Crescent Toys Jaguar Type D

Jaguar : système D

La silhouette de la Jaguar type D est unique : on ne peut la confondre avec une autre auto de course. Un profane l’identifiera sans difficulté ce qu’il ne sera pas à même de faire avec une Ferrari de la même époque.

Jaguar Type D Crescent Toys
Jaguar Type D Crescent Toys

Durant son existence, la carrosserie de la Jaguar type D ne connaîtra que peu de modifications. Très vite, elle adoptera sa dérive verticale, conçue initialement pour Le Mans. Son capot avant subira quelques aménagements : en 1954, lors de son lancement il est équipé de trois projecteurs ; en 1955, il adopte une face avant plus équilibrée, avec deux projecteurs ; en 1956, enfin, il est allongé.

C’est dans le plus grand secret qu’en octobre 1953, à Coventry, des ingénieurs s’affairèrent sur une étrange type « C ». Ce modèle chassera quelques records en Belgique avant d’entreprendre des essais début 1954, notamment à Reims.

Petit à petit on voit apparaître la type D. Elle sera dévoilée au Mans le 8 mai. A première vue, les amateurs ont tendance à ne voir qu’une évolution de la type « C » : même moteur sensiblement amélioré (carter sec), mêmes freins à disques.

Un examen plus poussé révèle que l’auto possède une structure monocoque, la première pour une voiture de sport. C’est l’aérodynamicien Malcolm Sayer qui en est l’auteur.

De son côté, Dunlop a étudié de nouvelles roues en alliage allégé. Le pont arrière rigide se révèle être le talon d’Achille de l’auto : il la handicape sur les tracés sinueux ou routiers. L’auto sera tout juste prête pour les 24 Heures du Mans 1954. Elle échouera de peu pour la victoire et devra se contenter de la seconde place. Nos amis anglais, fairplay, refuseront de porter réclamation contre les vainqueurs de cette édition fort pluvieuse, J-F Gonzalez et Maurice Trintignant sur Ferrari 375. En vue de l’arrivée, cette dernière refusera de redémarrer après un arrêt au stand et il faudra l’intervention « non réglementaire » de mécaniciens pour la faire repartir. Quelques témoignages subsistent de cette intervention où tout fut fait pour éloigner le commissaire de piste ! Le coup passa donc très prés. L’auto, performante, fiable, était bien née. Ainsi, alors que la Ferrari des vainqueurs, dotée de ses 340 cv, est chronométrée dans la ligne droite à 257 km/h, la Jaguar et son « petit moteur » de 250 cv culmine à 278 km/h. En 1955, elle s’imposera dans une édition malheureuse, marquée à tout jamais par l’accident de Pierre Levegh. Elle rééditera cette performance en 1956 et 1957,  grâce aux autos de l’écurie Ecosse.

Dès 1956, les ingénieurs installèrent définitivement l’injection Lucas sur le moteur et un pont De Dion. L’auto subira également une cure d’amaigrissement supplémentaire.
C’est bien sur la piste du Mans qu’elle connaîtra ses heures de gloire. Au championnat du monde des marques, en dehors des 24 Heures du Mans, elle ne connaîtra la victoire qu’aux 12 Heures de Sebring en 1955 dont les Mercedes étaient absentes. On peut ajouter, hors championnat, les 12 Heures de Reims en 1954 et en 1956. Elle est taillée pour des circuits rapides qui conviennent parfaitement à sa conception.

Pour mes recherches, je me suis aidé du précieux livre de Monsieur Christian Moity « Endurance 50 ans d’histoire » vol. 1 : 1953-1963 – éd. ETAI

Il s’agit d’un ouvrage exceptionnel, vivant et richement documenté. 

Studebaker : la tournée de mon père – 2

Quelques clefs pour une meilleure lecture des photos des ces Studebaker.

Dans cet article ne sont photographiés que les modèles de premier type de carrosserie, équipés de jantes en zamac de couleur assorties aux carroseries. Ce sont les version intermédiaires, les moins fréquentes. La peinture est de belle qualité, épaisse, brillante mais assez fragile. Le moindre choc a pour conséquence un inévitable éclat.

Avec patience, mon père a su réunir cette belle brochette de Studebaker. Les nuances de rouge, bleu, jaune sont très différentes des modèles de seconde génération. Il est à remarquer que certaines combinaisons de couleurs ne seront pas reprises sur les modèles équipés de jantes en zamac et de pneus en caoutchouc. Les mariages rouge et bleu, ou bleu et rouge seront, eux, conservés durant toute la durée de production du 25K.

Studebaker : la tournée de mon père – 1

Troisième volet de la série 25 en hommage à mon père.

Après les Ford, voici le 25 K Studebaker, camion maraîcher qu’il affectionne particulièrement.

A l’issue de la guerre, beaucoup de véhicules de l’armée américaine trouvèrent une seconde vie, dans un usage civil. Une partie des entreprises dont les véhicules avaient été réquisitionnés pendant le conflit avaient été prioritaires à la libération pour obtenir un véhicule à essence.

Studebaker
Studebaker

Ce fut le cas d’un cousin de ma grand-mère, négociant en aliments pour bétail et en vins à Champagnac. Pendant les grandes vacances, celui-ci emmenait mon père alors enfant, faire la tournée des débits de boissons du Cantal. Le pays est rude, et si la renommée de la production vinicole locale ne dépasse pas le département, durant l’hiver, le produit réchauffe autant qu’un autre. J’ose espérer que mon père se contentait d’une limonade.

En tout cas, mon père était très fier à l’intérieur du Studebaker. Il faut dire que le Studebaker était encore équipé de sa tourelle et il avait plaisir à se tenir debout sur la banquette, le nez au vent, comme dans une décapotable.

La campagne auvergnate, les routes sinueuses étroites et bosselées, c’était le rêve pour un gamin venant de la région parisienne. Il ne faut pas chercher plus loin l’intérêt pour mon père de ce véhicule.

Il a été difficile de réunir ces Studebaker maraîchers. L’expérience nous a enseigné que ces modèles, moins spectaculaires que les tapissières (25L), étaient bien plus rares. Ils empruntent le même châssis sur lequel est fixée, au moyen d’un axe vertical serti, maintenu par une roue de secours, une ridelle haute ajourée. Les modèles se différencient par la présence d’une bâche en tôle amovible sur la tapissière. On ne peut confondre les deux. Le maraîcher reçoit une finition bicolore, la teinte du châssis cabine étant différente de celle de la ridelle. Pour la tapissière, le châssis cabine et les ridelles sont unicolores. C’est la bâche qui reçoit une peinture de couleur différente.

Il y avait une petite différence de prix entre les versions maraîcher et tapissière, due au surcoût de la bâche en tôle. La tapissière a eu davantage de succès. Un slogan imprimé était placé à l’intérieur et précisait : « deux jouets en un ». Aujourd’hui encore, la tapissière a les faveurs des collectionneurs.

Le camion Studebaker sera exploité plusieurs années par Meccano qui a peut être vu là un moyen d’étoffer son catalogue à moindre coût. Il connaîtra les deux moules. Je me souviens avoir été passionné par les photos révélant les différences de moule lors de la parution du premier livre de Jean-Michel Roulet : la « caisse à outils sur le marchepied » et « la baguette large sur le plat du capot ».

Ces détails me paraissent évidents aujourd’hui, mais à l’époque, il nous fallait un certain temps pour bien identifier un premier moule d’un second !

Les quatre Ford rubber de 1935

L’histoire de ces autos est assez mystérieuse. Dans l’article précédent, nous avons fait connaissance avec la firme « The Perfect Rubber Company ».

Ford V8 Rubber V8
Ford V8 Rubber V8

La démarche de cette dernière consistait à contacter les concessions automobiles des marques Chrysler, Pontiac et De Soto afin que ces dernières commandent des miniatures estampillées du nom de leur garage. Dans l’histoire présentée ce jour, c’est la firme Ford qui est à la manœuvre. C’est une démarche opposée à celle de « The Perfect Rubber Company ».

Le géant de Detroit doit faire face à une rude concurrence. Fini le modèle unique. Pour garder sa clientèle il faut, comme General Motors, proposer très régulièrement un nouveau modèle. La publicité a fait son entrée dans ce marché énorme. Tous les supports sont les bienvenus. En 1935, le bureau de la publicité a l’idée de promouvoir le lancement de son modèle V8 par l’édition de sa reproduction en miniature. Il faut un matériau bon marché car les quantités souhaitées sont très importantes : nous sommes aux Etats-Unis, le potentiel est à l’échelle de ce pays.

C’est alors que l’idée de faire mouler ces jouets en « rubber » fait son apparition. Nous avons vu précédemment que ce matériau était déjà utilisé dans le monde du jouet, mais pas encore dans celui de la reproduction de miniatures automobiles.

Il est vraisemblable que la proximité des petites fabriques de jouets en caoutchouc avec celles des fabricants de pneumatiques automobiles ait été un élément déclencheur de la décision. Aux USA, les centres d’importation du caoutchouc étaient centralisés et les firmes travaillant ce matériau se trouvaient sur place.

La décision fut donc prise de commander des miniatures de Ford V8 berline. La décision a entrainé des conséquences inattendues. Aucune firme de jouets travaillant le caoutchouc ne pouvait répondre à une telle commande. Aucune n’avait les capacités de produire de telles quantités dans le laps de temps requis. Il semblerait que plusieurs d’entre elles, jouant de leur proximité se soient alliées afin de répondre à la demande du géant de Detroit. Comment expliquer en effet que, 80 ans après, nous soyons en présence de quatre reproductions portant quatre noms de fabricants différents alors que ces quatre autos sont identiques en tous points ? Cette auto fut aussi déclinée en jouet en versions coupé, fourgon et camion ridelles. La berline est sortie des quatre unités de fabrication. Le coupé n’a été produit que par trois d’entre elles, comme le camion ridelles. Quant au fourgon dit « panel van », il n’a été proposé que par deux fabricants. C’est mon préféré, car il est très représentatif de cette période (ici, sur la photo en version ambulance).

Sur une des images de la galerie trois exemples de modèles vendus comme souvenir lors de différentes foires expositions durant la période 1935-1936, représentant également une Ford V8 1935. Ils sont équipés de pneus Firestone, au contraire de la De Soto de la fiche 190, qui est équipée de pneus Goodyear. Le logo Firestone apparait aussi très clairement sur les boîtages.

The Perfect Rubber Ford V8

Le mystère V8 1935

L’histoire de ce jour est, je pense, un cas unique dans l’histoire de l’industrie de la miniature automobile. De nombreux collectionneurs américains s’y sont intéressés et n’ont pas réussi à s’accorder sur la réalité des faits. Je vais donc vous proposer ma version.

The Perfect Rubber Company : à gauche De Soto et à droite la Chrysler
The Perfect Rubber Company : à gauche De Soto et à droite la Chrysler

Nous sommes en 1935-1936. Dans l’industrie du jouet automobile, un nouveau matériau vient de faire son apparition, le caoutchouc dit « rubber ». Il n’est pas utilisé ici comme accessoire, pour reproduire les pneumatiques des miniatures, mais bien comme matière première dans l’injection monobloc des jouets automobiles.

C’est à la crise de 1929 que le caoutchouc, doit son succès. Il était devenu absolument nécessaire de réduire les coûts de fabrication. C’est ainsi que sont apparus en 1935 les premiers jouets automobiles « rubber » qui disparaitront en 1955.

Il est bien évident que leur fabrication était moins onéreuse que celle des modèles en zamac. Non seulement la matière première était bon marché, mais en plus, la réalisation du moule posait peu de contraintes. Ces deux facteurs permettaient un prix de revient modéré. En fait, pour être rigoureux, cette matière était déjà utilisée dans le monde du jouet, mais cantonnée à la reproduction de soldats, de poupées et figurines. Auburn, le leader dans ce domaine a commencé par mouler des pneus pour des firmes de cast-iron. Ce sera sa principale activité à compter de 1910. Puis vont apparaître des figurines, des soldats et des reproductions d’animaux ! Au milieu des années 30, le directeur d’Auburn, Monsieur Murray, entreprend un voyage en Europe. Il va ramener dans ses valises de nombreux jouets. C’est à la suite de ce voyage qu’il décide, en 1936 de créer des automobiles. Je suis persuadé qu’il a dû être inspiré par nos modèles C-I-J et JRD moulés en plastiline. Bien que le matériau diffère, il y a une grande similitude dans la conception de ces jouets. Il est pertinent de souligner qu’Auburn était installée à Akron, haut lieu de l’industrie du caoutchouc et où l’on trouve le siège GoodYear.

Cette information m’a conforté. Durant mes premiers voyages aux Etats-Unis, j’avais été très attiré par les jouets en rubber, car j’y voyais un lien de parenté avec les modèles C-I-J et JRD en plastiline. Lorsqu’au cours de mes recherches j’ai découvert l’existence du voyage en Europe de Monsieur Murray, cela n’a fait que confirmer ce que j’avais pressenti devant ces jouets. Lors de la prochaine fiche, je vous promets d’autres révélations sur ces rubber !

Pour illustrer cet article j’ai choisi de vous présenter des modèles provenant de la firme « The Perfect Rubber Company ». Cette firme de Mansfield dans l’Ohio, produisit sur une très courte période quelques modèles en caoutchouc.

Dotés d’une bonne finition, ces jouets étaient la reproduction fidèle de modèles Pontiac, Chrysler et De Soto du millésime 1935. Cette petite firme avait entrepris de contacter tous les points de vente et garages des modèles reproduits afin de leur proposer d’appliquer leurs noms et adresses sur le pavillon des miniatures. Des collectionneurs américains ont ainsi retrouvé quelques exemplaires de Pontiac encore emballés dans une petite boîte qui servait d’emballage de livraison. Une notice expliquait la démarche de la société, avec les tarifs et les conditions de vente. Les amateurs de ce type de jouets pensent qu’il en fut de même avec les Chrysler et De Soto Airflow. On peut sans doute en déduire que les quelques d’exemplaires retrouvés sans marquage, sont ceux qui avaient été envoyés aux quatre coins des Etats-Unis afin de présenter ce type de produit.