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Dialogue de Buicks … suite

Les deux autres sont signées Wittrock. Elles sont en plastique. La plus grande, de couleur bordeaux est au 1/32 et la rouge au 1/38 environ. Les boîtes sont évocatrices. Celle de la plus petite est clairement destinée au marché américain « The New Dollar Dream ».

Buick chocolat Kemmel
Buick chocolat Kemmel

L’annotation n’appelle pas de commentaires. La finition est simple, voire simpliste par rapport à celle du grand modèle et montre clairement que le fabricant a dû tirer sur la qualité afin d’abaisser son coût de fabrication et d’être compétitif sur le marché américain. Bien qu’en plastique, celle de couleur bordeaux est peinte et bénéficie d’une finition au pochoir pour toutes les parties de couleur argent. Le résultat est superbe. Ces deux modèles peuvent cohabiter sans souci.

Voilà donc deux ensembles constitués. Les plus observateurs d’entre vous auront remarqué un étrange détail commun sur ces quatre miniatures. Outre le fait qu’elles sont censées reproduire une auto similaire, de millésime différent : toutes sont équipées de jantes siglées « W », pour Wittrock ! Il y a donc un lien entres ces productions. Il est possible que Stentorp qui ne travaillait que le zamac ait sous-traité chez son concurrent les jantes pour ses modèles. Mais les autres modèles Stentorp en ma possession (Lancia, Studebaker) ont des jantes en zamac.

Il y a donc sûrement eu un lien plus étroit entre ces firmes, d’où l’intérêt de les faire dialoguer entre elles ! On peut enfin s’interroger sur le besoin de reproduire la même auto, même si la Buick fut dans les années cinquante une référence esthétique.

Cocorico dans la Pampa

L’histoire de la course automobile a commencé par l’organisation d’épreuves de ville à ville. Comme les bolides représentaient un réel danger pour les autochtones massés le long des chemins de terre battue, il a été décidé, en Grande-Bretagne de construire le premier autodrome, à Brooklands.

Renault Dauphine IKA
Renault Dauphine IKA

En Amérique du Sud toutefois, la tradition des courses dans la campagne perdurera. Il faut dire que les grands espaces s’y prêtent et que peu d’autodromes avaient été construits sur ce continent. Il fallait bien trouver un moyen pour satisfaire une jeunesse éprise de vitesse. Une des courses les plus impressionnantes a été créée en 1950. Dénommée Carrera Panamericana, elle traversait le Mexique, en empruntant la partie mexicaine de la fameuse route panaméricaine qui relie l’ensemble des Amériques, de l’Alaska à l’Argentine. Cette épreuve permit la confrontation fort intéressante d’autos américaines, surpuissantes mais aux châssis peu adaptés à ce type d’utilisation, aux bolides européens de conception moderne. Les plus grandes marques de voitures de sport prirent très vite conscience de l’importance de cette épreuve. Mercedes, Porsche, Lancia, Ferrari mais également de petites marques comme Gordini inscrivirent au départ de l’épreuve des prototypes. Afin de financer le coût du voyage, les européens eurent recours à la publicité. Il est assez fascinant de contempler les Porsche 550 parées de publicités « Telefunken » ou les Gordini arborant des autocollants « Dubonnet » Il faudra attendre la fin des années soixante (1968) pour voir apparaître en Europe des publicités sur les autos de course. En 1950, la première édition de la Panamericana fut remportée par une Oldsmobile. À son volant se tenait Hershel McGriff qui domina ainsi une pléiade de pilotes mexicains et américains. La première édition n’était ouverte qu’aux autos de série. A partir de 1951, l’épreuve a été ouverte aux prototypes. Les autos américaines furent alors surclassées. Ferrari remporta l’épreuve à deux reprises, Mercedes et Lancia la remportèrent une fois. La catastrophe des 24 heures du Mans de 1955 impressionna le Gouvernement mexicain qui craignit qu’un pareil drame se produise. Il décida d’annuler l’édition 1955. L’épreuve ne se remit pas de cette annulation de 1955 et ne sera plus jamais organisée.

Les argentins, passionnés par la compétition automobile, avaient eux aussi des épreuves sur routes ouvertes. Elles jouiront d’un succès populaire incroyable. Le grand Juan-Manuel Fangio se fera remarquer à travers ses succès dans la Pampa.

L’épreuve la plus célèbre était la «Gran Premio Standard ». Elle attisait la convoitise de tous les constructeurs automobiles implantés en Argentine.

En toute logique, les fabricants de miniatures locaux vont s’attacher à reproduire ces bolides afin de les offrir au jeune public désireux de recréer dans les cours d’école les duels fratricides de leurs champions. Dès le lancement de sa marque Buby, M. Mahler va proposer une déclinaison en version compétition de quasiment toutes les miniatures de son catalogue. Il proposera même parfois plusieurs versions par auto, suivant en cela l’actualité sportive. En regardant les photos des autos en course, on constate, avec plaisir la conformité des décorations proposées par Buby.

Ce jour, je vous présente la Renault Dauphine IKA, lauréate dans sa catégorie (classe B cylindrée limitée à 850cc) lors de l’édition 1962. Cette édition marquait l’entrée en lice pour la première fois de l’écurie officielle Renault IKA. Les Dauphine signèrent les deux premières places, Perkins devançant Bohnen. La Dauphine aura une très belle carrière en Argentine. Elle s’imposera dans sa catégorie jusqu’en 1967, date de la dernière édition. Buby s’est contenté d’ajouter les décorations. Il faut dire que les autos avaient dans la réalité un aspect proche des autos de série.

La deuxième auto présentée ce jour est beaucoup moins connue. Elle ne figure même pas dans le livre « Buby La historia en fotos » de notre compatriote, Lucien C.L. Brousse, qui était en poste au comptoir Air France à Buenos Aires. Il s’agit d’une rare Renault 6 Ika compétition. Il est surprenant d’associer le terme compétition à l’image de la Renault 6. Si j’ai trouvé la trace d’une Renault 4L officielle dans cette épreuve, je n’en ai pas de la Renault 6. Cela s’explique par le fait que la dernière édition a eu lieu en 1967. Buby a reproduit un véhicule ayant participé à une autre épreuve locale et s’est contenté d’ajouter une décoration et la mention « carrera » sur la boîte.

Merci Monsieur Le Comte Giansanti !

L’histoire tient souvent à peu de choses. Nous allons voir aujourd’hui comment sans la volonté d’un homme, le comte Giansanti de Lausanne, l’histoire de Mercury n’aurait jamais pris cette dimension.

Mercury
Berne : au fond les fameux taxis jaune et rouge

Remontons le temps jusqu’à la création de la Mercury. Nous sommes après la guerre. La Societa Esercizio, fonderie de Ms Attilio Clemente et Antonio Cravero produit des pièces détachées d’automobile pour les firmes Solex, Lancia et Fiat. Elle souhaite diversifier sa production. En effet, à la fin de la guerre, de nombreux contrats qu’avait cette usine d’injection de pièces en zamac ont été dénoncés. La diversification est la condition de la survie de l’entreprise. Deux voies sont choisies par les associés : les accessoires de cuisine et les jouets : c’est ainsi qu’est créée la Mercury. La dénomination est habile. Tout en gardant une sonorité italienne, elle nomme en anglais le dieu Mercure qui veille notamment sur le commerce. A partir de 1950, Mercury abandonne la branche des accessoires de cuisine pour se consacrer pleinement aux jouets.

C’est à ce moment que l’histoire bascule. En 1949, le comte Giansanti de Lausanne se rapproche de la Mercury. Il pressent pour la gamme naissante un avenir en Suisse. Il devient donc l’importateur.

Mercury
Mercury pour le marché suisse

Cet homme très actif propose sa marchandise à la fameuse chaîne de magasins suisses « Franz Carl Weber ». Comme il l’expliquera plus tard, il savait que la partie ne serait pas facile. Il fallut sans doute tout le charme du comte pour dérider l’austère M. Franz Carl Weber lors de leur rencontre à Zürich. Le comte dut être convaincant, car à sa grande surprise, le dirigeant passa une importante commande. Un peu pris de court, le comte Giansanti s’engagea personnellement et de manière un peu inconsidérée à ce que les magasins Weber soient livrés rapidement. Or il n’avait pas consulté l’usine. Quand il revint à Turin le précieux contrat en poche, ce fut la douche froide. Mercury avait ralenti sa production de jouets, accaparée par la production de pièces automobiles. Tout aussi regrettable, Mercury venait de livrer une importante quantité de jouets dans la région de Cunéo et n’avait plus de stock. Qu’a cela ne tienne, soucieux d’honorer sa parole, le comte Giansanti reprit le volant de sa voiture et s’en alla racheter la livraison. L’usine turinoise réussit tant bien que mal à fournir la partie complémentaire !

Cet incident amena les dirigeants de la fonderie à prendre conscience du potentiel de leurs automobiles miniatures. A partir de ce moment, on considéra l’activité comme sérieuse et susceptible de générer des bénéfices.

Il faut dire que la direction avait caché à ses clients de l’industrie automobile cette activité de fabrication de jouets de peur qu’elle ne donne une image négative de l’entreprise.

Pour illustrer ces propos, voici deux séries de Mercury qui ont été réalisées pour le marché suisse et distribuées en majeure partie chez Franz Carl Weber. Nous sommes au milieu des années soixante.

Mercury
Mercury : deux variantes de combinaison de couleur

Pour beaucoup de collectionneurs de Mercury, la Fiat 1100 dite « taxi de Berne » est le modèle le plus désirable. Elle a été produite en très petite quantité. La fabrication est quasiment artisanale. La production a dû être livrée en plusieurs fois, ce qui, au vu du texte précédent n’a rien d’extraordinaire ! En effet, deux calandres différentes ont été utilisées. Bien que Mercury n’ait jamais dénommé ce modèle « taxi de Berne », j’ai pu valider l’exactitude de la décoration à partir de photos prises à Berne et reproduites dans un ouvrage suisse relatif au code de la route.

Mercury
Mercury : VW PTT avec grand décalque

L’autre modèle est un grand classique du jouet. Tout fabricant ayant à son catalogue une Volkswagen 1200 a réalisé une version des postes suisses. Mercury n’échappe pas à la règle. Deux décalcomanies différentes existent, circonstance qui confirme que la production a été étalée sur plusieurs années. Pour les amateurs, signalons qu’il existe une nuance de jaune.

Nous verrons, que le comte Giansanti va aller encore plus loin dans sa relation avec Mercury. Je conseille vivement la lecture de l’excellent ouvrage « Mercury » de chez Edizioni Libreria Cortina Torino.