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Belgitude.

Belgitude.

Ostende est située sur la côte flamande, en Belgique. Je n’y ai jamais mis les pieds. C’est à travers les chansons de Jacques Brel et de Léo Ferré (« L’Ostendaise », paroles de Jacques Brel et « Comme à Ostende » paroles de Jean-Roger Caussimon) que j’ai découvert cette cité  dont la vocation balnéaire c’est affirmée  au 19ème siècle.

Adolescent, je me suis donc construit un imaginaire à travers ces deux chansons que j’écoutais régulièrement : les casinos vides symboles d’une époque révolue, les rues chaudes de la ville, les bars, la bière qui coule à flot, la faune interlope. Mais aussi le petit peuple, les femmes de pêcheurs guettant le retour des marins.

J’ai pu tout récemment mettre des images concrètes sur cet imaginaire. Le musée d’Orsay, toujours bien inspiré, a consacré une petite exposition à un artiste ostendais un peu oublié, Léon Spilliaert.

Ce dernier est moins connu que James Ensor, son contemporain et ami, également originaire de cette ville des Flandres. L’exposition qui se tenait cet automne dans le musée parisien m’a dévoilé un artiste de talent, des plus singuliers. Les commissaires de l’exposition Leïla Jarbouai et Anne Adriaens ont centré leur exposition sur la première période de l’artiste s’étendant de 1900 à 1919. C’est le début de l’aventure, il doute, il cherche sa voie.

Il faut dire que cet artiste est autodidacte. Son oeuvre des débuts est inclassable. Epris de littérature, Léon Spilliaert a d’abord côtoyé les symbolistes, mais sans vivre dans le passé comme ces derniers. Son inspiration se nourrit des rencontres de la vie quotidienne. Puis ce sera l’expressionnisme et enfin l’abstraction en passant par le futurisme.

La reconnaissance ne sera pas au rendez-vous. Issu d’une famille bourgeoise, Léon Spilliaert est tourmenté, cela se ressent à travers sa production et ses autoportraits.

Son mariage avec Rachel Vergison en 1916 et la naissance de leur fille Madeleine semblent l’apaiser. Son oeuvre s’assagit. Il connaitra à partir de 1920 un petit succès auprès des collectionneurs parisiens. En 1922 James Ensor, saura même se montrer élogieux au sujet de sa production. Mais cette partie déborde le cadre de l’exposition.

Cela m’a fait penser à une marque de miniatures belges, qui, comme le peintre, aura connu deux périodes. Une première, assez exceptionnelle, et très courte. Et une seconde, plus longue, plus tranquille, mais dépourvue de génie créatif, de folie. Je veux parler de la firme liégeoise (Herstal) Gasquy Septoy.

Elle débute à l’aube des années cinquante. Les débuts sont un véritable feu d’artifice. Replaçons-nous dans le contexte. En 1947, Dinky Toys relance les machines. La nouveauté est bien sûr l’incontournable Willys Jeep. L’entreprise reprend l’outillage créé avant le début du conflit mondial : Série 38 (cabriolet) et série 39 (voitures américaines).

Mais au fin fond de la Belgique, une petite firme nommé Gasquy propose rien moins que les premières autos marquantes d’après-guerre : Studebaker Champion, Ford Tudor, Chevrolet, Willys break bois, Tatraplan, Renault 4cv. Elles sont injectées en zamac de belle qualité, sont fort détaillées, dotées d’une belle gravure et sont équipées d’un châssis en tôle.

Cerise sur le gâteau, les pneus sont estampillés Englebert, le fabricant de pneus d’Outre-Quievrain !

Les modèles sont au « standard  » Dinky Toys.

On se doute de la difficulté qu’à eue cette petite firme pour diffuser ces produits. Ils sont chers. La qualité a un prix.

Dans la Belgique d’après-guerre, pas facile de se faire une place face à l’ogre Dinky Toys. On l’oublie souvent, mais si Dinky Toys s’est si bien développée c’est qu’elle a bénéficié du réseau des points de vente Meccano, consolidé ensuite par celui d’Hornby.

En Belgique, même si le marché était conséquent, il était difficile de se faire une place. Les meilleures enseignes ont déjà Dinky Toys. Par voie de conséquence, les autres n’ont pas la clientèle pour écouler des produits réclamant le budget d’une Dinky Toys. M. Dufour et M. Sherpereel m’ont raconté comment, sur la côte flamande, ces produits étaient demeurés invendus.

Alors la firme liégeoise va revoir sa copie. Elle va abandonner cette gamme « luxe » et proposer des modèles plus simples, destinés au créneau de la clientèle de bazar.

Finis les pare-chocs rapportés comme sur la Studebaker Commander ou la Willys break vitrée. Les nouvelles Mercury seront conçues de manière monobloc. Finis également les châssis en tôle, seules les versions « luxe », mécaniques, en seront équipées. Finies les jantes personnalisées, place aux roues monobloc en zamac puis aux jantes en zamac concaves peintes.

Si elle dégage un certain charme, la série des Mercury est loin d’égaler la série  décrite plus haut au niveau esthétique. Les modèles sont plus grossiers, plus rustiques.

Les argentures « main » que l’on voyait sur les Tatra, les Studebaker et les Ford Tudor et qui pouvaient varier au gré de la production ont totalement disparu. Cependant, la gamme des Mercury reçoit de belles peintures bicolores, appliquées avec soin.

Le car est fort réussi. On appréciera la version des chemins de fer belges, décorée d’une lettre « B » majuscule dans un ovale, et l’ambulance, et ses croix rouges réalisées au pochoir.

Pour les rares versions mécaniques, la firme belge a été obligée de créer une ouverture à l’arrière de la carrosserie afin de loger le levier de commande du mécanisme. Certes, cela est efficace, mais l’installation nuit à l’équilibre esthétique du jouet.

Les premiers exemplaire des Willys jeep furent équipés de roues en zamac peintes. Elles sont bien sûr aux couleurs de l’US army. Il faut dire que les forêts liègeoises, proches de la petite fabrique, ont été le théatre des derniers combats acharnés, entre les belligérants de la dernière guerre mondiale. Très rapidement la « jeep » retrouva des couleurs civiles dans une logique que nous avons déjà analysée. (voir le blog consacré à la Willys jeep de Dinky Toys France).

Comme le peintre Spilliaert, la firme liégeoise a ses mystères. Prenons la Plymouth berline. Modèle économique, comme la jeep, elle fut équipée de roues en zamac et reçut aussi une finition militaire.

Il est troublant de retrouver de l’autre côté de la Manche, au Pays de Galles plus précisément, un clône de cette miniature. Le modèle est fort ressemblant. On note cependant des différences de traitement au niveau des phares, des baies vitrés. Le mystère reste total. Comment ce modèle est–il arrivé là ? Il reçoit même un étui individuel, ce qui lui confère un petit côté précieux. Qui saura m’expliquer l’histoire de cette miniature ?

Enfin, un second mystère existait qui a en partie été levé. Au milieu des années quatre-vingt-dix, une maison de vente anglaise a acquis une très large collection au Portugal. Cette dernière avait semble t-il été exposée au public.

Dans cette collection disparate se trouvait une très grande quantité de Gasquy Mercury : autocars, coupés et Willys qui avaient reçu une finition très différente des habituels modèles croisés auparavant. Les peintures étaient brillantes, les finitions fort différentes.

Dans le milieu des années soixante-dix un large stock de carrosseries brutes fut retrouvé en Belgique et acquis par ce collectionneur portuguais. Il les fit peindre chez Metosul, firme avec laquelle il entretenait d’étroites relations. Il fit d’ailleurs également repeindre des Dinky Toys et les décora notamment en version taxi portugais, taxis d’Amsterdam et autres policia.

Comme cela se faisait beaucoup à l’époque, il se servait de ce stock pour faire des échanges avec d’autres collectionneurs. Heureuse époque où les amateurs ne voulaient pas d’argent mais échangeaient leurs doubles contre les modèles manquants à leur collection.

Ainsi, il faut désormais distinguer les premières séries, les « vraies » Gasquy Septoys avec leur peinture satinée et les modèles aux peintures brillantes réalisées au milieu des années soixante-dix.

Ce ne sont pas des faux, appelons cela une « production tardive ». Pour ceux qui n’ont pas la chance d’avoir les premières, elles permettent à peu de frais de placer en vitrine des modèles intéressants. L’important est de le savoir.

Rendez vous le 7 Mars 2021.

 

 

 

Copains comme cochons

Copains comme cochons.

Notre homme est confortablement assis dans son fauteuil. C’est le soir, la journée de travail est finie. Pipe en main, verre de whisky posé sur la table basse, il savoure enfin ce moment qu’il a espéré toute la journée.

Ce matin, la postière lui a déposé au cabinet dentaire un petit colis ficelé et enrobé de papier kraft. Il commence par lire la lettre qui se trouve à l’intérieur puis se plonge avec gourmandise dans l’étude du catalogue qui y est joint.

« Catalogue », c’est ainsi que Raymond Daffaure, l’expéditeur a dénommé les deux feuilles ronéotypées. Ce sont les nouveautés 1971. Il en a les yeux qui brillent. Ce n’est pas la boisson alcoolisée mais bien la liste des modèles proposés par « l’artiste de Marmande » qui a sur lui cet effet.

Depuis plusieurs années ce « Porschiste », comme le nomme affectueusement Raymond Daffaure dans les courriers que j’ai pu me procurer, est aux anges. En juin 1971, Porsche remporte sa seconde victoire mancelle et quatre mois plus tard, Raymond Daffaure envoie à ses clients les reproductions des autos qui ont marqué cette édition.

1/ Rapide comme l’éclair.

Cette remarquable rapidité d’exécution est une des caractéristiques de notre artiste du sud-ouest. Il joue dessus. Dans un courrier daté du 24 avril 1966, adressé à notre amateur de Porsche, il indique lui avoir envoyé d’office la Carrera 6 (906) qu’il venait de créer, sans même demander son assentiment et certain qu’il sera ravi de cette initiative. Rappelons que la course s’est déroulée les 5 et 6 février 1966. Moins de trois mois après, l’auto est en vitrine chez notre amateur.

Nous sommes donc en septembre 1971. Quelques exemplaires de la toute nouvelle revue du Club Porsche France trainent sur la table.

C’est un stratagème. Un piège. Un moyen d’orienter la conversation des notables venus diner chez notre homme sur « LE » sujet qui le passionne : la voiture de sport.

C’est le grand désespoir de Madame, qui elle, proche de Monsieur le curé, préférerait que son mari s’investisse un peu plus dans le bénévolat et la cause des plus démunis. Mais une fois la conversation embrayée sur le sujet, notre amateur de vitesse sait que sa femme ne pourra plus solliciter les invités pour qu’ils participent à la prochaine kermesse de la paroisse.

Il faut dire que pour les lots de la tombola, ses napperons en crochet ont bien du mal à rivaliser avec le demi cochon offert par le charcutier.

2/ Cochon qui rit

Justement, en cette belle soirée de septembre, il y a réception. Régulièrement les notables de la ville s’échangent des invitations. Notre homme, l’humour potache, choisit de sortir devant les convives, la dernière miniature que Raymond Daffaure lui a concoctée en tant que « spécialiste Porsche », la fameuse Porsche 917/2O dite « cochon rose ».

C’est surtout sa décoration qui fera parler d’elle. S’agissant des résultats on compte deux courses et deux abandons (3 Heures du Mans 1971 et 24 Heures du Mans 1971).

Madame qui ne goûte pas l’humour de son mari, y voit une allusion au charcutier concurrent et choisit de planter là ses invités. Les femmes du nord ont un caractère bien trempé.

Qu’à cela ne tienne, Maitre Pierre, le notaire, lance l’idée d’aller à l’hôtel des trois faisans pour « ripailler » entre hommes. Cela leur rappellera de bons souvenirs. Le temps où jeunes étudiants, après avoir bu quelques pintes chez la « grosse Adrienne de Montalant », légèrement éméchés, ils allaient chanter, devant l »‘hotel des trois faisans », restaurant huppé de la région cette chanson empruntée à Jacques Brel: « Les bourgeois c’est comme les cochons… »

3/ arrêt brutal

Quelques années se sont écoulées. Les premières limitations de vitesse sont arivées. Nous sommes en 1974. Verbalisé à plusieurs reprises notre homme ressent soudain comme un ras-le-bol de l’automobile. Son désamour est à la mesure de la passion qu’il avait entretenue pour la vitesse, l’automobile et ses reproductions miniatures. Il laisse tout tomber.

C’est ainsi qu’ont pris fin son contact avec Raymond Daffaure, et sa collection de miniatures. Il a revendu sa Porsche 911S et sa Ferrari. La collection de miniatures a été mise au placard. Bien plus tard il l’offrira à son « petit » voisin , lui racontera toute son histoire.

C’est cette collection que je viens d’acquérir. 900 RD Marmande. Au fil des semaines je vais essayer de vous faire découvrir l’artiste qu’était Raymond Daffaure et comment il a su par ses reproductions miniatures faire partager sa passion de l’automobile.

Pour illustrer ces lignes, j’ai choisi quelques Porsche de cette collection. Au fil des lettres, on comprend que Raymond Daffaure avait de l’ affection pour cette marque. Je les ai disposées de manière chronologique.

Depuis l’acquisition de cette collection, j’ai entrepris un travail de référencement. Je consigne tous les détails, années de la voiture, année de réalisation par Raymond Daffaure et numéro de série. De manière étrange cette Porsche 917/20 ne porte pas de numéro de série. N’en aurait il réalisé qu’une seule ? .

Cet article m’a fait faire un bond de plus de 40 ans en arrière. Avec mon père, nous étions attirés par les miniatures Porsche. Nous avions acheté dès 1977 des RD Marmande. Plein d’optimisme, mon père recherchait tout ce qui pouvait se faire. Les RD Marmande faisaient donc partie du champ d’investigation. Nous ne savions alors absolument rien de l’étendue de la production.

PS: Si vous  avez des RD Marmande à vendre ou à échanger contactez-moi sur autojaune@orange.fr ou au 01 42 40 61 23. Je suis preneur.

La valse des zéros

La valse des zéros

« C’est le tango du temps des zéros
J’en avais tant des minces des gros
Que j’en faisais des tunnels pour Charlot
Des auréoles pour Saint-François »

Ces paroles de Jacques Brel sont extraites de la chanson « Rosa ». Il y décrit avec tendresse son univers scolaire et ses premiers émois amoureux qui présagent de relations complexes avec les femmes. (voir la vidéo de la chanson de Jacques Brel « Rosa »https://youtu.be/v6rLLE48RL0)

Aujourd’hui, le zéro est mieux perçu par nos contemporains. Si dans le passé il était synonyme d’échec scolaire, il évoque aujourd’hui le prix astronomique d’un objet.

Désormais, lorsqu’on me parle en millions d’euros de certaines autos anciennes, je suis perdu, je n’arrive pas à me représenter la réalité de la somme. Mon unité de mesure étant le prix de ma maison, j’en suis réduit à tout ramener au prix de mon habitat.

Au hasard d’une conversation avec des collectionneurs, j’apprenais ainsi que le 24 juin 2017, un Saviem JM240 tracteur semi-remorque « Transcontinental express » de chez C-I-J avait été enlevé pour 10 000,00€ au marteau, dans une salle des ventes. Avec les frais, cela faisait plus de 12 000,00€. Ce genre de résultats suscite toujours bien des commentaires, plus ou moins avisés, mais souvent empreints de jalousie.

Cet événement m’a rappelé mon histoire personnelle de collectionneur. Mon père et moi étions sur les rangs pour le premier exemplaire mis en vente en 1983, dans une salle des ventes de l’Eure, à Vernon précisément. On peut même dire que c’est à ce moment-là que le modèle fut officiellement référencé par les amateurs de C-I-J. J’ai conservé la coupure d’un journal local annonçant l’événement.

Le journaliste avait titré : « Un mini »bahut » à un maxi prix » ! Il devait être en mal d’inspiration. On voyait en photo le camion dans les mains du commissaire priseur. Les vacations dispersant cette importante collection s’étaient étalées sur plusieurs week-ends. Le journaliste annonçait fièrement que celle du 11 décembre 1983 allait en être le moment fort. Le camion était estimé entre 12 000,00 et 15 000,00Francs  (1830,00€ et 2286,00€). ce qui était à l’époque une très belle somme pour un jouet.

Mon père était bien décidé à ramener l’objet à la maison, pourtant, ce ne fut pas le cas. Contre toute attente, le camion atteignit le prix de 50 000,00Frs (7500,00€), somme considérable. J’ai appris ce jour que rien n’est jamais gagné aux enchères !

Il nous fallut patienter jusqu’au 30 aout 1988 pour trouver un exemplaire neuf en boîte auprès de Jean Bernard Sarthe pour 10 000Frs (mille cinq cents euros). On notera le gros écart de prix avec celui de la vente aux enchères vu plus haut.

Toujours en 1988,  une autre salle des ventes proposa des modèles C-I-J provenant de la valise d’un ancien représentant de la marque. Au vu de son contenu, on comprenait que son propriétaire avait connu la fin de l’aventure C-I-J.
Les véhicules proposés à cette vente étaient des échantillons destinés à être montrés aux marchands de jouets en vue d’éventuelles commandes. Parmi les modèles figurait la présérie du fameux Saviem décrit plus haut.

Il était donc bien antérieur au modèle commercialisé et avait été fabriqué sur la base d’une calandre à 3 barres et non à une barre comme celui vu plus haut.

Le plus étonnant était le schéma de couleurs inversé par rapport à celui retenu en série.

Le système d’accrochage de la remorque n’avait pas encore bénéficié des améliorations vues sur la version définitive.

La C-I-J avait dû se rendre compte qu’elle n’avait pas assez de pièces récupérées chez JRD pour concevoir son système d’attelage. N’oublions pas que ce modèle, de toute fin de production, était  l’assemblage d’un tracteur de fabrication C-I-J et d’une remorque récupérée lors de la cession du stock de pièces détachées de JRD. La décalcomanie est également issue de chez JRD ; elle décorait à l’origine le Simca Cargo tracteur semi-remorque en tôle reproduit à une échelle bien supérieure.

Par miracle, elle s’adapte parfaitement sur les flancs de la remorque recevant normalement la décalcomanie « Kronenbourg ».

La finition est digne d’un modèle de série, ce qui permet de penser qu’une petite série a été fabriquée dans cette première mouture, au moins pour les représentants.
Il ne fallait pas laisser passer l’occasion d’acquérir une telle pièce. C’est toujours à ce jour le seul exemplaire connu. Mon père ne l’a pas laissé passer ! Il fit 17 500,00 Frs. soit  2668,00€.

La première constatation c’est qu’il est parti pour un prix inférieur à celui du premier modèle mis en vente alors qu’il était encore plus rare. Cela donne à penser que les scores des ventes aux enchères sont le résultat d’une étrange alchimie.
J’avoue avoir souri au résultat de l’enchère du 24 juin 2017. Il me conforte dans l’idée que j’avais fait un bon choix trente ans auparavant.

Je pense aussi à l’enchérisseur qui, ce 24 juin 2017, a dû laisser filer l’objet convoité. Combien de temps lui faudra-t-il attendre pour en trouver un autre ? Sera-t’-il encore intéressé, à quel prix ? L’échec d’un jour conduit parfois à l’abandon. Saura-t-il persévérer ?

Ce fut notre cas. Nous n’avons jamais baissé les bras lorsqu’un autre emportait le modèle convoité. Bien au contraire, cela décuplait notre motivation. La logique est imparable : celui qui l’a emporté ne sera plus sur les rangs la prochaine fois que le modèle sera proposé !
Parfois cependant, de nouveaux collectionneurs entrent dans la compétition.

L’échec n’est finalement pas bien grave, le plus important est d’apprécier la collection déjà construite.

Voir l’autre article consacré à l’autre version du Saviem JM240 tracteur semi remorque tôle « Kronenbourg »

 

Un écureuil dans votre moteur !

Les collectionneurs ont parfois des attirances qui peuvent paraître étranges. Pour ma part, je dois confesser une faiblesse pour les stations-services. Ainsi, lors de mes nombreux voyages à l’étranger, j’essaie toujours de privilégier les marques d’essence qui sont propres au pays où je me trouve et qui ont un rapport avec ma collection.

Esso
Esso

Aux USA, j’ai beaucoup de plaisir à faire le plein chez Phillips 66 ou chez Sunoco. Ces compagnies ont gardé un lien avec leur passé au niveau des logos et des couleurs.

Tel un touriste japonais devant la Joconde, je n’hésite pas à sortir mon appareil photo afin d’immortaliser ces stations, provocant un regard, au mieux interrogateur, au pire soupçonneux, du pompiste.

Si je lui demande de surcroît s’il n’a pas un petit sticker que je pourrais joindre à mes miniatures en vitrine, je sais que je le laisse pour la journée dans une grande perplexité ! J’aime surtout faire le plein dans des stations représentatives. Au milieu du mois d’octobre, je me suis rendu en Allemagne. Aral, l’enseigne locale, y est aussi connue que Total chez nous. Je m’interroge cependant sur un point. Certes, ces marques que je viens de citer dominent leur marché national, mais il y a des pétroliers que vous retrouvez aux quatre coins du monde : Esso, Shell, BP. Il est intéressant de voir comment ces firmes ont réussi à pénétrer la plupart des marchés, bien avant la mondialisation actuelle.

Prenons le cas d’Esso. Les collectionneurs français que vous êtes ont déjà remarqué que cette enseigne se retrouve sur un très grand nombre de jouets des années 50-60, notamment les garages Depreux, les boîtes Starlux et vos Dinky Toys. Bien avant l’apparition de « l’enfant prescripteur » ces firmes cherchaient déjà à conditionner les plus petits. Le logo avec le tigre fait partie de cette démarche.

Ainsi, sur le marché allemand, Esso fut aussi très actif, et c’est le sujet de notre rubrique. Gama fut un des partenaires de la firme américaine et ce durant de nombreuses années. Un des modèles les plus fameux est la reproduction au 1/30 environ de la bonne vieille BMW 1800. Sous des allures de berline familiale, un décalque sur la malle arrière conseille de mettre un tigre dans le moteur (dans la langue de Goethe, évidemment !).

Un ingénieux mécanisme permet à la malle arrière de pivoter et faire apparaitre le terrible félin en plastique qui ressemble en l’occurrence fortement à un gros chat… succès garanti auprès des enfants…

J’avoue que chaque fois que je rencontre ce jouet en Allemagne, je ne peux m’empêcher d’actionner le mécanisme, au prétexte de vérifier simplement, en tant qu’acheteur éventuel, le bon fonctionnement du modèle !

Gama prolongea jusque dans les années 80 son partenariat avec Esso. Siku partagea sa production entre la compagnie nationale Aral, et Esso. Le modèle de camion citerne Esso que je vous présente est particulier.

Il ne s’agit pas du modèle de série, qui est rouge, mais d’une version promotionnelle très peu fréquente et plus tardive. La cabine est dénommée Struver par Siku. Il s’agit d’une mécanique Man et d’une cabine Henschel. Ce modèle était uniquement disponible dans le réseau Esso comme l’autre modèle de la photo, issu de chez Riegel. La cabine est celle du Man. Le texte sur la boîte vante la capacité de la citerne. La reproduction de la miniature est au 1/60, comme les Siku. Pour le détail, observez le logo « Esso » gravé dans la calandre. Enfin, ce fabricant peu connu n’a pas hésité à donner la référence « 1003 » ce qui laisserait présumer une fabrication antérieure importante!

A voir le sourire du pompiste Esso sur la publicité présentée, on se plait à imaginer qu’il vient d’offrir à un bambin une petite reproduction miniature du semi-remorque, comme celle que je vous montre. Epoque bénie, où il y avait encore des pompistes …. En 2010, Esso a automatisé sa distribution, et de pompiste il n’y en plus…. comme de cadeaux d’ailleurs, et même, en ce mois d’octobre, d’essence !

Devant les files d’attente qui créent des bouchons à l’entrée des stations services, on pense avec un sourire nostalgique à Jacques Brel, « emmerdeur » splendide qui préfère tomber en panne d’essence plutôt que de faire le plein dans une station service qui ne distribue pas les cadeaux collectionnés par son neveu…..

L’aventure c’est l’aventure ou Brel et la Citroën DS19

L’aventure c’est l’aventure ou Brel et la Citroën DS19.

La balade de Jacques et Jojo.

C’est la tombée de la nuit. Un vrai crépuscule de carte postale. Le faisceau des phares de la voiture balaie une route de campagne. La scène est filmée depuis l’habitacle d’une DS : le volant et le tableau de bord sont tout à fait reconnaissables.

Il s’agit d’un passage du documentaire de Philippe Kohly intitulé « Jacques Brel, fou de vivre ». A l’aide d’images d’archives, de reconstitutions, de mises en situation et même de tableaux aquarellisés Philippe Kohly a retracé la carrière hors du commun de cet artiste hors-norme. Remontant aux racines même de l’enfance de l’artiste, le documentaire nous balade le long des plages du Nord, souvenirs des vacances d’été et nous assoit derrière les vitres embuées du tramway bruxellois que Brel empruntait pour traverser la capitale belge.

Le documentaire démontre combien Brel aimait se mettre en danger.

Très vite, il n’a plus supporté de vivre derrière le bureau de l’entreprise familiale de carton ondulé. Pour ne pas mourir d’ennui, il quitte le domicile conjugal, laissant une épouse et une fille et prend le train pour Paris. Suivront des années de galère, car celui que Brassens a surnommé l’abbé Brel ne trouve pas son public. Il doute, il est sans doute près de renoncer lorsqu’il trouve son personnage. En abandonnant sa guitare il libère enfin son corps et son talent d’interprète. C’est le début d’une course infernale, il est en tournée dix mois et demi par an.

C’est de cela dont il rêvait : se mettre en danger tous les soirs puis reprendre la route avec son fidèle Jojo, Georges Pasquier qui lui sert d’homme à tout faire et conduit la Citroën DS. Comme le relève le réalisateur, Jojo sera pour Brel le frère qu’il n’a jamais eu.

 Philippe Kohly a retrouvé de nombreuses images d’archives où l’on voit les deux hommes dans une DS noire immatriculée en Belgique. La voiture sert de bureau, Brel y écrit, y compose, et y donne même une interview, comme d’autres le feraient de leur bureau. Il explique son besoin d’être tous les jours sur la route.

Cela va durer des années, jusqu’à ce qu’il décide en pleine gloire de quitter définitivement la scène.

Pour illustrer ces propos, j’ai choisi ma Citroën DS19 préférée. Il s’agit de la reproduction proposée par le fabricant de Montreuil, JRD qui a eu un lien historique très fort avec Citroën. L’échelle de reproduction semble légèrement supérieure au standard du 1/43. Qu’à cela ne tienne, ce léger embonpoint va bien à cette berline du quai de Javel.
Rares sont les marques à avoir proposé des DS unicolores. Même les fabricants de jouets en plastique ont préféré les versions bi-ton, plus compliquées à produire mais plus esthétiques. Le nuancier Citroën a d’ailleurs longtemps privilégié les pavillons contrastés. Pour ce qui est de JRD, il faudra attendre les reproductions de 1986 pour voir sous son estampille des versions unicolores.

La palette offerte est bien plus large que les collectionneurs ne l’imaginent. La version de couleur orange est peu fréquente mais selon moi, les plus rares sont les versions de couleur bleue, avec pavillon ivoire ou argent.

Au contraire de la traction, du 1200 Kg et de la de 2cv camionnette, la DS 19 disparaît avec JRD. C-I-J qui rachète une partie du stock JRD ne semble pas avoir récupéré de caisses de Citroën DS19.