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Sur les quais de Marseille

Sur les quais de Marseille

« J´connais un´ grue sur le Vieux Port

Avec des dents longu´s comm´ la faim

Et qui dégraf´ tous les marins

Qu´ont l´âme chagrine et le cœur d´or

C´est à Marseille que j´vais la voir

Quand le soleil se fout en tweed

Et que l´mistral joue les caïds

C´est à Marseille qu´ell´ traîn´ le soir »

Léo Ferré  La Marseillaise (écouter la chanson dans son intégralité)

 

Beaucoup d’artistes sont inspirés par les ports de marchandises. Photographes, cinéastes, poètes et peintres aiment l’atmosphère des quais, et la puissante silhouette des grues de déchargement.

Le port de Marseille a longtemps été l’un des plus actifs en France. Après la seconde guerre mondiale, l’Algérie est toujours un département français, et l’Algérie c’est en face de Marseille.

Lors de la conquête du pétrole en Algérie, le matériel nécessaire aux recherches et à l’exploitation transitait donc par ce port. Le transport des pipelines et les convois spectaculaires en direction du Sahara algérien ne pouvaient laisser insensible FJ, firme marseillaise.

Pour FJ qui avait déjà créé le moule du camion Pacific et de sa remorque, la déclinaison en convoi exceptionnel était une suite logique. Historiquement, le vrai camion a d’abord été conçu  pour l’armée américaine, dans un usage militaire (porte-char). FJ a également commencé avec une version militaire, un lance-missiles. Ensuite il lui a suffit de créer un berceau en tôle au-dessus de l’essieu arrière de la remorque pour recevoir le pipeline. Le tour était  joué.

Pour la création du pipeline lui-même, on peut dire que FJ a fait dans la débrouille : il s’agit d’un tube en carton peint de couleur argent (ensuite ce sera du PVC de couleur gris clair). Mais l’attrait du camion tient aussi dans sa décoration et la mention : « Destination  PETROLES DU SAHARA éléments de pipe line » encadrée de deux cocardes tricolores.

Comme nous l’avons déjà constaté  avec d’autres véhicules français ayant pour thème le Sahara français, l’exploitation de ces gisements s’accompagnait d’une grande fierté nationale. FJ est allé jusqu’à placer des cocardes sur les portes de la cabine du tracteur.

Comme la vantardise n’est jamais très loin de la fierté,  on peut relever la terminaison plurielle de « pétroles » et aussi du mot « élément » alors  que notre convoi n’en transporte qu’un !

La couleur la plus fréquente de l’ensemble, tracteur et remorque est le rouge. Les autres couleurs sont nettement moins courantes. La boîte est similaire à celle du lance-missile produite en même temps.

Plus tard, afin d’étoffer son catalogue FJ proposera des versions plus sophistiquées de ces camions Pacific transports exceptionnels.

Dans cette seconde période, elle proposa  notamment une version équipée de tubes, conçus pour être emboîtés les uns dans les autres. Dans cette seconde série que l’on peut également qualifier de plus luxueuse, une grue à flèche treillis est située derrière la cabine. Cette grue est empruntée à la série des camions GMC de chez FJ. Chez ce fabricant  rien  ne se perd et  tout est recyclé !

L’utilisation de pièces communes à plusieurs véhicules est le genre de détail qui fait le charme de ces petites firmes. Une boîte illustrée accompagne le modèle. Le camion  est parfaitement reproduit, en couleur,  sur l’étui. Cette seconde version, avec la grue derrière la cabine  et ses tubes  est peu fréquente.

(voir l’article consacré aux Berliet Stradair de chez FJ)

Il faut remarquer un dernier détail. Cette seconde série est apparue au milieu des années soixante alors que l’Algérie avait obtenu son indépendance.  Notre Pacific  a perdu ses cocardes tricolores et bien sûr sa décoration vantant la destination vers le Sahara.

Autre temps.

(voir un autre article consacré au transport dans le Sahara)