Il vous faudra gravir les escaliers de l’aile Richelieu du musée du Louvre, jusqu’au second étage. Là, devant vous, des portes vitrées marquent l’entrée des salles consacrées à la peinture française.
Face à vous, un petit tableau : 60 cm sur 45 cm. Seul dans la vitrine, comme perdu dans un espace trop grand pour lui. On comprend que l’on est en présence d’une oeuvre majeure. La mise en scène est efficace, on ne peut passer sans lire les commentaires.
portrait de Jean Le Bon
Il s’agit du premier portrait profane connu dans la peinture occidentale. Avant lui, on ne trouve que des scènes de nativité, de crucifixions, des vierges à l’enfant. La peinture occidentale se borne à illustrer la Bible. Ce portrait, qui pourrait être celui du roi Jean II le Bon va ouvrir la voie aux autres peintres.
Désormais tous les grands qui dirigent le monde vont vouloir se faire portraiturer. Plus tard ce sera au tour de la grande bourgeoisie enrichie par le commerce ou le prêt d’argent de vouloir son portait.
Nous sommes aux environ de 1350-1360. L’auteur n’a pu être formellement identifié. Il s’agit peut-être d’un peintre ayant subi en Avignon l’influence de la peinture italienne, comme le décrit l’excellent site en ligne du Louvre.
CD Renault 40cv « transports rapides »
A leur manière, les Renault de chez CD présentées ce jour ont aussi marqué l’histoire du jouet. Modestement nous restons bien sûr dans le domaine de l’art populaire. CD a occupé une place de premier choix dans l’histoire mondiale des miniatures automobiles.
CD Renault 40cv (chassis)
Elle est sûrement l’une des premières a avoir proposé des miniatures identifiables par les enfants et les parents reproduisant des Renault, des Hotchkiss et des Delahaye et non des autos génériques. CD ira encore plus loin en estampillant les châssis et parfois les carrosseries (Chenard et Walcker)
Pour les pionniers de la collection, qui trouvaient écho à leur passion chez M. Jacques Greilsamer Boulevard de Sébastopol, ces jouets CD comme les AR, les Gasquy et les Märklin d’avant-guerre avaient valeur de référence. Je dirais même de marqueur : il y avait ceux qui en possédaient et ceux qui en cherchaient.
CD-Renault 40cv fourgon
Dans les années soixante, ces CD ont près de quarante ans d’existence. Ce sont déjà des « ancêtres ». A ce titre, trouver un exemplaire relève déjà de la chance, mais trouver un exemplaire en état d’origine impeccable cela relève du miracle. Alors, lorsqu’on trouve une CD incomplète ou en épave, une restauration s’impose. Il en va de la survie d’un produit qui est rare. Désormais, on a totalement oublié ce phénomène. Les gens regardent avec dédain ces restaurations des années soixante.
J’ai pour ma part un regard plein d’indulgence sur ces modèles qui ont retrouvé un éclat ancien, même si je préfère laisser l’objet dans son état d’origine.
ensemble de CD-Renault 40cv fourgon
Dans cette première partie, je vous présente les versions commerciales de la Renault dite « 40cv » disponibles en magasin de jouets. Nous sommes encore proches de la fin du premier conflit mondial et CD a cru bon de proposer une version sanitaire militaire. sa couleur grise ne laisse aucun doute. D’ailleurs à la même période CD proposera une Delahaye en version ambulance municipale qui sera, elle, peinte de couleur crème avec une bande de couleur rouge.
CD Renault 40cv « transports rapides »
CD Renault 40cv « transports rapides »
CD déclinera bien sûr sa camionnette en version de livraison. Est-ce la forme aérodynamique du capot qui a inspiré la création du papier collant figurant sur les flancs et à l’arrière du fourgon ? En effet CD a cru bon de faire apparaitre la mention « TRANSPORTS RAPIDES ».
Cela a un charme désuet, mais on réalise que dès les années 20, il y avait déjà la préoccupation du temps perdu et de de la vitesse. Aujourd’hui, nombre de véhicules de livraison arborent ce type de slogan.
CD Renault 40cv « transports rapides »
On appréciera les versions bicolores, beige et noir, faisant référence au luxe. On reconnaitra les couleurs fétiches utilisées plus tard par Coco Chanel. Là encore il est intéressant de constater qu’au fil du temps des nuances apparaissent.
CD-Renault 40cv fourgon
CD-Renault 40cv fourgon
CD-Renault 40cv fourgon
Des versions plus classiques, unicolores, rouges ou bleues existent. Elles sont le plus souvent dépourvues de décorations
CD-Renault 40cv fourgon « postes »
CD-Renault 40cv fourgon « postes »
CD-Renault 40cv fourgon « postes »
Sur la superbe version postale, pas de notion de vitesse ni de courrier express. Juste la mention « POSTES » . Sobre, dans sa robe vert foncé avec la casquette de pare-brise soulignée de jaune, elle est d’une élégance rare.
Delahaye est une des plus anciennes firmes d’automobiles françaises. Sa création remonte à 1895.
JRD Delahaye 135
Comme ses concurrents, Emile Delahaye a choisi le vecteur de la course automobile pour se faire connaître. A l’époque c’était le passage obligé. C’est ainsi que le 24 septembre 1896 deux autos Delahaye prennent part à une des toutes premières compétitions automobiles, le Paris-Marseille-Paris : 1710 kilomètres d’aventure. Seuls 14 véhicules terminent cette épreuve, dont les deux Delahaye. C’est une Panhard qui remporte l’épreuve à 25,250 de moyenne horaire.
Parmi les nombreuses péripéties, la plus savoureuse est celle où les Delahaye qui faisaient route ensemble ont été prises au milieu d’une tempête en Côte-d’Or. Elles ont été immobilisées de longues heures, le temps que leurs équipages scient les arbres abattus en travers de la route !
JRD Delahaye 135
Au fil des ans, la marque a trouvé sa clientèle, la grande bourgeoisie. Les Delahaye ont ainsi acquis une image d’autos cossues, solides. Chez Delahaye, on a toujours préféré les solutions éprouvées aux nouveautés. Pas de clinquant ni de tape à l’œil chez ce fabricant, juste de la belle ouvrage. Pendant des décennies cela va être la ligne de conduite de la firme installée rue du banquier à Paris, près des Gobelins.
Au début des années trente les Delahaye sont équipées de caisses carrées, très classiques. Et puis en 1935, la 135 est arrivée. C’est une auto bien plus sportive que celles produites précédemment.Elle peut se comparer aux Bugatti, Talbot et autres Delage de l’époque.(voir le blog sur les Peugeot 402)
JRD Delahaye 135
JRD Delahaye 135
JRD Delahaye 135
JRD Delahaye 135
JRD Delahaye 135
JRD Delahaye 135
Étrangement, ces belles autos n’ intéressent pas les fabricants de jouets qui semblent préférer les autos familiales, de course ou utilitaires. JRD sera donc le seul à produire une Delahaye 135 cabriolet en plastiline à l’échelle du 1/42 environ. Philippe Moro m’a signalé l’existence d’un coupé de couleur verte. Je ne l’ai jamais vu.
JRD Delahaye 135 et Peugeot 402 cabriolet
JRD Delahaye 135 et Peugeot 402 cabriolet
JRD Delahaye 135 et Peugeot 402 cabriolet
La version cabriolet est une des miniatures françaises les plus rares jamais produites.
Des copies ont été réalisées dans les années quatre-vingt. Elles sont bien plus lourdes que les originales et leur peinture est également très brillante.
JRD Delahaye 135
C’est grâce à la dispersion d’une exceptionnelle collection de jouets français d’avant-guerre qu’un exemplaire a refait surface. Avec une copie également !
A la fin de la vente, Gilles Scherpereel est venu me trouver et me dire que j’avais bien fait d’acquérir ce rarissime modèle. De la part de quelqu’un qui a eu entre les mains les plus rares jouets, et qui n’est pas familier de ce genre de commentaires, cela m’a confirmé la rareté de ce jouet.
L’avenir semblait tout tracé pour la C-I-J. Elle n’avait qu’un interlocuteur, Renault, et un contrat d’exclusivité qui lui permettait de reproduire en zamac les véhicules du groupe Renault. Au milieu des années cinquante le constructeur automobile qui était devenu après guerre La Régie Renault décida de mettre fin au contrat.
Porte clefs régie Renault
Porte clefs 4cv Renault
On imagine à quel point cela dut être difficile à accepter pour la direction de la C-I-J, d’autant que la relation dépassait le simple cadre du droit à l’exclusivité de reproduction. Depuis l’avant guerre, il y avait entre les deux firmes une étroite collaboration qui concernait également la distribution des jouets (voir l’article consacré à ce sujet).
extrait du catalogue C-I-J Renault 4cv calandre à 3 barres
Ce fut un vrai coup de massue. Il est facile d’analyser la situation. Comment La Régie Renault pouvait-elle accepter d’être absente des catalogues Dinky Toys, firme concurrente à la C-I-J, et qui était au début des années cinquante la référence absolue dans le domaine des reproductions miniatures automobiles ? Peugeot, Simca, Ford, Citroën se partageaient ce privilège. Le contrat d’exclusivité avec la C-I-J devenait un obstacle pour La Régie et freinait la distribution de ses modèles auprès du jeune public.
La C-I-J aurait pu rapidement sombrer corps et biens. Cela va malheureusement arriver, mais l’échéance va être retardée. Courageusement la direction va relever la tête et se battre. Ce fait est oublié un peu vite des collectionneurs.
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres jantes en plastique de couleur rouge avec châssis riveté
Les reproches de la Régie vis à vis de la firme de Briare devaient concerner la mauvaise distribution des modèles mais aussi la rusticité des fabrications. Avez-vous observé de près les C-I-J d’avant 1955 ? Un détail a dû vous frapper.
La méthode de fixation du châssis en tôle peinte est des plus rustique même si C-I-J maîtrisait parfaitement cette technique. Cependant, depuis 1950, Dinky Toys France sertit ses modèles et évite ainsi les disgracieuses surépaisseurs au niveau des pare- chocs.
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres avec châssis peint de la couleur de la carrosserie
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres jantes en plastique de couleur rouge avec châssis riveté
La firme de Briare va réagir, fini les châssis pincés. Toute la série des Prairie et ses dérivées vont être équipées de châssis marbrés et rivetés. Il en est de même pour la Renault 4cv. Pour la Frégate, un nouveau moule va être créé au 1/43, en place du 1/50 environ.
Cela bouge à Briare. D’ailleurs on peut légitimement s’interroger : ces investissements coûteux ont-ils été bien réfléchis ? En effet, les modèles cités ci-dessus étaient déjà en fin de vie chez Renault.
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres
Pour sa Renault 4cv, C-I-J va modifier sa calandre et la mettre au goût du jour. En effet, depuis 1954 La Régie Renault équipe désormais ses autos d’une calandre simplifiée à trois barres.
Dans la production des Renault 4cv équipées de calandre à trois barres, on distingue deux variantes de jantes.
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres jantes en plastique de couleur rouge avec châssis riveté
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres jantes en plastique de couleur rouge avec châssis riveté
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres jantes en plastique de couleur rouge avec châssis riveté
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres jantes en plastique de couleur rouge avec châssis riveté
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres jantes en plastique de couleur rouge avec châssis riveté
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres jantes en plastique de couleur rouge nuance de gris avec châssis riveté
Logiquement, les premiers exemplaires reprennent les jantes en plastique de couleur rouge et les couleurs de carrosserie vues sur la variante précédente équipée d’une calandre 6 barres. La carrosserie de couleur noire est peu fréquente.
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres jantes en plastique de couleur argent
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres jantes en plastique de couleur argent nuance de gris
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres jantes en plastique de couleur argent
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres jantes en plastique de couleur argent
Ensuite, le modèle sera équipé de jantes en plastique de couleur argent, comme le reste des autos produites à la C-I-J durant cette période. Cette ultime variante connaitra les boîtages Europarc. Le modèle continuera sa longue carrière avec des couleurs chatoyantes mais peu crédibles: orange, bleu métallisé, bleu layette…pour notre plus grand plaisir de collectionneur.
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres avec châssis peint de la couleur de la carrosserie
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres avec châssis peint de la couleur de la carrosserie
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres avec châssis peint de la couleur de la carrosserie
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres avec châssis peint de la couleur de la carrosserie
Les ultimes versions sont reconnaissables à leurs châssis peints de la couleur de la carrosserie. Quel luxe !
C-I-J sortira une version police parisienne qui a eu un certain succès.
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres jantes en plastique de couleur argent châssis riveté
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres jantes en plastique de couleur argent nuance de vert châssis riveté
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres jantes en plastique de couleur argent nuance de bleu châssis riveté
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres jantes en plastique de couleur argent nuance de vert châssis riveté
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres jantes en plastique de couleur argent nuance de gris châssis riveté
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres jantes en plastique de couleur argent
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres jantes en plastique de couleur argent nuance de vert châssis riveté
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres jantes en plastique de couleur argent nuance de gris
C-I-J Renault 4cv calandre 3 barres jantes en plastique de couleur argent nuance de beige
Mais ces derniers sursauts ne pouvaient suffire à sauver cette entreprise pourtant si attachante. Nous sommes au début des années soixante. C-I-J n’a pas vu arriver la concurrence. On imagine que son marqueur était Dinky Toys et la reproduction de la berline populaire. Cependant depuis 1957, un certain Solido a lancé sa série 100, avec ses innovations techniques et un catalogue qui correspond à la demande de la jeunesse de ces années.
Il reste que la C-I-J est une firme des plus intéressantes. Elle possède un grand nombre d’amateurs et c’est justifié. Il y 40 ans j’avais réalisé un brouillon de livre sur la C-I-J. Finalement d’autres l’ont fait à ma place.
Beaucoup d’artistes sont inspirés par les ports de marchandises. Photographes, cinéastes, poètes et peintres aiment l’atmosphère des quais, et la puissante silhouette des grues de déchargement.
FJ Pacific au travail sur le quai de Marseille
Le port de Marseille a longtemps été l’un des plus actifs en France. Après la seconde guerre mondiale, l’Algérie est toujours un département français, et l’Algérie c’est en face de Marseille.
Lors de la conquête du pétrole en Algérie, le matériel nécessaire aux recherches et à l’exploitation transitait donc par ce port. Le transport des pipelines et les convois spectaculaires en direction du Sahara algérien ne pouvaient laisser insensible FJ, firme marseillaise.
FJ Pacific au travail sur le quai de Marseille
Pour FJ qui avait déjà créé le moule du camion Pacific et de sa remorque, la déclinaison en convoi exceptionnel était une suite logique. Historiquement, le vrai camion a d’abord été conçu pour l’armée américaine, dans un usage militaire (porte-char). FJ a également commencé avec une version militaire, un lance-missiles. Ensuite il lui a suffit de créer un berceau en tôle au-dessus de l’essieu arrière de la remorque pour recevoir le pipeline. Le tour était joué.
FJ Pacific camion porte pipe line
FJ Pacific camion porte pipe line
FJ Pacific camion porte pipe line
Pour la création du pipeline lui-même, on peut dire que FJ a fait dans la débrouille : il s’agit d’un tube en carton peint de couleur argent (ensuite ce sera du PVC de couleur gris clair). Mais l’attrait du camion tient aussi dans sa décoration et la mention : « Destination PETROLES DU SAHARA éléments de pipe line » encadrée de deux cocardes tricolores.
Cocarde tricolore
Comme nous l’avons déjà constaté avec d’autres véhicules français ayant pour thème le Sahara français, l’exploitation de ces gisements s’accompagnait d’une grande fierté nationale. FJ est allé jusqu’à placer des cocardes sur les portes de la cabine du tracteur.
Comme la vantardise n’est jamais très loin de la fierté, on peut relever la terminaison plurielle de « pétroles » et aussi du mot « élément » alors que notre convoi n’en transporte qu’un !
FJ Pacific camion porte pipe line
FJ Pacific camion porte pipe line
FJ Pacific camion porte pipe line
La couleur la plus fréquente de l’ensemble, tracteur et remorque est le rouge. Les autres couleurs sont nettement moins courantes. La boîte est similaire à celle du lance-missile produite en même temps.
FJ catalogue
FJ porte clef
Plus tard, afin d’étoffer son catalogue FJ proposera des versions plus sophistiquées de ces camions Pacific transports exceptionnels.
FJ Pacific porte tubes
FJ Pacific porte tubes
FJ Pacific porte tubes
FJ Pacific porte tubes
FJ Pacific porte tubes
Dans cette seconde période, elle proposa notamment une version équipée de tubes, conçus pour être emboîtés les uns dans les autres. Dans cette seconde série que l’on peut également qualifier de plus luxueuse, une grue à flèche treillis est située derrière la cabine. Cette grue est empruntée à la série des camions GMC de chez FJ. Chez ce fabricant rien ne se perd et tout est recyclé !
FJ : ensemble de Pacific équipés de grue
L’utilisation de pièces communes à plusieurs véhicules est le genre de détail qui fait le charme de ces petites firmes. Une boîte illustrée accompagne le modèle. Le camion est parfaitement reproduit, en couleur, sur l’étui. Cette seconde version, avec la grue derrière la cabine et ses tubes est peu fréquente.
Il faut remarquer un dernier détail. Cette seconde série est apparue au milieu des années soixante alors que l’Algérie avait obtenu son indépendance. Notre Pacific a perdu ses cocardes tricolores et bien sûr sa décoration vantant la destination vers le Sahara.
C’est le titre d’un des plus fameux films de Jean Renoir. La règle du jeu est un film est sorti en 1939. En relatant les vestiges du passé d’une classe sociale en fin de règne il annonce les sombres heures à venir. Il est un peu à l’image de nos compétiteurs automobiles tricolores. Les années 20 et le passé glorieux des Bugatti type 35 et des Delage de Grand Prix sont bien loin.
CD-Bugatti: en pleine action !
Comment lutter contre les autos allemandes et italiennes, soutenues par les gouvernements nationalistes de ces pays qui voient dans les joutes automobile un moyen de propagande efficace? (voir le blog sur les fléches d’argent).
GP d’Allemagne avant guerre !
Monoplaces Mercedes
De plus, et sans chauvinisme aucun, le règlement favorise clairement les auto équipées de compresseur. En effet, les équivalences entre moteur atmosphérique de 4,5L de cylindrés et ceux avec compresseurs de 3L sont erronées.
Pour faire simple, les moteurs avec compresseurs développaient environ le double de puissance des moteurs atmosphériques. On constate d’ailleurs que le règlement en vigueur pour le championnat du monde de formule 1 juste après la guerre a corrigé cela. Désormais les autos avec compresseur ne peuvent dépasser les 1,5litre de cylindrée au lieu des 3 litres avant-guerre. Sans commentaires.
Mais il ne faut pas non plus enlever leur mérite aux ingénieurs allemands qui ont su mettre sur roues des autos très efficaces. Les moyens financiers n’expliquent pas tout. Hans Nibel pour Mercedes et Ferdinand Porsche pour Auto Union vont concevoir des autos qui dès 1934 enchaînent les succès. Les français vont réagir à cette domination de manière détournée. Cela va se faire dans deux directions, avec à chaque fois l’ACF (Automobile Club de France) à la manœuvre.
Bugatti 57C
Bugatti 57C de chez JRD
Bugatti 57C de chez JRD
Bugatti 57C de chez JRD avec le sigle de l’ACO
Bugatti 57C de chez JRD devant les stands
Tout d’abord, ne pouvant rivaliser directement sur les Grands Prix, c’est un règlement pour les modèles « sport » biplace, sur mesure, pour les constructeurs français, qui est créé pour les courses d’endurance. (voir le blog sur la Bugatti au Mans). Cela permettra de voir triompher des autos bleues aux 24 heures du Mans en 1937, 1938 et 1939. Précisons que la course a été annulée en 1936 pour cause de front populaire.
Logo en tôle repoussé représentant la fameuse Delahaye 145 dites du « Million »
L’autre plan de soutien consiste à distribuer une forte somme d’argent lors d’une compétition unique réservée à des autos fabriquées obligatoirement en France. l’ACF dota d’un prix d’un million de Francs une compétition nommée bien à propos « Grand prix du Million ».
Pour emporter l’épreuve, il fallait battre à Montlhéry, avant le 31 août 1937, la moyenne réalisée par l’Alfa Romeo de Chiron en 1935 lors du Grand Prix de l’ACF sur les deux cents premiers kilomètres de la course qui se disputait sur 500 kilomètres.
La course avait pourtant été remportée par Caracciola sur Mercedes tandis que Chiron abandonnait. Cela entraîne aujourd’hui encore une certaine confusion. Craignait-on que nos autos bleues qui devaient battre le record ne puissent tenir la distance et la moyenne sur 500 km ? On peut légitimement se poser la question.
Cette compétition a, avouons-le, un côté désuet. Elle permettra aux Français de ne pas perdre la face devant leur public. Mais ce type de course sans confrontation directe avec l’adversaire est bien un aveu d’impuissance.
la lutte entre la Bugatti et la Delahaye le dernier jour de la compétition
Le record sera battu in extrémis par Delahaye avec sa 145. Cette auto répondait aux deux règlements, « Sport » et « Grand Prix ». Elle était donc biplace, ce qui n’était pas interdit en Grand Prix. Elle était polyvalente. Elle battra le record de justesse (146,654 Km/h pour 146,508Km/h pour l’Alfa Romeo). Deux autres constructeurs s’étaient inscrits : S.E.F.A.C et Bugatti. Nous reviendrons sur la Bugatti 4,5L sans compresseur qui fut l’unique concurrente, la S.E.F.A.C n’étant pas prête à temps.
JRD Delahaye 145 biplace
JRD Delahaye 145 biplace
JRD Delahaye 145 biplace
JRD Delahaye 145 biplace
JRD Delahaye 145 biplace
On imagine bien le retentissement national provoqué par ce record. Pour la presse, les voitures françaises étaient donc capables de rivaliser avec les allemandes.
C’est bien sûr un résultat en trompe-l’œil. Il n’empêche qu’en France, JRD se sentit investi d’une mission patriotique et offrit aux enfants une reproduction miniature de la voiture qui avait terrassé la terrible Mercedes.
La même année, le fabricant de Montreuil avait déjà immortalisé l’autre grande victoire française, celle du tank 57 Bugatti aux 24 heures du Mans.
JRD Delahaye 145 biplace
JRD Delahaye 145 biplace
JRD Delahaye 145 biplace
La Delahaye 145 de chez JRD est réduite à une échelle proche du 1/43. Elle est moulée en plastiline. Elle est fort ressemblante à l’originale qui possédait une face avant massive et une carrosserie qui s’effilait vers l’arrière. L’auto était facilement identifiable. Elle est impressionnante. Pour l’époque JRD est allé assez loin, dans le détail en reproduisant même les rivets de capot. Elle est mieux finie que son tank Bugatti ce qui laisse supposer que chez JRD on avait vu l’auto de près.
JRD Delahaye 145 biplace
JRD Delahaye 145 biplace
Elle est dûment estampillée JRD sur son châssis. Elle est équipée de pneus crampons de couleur noire ou de pneus « Michelin ». Sachant que je préparais un article sur cette Delahaye, M. Lafond amateur de belles autos m’a confié un ouvrage publié en 1981 : « Delahaye sport et prestige » écrit par François Jolly. On y apprend que lors du Grand Prix du Million l’auto était en fait équipée de pneus « Dunlop », très performants et endurants, remplaçant les « Goodrich-Colombes ».
L’année suivante, en 1938, notre belle Delahaye 145 participera aux 24 heures du Mans, équipée d’ailes et bien sûr de phares. Elle réussira même à s’imposer une fois face aux Mercedes en Grand Prix en début de saison, à Pau, le 10 avril 1938.
Le succès tint surtout au fait que la Delahaye était moins gourmande que les Mercedes qui perdirent la course dans les stands, au ravitaillement.
La victoire à Pau c’est joué dans les stands
La victoire à Pau c’est joué dans les stands
La victoire à Pau c’est joué dans les stands
La victoire à Pau c’est joué dans les stands
Le reste de la saison fut une suite de quatre victoires Mercedes, les deux derniers Grands Prix étant remportés par Auto Union.
Le gamin parisien pouvait alors parader fièrement à l’école avec ses petits bolides français et croiser le fer dans la cour de récréation avec le petit camarade à qui on avait offert les monoplaces Märklin. Ces dernières étaient importées d’Allemagne en France et vendues à Paris. Je possède un catalogue Märklin de cette période en langue française, estampillé d’un magasin parisien. Dans la cour de récréation, notre Delahaye n’avait peur de personne.
Auto Jaune Le Blog de Vincent Espinasse collectionneur