Archives de catégorie : Dinky Toys

Que sont ils devenus ?

Que sont ils devenus ?

Solido sera le seul fabricant français de miniatures en zamac à ne pas succomber aux charmes de la Simca 1000 lors de la sortie de la petite berline de Poissy.

Elle n’en offrira la reproduction que quarante ans plus tard, dans une gamme dédiée à la nostalgie des années soixante

Solido, qui avait déjà de quoi s’occuper avec son programme de sportives a sciemment laissé les reproductions de voitures de tourisme à Dinky Toys.

Cette dernière offrit une bonne reproduction même si les jantes flottent un peu dans les passages de roue. La Dinky Toys a connu un franc succès auprès du public.

Elle a été déclinée en version économique (Junior), et, fait unique, dans deux couleurs distinctes. La Simca 1000 de Bobigny eut l’honneur d’être produite en Espagne (Poch ) et même en Afrique du Sud (Harris).

Il existe des versions rares, connues en plusieurs exemplaires, qui combinent des carrosseries et des couleurs de modèle de la série Junior, mais avec des finitions (châssis, suspension et aménagement intérieur) de la série 500. On connaît aussi des modèles de la série Junior, donc économique, qui empruntent les couleurs bleu et rouge de la référence 519. Je les ai trouvés auprès de M. Malherbe du bureau d’étude. Ces modèles ont dû servir de test au service marketing pour expliquer aux commerçants ce qu’allait être cette série économique. Avant de créer des teintes spécifiques, la direction a utilisé les teintes existantes.

On observe le même phénomène avec la Panhard qui dans sa couleur de série, mauve, a été testée en série junior et distribuée lors du salon du jouet

Enfin, deux modèles de couleur argent ont été retrouvés par Jean-Michel Roulet rue du Maroc. Ces modèles devaient faire partie d’un ensemble de propositions faites à la direction. Il subsiste au moins ces deux exemplaires qui ont juste pour différence la couleur d’intérieur (noir et vert pomme) Les modèles sont finis comme des modèles de série avec des pochoirs identiques.

JRD a offert une miniature très correcte à une échelle légèrement supérieure au 1/43. Elle possède les capots et malles ouvrants, laissant découvrir un moteur sous-dimensionné… qui aurait inquiété les acheteurs de nos petits concessionnaires. Il est certain qu’un tel moteur devait être frugal.

C-I-J a aussi succombé au charme de la petite berline de Poissy. Le résultat est fort convaincant. Je la préfère à la Dinky Toys. Une série hors commerce limitée à 350 exemplaires sera produite. Elle se distingue par sa planche de bord noire et son marquage numéroté sur le chassis. Pour l’occasion la firme de Briare apposera une étiquette sur une face de la boîte.

Près de dix ans se sont écoulés. La Simca 1000 a subi quelques modifications, mais elle est toujours là.  Seule Norev apportera des modifications à sa miniature suite aux changements esthétiques de 1969.

C’est à cette époque que Chrysler est devenu actionnaire majoritaire de la marque. Matra est arrivé dans le réseau Simca. Une campagne de publicité tente de relancer la marque qui, malgré de bons produits, commence à souffrir du vieillissement de sa gamme et de la concurrence des marques étrangères qui ne se faisait pas sentir durant les trente glorieuses.

En 1974, Simca bénéficie encore d’un capital sympathie auprès de la clientèle. C’est d’ailleurs cet aspect qui est mis en avant dans le texte d’un autocollant distribué dans les concessions Simca : » je suis Simca sympa je suis ! je suis sympa Simca je suis ». Mai 68 est passé par là ! les couleurs criardes semblent avoir été inspirées du courant psychédélique et aussi de celles des Matra-Simca qui se sont imposées trois fois de suite au Mans avec leurs couleurs : bleu et vert.

Le message semble un peu décalé par rapport à la gamme constituée plutôt de familiales. Seule la petite Simca 1000 correspond parfaitement à cette publicité, et plus particulièrement la version sportive Rallye 1 qui connaitra une descendance 2 et même 3.

Dinky Toys avait prévu une Rallye 2 qui figure même dans son catalogue de 1975 sous la référence 520, mais celle-ci ne dépassera pas le stade du prototype.

Et nos petits concessionnaires en herbe de 1961 que sont-ils devenus en cette année 1974 ? Travaillent-ils dans le secteur automobile qui connaît sa première crise énergétique ? Sont-ils devenus fonctionnaires ? Poètes ? Les deux à la fois peut-être.

lire le premier épisode « tu vendras des Simca comme papa ! »

 

Le filon de la gendarmerie.

Le filon de la gendarmerie.

Les fabricants de jouets français ont mis du temps avant de reproduire des miniatures de la police ou de la gendarmerie.

Lors d’un précédent blog, j’avais souligné les scrupules des industriels du jouet à reproduire ce type de véhicules dont l’image est associée à celui qui a mal tourné. (lire le blog « le blues de la police »).

La C-I-J va être la première en France, à briser ce tabou (voir le blog les deux harengs). Devant le succès rencontré par ces modèles police et gendarmerie, tous les fabricants, qu’ils injectent du zamac ou du plastique (Minialuxe sera le premier dans cette matière) vont lui emboîter le pas.

Norev, leader français des fabrications de miniatures en plastique, ne pouvait rester sans réagir devant l’évident succès de Minialuxe, son concurrent d’Oyonnax, dans cette niche des véhicules de la gendarmerie.

Elle comprit tout le bénéfice qu’elle pouvait tirer auprès de la clientèle en déclinant sa Citroën DS21, et surtout sa berlinette Alpine. Pour l’occasion elle conçut pour ces deux modèles un gyrophare convaincant, ainsi qu’une petite antenne.

Pour sa Land Rover châssis court, elle a créé une antenne fouet. Une fois de plus, on comprend tout le bénéfice que le fabricant pouvait tirer de cet accessoire. En ajoutant un gyrophare et des décalcomanies papier, le tour était joué. Une version de couleur sable, tout à fait crédible, a été produite..

Bien plus tard dans la série jet car, L’ Alpine A310 a également été déclinée en gendarmerie.

Dinky Toys France est d’abord passé totalement à côté de ce type de véhicule et c’est bien dommage. Equipée d’une antenne fouet, la Peugeot 403 familiale aurait été parfaite.

Il faut dire qu’à cette époque tout allait encore bien à Bobigny et l’entreprise n’éprouvait pas le besoin de se remettre en question.

Plus tard sur les conseils de Claude Thibivilliers, arrivé en 1965, elle se laissa convaincre de produire un tel modèle. La Renault Sinpar gendarmerie illustra parfaitement l’attente de la clientèle. Une antenne en plastique, un support en acier la maintenant courbée, deux personnages en pleine action, un poste-radio, une capote, un pare-brise repliable, voilà bien le type de modèle qui répondait à la demande. Il connaîtra deux références et perdra son filin en acier dans le temps. Le véhicule est une belle réussite . Il me procura, enfant, beaucoup de plaisir.

Dans un effet entrainant, Solido, comprit qu’il fallait aussi sacrifier à cette mode « gendarmerie ». Mais comment faire ?

En 1967 l’entreprise n’avait à son catalogue aucun modèle susceptible de remplir cette mission. Une fois n’est pas coutume, le fabricant d’Oulins proposa une auto totalement imaginaire : une « Alfa Romeo GTZ tubolare police des autoroutes ».

Cette dénomination fantaisiste, « police des autoroutes », colle bien à la miniature. Ne la cherchez pas en photo ! Mais elle aurait sûrement ravi les apprentis pilotes de la gendarmerie.

Elle permettra à Solido d’amortir son moule qui ne semble pas avoir rencontré un vif succès en version compétition. Une peinture bleue, des décalcomanies sur les portes, le capot avant et le pavillon, une antenne bien sûr, et, surtout, un petit gyrophare créé spécialement. C’est un jouet, mais il a fière allure.

Le modèle symbolise tout à fait ce type de véhicule d’intervention rapide qui venait juste d’apparaître en France sur les autoroutes.

Autre particularité, la voiture ne fait pas partie de la série 100, comme la version sportive dont elle est déclinée, mais appartient à la gamme militaire (série 200). Elle a connu les deux variantes d’aménagement intérieur qui se caractérisent par la présence d’une roue de secours rapportée puis moulée. Pour l’occasion, la tonalité de la couleur bleue évolue (plus foncée à la fin) et ses phares en plastique passent du cristal transparent au jaune.

Elle connaîtra deux boîtages, preuve d’un certain succès et d’une pérennité. Enfin, il existe une variante plus rare qui empruntera durant quelque temps (1968) la teinte bleu-marine foncé (et non noire comme décrit par erreur dans le livre de Bertrand Azéma) du Renault 4×4 Gendarmerie sorti cette année là.

En1968, année prémonitoire, Solido va élargir son offre avec un joli coffret, à l’intérieur de la gamme militaire. Il est constitué du Renault 4×4 décoré à l’aide d’une grenade, symbole graphique de la gendarmerie, d’une moto BSA , de deux figurines et deux cônes de Lübeck.

Le socle en plastique et la cartouche de protection en carton sont communs aux deux autres coffrets proposés simultanément. Le modèle est fabriqué par Monovac, à Monaco. Monovac est la propriété de Ferdinand de Vazeilles, père de Jean qui, au milieu des années cinquante, a laissé l’ entreprise Solido à ses enfants, avant de créer cette firme spécialisée dans l’injection plastique (maquettes…)

Bien plus tard, au milieu des années soixante-dix, au moment de la cession de l’entreprise par la famille de Vazeilles, Solido se souviendra de ce coffret.

Elle réutilisera la moto et les deux gendarmes. La Renault 12 break remplacera le 4×4. Pour l’occasion elle recevra un gyrophare.

Ce coffret est devenu culte par la reproduction, la première, d’un accessoire qui venait de faire son apparition à la suite des premières limitations de vitesse , un radar.

Pour l’occasion Solido a créé un vilain buisson en plastique qui servait à maintenir le radar en place.

Dans ces années soixante-dix, Solido avait un catalogue plus diversifié. Depuis la disparition de Dinky Toys, berlines et breaks avaient fait leur apparition au catalogue au milieu des coupés sportifs et des voitures de compétition. Il fut donc facile de trouver une remplaçante à la GTZ « police des autoroutes ». Ce fut l’Alpine Renault A310.

La miniature est fort réussie. Un gyrophare, une petite antenne, bien sûr, des, décalcomanies sur les portières. Cette fois, les clients ont eu droit à un modèle réaliste.

Il existe au moins trois couleurs, sans compter les nuances différentes. L’Alpine Renault sera suivie d’un break Peugeot 504 bénéficiant du même équipement et …d’un panneau « halte » inséré dans la cale de blocage de la boîte carton. La miniature a belle allure, elle bénéficie d’une qualité de fabrication héritière de la série 100.

Dans les années quatre-vingt-dix, comme un clin d’oeil au passé, Solido ressortira un coffret Gendarmerie. Le coffret contient une Peugeot 205 sur laquelle Solido s’est contenté d’une tampographie gendarmerie. Le modèle n’apporte pas grand chose. Seul le Saviem VAB est original. Ce n’est plus le grand Solido innovant même si le graphisme du coffret est réussi.

Pour rester dans le thème, signalons qu’à cette époque des hélicop-tères de belle qualité ont été déclinés en version Gendarmerie (Alouette et Gazelle).

L’effervescence créative du milieu des années soixante a disparu. Mais il y a bien eu chez les fabricants de jouets français un mouvement tendant à proposer des modèles « Gendarmerie ».

Le lien entre ces modèles est l’adjonction d’une antenne et d’un gyrophare. A part la Renault Sinpar de chez Dinky Toys, toutes ont été des déclinaisons de modèles au catalogue, permettant au fabricant de proposer à peu de frais des modèles différents. Au regard du nombre de modèles fabriqués, le filon semble avoir été rentable. Merci donc à C-I-J d’avoir créé cette antenne fouet qui a montré la voie aux autres fabricants français.

 

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Elémentaire mon cher Watson !

Elémentaire mon cher Watson !

Il aura eu la bienséance de laisser partir la Reine Elisabeth II avant lui.  Robert Goirand nous a quittés le 10 septembre 2022.

Logique, me direz-vous, pour cet admirateur inconditionnel des productions de Frank Hornby, sujet de sa gracieuse majesté.

J’ai fait sa connaissance en 1978. Pour être précis, c’est à travers le récit que Jean-Michel Roulet avait consacré à leur relation de collectionneurs dans son premier ouvrage , déjà très réussi, que j’ai découvert Robert Goirand. J’ai compris la place centrale qu’il tenait dans l’univers des Dinky Toys.

Dans l’étude de la série 25, Jean-Michel Roulet fait un aparté pour expliquer la signification du suffixe accolé aux références des modèles publicitaires dérivés du 25J, le Ford ridelles bâché. Ainsi la version Calberson finie en jaune a hérité du suffixe « J » pour jaune et celle aux couleurs de la SNCF de la lettre « B » pour bleu.

Il fit tenir à Robert Goirand le rôle de Sherlock Holmes, le célèbre détective imaginé par Sir Conan Doyle pour la résolution de l’énigme du 25 JV. Le suffixe « V » accolé correspondait à la couleur verte.

Pourtant le Grands Moulins de Paris est fini en gris. Elémentaire mon cher Watson ! fit répondre Jean-Michel Roulet à Robert Goirand qui possédait le prototype récupéré lors de sa présentation au salon annuel du jouet sur le stand Meccano à Lyon.

Dinky Toys le fameux Ford ridelles bâché vert métallisé ...25 JV
Dinky Toys le fameux Ford ridelles bâché vert métallisé …25 JV

Ce prototype réalisé sur la base d’un type intermédiaire, crochet moulé et jantes à pneus, est fini en vert métallisé, couleur en vogue chez Meccano France durant cette période (Ford brasseur, Studebaker Commander puis Peugeot 203) , teinte qui, au dernier moment, ne fut pas retenue par la direction. Elle jugea qu’il était préférable de le repeindre en gris, quitte à laisser une référence à la signification erronée. Il aurait dû porter la référence 25 JG et non 25JV.

Ce passage m’a profondément marqué. Il a orienté mon intérêt de collectionneur pour tous ces Dinky Toys d’exception qui ont façonné la grande histoire. En cela, je poursuis aujourd’hui le travail de ces pionniers que furent Jean-Michel Roulet et Robert Goirand.

Ma première rencontre « physique » avec ce pilier de l’univers Dinky Toys se fera à la bourse de printemps à Villeurbanne. C’est une époque où l’on pouvait encore fumer dans les espaces publics. Je revois sa silhouette élancée , la pipe au coin des lèvres, son noeud papillon. Il dégageait une élégance toute britannique. C’est une époque où il était de bon ton de s’habiller avec soin pour les événements importants. Et les bourses aux jouets faisaient partie des moments très importants pour Robert Goirand qui consacra son existence aux jouets et plus particulièrement aux productions Meccano… mais pas que !

Sa fille Sandrine m’a raconté qu’il avait d’abord été passionné par les trains, surtout les Märklin.

Il aurait ainsi appris à lire avec le catalogue Märklin d’avant guerre qu’il promenait partout, à l’école comme à table.

Toute sa vie il a cherché à avoir l’intégralité de cette production d’avant 1940. Enfant, il n’avait pu voir ces jouets qu’à travers la vitrine du magasin : ils étaient financièrement inaccessibles pour sa famille. A la fin de sa vie son rêve était quasiment exaucé. Il ne lui manquait que la fameuse « crocodile » à l’échelle « O » !

Marklin "crocodile" HO
Marklin « crocodile » HO

J’ai eu l’occasion d’aller dans son appartement au début des années 90, alors que j’accompagnais Jean-Bernard Sarthe qui venait lui acheter son Citroën U23 dépanneuse de couleur verte. Nous venions de rentrer ce même modèle auprès de la famille Chaudey qui avait travaillé au bureau d’étude.

J’avais remarqué qu’il possédait une caractéristique particulière, un pavillon lisse que ne possédaient pas les modèles de série. Je me rappellerai toujours comment Robert Goirand avait été étonné de n’avoir pas relevé ce détail. J’ai ici gagné mes premiers galons face à cette légende de la collection.

Ce fut le début d’une relation basée sur un respect mutuel. Quand il réorientera sa collection dans le domaine ferroviaire, il n’oublia pas cette rencontre et me contacta pour me céder certaines de ses pièces, sachant qu’elles seraient mise en valeur.

je garderai longtemps en mémoire les anecdotes qu’il me contait avec malice, bien calé dans son fauteuil, lors de mes visites chez lui.

Je l’écoutais religieusement, assis sur le canapé. Il était si content qu’immanquablement, à la fin de nos conversations-transactions il me proposait toujours un « petit apéro ». Il faisait partie d’une génération qui scellait les pactes autour d’un verre.

Un jour, alors que nous évoquions le magasin du BB Lorrain, il me raconta comment, lors des repas familiaux il faisait répéter ses parents afin d’élargir leurs connaissances de l’univers Meccano.

Il s’agissait de préparer sérieusement les fameuses réunions du club du BB Lorrain et de rendre ses géniteurs incollables lors de leur participation aux jeux qui permettaient de gagner des cadeaux !

Il fallait tout connaître : la date d’anniversaire de Frank Hornby, le numéro de boîte de Meccano, le nom des rames célèbres chez Hornby ect…

Il me raconta également comment il avait aidé M. Goulon, le propriétaire de ce magasin, à poser les rubans adhésifs sur la fameuse 2cv fourgonnette grise. Il avait bien compris tout l’intérêt de nouer une solide relation avec cette institution. Etudiant aux beaux- arts, il avait réalisé deux frises à la gouache pour le magasin qui ont heureusement été conservées.

Cette bonne relation lui a ainsi ouvert les portes du stand Meccano où il a pu récupérer un certain nombre de pièces historiques, comme les Ford bâchés décrits plus haut ou ce Berliet GLR Marrel multibenne. Le prototype en bois, aux couleurs du Simca Cargo prouve bien que le multibenne était prévu avec une cabine Unic.

Comme l’explique Jean-Michel Roulet dans son livre, cette dernière n’étant pas prête pour le salon, le bureau d’étude bricola ce Berliet, récupéré par l’entremise de M Goulon après le salon.

Le dessinateur l’a sûrement eu en main avant le salon, à voir la façon dont il a traité l’illustration de ce 38 A dans le catalogue 1958 : pavillon arrondi et strié façon Berliet et face avant bricolée laissant clairement deviner le Berliet.

Vous imaginez la fierté pour lui de posséder cette pièce d’histoire.

Les années ont passé. Sa passion a résisté à toutes les épreuves. Je suis admiratif devant sa combativité pour obtenir jusqu’au bout les belles pièces qui pouvaient enrichir sa collection de trains. Cette passion nous a sans doute rapprochés.

Elle lui aura permis de traverser tous les coups durs de la vie. Il m’avait confié à quel point la perte de son épouse avait été une épreuve à laquelle il n’était pas préparé et comment la collection l’avait sauvé de la dépression.

Une dernière anecdote est révélatrice du personnage. Quand il m’a cédé sa série de modèles Poch il y a quelque temps, il m’a expliqué qu’il en gardait une : la 2cv furgoneta qu’il associait à beaucoup de souvenirs.

Lors d’un voyage en Espagne  en 1970 avec sa famille, il l’avait repérée dans la vitrine d’un grand magasin de jouets à Barcelone, « la casa del jugete » . C’était la première, et aussi la dernière fois, qu’il la voyait. Mais elle était en vitrine et les employés n’étaient pas prêts à démonter une partie de la présentation pour cette petite auto…il n’avait qu’à en prendre une autre sur le comptoir !

Il fit un esclandre dans le magasin pour l’obtenir, expliquant aux employés incrédules qu’elle était pour lui et pas pour un enfant.

Son épouse dut intervenir, et finalement, comme on achète un jouet pour calmer un enfant capricieux, passa à la caisse et paya l’auto.

Cette anecdote résume bien la vie de Robert Goirand. Il resta dans le monde de l’enfance toute sa vie. Ce ne fut pas toujours facile à comprendre pour son entourage. Mais je peux dire qu’il eut une existence hors du commun. Je suis fier qu’il m’ait confié ses modèles et ses souvenirs. Il m’appartient désormais d’en faire profiter les autres collectionneurs.

 

La pinte,Bruxelles et le tracteur.

La pinte, Bruxelles et le tracteur.

Ce titre surréaliste pourrait être celui d’un tableau de l’artiste belge René Magritte. Il n’en est rien. C’est encore une fois le Premier ministre anglais qui m’a inspiré, mais il est vrai que ce dernier verse parfois dans le surréalisme. Tout est parti de la lecture de la chronique d’Eric Albert dans le journal « Le Monde » du mercredi 12 janvier 2022.

Le journaliste rappelle que depuis trente ans le premier ministre anglais en exercice a toujours su très habilement déformer des faits relatifs à la question européenne.

Il cite dans le désordre la demande italienne de fabriquer des préservatifs plus petits, de raser le bâtiment actuel du parlement au profit d’une tour immense ou encore le souhait par les bureaucrates de Bruxelles d’imposer un test d’odeur au fumier…Boris Johnson a l’art de détourner les informations pour conforter les certitudes de son électorat euro-sceptique.

Dernièrement, afin de montrer tout l’intérêt du Brexit il a expliqué que les producteurs de Champagne allaient, pour le marché britannique, sortir des « règles européennes » en vigueur et re-fabriquer des bouteilles d’une contenance d’une pinte (0,57 litre).Celles qu’appréciait paraît-il,  Sir Winston Churchill : « assez pour deux au déjeuner et une au dîner ». Comme relève le journaliste: « l’information a fait le tour du monde : elle est drôle, simple, et le 23 décembre 2021, il ne se passait pas grand-chose d’autre. »

Il semble cependant que dans le monde viticole aucun producteur n’ait envisagé ce type de contenance.

Eric Albert conclut sa chronique par une interrogation  » Cinq ans de crise politique et institutionnelle pour en arriver là, cela en valait-il la peine ? »

Vous connaissez mon attachement à la Grande-Bretagne. Nos amis anglais ont une approche de l’univers de la collection de miniatures automobiles que j’apprécie, leurs manifestations sont conviviales et bien organisées, leur sens de l’humour et leur grande connaissance des modèles réduits m’ont toujours séduit.

J’ai là-bas beaucoup d’amis et nous évitons soigneusement de parler du Brexit, laissant cela aux grandes personnes.

EuroTunnel : en route pour la Grande -Bretagne !
EuroTunnel : en route pour la Grande -Bretagne !

Je me suis souvenu que dans les années cinquante, bien avant de rejoindre le marché commun en 1973, les fabricants anglais de miniatures automobiles avaient su faire preuve d’une véritable indépendance par rapport aux autres fabricants européens. 

Je m’explique. Nous avons vu précédemment (lire d’où venons nous?) que les premières reproductions de machines agricoles en jouets le furent à l’échelle du 1/32. Cette échelle correspondait à celle des figurines agricoles fabriquées par Britains en Grande-Bretagne, Quiralu en France ou Elastolin en Allemagne.

Cette échelle a été conservée partout en Europe, sauf en Grande-Bretagne ! Les deux grands fabricants, Dinky Toys et plus tard Corgi Toys, se sont affranchis de cette échelle pour adopter celle de leur gamme existante (1/43 pour les automobiles et le 1/50 pour les utilitaires).

Cette décision me paraît des plus logiques. Enfant j’ai personnellement dû me rabattre sur les miniatures agricoles de chez Corgi Toys. Solido n’avait d’yeux que pour les miniatures associées à la vitesse, tandis que Dinky Toys France et Norev ne juraient que par les berlines familiales.

Les fabricants français ont laissé le champ libre aux fabrications de jouets agricoles britanniques.

Vous connaissez tous la grande variété des produits proposés par Corgi Toys. La lecture des catalogues prouve l’intérêt de la firme de Swansea pour le monde agricole.

Elle veillera d’ailleurs à rajeunir constamment son offre. Le Massey- Ferguson type 65 sera remplacé par le célèbre et universel 165 . Les Fordson connaitront aussi, comme les vrais, des cures de rajeunissements au fil des ans. Corgi Toys a complété ses tracteurs avec une très belle gamme d’accessoires, preuve que la marque a pris ce marché au sérieux .

C’est pourtant Dinky Toys Liverpool qui fut le premier à produire des tracteurs miniatures à l’échelle du 1/43, et ce dès le début de l’aventure, en 1933. La raison est bien connue. Cette échelle correspondait à celle des trains Hornby.

Cependant, la firme de Liverpool n’affichera pas le volontarisme de son concurrent Corgi Toys. Elle peinera à offrir une offre élargie, renouvelée et modernisée. Il faudra attendre le milieu des années soixante pour voir de nouveaux tracteurs au catalogue, les David Brown.

Pourtant tout avait bien commencé pour Dinky Toys. La firme avait même dédié un numéro de code désignant la série agricole, le 27. Au début de l’aventure, elle attribuait à chacune de ses branches un numéro spécifique : berlines (40), cabriolets (38), voitures américaine (39) etc….

Chaque produit numéroté 27 était suivi d’un suffixe composé d’une lettre de l’alphabet. Le 27 A Massey Harris fut le plus célèbre. Il eut une vie très longue …trop longue même ! Imaginez que ce tracteur était encore en vente en 1970. Il avait été rebadgé « Massey Fergusson » du fait de la transformation de la société.

Les vénérables roues en zamac brut avec moyeux peints de couleur jaune avaient fait place à des jantes plastique/zamac montées sur pneus en caoutchouc. Le personnage était désormais en plastique comme le pot d’échappement.

Pour l’occasion, Liverpool avait créé un coffret et avait attelé à son tracteur une remorque de type rateau.  Une façon de se rappeler qu’il y a très longtemps elle avait proposé un superbe coffret cadeau contenant plusieurs miniatures de la gamme 27. Plus tard un autre coffret « supertoys » dans lequel le Massey Harris était attelé à une remorque de type rateau sera proposé.

Pour être le plus complet possible, n’oublions pas le très rare coffret conçu en France de type « importation » avec étiquette en langue française. De couleur rouge, dans l’esprit de ceux créés pour les camions laitiers Nestlé, Meccano France avait choisi l’épandeur pour être attelé au tracteur.  L’attache permettant à l’ensemble d’être fixé sur le socle manque très souvent.

Pour les amateurs de variantes de boîtes, l’intérieur du coffret peut être de couleur jaune ou de couleur rose, comme sur les camions laitiers d’ailleurs, et ce en fonction de la période de production. Les intérieurs roses ont précédé les jaunes.

Ce beau et symbolique tracteur a même fait un grand voyage en Afrique du Sud. Pour l’occasion il a reçu un marquage (Diesel Harris) et bien sûr une boîte spécifique. Ce dernier est très rare.

Le deuxième tracteur de la gamme 27 a été le Field Marshall. Il porte la référence 27 N. Lui aussi connaîtra une interminable carrière. Equipé de roues en zamac avec moyeux peintes de couleur argent, puis vert il finira comme le Massey Fergusson avec des jantes plastique/zamac et un personnage en plastique.

Un véhicule possède un charme certain et l’on aurait aimé d’ailleurs que Dinky Toys poursuive dans cette voie : le motocart. D’abord livré en boîte de 4 pièces, il recevra plus tard une boîte individuelle. Trois nuances de vert existent. Le vert foncé est rare comme le vert très pâle d’ailleurs.

Je passe sur les accessoires, ils figurent dans le coffret cadeau. Une mention spéciale, pour le plus rare à mes yeux, la triple tondeuse qui fut livrée en étui individuel. Ses couleurs chamarrées et sa conception ingénieuse marquent le sommet de gamme. On peut d’ailleurs l’atteler à la Land Rover, autre incontournable de la série 27. (voir le blog consacré à ce modèle)

Dans la gamme 27, figure enfin un break woody. On retrouve là toute la singularité britannique : le nom de l’auto reproduite ne figure pas, ni sur les boîtes de 6 pièces ni sur l’étui individuel ! Il s’agit en fait d’une Plymouth. Mais dans une logique ne pouvant appartenir qu’à une firme anglaise, les dirigeants de Meccano avaient décidé qu’il fallait un break pour compléter l’offre « agricole ».

Un break en finition « bois », donnant un côté rustique au modèle leur semblait la meilleure idée, au point de faire l’impasse sur le nom du constructeur !

Mes amis anglais, ne changez rien ! C’est comme cela que l’on vous apprécie. Il faut aussi savoir cultiver sa différence. Jusqu’à un certain point cependant !

Rendez-vous début septembre pour le prochain article.

 

 

Habits de noce.

Habits de noce.

Les photos de jeunes mariés, immortalisés en studio, ont une dimension particulière. Ces derniers comprennent que l’instant est important et que, durant des décennies, cette image servira de repère, pour le meilleur ou peut-être pour le pire.

Ils posent fièrement et n’ont pas peur de défier le temps et les événements à venir, comme les jeunes matelots qui se faisaient photographier avant leur départ pour Terre-Neuve, encore inconscients de ce qui les attendait.

J’ai retrouvé cette dimension dans les clichés de Yann Arthus-Bertrand. Une exposition à Nice était consacré à ce photographe-réalisateur.

Le personnage est atypique, sa vie pleine de rebondissements. Un brevet de pilote d’avion, l’amour de la nature, des animaux, et la passion de la photographie ont façonné l’artiste que nous connaissons. Nous avons tous en mémoire les images aériennes de la planète qu’il a publiées dans son livre « La terre vue du ciel » en 1992.

Les photos aériennes ne sont pas le seul centre d’intérêt du photographe. Il peut aussi se mettre au niveau de son sujet et immortaliser sur la pellicule la complicité entre l’homme et l’animal.

Il utilise pour ce travail un accessoire, une bâche tendue, qui lui sert de studio. Cet accessoire deviendra sa marque de fabrique, et dès lors il l’utilisera pour tous ses portraits. Pour l’occasion il travaille avec de la lumière artificielle et des assistants.

Ces clichés ne peuvent laisser indifférents. On perçoit la force de la relation entre l’homme et l’animal. On devine la fierté, mais aussi la tendresse. Pour l’occasion, comme on le fait pour toute photo importante, les protagonistes ont revêtu des vêtements qui les mettent à leur avantage et honorent leur compagnon. L’un et l’autre s’en trouvent magnifiés.

J’ai retenu six photos que le conservateur du musée de la photographie Charles Nègre à Nice a judicieusement accrochées. Ces clichés qui se mettent en valeur les uns les autres ont pour point commun le cheval et son cavalier.

L’artiste a choisi un cadre très large, qu’il a dénommé « bâche décalée » montrant l’installation de la fameuse bâche mais au milieu d’un décor naturel, immédiatement identifiable. Ainsi « Parouss » étalon karatchaï monté par Roussian Liskanitch est photographié au milieu d’un décor moscovite tandis que « Valur » étalon islandais monté par Linda Run est au centre d’un paysage volcanique.

On se sent tout petit au milieu de ces photos. L’adage qui dit que le cheval est la plus noble conquête de l’homme semble ici prendre tout son sens.

Mais pour assouvir sa soif de conquête, l’homme a trouvé un autre moyen, plus rapide, plus fiable pour se déplacer. Et petit à petit, le chemin de fer a supplanté le cheval.

Au point que l’homme a conçu des wagons pour le transporter, d’un point à un autre, comme une simple marchandise. Aurait-on imaginé au milieu du 19eme siècle ce type de transport ?

Le transport des chevaux apparaît comme une nécessité pour consolider la conquête de l’Ouest américain. Mais lors de la première guerre mondiale, il faudra aussi emmener rapidement les équipages sur les champs de bataille.

La paix revenue, les courses hippiques vont conduire l’homme à carrosser de beaux et luxueux camions. Les anglais se sont montrés experts dans cet art et cela s’est traduit dans les reproductions de camions miniatures.

Le camion Maudslay de chez Dinky Toys, luxueusement carrossé en transport de chevaux est somptueux. Il est le parfait exemple du soin que l’homme a pris pour concevoir des véhicules « confortables » pour déplacer les chevaux.

La première mouture du jouet est aux couleurs de la British Railways, l’équivalent de notre « SNCF » en Grande-Bretagne, prouvant bien toute l’importance du ferroviaire pour ce type de transport. Le camion ne vient qu’au bout de la chaîne du transport.

Ce formidable jouet a une histoire singulière. Le début de sa production coïncide avec la guerre de Corée (1950-1953). Quel rapport me direz-vous ? le gouvernement anglais impliqué dans les forces onusiennes va, temporairement, rationner l’utilisation du zamac dans l’industrie britannique.

C’est d’ailleurs pour cette raison que les Matchbox ont vu le jour : Lesney a utilisé astucieusement sa ration de matière première (le zamac) pour fabriquer des modèles au 1/75 au lieu des modèles au 1/43 ou au 1/20. Dinky Toys, lui, expérimentera l’aluminium.

Notre Maudslay servira avec le camion Studebaker citerne, et l’Avro Vulcan à l’expérimentation de l’aluminium afin de combler le manque de zamac. En main le camion est très léger. Un des inconvénients de l’aluminium est la mauvaise tenue de la peinture aux chocs car elle n’accroche pas aussi bien que sur le zamac.

Ce camion est aussi singulier pour une autre raison. Une version sera réalisée pour le marché américain, sans la mention « British Railways » qui n’évoque pas grand chose pour le petit américain mais avec celle d’ « Express Horse Van Hire Service ». Il conserve cependant sa belle robe bordeaux. Fait très rare chez Dinky Toys, une autre numérotation sera appliquée et une boîte spécifique sera créée avec la nouvelle numérotation. Cela se reproduira aussi pour la MG TF.

Ce camion marque le point culminant de la relation entre le mythique importateur américain Hudson Dobson et la firme de Liverpool.

Je m’explique. Après guerre en 1946-1947, à la reprise de l’ activité économique, une très grande partie de la production est envoyée outre-Atlantique. La Grande-Bretagne, comme l’Europe, est économiquement sinistrée. Il faut faire rentrer des devises.

Outre-Atlantique, les importateurs savaient déjà,  négocier durement et tordre le cou aux fabricants. L’importateur exigeait des conditions tellement avantageuses qu’il devenait difficile pour Dinky Toys de produire une boîte spéciale et une décoration spécifique tout en préservant son profit.

Bien plus tard, Dinky Toys relancera son modèle selon une technique qui semblait inusable, mais qui finira par trouver ses limites : une finition bicolore, certes du plus bel effet, gris perle et jaune pâle, et deux chevaux …en plastique ! le tour était joué.

Dinky Toys avait créé avant guerre, puis repris après, un petit coffret d’animaux de ferme avec deux superbes chevaux que l’enfant pouvait placer dans son Maudslay à la sortie du wagon à bestiaux Hornby.

Ce beau Maudslay fut si célèbre que d’ autres fabricants anglais, lui consacrèrent une reproduction. Tout d’abord Charbens. L’échelle est plus proche du 1/55. Il n’a certes pas l’élégance du Dinky Toys mais il est bien plus rare. Le trouver avec une boîte peut demander du temps. De plus, il souffre parfois de métal fatigue.

Morestone livrera également une version, mais à l’échelle du 1/87 qui n’est pas très fréquente.

Preuve que ce type de transport a toujours passionné nos amis anglais, Budgie proposera lui un Bedford TK équipé d’une carrosserie spécifique. Il se caractérise par sa capucine et ses portes latérales et arrière ouvrantes permettant à l’enfant de faire descendre les petits chevaux en plastique.

J’ai gardé pour la fin ce modèle de fabrication inconnue. Il est réduit au 1/50. C’est aussi une carrosserie spécifique qui ne pourra resservir à une autre déclinaison. On devine l’attachement du fabricant envers ce type de véhicule !

J’ai laissé de côté les tracteurs semi-remorque et leur remorque spécifique simulant de vrais « box ambulants ». Ils sont bien sûr de conception plus moderne, un peu trop moderne pour moi.

Citons Matchbox dans sa gamme au 1/60 qui proposa un beau Dodge aux couleurs de la fameuse course d’Ascot avec ses inévitables petits chevaux en plastique qui devaient bien souvent être l’élément déclencheur du choix de l’enfant.

Et enfin, le plus spectaculaire, le Bedford TK, tracteur de Corgi Toys aux couleurs du cirque Chipperfields qui sera ensuite décoré aux couleurs de « Newmarket racing stables ». Ce dernier sera ensuite remplacé par un Berliet. Mais nous approchons des années 80.