Archives de catégorie : souvenirs

les souvenirs de collectionneur de Vincent Espinasse

Berlin, 29 Juin 1914

Berlin, 29 Juin 1914

Notre voyage dans la capitale prussienne tire à sa fin. Bien que le séjour fut agréable, nous sommes heureux de reprendre le chemin de notre chère capitale. La chaleur est étouffante, et notre retour en train s’annonce éprouvant. Ce matin, nous avons appris dans le Berliner Zeitung, qu’un attentat avait été commis sur la personne de l’archiduc François Ferdinand . Cela a fait grand bruit ici. Les gens ne parlent que de cela.

Cela ne nous empêche pas de profiter de nos dernières heures dans la capitale pour vous écrire cette carte postale.

Bien à vous.

Carte postale de Berlin

Carte postale de Berlin

Berlin ,12 Juin 1912

Petit bonjour de Berlin

Après un éprouvant voyage en train, nous sommes bien arrivés. Nous profitons bien de la capitale Prussienne. Nous sommes allés hier soir au cabaret.
Tous les articles de mode de Paris sont disponibles dans les somptueux magasins Kadewe.
La circulation est aussi épouvantable que dans notre capitale. (voir la carte postale)

Bientôt le retour
Amicales salutations
Isabelle et Vincent

La bonne étoile de Bobigny – 1

Encore une fois, le départ de notre petite histoire est un document trouvé récemment aux Pays-Bas. C’est une photo et pas n’importe laquelle. Il s’agit d’une photo provenant de Bobigny et adressée à l’importateur batave des jouets Meccano.

Mercedes 190 SL Dinky Toys essais de couleur
Mercedes 190 SL Dinky Toys essais de couleur

Cette photo provient du photographe « Desboutin Navello » situé au 21 rue Henri-Monnier dans le 9ème arrondissement de Paris. Ce photographe devait travailler pour la firme de Bobigny à la fin des années cinquante. Il s’agit d’un cliché en noir et blanc représentant un dessin de la Mercedes 190sl.

Cette photo était certainement destinée au service publicité des importateurs afin de leur permettre de présenter les nouveautés de Bobigny. Ce cliché, dont il faut reconnaître la grande qualité, m’a incité à vous présenter quelques modèles.

La miniature numérotée 24 H puis renuméroté 526 a connu une existence paisible et ne présente pas de prime abord un intérêt majeur.

Lorsque Meccano propose cette réplique au 1/43 de la Mercedes 190sl, l’auto a déjà quatre années d’existence. La voiture, produite à Stuttgart, a été présentée en 1954.

Elle devait constituer une alternative pour les consommateurs qui ne pouvaient acheter une 300sl : plus petite de 30 cm, construite sur la base de la berline 180, son prix est de moitié inférieur à celui de la 300sl.

Au moment de la sortie de la miniature, le modèle n’est plus une nouveauté. Certes, cette auto aux lignes harmonieuses et intemporelles est digne de figurer au catalogue de Bobigny mais nous pouvons nous interroger sur les motifs qui ont finalement décidé Meccano à la reproduire, car il est peu probable que l’idée ait germé lors du lancement de l’auto.

Reprenons la gamme de la série 24. Depuis le début des années 50, Meccano France articule sa gamme automobile autour de deux axes. Le premier, qui fit sa force, est constitué des berlines françaises. Le second, qui nécessita l’autorisation de Liverpool, porte sur les autos américaines et repose sur une gamme bien équilibrée, avec une berline (Buick), deux coupés (Studebaker et Plymouth) et un cabriolet (Chrysler). Le cabriolet Simca 8 sport qui n’appartient à aucune des deux catégories constitue une exception.

Dès 1957, un sérieux concurrent se positionne sur le marché hexagonal puis, très rapidement à l’exportation. Il s’agit de Solido avec la série 100. Dès le départ, la firme d’Oulins fait la part belle aux bolides (voir fiche sur les Vanwall et celle sur les Cooper) et aux fringuant cabriolets : place à l’Alfa Romeo Giulietta à la Simca Océane et à la Renault Floride. Même la placide Peugeot 403 trouve place dans le catalogue grâce à sa version Cabriolet.

Solido ne pouvait laisser passer la Mercedes 190sl, d’autant que le caractère attractif des modèles est renforcé par les innovations techniques : suspension, aménagement intérieur, personnage, volant. Ce constat me conduit à penser que cette période marque pour Dinky Toys le début d’un lent déclin. Pour ne pas perdre pied face à Solido, Bobigny propose sa Mercedes 190sl, sortant ainsi de sa logique du début des années cinquante. Ce sera la première auto dont le constructeur n’est ni français ni américain. Certes la reproduction offerte par Bobigny est superbe. Mais si les lignes sont bien rendues, il faut avouer qu’avec son châssis en tôle, l’absence de vitrage, d’aménagement intérieur et de suspension, elle paraît bien dépassée.

C’est la raison pour laquelle cette auto est une étape plus importante qu’il n’y paraît.

Rendez-vous la semaine prochaine pour la suite

Profitez de la neige …

Profitez de la neige : le chasse-neige Polichinelle a plus d’un tour dans son sac !

C’est la météo hivernale qui m’a soufflé le sujet de notre chronique hebdomadaire. Quel bonheur d’avoir des saisons marquées et un hiver rigoureux qui nous fera apprécier le printemps. Je m’étonne qu’un peu de neige en hiver suscite autant d’émoi.

Polichinelle: bataillon de Jeep
Polichinelle: bataillon de Jeep

Le scénario cauchemardesque qu’ont vécu certains de nos compatriotes la semaine dernière me laisse perplexe. Pour tout dire, devant me rendre en Suisse j’étais moi aussi sur la route et j’ai découvert avec ahurissement le message délivré par les panneaux lumineux qui enjambent l’autoroute : « En hiver équipez-vous ». Et moi qui pensais naïvement qu’il revenait aux pouvoirs publics de s’équiper !

Ainsi, en hiver, ne jouez plus à l’automobiliste inconscient. Avant de monter en voiture, en plus de votre triangle orange et de votre gilet jaune, pensez à emmener de l’eau potable, une thermos, des couvertures un jeu de cartes, une pile de CD …

et, il se peut d’ailleurs que cela devienne prochainement obligatoire, mettez dans votre coffre une lame à fixer devant votre véhicule.

Les fabricants ont devant eux un nouveau créneau, ils pourront laisser libre cours à leur imagination. C’est un peu ce que le fabricant Polichinelle a voulu faire en adaptant cette lame sur la Willys. Il se peut que quelques petits cantons aient tenté d’adopter la Willys aux travaux de déneigement. Je ne me souviens pas en avoir déjà croisé, ni même en avoir vu en photo.

Cette version chasse-neige que je vous présente, j’ai mis plus de 25 ans à la trouver. Bien que Polichinelle soit une marque française, j’ai dû acquérir tout un lot de Willys aux USA pour obtenir cette précieuse version. Sa couleur blanche peut paraître étrange pour un chasse-neige, pour lequel il est plus fréquemment recouru à des couleurs vives. Mais il est vrai que Polichinelle produisait facilement des versions blanches, notamment les versions Tour de France.

Je suis un enfant des années soixante, et, comme tous les aventuriers en herbe de la génération Daktari, j’étais très attiré par les véhicules tout terrain et les Land Rover! J’habitais Compiègne et je me souviens encore de ma première et unique expérience du tout terrain. Avec un copain de classe, nous avions emprunté le Vélosolex de ma mère, et, adolescents en mal de sensations fortes, nous étions partis dans la forêt, à la recherche d’un terrain présentant suffisamment de dénivellations. Nous dûmes changer plusieurs fois de parcours, notre valeureuse monture refusant de franchir certaines dénivellations, malgré force coups de pédales ! Aidé d’un chronomètre, (déjà l’esprit de compétition) le jeu consistait à aller le plus vite possible en slalomant autour des racines des arbres. Peut-être aurions-nous été plus vite en vélo, mais le bruit du féroce moteur faisait toute la différence !

J’ai toujours eu un regard bienveillant pour ces autos que sont la Jeep et la Land Rover. Paradoxalement, je n’ai jamais ressenti le besoin de rouler dans les véritables voitures… les miniatures me comblent et ne présentent pas les inconvénients de leur modèle. La Jeep est un des véhicules qui a connu le plus de reproductions. Celle qui est proposée par Polichinelle est assez typique. Ce n’est pas le matériau qui est original, de la tôle pliée et agrafée puis peinte, mais l’emploi qui en a été fait. Polichinelle maîtrisait parfaitement la technique de pliage, car les formes rendues sont excellentes et surtout le fabricant n’a pas hésité à reproduire nombre de détails, comme les pare-chocs, le pare-brise et les sièges. Les roues sont monobloc en buis (brut ou peint). Certaines versions recevront un petit moteur astucieusement réalisé puisqu’il est très plat et n’altère en aucune manière la forme de la carrosserie de la miniature. Ce moteur se retrouve également sur le Berliet diesel, version plateau brasseur, de chez Gulliver…

Y aurait-il un lien entre ces deux firmes qui ont choisi un nom de héros enfantin ?

Compression cubiste Banania

La vie du collectionneur est cadencée d’acquisitions programmées. Les achats s’inscrivent dans une suite logique de complètement d’une série. Cette vie deviendrait vite monotone s’il n’y avait des cassures de rythme : des rencontres inattendues où la logique cède le pas au plaisir de se laisser surprendre par une découverte inattendue.

C’est précisément ce que j’ai ressenti à la découverte de ces deux boîtes Banania. Elles n’ont aucune valeur particulière, mais j’ai été conquis. Qu’est-ce qui fait qu’on se laisse séduire de manière irrationnelle ?

Planche à découper Banania
Planche à découper Banania

L’effet de surprise d’abord : je ne connaissais pas ces objets et je ne me souviens pas, enfant, avoir vu ces découpages. Certes, j’en ai rencontré d’autres. Je garde un souvenir plaisant de ces planches. Comme elles étaient belles ces autos à plat. Le dessin montrant l’objet fini faisait naître dans mes yeux des étoiles. Je les imaginais déjà avec mes Solido et Norev. Quel dommage que mes talents dans le maniement des ciseaux aient été si limités ! C’est surtout les roues qui me posaient problème… Quelle idée de la part de l’artiste ayant mis à plat ces autos que d’avoir créé des rondeurs parfaites. Quelle exigence pour les bricoleurs en herbe : même pas un méplat ! Moi, du méplat, j’en créais à foison… je peux même parler de crevaison lente.

Bref, ces autos auxquelles j’avais consacré tant d’énergie, me laissaient souvent déçu, au milieu d’un champ de pinces à linge, les doigts gluants de colle, et finissaient leur carrière à peine commencée à la poubelle !

Confus d’avoir gâché le bel objet, je me promettais alors de m’appliquer davantage la fois suivante. Les progrès furent lents ! Il faut peut-être atteindre la maturité pour réaliser avec sérieux les choses les plus futiles. Mes dernières réalisations sont dignes de figurer en vitrine. Lorsque je trouve les planches en double, j’en conserve une intacte et je découpe l’autre. Mais les deux boîtes présentées ce jour, il n’est pas question que j’y touche. Je ne peux pas me limiter à voir dans ces objets un simple découpage à effectuer, un travail manuel en devenir

L’histoire de ces planches me laisse un peu mélancolique ; le marchand qui me les a vendues m’a raconté qu’il les avait trouvées, bien rangées à plat au fond d’un meuble de cuisine lors d’un débarras. Les enfants, certainement turbulents, à qui on avait promis ces découpages en échange d’un petit moment de sagesse n’ont-ils jamais su les mériter ? Est-ce une grand mère qui a vainement attendu que ces petits enfants lui rendent visite ? Faisait-il tellement beau que tout le monde préférait les jeux de plein air aux travaux de découpage-collage… Tant pis pour les enfants, tant mieux pour moi qui peux vous présenter aujourd’hui ces petits trésors. Il n’y a que mes petits enfants, si j’en ai un jour, qui auront le droit de se faire les ciseaux dessus !

PS : je joins deux autres exemples de découpages réussis. L’ensemble avec la moto « AA » provient des céréales Weetabix, alors que le Peugeot J7 vante une compagnie de transport communale Ville de Caen.