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Des Bluebird made in England

Bluebird Kellog's céréales plastique 1/100 environ
Bluebird Kellog’s céréales plastique 1/100 environ

Pour rester dans la logique de la chronique de la semaine dernière, nous allons faire le tour des reproductions de cet impressionnant engin, la Bluebird, à travers les fabrications anglaises. C’est un des véhicules de record les plus reproduits. En France, AR et JRD produisirent chacun une reproduction. Même Märklin rendra hommage à cette auto, c’est dire l’aura dont il bénéficie. Il est bien possible cependant que les formes relativement simples du modèle aient favorisé les reproductions.

Plusieurs fabricants anglais ont inscrit ce joli modèle à leurs catalogues. La reproduction la plus fidèle est sans aucun doute celle de Britains. Seul ce dernier a su reproduire le poste de pilotage décalé sur la droite, avec, dans son sillage, la dérive verticale située elle aussi à droite. Pour l’occasion le fabricant anglais réalisera un jouet remarquablet. Il est composé de deux parties : un superbe châssis détaillé, injecté en plomb et une carrosserie amovible

En soulevant cette dernière, l’heureux enfant pouvait admirer l’impressionnant bloc moteur. La réalisation de Britains est splendide. Pourtant, Britains diffusera une version simplifiée, moulée en seule partie et dépourvue du châssis détaillé.

Nous appellerons cela une version économique. Comme cela est souvent observé, cette version économique ne rencontrera aucun succès. Cette dernière est très rare. Jamais deux sans trois, une autre version produite par Britains a vu le jour, également très rare. Si les deux exemplaires décrits précédemment étaient reproduits à une échelle proche du 1/50, cette version promotionnelle produite par Britains pour Cadbury est monobloc et réduite à l’échelle du 1/65ème environ. Charbens proposera aussi sa déclinaison, au 1/65ème environ. Injectée en plomb, elle est peu fréquente, même en Grande-Bretagne. Richtoys mettra sur le marché une version en rubber, peinte dans une finition bicolore. La finition est assez approximative et la qualité de reproduction médiocre. Enfin, signalons une reproduction au 1/100ème environ qui aurait été distribuée dans les céréales Kellog’s. Elle est moulée en plastique.

Un Paris Nice de record

Pour la jeune génération, celle de mes enfants, la liaison Paris Nice, c’est l’avion. Une heure suffit pour quitter les brumes parisiennes et respirer dès la fin de l’hiver le parfum du mimosa en fleurs.

Dans les années trente, époque où le jeu de société présenté fut créé, les voyages en avion n’étaient démocratisés et c’est par l’auto ou le train que quelques privilégiés pouvaient relier la capitale à la Côte-d’Azur.

les deux versions du Coffret Paris Nice
les deux versions du Coffret Paris Nice

Le choix du commanditaire de ce coffret est donc justifié. La nationale 7 qui traversait la France et permettait de rejoindre la Méditerranée évoquait l’aventure des vacances. Charles Trenet en a fait une merveilleuse chanson. C’est dans ce contexte qu’un fabricant proposa ce jouet. Vous pouvez constater que les deux coffrets sont constitués d’autos de compétition, et même de record.

Dans le premier coffret, c’est une MG qui a inspiré la firme AR. C’est un modèle équivalent à celui reproduit par Dinky Toys sous la référence 23A/220. Cette auto était une habituée du circuit de Brookland. Dans le second coffret c’est une reproduction du fameux Golden Arrow de record de 1929. La voiture est impressionnante par ses dimensions. Elle est ici reproduite par Aludo. Comme cela arrive fréquemment, un petit industriel à l’origine d’un jeu de société a fait appel à deux fabricants, AR et Aludo, pour garnir ses coffrets.

Il est certain que la taille des objets est entrée en ligne de compte dans le coût de revient. Relier les deux villes avec de tels engins relève de l’exploit !

On imagine la chose plus aisée à bord d’un coupé sportif ou d’une puissante berline. Je peux cependant avancer une explication au fait que le fabricant ait garni ses coffrets d’autos de record. Pour cela il faut remonter à l’année 1930, précisément au 13 mars 1930. Ce jour là, deux intrépides sujets de Sa Majesté, Mrs Barnato et Bourne firent un pari audacieux : celui d’être plus rapides que le train bleu qui reliait Nice à Calais. Ce luxueux train emportait les privilégiés sur la Côte d’Azur. Ils partirent de Nice, là où ils se trouvaient. Après une traversée épique de la France à bord de leur Bentley Speed Six carrossée par J. Mulliner, ils ont gagné leur pari à quelques minutes près. La légende raconte que la somme remportée pour avoir gagné le pari ne couvrit pas l’amende qui leur fut infligée par la police.

Cet exploit fit beaucoup de bruit durant de longues années et  donne au coffret Paris Nice son sens et son intitulé. Il est évident que pour des raisons commerciales, le fabricant a choisi de faire figurer Paris dont l’évocation est plus glamour que Calais, qui est une ville aux charmes méconnus (attention mon épouse est calaisienne). Ces coffrets au charme désuet sont les témoins d’une époque insouciante.

Nous reviendrons prochainement sur le Golden Arrow. Cet engin mérite bien que l’on s’y intéresse.

L’après-midi du 15 Février 1935 Auto Union

La grande majorité des clichés pris lors de ce record montre l’auto, avec des ailes arrière dépourvues de carénage. Sur les autres clichés, les sabots d’ailes derrière les roues avant ont également disparu. Durant une autre tentative, ce sont les flasques de roues qui sont retirés, qui sont retirées, laissant apparaître les jantes à rayons.

Micro Auto Union
Micro Auto Union

On peut imaginer les hypothèses suivantes :

  •  le poids de ces appendices aérodynamiques réduisait à néant le gain de performance engendré par l’aérodynamisme poussé ;
  • l’existence de nuisances aérodynamiques, ces carénages perturbant le bon écoulement de l’air.

Si les ingénieurs disposaient déjà à cette époque de souffleries aérodynamiques, on était loin des outils de simulation d’aujourd’hui . Après enquête, il semble bien que c’est sans son carénage recouvrant les roues arrière que l’auto battra son record.

Un détail vient étayer cette histoire. Un très beau cliché de la voiture a été pris, après la tentative à Zwickau, dans l’atelier. L’auto est dépourvue de ses carénages au-dessus des ailes arrière. Elle a été préparée pour la photo : les pneus ont été cirés afin d’optimiser le cliché, comme les engins militaires pour un défilé …

C’est bien dans cette configuration que les fabricants allemand la reproduiront. Il est bien sûr possible de rétorquer qu’il est plus facile pour un industriel de reproduire le jouet sans le carénage des roues arrière.

Ce sera la deuxième auto de la série 5521 Märklin. Son étui porte de ce fait le numéro 5521/2. On retrouve sur le côté gauche un numéro 2 gravé. Il est encore assez facile de se procurer cette auto. Une version promotionnelle a été créée pour la firme Kolben, équipementier automobile. Pour l’occasion elle a reçu un châssis gravé au nom de la société. On apprend ainsi que Kolben a fourni des accessoires aux équipes de course Mercedes et Auto Union, notamment des freins.

Il existe bien entendu son pendant, reproduisant sa concurrente la W25 (la numéro 5521/1 chez Märklin). Curieusement l’Auto Union est plus rare que la Mercedes, déjà très délicate à se procurer. Deux autres détails concernant ces miniatures. Elles ont perdu leurs numéros gravés sur les flancs. Et elles sont de moindre densité que leurs homologues estampillées Märklin : l’alliage est différent. Je n’ai jamais vu de Kolben souffrant de problèmes de métal.

Un autre fabricant allemand, la firme Kibri a également immortalisé cette version. C’est indubitablement une copie de la Märklin, mais l’arrière a été tronqué. Il a été coupé net. Cela lui confère une allure assez étrange. Le modèle semble être en aluminium. Il est équipé de roues monobloc lisses ou avec crampons. Outre la version classique argent, il existe au moins une version bleue. D’autres teintes ont certainement été produites. Un fabricant japonais tentera l’aventure en reproduisant lui aussi cette version. D’une taille équivalente à celle des Märklin (10,5 cm), outre sa pimpante couleur verte, elle doit son originalité au matériau retenu. Elle est en tôle lithographiée. Le fabricant a même reproduit les sorties d’échappement latérales.

Un mot enfin sur un modèle qui relève plus de l’inspiration que de la fidèle reproduction. Je veux parler du modèle produit par Micro au Danemark. Il est moulé en plomb, c’est une fabrication, rudimentaire. Il mesure 9,8 cm. Les axes sont de vulgaires clous, ce qui se faisait assez souvent chez les tout petits fabricants avant-guerre.

Enfin, voici un dernier modèle dont l’histoire est assez tortueuse. C’est la version « matinale », équipée de ses carénages, que Renwal, firme américaine bien connue choisit de reproduire. Comme souvent aux États-Unis, ce fabricant la déclinera en plusieurs échelles (trois) et même en plusieurs matériaux. Comme en Europe, elle rencontrera un beau succès commercial, et suscite encore de nos jours des commentaires admiratifs. Aux Etats-Unis, peu de gens savent reconnaître l’Auto Union. Ils ont plutôt la vision d’une auto de course futuriste. La version intermédiaire mesure 11 cm (environ 1/43ème). Elle est moulée en plastique de qualité, brillant.

L’inscription sur le pavillon est sans équivoque « speed king » !

Renwal en a produit une au 1/25ème (absente des clichés) et une autre au 1/55 ème environ (8,2 cm). Cette dernière est en zamac, peinte de couleur crème. Les Renwal ne furent certainement distribuées qu’aux Etats-Unis.

Après la guerre, un grand nombre de troupes américaines restèrent en Europe, notamment à Berlin. Certain soldats furent rejoints par leurs famille. C’est ainsi que l’on peut expliquer cette copie, produite par Hels en RDA. Le fabricant est-allemand a dû lui aussi être fasciné par cette auto, avant la guerre, et s’est servi du modèle américain pour proposer cette version. La dimension est identique. Pour masquer la qualité inférieure du plastique, Hels peindra ses reproductions. Le modèle existe en plusieurs couleurs, notamment en gris et en rouge. Le nom de la firme est gravé. Les roues sont lisses au contraire du modèle Renwal. Quelques autres détails différencient les deux modèles. Enfin, un autre fabricant s’inspirera du modèle Renwal. Il est Suédois. Il n’est pas étonnant qu’un fabricant scandinave ait été inspiré par des jouets américains. Le modèle n’est pas estampillé mais il est probable qu’il s’agisse de la firme Kabo, spécialiste suédois des jouets en plastique. Une inscription « 1950 » nous renseigne sur sa probable datation. Contrairement au modèle produit par Hels, il bénéficie d’un plastique de qualité. Ce modèle est très peu fréquent.

Railton à Stockholm

Railton à Stockholm

Après le Bluebird de chez Eneret, voici une autre fabrication Suédoise. Elle est le fruit de la firme Kabo qui devait être spécialisée dans la fabrication d’objets divers, en plastique.

Railton Racer
Railton Racer

Nous pouvons comparer cette firme avec Vapé ou Bourbon en France, firmes polyvalentes dans l’industrie du plastique. Nous possédons un très beau Peugeot D3A fourgon « Normalms » conçu chez ce fabricant pour une chaine de magasins de Stockholm spécialisés dans les fruits et légumes.

Le commanditaire de ces autos de record est la société Mobil qui fut partenaire publicitaire de ce projet. L’auto avait battu le record du monde de vitesse avant la guerre. Juste après la guerre, au début des années 50, à Stockholm, au salon de l’auto, Mobil expose sur son stand l’impressionnante auto. Pour l’occasion, Mobil fait réaliser une reproduction à l’échelle du 1/50 (19,5cm de long).

Le châssis est gravé en Suédois « KopiaVärldens snabbaste bil 640km/tim ».. ce qui doit pouvoir se traduire par « reproduction de l’auto la plus rapide du monde avec une vitesse de 640 km/h ».

Les ultimes versions ne portent plus cette mention de même que le nom du fabricant. On peut facilement imaginer que la production de cette miniature s’est poursuivie après le salon. Les pneumatiques sont monobloc en plastique de couleur noire, et on peut y lire la mention Dunlop.

Les inscriptions sur la carrosserie sont en relief, surlignées en rouge. La pégase, logo de la firme Mobil apparait à l’arrière du véhicule, alors que dans la réalité, elle était placée de part et d’autre de la face avant du capot. La reproduction de la signature de John Cobb, le valeureux et intrépide pilote, est gravée derrière le cockpit. Le choix des couleurs retenues par Kabo est curieux et ne correspond pas à la couleur réelle de l’auto ! Un correspondant Suédois m’a affirmé qu’elle existait bien en argent..mais je ne l’ai jamais eu en main…est-elle d’origine ? ou un enfant soucieux d’avoir une reproduction fidèle ne l’a t’il pas repeinte ?

Nous possédons une version ivoire (la plus fréquente) mais aussi une verte, une jaune, et une bleue toutes improbables au regard de la réalité ! Nous sommes en droit de nous poser la question du choix des couleurs. Je ne vois qu’une réponse : nous sommes donc après le deuxième conflit mondial. Dans le public, l’image des voitures de course de couleur argent renvoie tout de suite aux flèches d’argent du régime nazi. Pour l’histoire, la couleur des autos de course représentant l’Allemagne était le blanc.

Au milieu des années 30 Mercedes lança sur les pistes des autos surpuissantes, mais lourdes. Sur le circuit du Nürburgring, lors d’essais, les ingénieurs s’aperçurent qu’en enlevant la peinture de la carrosserie, ils gagnaient de nombreux kilo. Les autos remportèrent de nombreux succès et furent surnommées « flèches d’argent » en raison de leur couleur aluminium. Même les Auto union troquèrent leur peinture blanche pour une robe argent. Dans l’imagerie populaire elles furent un des symboles de la puissance de l’Allemagne lors de cette période troublée et c’est sûrement pour cette raison que le fabricant de jouets ne voulut pas reprendre à son compte cette couleur.

Par contre, il est intéressant de constater que Mercedes garda la teinte aluminium lors de son retour en compétition en 1952, voulant perpétuer une couleur symbole de victoire.