très détaillée. Trop?

L’ensemble manque de finesse. Suivre Solido et Corgi Toys dans la course à l’innovation aura essoufflé plus d’un fabricant de jouets en Europe.

On est aussi bien loin de la finesse de gravure de Märklin. Comment le bureau d’étude de Göppingen appréciait-il ces miniatures italiennes ? Fermait-il les yeux sachant qu’il préparait la riposte avec des miniatures de qualité ? Entre Märklin et Mercury, c’est un mariage de raison mais la passion n’est pas là. Les mariés sont mal assortis.

Il est étrange de voir sur la couverture du catalogue Märklin la Mercedes 230SL Safari de Mercury ! Certes c’est une auto allemande, mais nous sommes loin des standards de qualité de chez Märklin. L’illustrateur a d’ailleurs fait un travail formidable. Il a su capter tout le charme de la miniature et gommer les aspects rustiques comme cette grille de protection en plastique chromé, assez grossière.

Toute la gamme Mercury du milieu des années soixante est présente dans ce catalogue au format inhabituel. Comment a réagi la clientèle allemande ? Les autos de course de chez Mercury, très populaires à cette période ont dû apporter un plus.

M. Juge me parle encore des grandes quantités de  Ferrari 250 LM qu’il a réussi à vendre aux détaillants français.

Il précise à juste titre : « Tu comprends, à cette époque, les Ferrari elles gagnaient partout ! Le nom faisait vendre.  » C’est une réalité que la firme italienne a dominé les courses d’endurance, pendant une petite décennie, comme plus tard Porsche le fera. Les autos de course Mercury ont de l’allure.

Märklin conservera jusqu’au bout de son aventure 1/43, en 1972, cette importation Mercury.

Les modèles post 68 de chez Mercury marqueront une nette décadence, difficile à expliquer. On a l’impression qu’un nouveau bureau d’étude est à l’origine de ces miniatures médiocres. Märklin traînera cette gamme comme un boulet. Désormais, dans ses catalogues, Märklin prend bien soin de séparer les deux gammes. Mais par rapport aux Märklin, le point positif des Mercury réside dans un prix de vente attractif. C’est peut-être la raison qui explique l’intérêt pour Märklin de diffuser cette série « premier prix ».

L’histoire se répétera. C’est encore une fois le modelisme ferroviaire qui aura raison des miniatures automobiles. Märklin s’apprête en 1973 à lancer une nouvelle gamme : Märklin Mini-Club (écartement Z, échelle du 1/220).

Cela marquera la fin de l’aventure des miniatures 1/43. Märklin ressortira, bien longtemps après, dans les années 90, des rééditions de quelques modèles au 1/43. D’abord une série de monoplaces issues des moules d’avant-guerre, puis des autos du milieu des années soixante-dix, sans intérêt car les modèles originaux sont courants.

Prochain blog le dimanche 1er Novembre.