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La règle du jeu

La  règle du jeu

C’est le titre d’un des plus fameux films de Jean Renoir. La règle du jeu est un  film est sorti en 1939.  En relatant les vestiges du passé d’une classe sociale en fin de règne il annonce les sombres heures à venir. Il est un peu à l’image de nos compétiteurs automobiles tricolores. Les années 20 et le passé glorieux des Bugatti type 35 et des Delage de Grand Prix sont bien loin.

Comment lutter contre les autos allemandes et italiennes, soutenues par les gouvernements nationalistes de ces pays qui voient dans les joutes automobile un moyen de propagande efficace? (voir le blog sur les fléches d’argent).

De plus, et sans chauvinisme aucun, le règlement  favorise clairement les auto équipées de compresseur. En effet, les équivalences entre moteur atmosphérique de 4,5L de cylindrés et ceux avec compresseurs de 3L sont erronées.

Pour faire simple, les moteurs avec compresseurs  développaient environ le double de puissance des moteurs atmosphériques. On constate d’ailleurs que le règlement en vigueur pour le championnat du monde de formule 1 juste après la guerre a corrigé cela. Désormais les autos avec compresseur ne peuvent dépasser les 1,5litre de cylindrée au lieu des 3 litres avant-guerre. Sans commentaires.

 

Mais il ne faut pas non plus enlever leur mérite aux ingénieurs allemands qui ont su mettre sur roues des autos très efficaces. Les moyens financiers n’expliquent pas tout. Hans Nibel pour Mercedes et Ferdinand Porsche pour Auto Union vont concevoir des autos qui dès 1934 enchaînent les succès. Les français vont réagir à cette domination de manière détournée. Cela va se faire dans deux directions, avec à chaque fois l’ACF (Automobile Club de France) à la manœuvre.

 

Tout d’abord, ne pouvant rivaliser directement sur les Grands Prix, c’est un règlement pour les modèles « sport » biplace,  sur mesure, pour les constructeurs français, qui est  créé pour les courses d’endurance. (voir le blog sur la Bugatti au Mans). Cela permettra de voir triompher des autos bleues aux 24 heures du Mans en 1937, 1938 et 1939.  Précisons que la course a été annulée en 1936 pour cause de front populaire.

L’autre plan de soutien consiste à distribuer une forte somme d’argent lors d’une compétition unique réservée à des autos fabriquées obligatoirement en France. l’ACF dota d’un prix d’un million de Francs une compétition nommée bien à propos « Grand prix du Million ».

Pour emporter l’épreuve, il fallait battre à Montlhéry, avant le 31 août 1937, la moyenne réalisée par l’Alfa Romeo de Chiron en  1935 lors du Grand Prix de l’ACF sur les deux cents premiers kilomètres de la course qui se disputait sur 500 kilomètres.

La course avait pourtant été remportée par Caracciola sur Mercedes tandis que Chiron abandonnait. Cela entraîne aujourd’hui encore une certaine confusion. Craignait-on que nos autos bleues qui devaient battre le record ne puissent tenir la distance et la moyenne sur 500 km ? On peut légitimement se poser la question.

Cette compétition a, avouons-le, un côté désuet. Elle permettra aux Français de ne pas perdre la face devant leur public. Mais ce type de course sans confrontation directe avec l’adversaire est bien un aveu d’impuissance.

Le record sera battu in extrémis par Delahaye avec sa 145. Cette auto répondait aux deux règlements, « Sport » et « Grand Prix ». Elle était donc biplace, ce qui n’était pas interdit en Grand Prix. Elle était polyvalente.  Elle battra le record de justesse (146,654 Km/h pour 146,508Km/h pour  l’Alfa Romeo). Deux autres constructeurs s’étaient inscrits : S.E.F.A.C et Bugatti. Nous reviendrons sur la Bugatti 4,5L sans compresseur qui fut l’unique concurrente,  la S.E.F.A.C  n’étant pas prête  à temps.

 

On imagine bien le retentissement national provoqué par ce record. Pour la presse, les voitures françaises étaient donc capables de rivaliser avec les allemandes.

C’est bien sûr un résultat en trompe-l’œil. Il n’empêche qu’en France, JRD se sentit investi d’une mission patriotique et offrit aux enfants une reproduction miniature de la voiture qui avait terrassé la terrible Mercedes.

La même année, le fabricant de Montreuil avait déjà immortalisé l’autre grande victoire française, celle du tank 57 Bugatti aux 24 heures du Mans.

La Delahaye 145 de chez JRD est réduite à une échelle proche du 1/43. Elle est moulée en plastiline.  Elle est fort ressemblante à l’originale qui  possédait une face avant  massive et une carrosserie qui s’effilait vers l’arrière. L’auto était facilement identifiable.  Elle est impressionnante.  Pour l’époque JRD est allé assez loin, dans le détail en reproduisant même les rivets de capot. Elle est mieux finie que son tank Bugatti ce qui laisse supposer que chez JRD on avait vu l’auto de près.

Elle est dûment estampillée JRD sur son châssis. Elle est équipée de pneus crampons de couleur noire  ou de pneus « Michelin ». Sachant que je préparais un article sur cette Delahaye, M. Lafond amateur de belles autos m’a confié un ouvrage  publié en 1981 : « Delahaye sport et prestige » écrit par François Jolly. On y apprend que lors du Grand Prix du Million l’auto était en fait équipée de pneus « Dunlop », très performants et endurants, remplaçant les « Goodrich-Colombes ».

 

L’année suivante, en 1938, notre belle Delahaye 145 participera aux 24 heures du Mans,  équipée d’ailes et bien sûr de phares. Elle réussira même à s’imposer une fois face aux Mercedes en Grand Prix en début de saison, à Pau, le 10 avril 1938.

Le succès tint surtout au fait que la Delahaye était moins gourmande que les Mercedes qui perdirent la course dans les stands, au ravitaillement.

Le reste de la saison fut une suite de quatre victoires Mercedes, les deux derniers Grands Prix étant remportés par Auto Union.

Le gamin parisien pouvait alors parader fièrement à l’école avec ses petits bolides français et croiser le fer dans la cour de récréation avec le petit camarade à qui on avait offert les monoplaces Märklin. Ces dernières étaient importées d’Allemagne en France et vendues à Paris. Je possède un catalogue  Märklin de cette période en langue française, estampillé d’un magasin parisien. Dans la cour de récréation, notre  Delahaye  n’avait peur de personne.

 

Mise à mort

Mise à mort

« L’attelage entra par le pont tournant des Tuileries. Dehors, le peuple avait choisi le silence pour marquer son mépris et sa colère. Un vaste silence. La lourde berline allemande roulait, funèbre ». Ces phrases sont extraites de l’émission de Karine Le Bail diffusée sur France Musique le dimanche 2 juillet 2017 et consacrée  au silence.

Elle décrivait ainsi le retour de Louis XVI à Paris après sa fuite avortée à Varennes, parlait d’excommunication du silence,  de mise à mort cérémonielle de la monarchie.

Le retour du roi aurait pu s’accompagner de vociférations et  de cris de colère. C’est tout le contraire qui se produisit.

 

Je n’ai pu m’empêcher de faire un parallèle avec une autre mise à mort, celle des miniatures  automobiles qui étaient apparues dans les années vingt et qui reproduisaient des véhicules réalistes.

Le silence résultant du roulement des roues en plastique montées sur des axes aiguilles a révolutionné le paysage des miniatures automobiles. Revenons en arrière. En 1967, Mattel, un des leaders mondiaux de la fabrication de jouets lance une branche dénommée « Hot Wheels ». Les autos sont reproduites à une échelle inférieure au 1/43, elles sont environ au 1/70. Mais ce n’est pas là que réside l’innovation. La première résulte du choix des véhicules. Nous sommes en pleine révolution culturelle et idéologique. Les premières miniatures reproduisent des autos sportives américaines, que l’on appelle familièrement « muscle car » : Corvette et Mustang figurent au catalogue. Au milieu des années soixante, la Californie voit l’apparition des beatniks et de leurs drôles de véhicules qui cherchent à se démarquer de l’idéologie bien pensante. Hot Wheels s’affirme alors comme une entreprise californienne décomplexée et lance une série de miniatures reproduisant des véhicules provocants.

Le paysage routier est bouleversé :  jeunes et moins jeunes transforment leurs motos en chopper, les autos d’avant-guerre en « hot rod » ou les décorent avec des fleurs et les messages pacifiques des Kombi Volkswagen. Hot Wheels va surfer sur cette transformation du parc automobile californien.

La seconde innovation c’est l’utilisation de ces fameux axes aiguilles et l’emploi de roues monobloc en plastique qui assurent aux miniatures un roulement sans friction et des vitesses de déplacement jamais vues. Le succès est immédiat. Très bien implantées aux Etats-Unis, Matchbox et Corgi Toys observent la chute de leurs ventes et comprennent  très rapidement le changement qui s’opère.  Elles réagissent plus vite que les autres firmes européennes, moins ancrées au pays de l’oncle Sam. Elles adapteront dans un premier temps leurs modèles aux axes aiguilles. Le mouvement est irréversible. Il va s’accélérer. Une petite analyse montre que les fabricants de jouets, outre l’obligation de s’adapter à la demande, ont tout intérêt à aller dans ce type de fabrication. Les miniatures sont plus économiques à fabriquer. Finie la course aux gadgets. Finis les modèles avec toutes les parties ouvrantes, finies les innovations coûteuses comme la direction au volant et l’éclairage intérieur. Les fabricants  ont  également tout intérêt à opter pour une standardisation des roues.

On peut même dire que c’est de manière inespérée  qu’ils voient le marché se transformer.  Les gamins des années soixante-dix  réclament des couleurs métallisées criardes, des roues en plastique monobloc, des chromes exubérants, des moteurs simplistes et apparents. Bref,  même  dans le domaine de la miniature automobile nous assistons  à une vraie révolution culturelle ! Pour ma part je n’ai jamais réussi à m’adapter ! Cela reste même du domaine de l’incompréhension. Comment trouver du charme à ces objets ? Encore aujourd’hui, je regarde cela avec étonnement.

Comment le mauvais goût a-t-il pu s’imposer à ce point alors que les fabricants nous régalaient de miniatures de plus en plus attrayantes. Fallait-il faire table rase du passé ?  Casser ce que l’on avait adoré ?

Certaines firmes vont résister et refuser la facilité. Encore une fois, Solido peut sortir grandi de cet épisode. Ici, la méfiance qu’avait M. De Vazeilles pour le marché américain a peut-être joué. Bref, en 1969, Solido continue son bonhomme de chemin, imperturbable. La Porsche 908 L produite cette année-là est donc équipée de jantes en zamac, fidèles à celle de l’auto, et de pneus rapportés. On note la présence de coussinets  en nylon  au niveau des moyeux des roues pour parfaire le roulement …Les portes ouvrantes (ingénieux système d’ouverture) et l’aileron stabilisateur sont les deux « plus » que Solido  offre à ses petits clients.

Fin 1968,  Solido avait déjà pensé à reproduire cette auto. La décoration prévue sur l’affichette ne fait aucun doute. Elle est aussi listée  ainsi sur le catalogue .  C’est la version vue  à Montlhéry et vainqueur de ces mêmes 1000 km de Paris 1968, numéro 12, avec Stommelen et Hermann.

Puis fut prévue la version des 24 heures du Mans 1968. Le catalogue Solido l’atteste.  Cette version sortira en fin de production sous la marque  Top 43 dans les années 1980.

Mais finalement l’arrivée spectaculaire des 24 Heures du Mans 1969 a dû précipiter le choix de cette version . L’auto y sera battue sur le fil par la Ford GT40 de Jacky Ickx. Aujourd’hui encore la course continue de marquer les esprits.(voir la video de l’arrivée des 24 heures du mans 1969) .

C’est aussi dans cette course qu’est apparue la nouvelle Porsche, la 917 qui a laissé son empreinte dans l’histoire (voir le blog consacré à la Porsche 917 Dinky Toys).

Jean de Vazeilles a dû regretter d’avoir trop attendu : la 908 est sortie un peu tard, alors que l’avenir appartenait désormais à la 917 ! Solido proposera la  version courte qui remporta l’édition  1970.  La firme d’Ivry -la-Bataille  aura été plus réactive et proposera une reproduction de toute beauté. Du très grand Solido. Deux superbes Porsche en peu de temps.

La décoration de la 908L (« L » pour Lang Heck – longue queue) est exacte. Elle doit être finalisée à l’aide d’une planche complémentaire.

La miniature finira sa carrière, assez brève, au Brésil. Elle ne semble pas avoir été produite chez Dalia en Espagne dans une décoration différente de celle vue en France.

Solido a résisté à la déferlante roues rapides tandis que Matchbox, Corgi Toys puis Politoys, Mebetoys et même Märklin   succombaient à cette mode basée sur la simplification. Et Dinky Toys ? Les Anglais sont déjà très mal en point, ils vont suivre bien sûr.

Et Dinky Toys France ? Ne manquez pas le blog de la semaine prochaine pour savoir ce qui s’est passé à Bobigny. Une surprise, de taille vous attend. Vous pouvez en attendant  revoir le blog sur la Ferrari 312 P  de chez Dinky Toys France ,miniature contemporaine à la Porsche 908 du jour.

(voir article  suivant  et la surprise de Bobigny)

Bluebird à Stockholm

Bluebird à Stockholm

A l’heure actuelle les records de vitesse ne sont plus d’actualité. Mais dans les années 30, ils avaient autant d’aura que les courses automobiles. Cette course aux records était très prisée par les anglo-saxons et se transforma vite en une compétition Anglais contre Américains.

Nous sommes au début des années 30. Les fabricants de jouets vont tout de suite s’intéresser à ce sujet. Il faut dire que ces engins aux lignes futuristes sont impressionnants. Avant guerre, Dinky Toys inscrira plus de voitures de records à son catalogue que de voitures course. Sir Malcom Campbell vient avec son bluebird de battre le record de vitesse, en 1933.

C’est cette version de la Bluebird qu’Eneret, petit fabricant Suédois choisit de reproduire.

La bluebird mesure 11 cm ; il est injecté dans un alliage très chargé en plomb. Les formes sont simplifiées, voir caricaturées. La gravure Eneret apparaît dans un petit rectangle rehaussé. Ces miniatures étaient disponibles peintes de couleurs vives (rouge, bleu,..) ou chromés. Le peu d’ouvrages traitant de cette marque mentionne l’existence d’un seul modèle !

A la réception d’un catalogue d’une petite salle des ventes scandinave, j’ai été attiré par la présence d’un lot décrivant des miniatures d’avant guerre provenant des firmes Birk et Micro. Après avoir pris des renseignements téléphoniques afin d’obtenir une description sommaire de la composition du lot, j’ai décidé de miser et j’ai emporté l’enchère. Ma surprise fut grande à la réception du colis, avec la présence d’un second modèle Eneret, un Bluebird mais de 1935 mesurant 12cm. Il possède les mêmes caractéristiques que son ainé.

Je n’en ai jamais revu un autre. Connaissez- vous un troisième modèle ?

A l’est du Danube

A l’est du Danube
Je n’ai jamais vraiment été accroché par les aventures de Michel Vaillant qui nous donnent une vision plutôt fantaisiste de la compétition automobile. Le premier album qu’il m’a été donné de lire date de 1969 et s’intitule « Le fantôme des 24 heures ». Il met en scène une écurie mongole qui s’attaque à la classique mancelle avec des méthodes pour le moins discutables. L’auteur de la bande dessinée, Jean Graton, l’a affublée du nom de « Team Gengis Khan ». C’était déjà un mauvais présage.

Tout un programme… scolaire, car, dès l’école primaire, les petits français apprennent les méfaits d’Attila et de sa bande de Huns. Il faut dire que ce dernier a sévi jusqu’aux portes de Paris et n’a pas laissé de très bons souvenirs sur son chemin. Quant à Gengis Khan, considéré par les historiens comme le fondateur de la nation mongole, aucun empereur n’a possédé de royaume plus étendu que le sien et ses innombrables conquêtes lui ont fait endosser le costume d’un tyran sanguinaire.


Pour Jean Graton, guerre froide oblige, le péril venait manifestement de l’est car déjà, dans sa deuxième aventure intitulée « Le pilote sans visage », notre « véritable ami, fort, courageux et loyal » – dixit la quatrième de couverture des albums – avait dû affronter les Zvezda d’une écurie russe pas loyale, elle, pour deux roubles !.

A l’opposé de ces mœurs barbares, l’entrée en lice des concurrents venus d’Extrême-Orient et notamment des japonais (amorcée dans la réalité par l’arrivée de Honda en formule 1 en 1964, puis poursuivie par Mazda et ses moteurs rotatifs aux 24 heures de Spa en 1969 et les victoires de Datsun en Trans Am en 1971 aux Etats-Unis) se fait dans un parfait respect des règles de la chevalerie et du fair-play : il suffit de lire « L’honneur du samouraï », dixième aventure de notre héros, parue en 1966, pour en être convaincu !On sait que pour  se développer au delà de leurs frontières et conquérir de nouveaux marchés, les constructeurs automobiles doivent affronter leurs adversaires sur leur propre terrain. L’histoire est un éternel recommencement. Hier, il s’agissait des constructeurs japonais, aujourd’hui se sont les coréens et les indiens qui débarquent dans le sport automobile. Déjà des pilotes chinois s’aventurent sur les circuits européens dans l’attente des produits des constructeurs chinois.

 

Comme le Japon, la Tchécoslovaquie est un pays riche en constructeurs automobiles. Ce pays cultivé a vu naître de grands ingénieurs qui ont mis leurs talents au service de firmes aussi typées que Tatra, Skoda, Jawa ou Praga. L’histoire mouvementée du pays, avant et après la seconde guerre mondiale, va bloquer le développement de ces marques automobiles sur le marché occidental. La Tchécoslovaquie est le dernier pays à passer dans le bloc de l’Est, la démocratie est abolie en 1948. Un constat s’impose. Jusqu’en 1950, Skoda développe des autos destinées aux rallyes et aux courses d’endurance afin de promouvoir ses autos auprès des occidentaux. Juste après la seconde guerre mondiale les autos tchèques participent au Rallye de Monte Carlo, au Rallye des tulipes et aux 24 heures de Spa (1948). Une barquette Skoda participera même aux 24 heures du Mans en 1950. Mais la porte du rideau de fer va finir par se refermer.  (voir les images extraordinaires du GP de Tchécoslovaquie  à Brno de 1950 avec Talbot,Maserati et autres   Gordini.  https://youtu.be/L3N3qwRMQO4 )

Finis les rêves d’exportation et de conquête de l’Ouest. Il en est de même avec les sports automobiles. Le pays vit replié sur lui-même. Très peu de documents de l’époque nous sont parvenus. En fait, les constructeurs tchèques Tatra et Skoda vont s’organiser pour fabriquer des autos de course et participer à des compétitions locales.

Un Grand Prix de Tchécoslovaquie existe pourtant depuis le milieu des années 20. Les Mercedes y ont brillé durant les années trente. L’épreuve était inscrite au calendrier international mais disparaitra après guerre.

C’est la découverte d’une miniature reproduisant une Tatra de course chez Smer qui m’a ouvert les yeux. J’ai été ému en pensant aux enfants tchèques qui devaient jouer avec ces petits bolides reproduisant la Tatra T607. Elle devait les faire rêver. Cette auto était équipée du moteur de la Tatra 603 refroidi par air. La monoplace est bien pataude. Elle n’en a que plus de charme. Aucune confrontation n’aura jamais lieu avec les monoplaces occidentales ( voir  le GP de Brno 1954 avec la Tatra  T607 en action…attention, accrochez vous  cela décoiffe ! Un constat s’impose : il n’y a plus d’autos étrangères .https://youtu.be/azfHfzHxIkc)

Plus tard, j’ai mis la main sur une autre fabrication, en aluminium mais à une échelle supérieure. Cette maquette semble être un objet publicitaire pour la firme tchèque Tatra.

Je me suis alors rappelé que j’avais d’autres monoplaces venant de Tchécoslovaquie. Le fabriquant tchèque Schovanek monoplace avec skieur a proposé dans les années trente une élégante monoplace réalisée en bois. C’est une fabrication de grande qualité, comme tous les jouets proposés par cette firme. L’auto reproduit une monoplace générique. Elle existe en deux tailles (1/50 et 1/43 environ) avec ou sans mécanisme à clef.

Dernièrement j’ai eu l’occasion de trouver un très étrange petit diorama d’origine. Sur un socle en carton granité figurant de la neige une monoplace tracte un skieur ! On sait qu’à l’Est il existait des compétitions de motos sur piste de glace. Mais je n’ai pas pu trouver d’autres documents sur cette scénette des plus étrange. Elle est, je pense, en rapport avec un exploit local.

A pied à cheval et en voiture

A pied à cheval et en voiture
Petit, j’étais fasciné par le catalogue Rivarossi de mon père. Mon père a commencé à s’intéresser au modélisme ferroviaire bien avant de collectionner les miniatures automobiles. Le catalogue, dans un format dit « à italienne », présentait sa gamme de manière luxueuse. La page que je préférais, celle qui me faisait rêver, c’était celle qui présentait des wagons plats chargés de véhicules divers, notamment un camion Fiat et sa remorque. Je trouvais en ces reproductions le jouet idéal, ou plutôt deux jouets en un seul : le wagon et le camion que l’on devait pouvoir détacher de son support. Plus tard, j’ai compris que cet attrait pour ce type de jouet révélait ma future passion pour le modélisme automobile.

 

Bien avant Rivarossi, d’autres marques avaient déjà présenté ce type d’attelage, dont L.R (Le Rapide). Cette firme de jouets avait été créée par Louis Roussy vers 1927. Sa gamme de locomotives et matériels ferroviaires eut un certain succès. Parmi les wagons proposés aux enfants, figure un modèle qui a retenu toute mon attention. C’est un simple wagon à ridelles transportant une magnifique auto de course.

A ma connaissance, c’est sûrement un des premiers exemples de wagon ferroviaire transportant ce type de marchandise. Märklin reprendra l’idée dix ans plus tard en équipant ses wagons au choix de monoplaces, de berlines, de camions et bien sûr, c’est l’époque qui voulait cela, d’engins militaires.

Le modèle qui repose dans son wagon est sans conteste une Bugatti. La calandre en fer à cheval est facilement identifiable. La partie arrière, en pente douce l’est beaucoup moins. C’est le Type 36 de 1925 qui paraît correspondre au modèle reproduit par L.R, ce qui est assez logique au regard de l’année de reproduction du jouet. L’auto est moulée dans une sorte de composition annonçant la plastiline. L.R a fait graver sous le châssis la mention « résistex ». On peut imaginer qu’il s’agit du nom commercial déposé du matériau utilisé par ce  fabricant, à moins que ce dernier ait confié à un sous-traitant le soin de réaliser cette auto. Il est également possible qu’une gamme complémentaire ait été prévue. Une chose est sûre, deux modèles ont été créés. En effet, la version qui est transportée sur le wagon ne possède pas de conducteur. C’est logique, on imagine bien que le conducteur d’une telle auto est installé confortablement dans un wagon de première classe. Une autre version, avec un chauffeur moulé de manière monobloc avec la carrosserie existe. Il s’agit bien d’un autre moule et l’on comprend que l’auto a également été vendue sans son wagon.

Les jantes de type artillerie, injectées en zamac brut et équipées de pneus blancs sont du plus bel effet. Certains exemplaires sont décorés d’un numéro de course peint au pochoir sur la partie arrière.

On appréciera le mode de fixation des essieux. Pour chaque axe une rainure a été exécutée sur le châssis. Je ne connais pas d’autres exemples équivalents.

Il a dû être inspiré au prototypiste par le travail des peintres en bâtiment. C’est une bande de calicot collée puis peinte, comme celles que l’on applique sur les murs fissurés et que l’on nomme souvent « cache misère

Ces miniatures sont des raretés, peu d’exemplaires nous sont parvenus.

Cette Bugatti, symbole de vitesse, à l’arrêt, posée sur son wagon, a un côté désarmant.

Certains amateurs ricaneront. On sait que la fiabilité n’était pas le point fort de ces « pur sang ». N’oublions pas que pendant très longtemps, jusque dans les années soixante, pour se rendre au circuit, les voitures de course empruntaient la route et roulaient au milieu des autres automobilistes.

Parfois, avec une Bugatti le voyage se terminait à pied, puis ensuite en voiture de chemin de fer ! Je vous laisse donc écouter la chanson de Bourvil dont je ne me lasse pas : « A pied, à cheval et en voiture.https://youtu.be/KoPE_-5kkw4

Voir l’article  précédent sur l’autre Bugatti réalisée par le fabricant CD.