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A l’autre bout de la chaîne.

A l’autre bout de la chaîne.

Les mois ont passé depuis le lancement en grande pompe de la miniature. Il est loin le temps du présentoir en carton et de l’affichette qui expliquait que la miniature sortait en même temps que la vraie voiture.

Bien sûr, le succès a été au rendez-vous. Mais les concurrents ne sont pas restés inactifs. Solido a depuis présenté sa première miniature avec portes ouvrantes, sonnant ainsi le début de la fin pour Dinky Toys qui mettra trop de temps à trouver une solution à cette équation : comment réaliser des ouvrants fonctionnels, fiables et qui ne déforment pas la silhouette de la miniature. Liverpool sombrera très rapidement, Bobigny résistera un peu.

L’entêtement à vouloir rester sur le créneau de la reproduction de la voiture familiale a accéléré le déclin.  Avec ses sportives et sa fantastique gamme militaire, Solido grignote petit à petit des parts de marché.

Cependant, notre Renault 4L connaîtra une carrière honnête. La base est excellente. Je vous invite à découvrir les multiples variantes dans le livre de Jean-Michel Roulet.

Dinky Toys se servira de son modèle pour compléter son offre sur le thème « autoroutes ». Les châssis plastique viennent de faire leur apparition à Bobigny. La 4L hérite donc d’un chassis vissé en plastique de couleur noire. Sur quelques exemplaires de pré-série il est de couleur ivoire.

Je suis ému au souvenir de ce modèle. Enfant, je revois la vitrine d’un petit magasin qui vendait des Dinky Toys et des Norev à deux pas du magasin de mes parents.

Un matin, j’ai aperçu ces trois modèles autoroutes en vitrine. Ce fut un choc. Le Peugeot J7 me faisait rêver avec ses personnages et ses accessoires. L’univers de ces véhicules « orange » me fascinait au point que je souhaitais en faire mon métier, comme d’autre veulent être pompier. J’entraînais mon père devant la vitrine. Les prix étaient élevés. Je suis ressorti avec la Renault 4L.

Le Peugeot J7, je l’aurai plus tard, d’abord en Norev puis enfin, en Dinky Toys. Le diorama m’avait beaucoup marqué.

Un détail ne vous a pas échappé sur la Renault 4L autoroutes. Un indice montre que Meccano est à bout de force. Monsieur Jouin, l’illustrateur patenté durant cette période, a dessiné sur l’étui la nouvelle calandre (1968) qui vient tout juste d’apparaître. Pourtant c’est bien l’ancienne calandre qui équipe la miniature. Dinky Toys aurait pu trouver là matière à rajeunir son modèle de base, et répondre à la la demande, qui, sur ce type d’auto populaire, devait encore être conséquente.

Quelques années plus tard, en 1972, le même cas de figure va se reproduire, avec ce que l’on peut considérer comme la dernière Dinky Toys France, la version postale de la Renault 4L. Là encore, la nouvelle calandre ne figure que sur l’étui.

L’idée est très bonne. Elle devait être dans les tiroirs du bureau d’étude depuis un moment. Claude Thibivilliers qui a quitté Meccano en 1971 semble être à l’origine de ce modèle. Il a réalisé la fameuse version avec châssis en tôle (vissé ou serti) qui sera ensuite distribuée dans des boutiques spécialisées comme Multisport boulevard de Sébastopol.

Mon ami Charles se souvenait très bien l’avoir aperçue dans les tiroirs. Quelle importance accorder à cette miniature ?  Elle a une place dans l’histoire Dinky Toys. On ne peut cependant  la placer sur le même plan que les modèles réalisés avec l’accord de la direction et les prototypes. Je doute beaucoup du fait que la direction ait été informée de la commercialisation de ces séries « parallèles ».

Chez Monsieur Badaroux, j’ai pu récupérer le modèle qui a servi à la validation du projet. Il est réalisé sur la base de la version autoroutes, et possède donc une antenne.

Le dernier modèle que je souhaite vous présenter est émouvant à plus d’un titre.

C’est la dernière version. Elle se situe à l’autre bout de la chaîne, à l’opposé du présentoir vu dans le dernier blog qui avait été conçu pour le lancement du modèle. C’est la fin de production avant que la chaîne ne s’arrête.

Le modèle est photographié dans le catalogue général Meccano de 1975 : il apparaît sur une des pages consacrées aux Dinky Toys spain.

Monsieur Badaroux qui m’a confié tous ses trésors m’a expliqué que Dinky Toys utilisait en usage interne ce type de boîtage blanc. Cependant, le plus important est ailleurs, il est sur le tampon de la languette. Ce tampon signifiait la validation par le bureau d’étude de la taille du carton à envoyer au cartonnier.

Une fois rentré chez moi, je me suis souvenu des pages présentant les modèles espagnols dans le catalogue général de 1975.

Quelle ne fut pas ma surprise de constater que l’exemplaire photographié était celui que je tenais en main. On y voit nettement les deux petits éclats de peinture. La plaque minéralogique en papier a été perdue.

 

Dans la même logique, j’ai récupéré d’autres modèles qui, sans preuve à l’appui toutefois, sont les modèles pressentis pour le catalogue, dont cette belle Simca 1100 vert bouteille. La couleur définitive de série sera le vert métallisé.

 

 

 

 

L’empire contre attaque ?

L’empire contre-attaque ?

Un empire. Un véritable empire. Il est loin le modeste hangar en bois, au fond de la propriété familiale de Billancourt qui servit à la construction de la première Renault.

Après la seconde guerre mondiale, la Régie Renault a développé un empire. Ses usines produisent des autos, des camions, des utilitaires, des tracteurs, des métros, des autorails, des moteurs d’avion, de bateau mais également des produits dérivés comme les lubrifiants.

Renault symbolise l’essor économique de la France du 20 ème siècle. Quand on veut parler croissance, exportation, productivité du pays, c’est très souvent Boulogne-Billancourt qui sert d’exemple. Dans la même logique, quand Renault tousse c’est la France qui s’enrhume. En 1936, c’est du côté de chez Renault que naissent les revendications syndicales.

Le même phénomène se produira en 1968. Léo Ferré dans sa chanson « Le conditionnel de variété » aura ce couplet:

« Comme si je vous disais que les cadences chez Renault sont exténuantes

Comme si je vous disais que les cadences exténuent les ouvriers jamais les présidents ».

Renault concentre la lutte des classes. Pour connaitre la température sociale du pays, les dirigeants n’ont qu’à se tourner vers ses usines.

Mais Renault va également servir de laboratoire social et artistique. Des artistes, proches de courants progressistes, vont tenter une communion entre l’art moderne et les travailleurs, à l’image de ce qu’ont réalisé les artistes soviétiques.

Le peintre Fernand Léger n’hésitera pas à venir accrocher une de ses oeuvres, « les constructeurs » (version définitive) dans la cantine des usines. Il viendra sur place recueillir l’avis des travailleurs. Le photographe Robert Doisneau sera aussi un familier de la Régie, immortalisant avec tout son talent le rapport entre la machine et l’homme.

Tout cela peut faire sourire, mais démontre combien Renault avait une place particulière dans notre pays. Je n’ai pu m’empêcher de relier ce passé à une série d’articles parus dans le journal « Le Monde  » du 30 mai 2020 consacré au constructeur.

Le titre est révélateur : « La potion-choc du patron de Renault ».

Résumons: le nouveau patron, Jean-Dominique Senard, est soucieux de « la sous utilisation des usines françaises ». Il veut réduire les capacités de production pour améliorer la marge industrielle, et attirer des productions partenaires ce qui fera augmenter les volumes… J’avoue humblement que ces discours ne me parlent pas beaucoup et demeurent assez abstraits. J’ai parfois l’impression qu’en économie, avec les même chiffres on peut tout dire et son contraire.

Le chiffre qui a retenu mon attention, c’est le nombre de salariés à Flins en 2020 : 2600 !

Je ne peux n’empêcher de penser aux publications que la Régie imprimait dans les années cinquante. Afin de montrer toute la puissance de sa machine industrielle, la Régie avait publié un fascicule : « 24 heures chez Renault » où elle expliquait que chez Renault, l’activité ne s’arrêtait jamais.

Chaque tranche horaire se voyait attribuer une activité. Le publiciste en profitait pour utiliser les fuseaux horaires. Ainsi , il nous entrainait chez Hino au Japon, en Afrique du Sud à Johanesbourg, en Espagne… On était impressionné par cet empire où le temps ne s’arrêtait jamais.

Peu après, en 1957, la Régie a rompu son contrat d’exclusivité avec la C-I-J pour la reproduction de la Renault Dauphine ce qui a conduit à un rapprochement entre Dinky Toys et Renault. La Floride, et l’Estafette ont logiquement suivi.

En 1961, Renault joue gros. Comment va être accueillie la nouvelle 4L ? Visiblement satisfaite de ses rapports avec Dinky Toys, la Régie, va réaliser une grande opération médiatique commune.

Quand on réfléchit, il fallait oser confier les plans originaux d’un nouveau modèle près d’un an avant la sortie presse. On peut imaginer que d’importantes précautions ont été prises afin qu’il n’y ait pas de fuites.

Pour l’occasion Dinky Toys a fait éditer un présentoir en carton afin de placer la nouvelle auto en vitrine et d’attirer l’attention du grand public.

Qu’a-t’-elle choisi pour communiquer ? Une usine et sa chaîne de production. On retrouve là encore l’idée que la Régie est bien un symbole de la production de masse.

Une petite cheminée en carton finit d’habiller le diorama . Un emplacement est réservé à la boîte, qui pourrait faire penser à une caisse avec une auto finie à l’intérieur. J’ai récupéré le présentoir auprès de Robert Goirand.

C’est celui qui était dans la vitrine du magasin du Bébé Lorrain. J’ai eu une émotion particulière en apprenant cela. Je l’ai laissé dans l’état dans lequel Robert Goirand l’a récupéré. je n’ai pas voulu changer la boîte de la 4L, ni effacer la trace de ruban adhésif. Je le conserve telle une relique.

L’affichette publicitaire expliquant le tour de force de Meccano est évocatrice. Quelle époque ! Quelle prouesse que d’avoir réussi cet excercice ! Les gens ont-ils apprécié l’exploit à sa juste mesure ?

Pourtant le vent a tourné pour les fabricants de miniatures. La demande a évolué. Les sportives et les autos de course commencent à fasciner la jeune clientèle avide de sensations .

Cependant, laissons nous encore surprendre par cette petite berline qui est une superbe réussite. C’est incontestablement une digne héritière des séries 24. Elle connaitra une très longue carrière.

Cette époque d’après-guerre semble loin. Il va falloir des arguments solides pour persuader les salariés et l’opinion publique du bien fondé d’un énième plan de redressement chez Renault. Pour utiliser une image liée au cinéma on pourrait titrer : « l’empire contre-attaque ». Je me demande pourtant si le combat n’est pas perdu d’avance, au regard de l’avenir bien sombre de l’automobile dans notre société. 

Rendez-vous dans 15 jours le dimanche 13 Décembre pour la suite  et la fin de l’aventure de la 4L chez Dinky Toys.

 

 

 

M. Hulot et la Simca break

Pour illustrer ce merveilleux film « Playtime », j’aurais pu vous proposer des Simca 1300 et 1500 sorties de chez Norev. Il faut convenir que le fabricant de Villeurbanne n’a pas été très inspiré par ces miniatures Simca. La version break et la 1501 viendront heureusement relever le niveau. Je vais donc me tourner vers Bobigny.

le modèle retrouvé au bureau d'étude
le modèle retrouvé au bureau d’étude

Dinky Toys a reproduit fidèlement la Simca 1500 berline. En choisissant de limiter le choix à un modèle avec la malle ouvrante, le fabricant a épargné aux amateurs les défauts rencontrés sur les modèles de cette époque avec les portières ouvrantes (Ford Taunus 12 M par exemple). L’auto est donc de bonne facture. Les feux et les phares en strass donnent une finition luxueuse. Il faut signaler l’existence de deux bleus très différents, le plus foncé étant le moins fréquent. Le modèle sera produit chez Poch en Espagne. Pour l’occasion il recevra une plaque d’immatriculation arrière de couleur argent et non noire, comme sur le modèle produit en France. Les pneus reçoivent un marquage « Pirelli ». Signalons enfin que j’ai découvert sur l’étal d’un marchand, une version avec un aménagement intérieur de couleur noire. L’ensemble était d’origine, la couleur étant injectée en plastique.

Le Simca break 1500  de Dinky Toys est également de bonne facture. Le hayon arrière bascule, laissant apparaître le coffre que Simca avait astucieusement équipé d’une table de camping servant également de fond à ce dernier.

Il faut ici parler de trois modèles particuliers. Le premier est un essai de couleur, fini en bleu marine. L’intérieur est injecté en plastique de couleur beige. Le modèle est riveté. Il possède une finition au pochoir similaire à celle des modèles de série. Par contre, il est équipé de jantes en plastique chromé qui ne furent jamais utilisées dans le commerce, Meccano se réservant ces jantes pour ses essais. Elles ont un aspect plus flatteur que celles de série, souvent ternes. Le deuxième modèle est une version enjolivée équipée de phares supplémentaires dans la calandre. Il pourrait s’agir d‘une proposition de variante « 1501 break » du bureau d’étude. Contrairement à la version berline, la version 1501 break ne subira pas de profondes modifications de face avant et arrière. La présence des phares additionnels est une piste. L’auto reçoit une jolie peinture « prune ». Elle doit être l’œuvre de Claude Thibivilliers, habile maquettiste de Bobigny. Sa finition maquette est bien sa signature. Elle reçoit un intérieur en plastique injecté de couleur ivoire qui ne sera jamais réalisé en série. Elle possède aussi, logiquement les jantes en plastique chromé.

Le dernier modèle présenté ce jour possède une histoire singulière. Claude Thibivilliers, cité précédemment, était un familier de la boutique Modélisme, boulevard Sébastopol à Paris. Amateur éclairé de miniatures, il fréquentait cet endroit incontournable pour les amateurs de modélisme et que son propriétaire, Monsieur Greilsamer, tenait d’une main de maître. Ce dernier proposa de diffuser, de manière confidentielle, hors listings, une série de modèles sur base Dinky Toys France.

Cette diffusion a notamment concerné une Renault 4L « PTT », une Peugeot 404 « pompiers de Paris », une Ford Galaxie « police » et bien sûr cette Simca 1500 « police ». Pour les collectionneurs, qui sont arrivés sur le marché 10 ans après l’événement se pose la question de la pertinence de ces modèles. Dinky Toys ou non ? Depuis l’été dernier, j’avoue que mon avis a évolué. En reprenant contact après de très longues années de silence avec un ancien collaborateur de Meccano, j’ai eu la surprise en allant lui rendre visite de voir ce modèle de Simca 1500 « police ». Ce monsieur avait eu l’intelligence de sauver de la destruction, nombre de modèles et de prototypes lors du démantèlement de la rue du Maroc dans le 19eme arrondissement. C’est la preuve incontestable que ce modèle a bien été étudié par Meccano. Comme la Renault 4L « PTT » qui sera elle, reprise en série, la 1500 « police » fut bien étudiée. Il doit en être de même pour les autres modèles distribués chez Modelisme. On peut alors conclure que Claude Thibivilliers aurait simplement écoulé de petites séries de projets avortés.

L’exemplaire présenté ne possède pas et n’a jamais possédé de gyrophare malgré la perforation du pavillon. Le vitrage n’a pas été perforé !