La reine de la route

La reine de la route

« Peugeot 402 légère reine de la route ». Voilà le texte appliqué à l’arrière du véhicule à l’aide d’un papier gommé. L’originalité de cette publicité tient au fait qu’elle a comme support un cercle blanc, en référence à celui qu’on appose sur les autos de course pour inscrire le numéro qui les différencie. On comprend immédiatement que cette auto est vouée à la compétition.

Replaçons la scène dans son contexte. Nous sommes en 1937. Un concessionnaire Peugeot parisien, fort dynamique, du nom d’Emile Darl’Mat se singularise en proposant à ses clients des autos personnalisées. Il a réussi à convaincre la maison Peugeot de le soutenir dans son initiative pour engager ses productions dans l’épreuve mancelle. Ce sont des autos à mécanique et châssis Peugeot, mais carrossées par Pourtout.

Bien qu’il s’agisse d’une initiative privée, Emile Darl’Mat a tout de même besoin de l’aval de Sochaux. Comme Peugeot ne veut pas prendre le risque de voir son image écornée par une contre-performance, des tests sont réalisés à Montlhléry fin 1936, notamment un test d’une durée de 24 heures. L’auto tourne sans problème durant 25 heures à près de 139 Km/h de moyenne.

C’est une réussite et l’aval est donné par la maison Peugeot à Emile Darl’Mat qui peut engager trois autos pour l’édition de 1937.
L’étiquette apposée sur le socle rend hommage à la performance de cette 402. Dans la réalité les choses sont plus nuancées. Ce sont bien trois Peugeot 302DS (« DS » pour Darl’Mat Sport) qui sont engagées pour l’édition des 24 heures du Mans 1937 car le carrossier Pourtout utilise un châssis de 302 (288 cm d’empattement). Cependant, la voiture emprunte à la 402 son moteur, son pont (à vis) et son train avant.

Mais revenons à notre miniature. La première fois que j’ai lu l’étiquette apposée sur le châssis de cette AR, je n’ai pu m’empêcher de sourire. Je me suis dit que déjà, à l’époque, les publicistes savaient communiquer et faire passer un message aux clients à qui ces autos étaient destinées.

Qu’apprend le client par cette étiquette ? Que la maison Peugeot (Darl’Mat n’apparaît pas, bien sûr) a participé aux 24 heures du Mans, « véritable record du monde sur route ». Vient ensuite le nombre de partants, puis celui des abandons. A ce sujet, on notera une erreur. Les livres consacrés à cette édition des 24 heures indiquent qu’il y avait 48 autos au départ et non 49 comme indiqué sur l’étiquette. Ensuite Peugeot fait le compte de ses voitures engagées, elles sont au nombre de 3. Comme celles qui ont abandonné sont au nombre de 0, celles qui ont vu le drapeau à damiers sont donc également au nombre de 3 ! Le client Peugeot pourrait se satisfaire de cet honorable résultat, qu’il faut quand même relativiser. Les Peugeot occupent au classement général les 7ème, 8ème et 10ème rang. Dans leur catégorie, celle des moteurs de 2 litres de cylindrée, elles sont battues par une Adler qui termine 6ème.

A mes yeux la réelle performance est celle de la petite Aston Martin Ulster qui occupe la 5ème place au classement général, avec un moteur de 1,5l de cylindrée !

Les commerciaux de Peugeot ont donc choisi de communiquer sur le résultat d’ensemble et la bonne fiabilité des autos.

publicité Esso vantant la victoire du mans 1992
publicité Esso vantant la victoire du mans 1992

Pour ma part, je vous montrerai la publicité qu’Esso publiera après la belle victoire aux 24 heures du Mans 1992 : « On n’a pas encore inventé de meilleur test pour une huile que les 24 heures du Mans ». On constate que les 24 heures du Mans sont toujours un excellent vecteur de promotion pour les fabricants comme pour les pétroliers.
Prochainement nous reviendrons sur l’histoire de ces Peugeot Darl’mat au Mans. Elles participeront à l’édition suivante, celle de 1938 avec un résultat bien différent.(voir l’article sur l’édition 1938)

ouvrage de messieurs Moity et Teissedre de l'édition 1992
ouvrage de messieurs Moity et Teissedre de l’édition 1992

Pour la rédaction de ces articles je me suis aidé de l’annuel consacré à la classique mancelle qui paraît chaque année depuis 1978. Pour l’annuel consacré à l’édition 1992 qui a vu la première victoire de Peugeot au classement général, Les auteurs, Christian Moity et Jean-Marc Teissedre ont écrit un très intéressant chapitre retraçant toute l’histoire de Peugeot au Mans depuis 1923.

Incendie à Copenhague !

Incendie à Copenhague !

Il est toujours plaisant pour un collectionneur de longue date de découvrir une nouvelle firme. Nous avons eu connaissance de ce fabricant pour la première fois dans l’ouvrage de Samlerborsen consacré aux productions danoises en miniature.Il serait l’oeuvre de Jotha Plastic.  Un vrai choc !

Incendie à Copenhague !
Incendie à Copenhague !

En 25 ans de voyage en Scandinavie nous n’avions jamais vu cet objet. Il y a trois ans, au détour d’un catalogue de salle des ventes Suédois l’objet convoité était présenté superbe, complet … neuf en boîte. Comment était il arrivé là ? … Mystère !

Manifestement il n’avait pas trouvé grâce auprès de son petit propriétaire ou plus simplement il était demeuré au fond d’une boutique, trésor ignoré d’acheteurs qui ne savent pas regarder.

Le plastique utilisé est de très belle qualité. C’est un jouet ludique. Le fourgon renferme un réservoir fermé par un bouchon servant d’amorce à une pompe. Le dévidoir est opérationnel. Les phares et le projecteur sont phosphorescents : ce qui est une caractéristique fréquente des jouets nordiques ; la nuit tombe tôt, il faut égayer les longues soirées d’hiver.

L’allure générale de ce fourgon fait penser à une reproduction d’un Triangel firme automobile danoise (voir la reproduction qu’à réalisée tekno). Les extensions d’aile sont assez généreuses. L’échelle retenue est le 1/43 environ. De nombreuses pièces en plastique rapportées composent ce jouet. Sur l’exemplaire présenté tout est en place mais iIl est facile d’imaginer la fragilité de l’ensemble.

Une question me taraude : ce fabricant éphémère, Jotha Plastic, a-t-il produit d’autres modèles ?

Barclay Ford A

Barclay Ford A

Découvertes au pays de l’oncle Sam

Après les Ford A de chez Tootsietoys à vocation promotionnelle, je vous invite aujourd’hui à poursuivre les découvertes.(voir l’article sur les Ford A Tootsietoys)

Tootsietoys et Barclay Ford A
Tootsietoys et Barclay Ford A

Selon moi, cette autre version promotionnelle de la Ford A est encore plus intéressante que les versions présentées précédemment. Elle a pour origine une autre grande manufacture américaine, Barclay. Elle est aussi en plomb. La technique d’injection est différente de celle utilisée par Tootsietoys et de ce fait, la gravure est moins fine, la finition plus rustique. C’est aussi un moulage monobloc. Le résultat est satisfaisant.

Comme pour les Tootsietoys décrites plus haut, toute la rareté de l’objet réside dans sa boîte. Je dois confesser que ce fut une découverte pour moi car je n’avais auparavant jamais eu l’occasion de rencontrer un boîtage pour une Barclay.

Comme pour les miniatures du géant de Chicago, le conditionnement se faisait en cartons assortis. Nul doute que là encore , Ford a mis la main à la poche pour la création de ces étuis. Il est intéressant de constater que la firme de Détroit a fait appel à deux firmes pour réaliser une auto similaire.

On notera la concordance des couleurs entre le modèle réduit et le boîtage. Barclay a également produit une version limousine avec 6 vitres. Il est fort possible que cette version ait aussi reçu un étui individuel.

Pour finir, je n’ai pu résister au plaisir de vous montrer une autre Barclay que je ne connaissais pas avant la mise en vente de cette collection. Outre l’aspect visuel de cette intéressante auto à traction avant, c’est surtout la boîte individuelle qui retient mon attention. On sent que Barclay a fait un réel effort pour proposer une auto ressemblante.

C’est indubitablement une auto promotionnelle et un produit qu’on peut qualifier de rare.

Marie Marguerite et les Peugeot

Marie Marguerite et les Peugeot

Diego Velasquez "L'infante Marie Marguerite"
Diego Velasquez « L’infante Marie Marguerite »

C’est une interview d’Henri Loyrette, alors conservateur du musée du Louvre, qui m’a donné envie de découvrir la peinture de Velasquez. Comme le journaliste lui demandait quel était son peintre préféré, il répondit qu’il s’agissait de Diego Velasquez. Il expliquait combien son choix était paradoxal, puisque le peintre est quasiment absent des cimaises du Louvre.

Je n’ai pu m’empêcher de faire un rapprochement avec les modèles réduits. Je me suis souvenu des ouvrages consacrés aux plus fameuses collections de miniatures automobiles. La première qui me vint à l’esprit fut bien sûr celle de Monsieur Nakajima. Les nombreux ouvrages qu’il publia au milieu des années soixante-dix et quatre-vingt montrent une collection ouverte sur le monde.

Et la lecture de ces ouvrages a été pour moi un véritable déclic : ils m’ont donné envie de rassembler des miniatures venant des quatre coins de la planète. Monsieur Nakajima fut sans conteste le plus grand collectionneur de son temps, tant par la diversité que par la qualité de sa collection. J’ai pour lui le plus profond respect.

Les livres de Monsieur Nakajima présentent bien sûr des modèles japonais, mais également tout ce qui a été produit à travers le monde. Les grandes marques comme Tekno, Dinky Toys, Corgi Toys côtoient avec bonheur des firmes plus confidentielles comme Micro Models et  Gasquy. Les plastiques de chez Norev répondent à ceux de Siku ou de Wiking. On trouve également des productions d’avant-guerre comme les Taylor and Barret anglaises, les cast iron américaines, des Tootsietoys ou des Märklin.

Mais on ne trouve pas les modèles AR ou CD français d’avant-guerre.

On fait un peu le même constat à la lecture du livre de Paolo Rampini : ces AR ouCD font cruellement défaut. On trouve certes trois variantes de Peugeot 201, une 601 restaurée, mais c’est tout.

Le docteur Force, autre éminent collectionneur à avoir publié des ouvrages sur les miniatures automobiles a choisi de présenter sa collection par pays de production. Dans l’opus intitulé « Made in France », ces modèles français d’avant-guerre manquent également.

Le premier constat qui s’impose est la réelle pauvreté de l’iconographie sur les modèles AR ou CD. Ces objets sont de vraies raretés !

Au début des années soixante, la revue Modélisme accompagnait la présentation de toute CD, même restaurée ou repeinte, de commentaires dithyrambiques. Rares sont les collectionneurs étrangers qui ont pu s’en procurer.
Il est temps de redécouvrir ces objets qui, en plus d’êtres rares, sont d’une qualité exceptionnelle.

Sans être chauvin, force est de constater que la série des Peugeot 601 et 402 de chez AR n’a pas d’équivalent en ce qui concerne la qualité et la fidélité de reproduction. La gravure, la peinture, l’ingéniosité de la conception, tout est là.

AR Peugeot 402 Fuseau Sochaux
AR Peugeot 402 Fuseau Sochaux

Prenons chez Dinky Toys un modèle de la série 24 d’avant-guerre ou une Peugeot 402, contemporaine des ces AR, la comparaison se passe de tout commentaire . Ces AR étaient injectées en plomb. De temps en temps, on peut noter quelques défauts d’injection, comme un petit manque de matière au creux d’une aile par exemple. Ces autos étaient très fragiles et leur prix de vente devait être conséquent. Cela explique que très peu d’exemplaires nous soient parvenus.

Voici donc le premier épisode d’une série que nous allons consacrer aux Peugeot de cette période. Commençons par la Peugeot 402 Fuseau Sochaux. Elle est d’abord équipée d’un moteur à remontage à clef. AR a réussi à placer le mécanisme sans déformer la miniature. L’utilisation de deux mécanismes différents va cependant l’obliger à modifier son modèle. Les mécanismes étaient fournis par de petites firmes spécialisées dans ce type de fabrication, et vraisemblablement, AR dû changer de fournisseur. Ainsi, la partie évidée servant à introduire la clef pour remonter le mécanisme peut se situer à droite ou à gauche.

Un curieux modèle que je qualifierais d’économique apparaitra plus tard. Cette version est dépourvue de mécanisme, ce qui contraint AR à caréner les passages de roues avant afin de fixer l’axe avant. En effet, sur la version mécanique, le châssis en tôle supportant le moteur sert également à fixer l’axe avant. Cette version carénée possède tout de même la perforation latérale pour le passage de la clef. Pris de vitesse AR n’a peut être pas jugé utile de réaliser le comblement de l’orifice. Ce modèle peut être équipé des belles jantes en plomb peintes de couleur rouge ou plus tard des petites roues en plomb économiques que l’on retrouve sur les 301 camionnettes. (voir l’article dur le modèle 802 Andreau).

A suivre.

La Peugeot 203 en safari !

J’ai trouvé ce coffret aux Etats-Unis lors d’une bourse d’échange à Allenntown. Il y a toujours un grand plaisir à découvrir un modèle que vous ne connaissez pas. Mais là, une auto française, une Peugeot 203 perdue aux fins fonds des Etats-Unis, le plaisir était décuplé !

Tout de suite, les amateurs que vous êtes auront vite fait de reconnaitre dans le modèle Bayshore, une copie d’un modèle produit en France par Cofalu : la Peugeot 203 radio télévision, voiture suiveuse du tour de France cycliste.

Peugeot 203 Safari Bayshore
Peugeot 203 Safari Bayshore

Le modèle est réduit à l’échelle du 1/32 environ (13 cm pour l’auto, 14 cm avec la plateforme). Quelques détails diffèrent entre les deux modèles. Chez Bayshore, le couvre capote enroulé sur le pare brise a disparu, de même que la plaque au dessus du pare choc avant. La copie se veut plus polyvalente, par la suppression des 2 supports horizontaux maintenant la plateforme. En fait Bayshore a transformé son modèle en cabriolet, en créant au niveau de la malle arrière un disgracieux système de maintien de la plateforme à l’aide d’un bouchon en plastique de couleur orange : on peut douter de l’efficacité du système de rotation de la plateforme ! Les roues ne sont plus en plastique monobloc mais avec des pneus en caoutchouc rapportés sur des jantes en plastique de couleur noire; il a fallu bien de l’imagination à Bayshore pour faire passer cette Peugeot 203, des routes ensoleillées du Tour de France, à celles défoncées des pistes africaines !

A travers la composition de ce coffret, il est évident que la clientèle visée est celle d’enfants en bas âge… la présence des animaux féroces devaient plus les attirer que celle de cette 203… inconnue aux Amériques !

D’ailleurs, je me souviens qu’un jour, à Chicago, un marchand américain m’a demandé de mettre un nom sur cette mystérieuse européenne…

Il faut quand même revenir sur la composition de ce coffret qui a autant d’intérêt que l’auto elle-même. Les figurines sont toutes à des échelles différentes. On observe un chasseur blanc présenté maladroitement en train de viser un fier guerrier africain, lui-même de taille équivalente à la girafe. Le lion chétif et le tigre (curieuse cohabitation) sont de taille équivalente au… daim… plus familier des pays continentaux !… peu importe, le charme opère, et ce coffret est une rareté.

Il ne doit pas être contemporain du modèle Cofalu, mais bien plus tardif. Observez le dessin du carton… on voit apparaître en haut à droite une Lincoln Continental du début des années 60.

Un client Canadien m’a indiqué une autre variante de couleur pour cette auto.