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J’ai fait un rêve.

J’ai fait un rêve.

C’est une petite photo couleur, en bas de page. Curieusement, cette photo n’a aucun lien avec le sujet de la rubrique principale intitulée « made in Argentina » et consacrée à la firme Buby.

Plus précisément, elle porte sur une nouvelle gamme de miniatures reproduisant les autos s’étant illustrées dans les rallyes argentins et les courses de la « Temporada ». Nous sommes en avril 1971. Il s’agit du mensuel « L’automobile » qui consacrait régulièrement quelques pages au modélisme automobile.

Le regretté Christian Moity, auteur de la rubrique en question, explique que le premier article qu’il a consacré à la marque Buby, dans ce même magazine lui a valu un important courrier de lecteurs mécontents de n’avoir pu se procurer les modèles photographiés.

Il justifie son nouvel article en expliquant que sa fonction de journaliste est d’informer et non pas de passer sous silence l’existence de certaines productions, quitte à frustrer les amateurs.

En effet, au moment de la publication de l’article, ces Buby ne sont pas disponibles à la vente sur notre marché national pour cause d’absence d’importateur. (voir l’article consacré à ce sujet).

Nous sommes exactement dans ce cas de figure pour les deux modèles de l’ intrigante photo couleur décrite plus haut.

« Faisons un rêve » .

Voilà comment Christian Moity introduit le second sujet relatif aux deux miniatures de sa rubrique modélisme. Le journaliste explique qu’un groupe de quatre amateurs anglais a décidé de reproduire au 1/43 les autos ayant marqué l’histoire du sport automobile. La marque portera le nom d’un des leurs : John Day.

Ce qu’il y a de nouveau, c’est que ces autos sont destinées uniquement aux collectionneurs. Christian Moity n’a d’ailleurs pas relevé dans son compte rendu ce point fondamental.

Pour résumer, disons qu’à l’aube des années soixante, le monde de la collection des miniatures automobiles est composé en grande majorité d’amateurs qui se contentent de rassembler les modèles du commerce. Ils sont une minorité à s’aventurer dans des transformations, voire mieux, des créations.

Pour les pionniers de la collection, l’objectif est de recréer chez soi un musée imaginaire retraçant l’histoire de l’automobile.

J’aime beaucoup le début de la préface signée du Comte Hadelin. de Liedekerke-Beaufort dans le Premier Répertoire  Mondial des Automobiles Miniatures , édité pour l’exposition de 1959 du C.I.A.M . Ce dernier était le président de l’ Automobile Club de France.

« Toutes les voitures du monde »

« Nous avons tous rêvé d’un musée de l’Automobile assez grand pour contenir un modèle de tous les véhicules qui ont circulé dans le monde depuis que l’ingéniosité des hommes a su mettre un moteur sur des roues. Ce Musée idéal n’existera jamais car il faudrait une ville entière pour l’abriter, si même on pouvait encore retrouver une voiture de toutes les marques et un exemple de toutes les carrosseries suscitées par tant de modes et destinées à de si multiples usages.

Mais ce rêve se réalise sous une autre forme et bientôt nous pourrons dire en effet que toutes les voitures construites depuis les inventions de Cugnot et de Beau de Rochas seront sous nos yeux.

C’est le modèle réduit qui nous offre cette possibilité, la seule, d’embrasser d’un seul regard ce gigantesque panorama, et de rassembler dans un même lieu tout le parc automobile mondial. »

Tout est dit dans ces quelques lignes sur la motivation des amateurs : recréer chez soi l’histoire de l’automobile.

A dix ans d’écart, le comte H. de Liedekerke-Beaufort et Christian Moity ont utilisé le même mot : rêve.

Or, en 1960, les productions industrielles ne suffisent pas à combler ce rêve. Alors, comment faire ? Voilà bien la question que se sont posée les amateurs d’automobile soucieux de constituer un musée de miniatures et nous verrons la semaine prochaine les solutions qu’ils ont trouvées.

En attendant, et pour illustrer cette première partie j’ai choisi de vous faire partager la solution de Raymond Daffaure à cette équation. En 1960, l’histoire de la course automobile passionne les amateurs.

Connaissez-vous beaucoup d’autos de courses d’avant 1914 ? C’est loin me direz-vous, plus d’un siècle en effet !

Serge Pozzoli, rédacteur en chef du fameux « Album du fanatique de l’automobile » est un des premiers à avoir consacré des articles à ce type d’autos dans sa rubrique « Les tiroirs de l’inconnu ».

Ce sont des hommes comme lui qui ont permis à Raymond Daffaure de nous laisser d’émouvants témoignages et de satisfaire ses clients qui lui en faisaient le demande. Les modèles sont approximatifs, mais quel intérêt historique !

A suivre.

 

 

Trois petits tours et puis s’en va …

Le salon Rétromobile a beaucoup évolué au fil des années. Il a perdu une partie de la magie et de la bonne humeur qui y régnaient. Pourtant, de temps en temps, il peut encore favoriser de belles rencontres.

Champion Lola T70
Champion Lola T70

La scène se passe au déballage, le mardi précédant l’ouverture au public. Au hasard des allées, je rencontre Jean Liatti. Je connais ce dernier depuis 1976, date à laquelle il est entré en qualité de maquettiste à la Boutique Auto Moto. A l’époque, pour convaincre les éventuels acheteurs de kits de modèles réduits, il fallait pouvoir présenter le produit fini. Grâce à son talent, Jean Liatti pouvait transformer un modeste kit John Day ou Mini racing en une superbe miniature dont chacun aurait aimé être propriétaire. Il formait avec son compère Jean-Claude Poussin un duo haut en couleur. La productivité n’était pas leur souci principal. Tant et si bien que les patrons de l’époque durent dissoudre le duo d’artistes. L’ami Jean créa sa marque, Nestor. C’est ainsi que ses amis l’avaient surnommé, trouvant quelque ressemblance entre sa silhouette et celle du valet de chambre du capitaine Haddock. Sa production porta sur les débuts de la marque Chaparral. Il livra ainsi aux connaisseurs de superbes miniatures fidèles et détaillées. La quantité produite était faible et la demande importante. Cela demeura du travail d’artiste. Ainsi, sa rencontre dans les allées me fit grand plaisir et je m’empressai de prendre de ses nouvelles.

C’est alors qu’une autre de mes connaissances fit son apparition. Il s’agissait de Francis Reste. Ancien journaliste auto à l’Equipe, ce dernier me fut présenté, il y a longtemps par Jean-Marc Teissedre, journaliste à Auto Hebdo, co-auteur chaque année du livre sur la dernière édition des 24 Heures du Mans, et, coïncidence, ancien patron de Jean Liatti. Outre son attachement pour la course automobile ce dernier, comme Francis Reste a une passion pour les poids lourds anciens et leur reproduction en miniature.

Après les présentations d’usage, la conversation dévia sur la Ferrari 330P4 qui venait juste d’arriver au salon Rétromobile et que Francis Reste s’apprêtait à aller voir. Chacun y allait de son anecdote savoureuse. Jean Liatti, en connaisseur, commença à énumérer les numéros de châssis des P4 fabriquées alors que Francis Reste et moi-même retracions la saison 1967 de cette auto.

Maquette en bois au 1/3
Maquette en bois au 1/3

Jean Liatti, déjà supporter de la marque Texane, s’était installé devant le stand de la Chaparral pour le départ. C’était sa première expérience de spectateur d’une course automobile, il avait 11 ans. Il en a d’abord gardé un souvenir sonore : le grand silence deux minutes avant le départ, quand le speaker de l’époque, Jean-Charles Laurens égrénait le compte à rebours, puis le bruit lourd du baisser de drapeau, immédiatement suivi du claquement des bottines des pilotes s’élançant sur l’asphalte vers leur auto. Enfin, le bruit assourdissant des moteurs. S’agissant du spectacle, notre ami mit plus d’une heure à comprendre comment regarder les bolides. A l’époque, il n’y avait pas le ralentisseur au début de la ligne droite des stands. Lancées dans cette ligne droite depuis Maison Blanche, les autos arrivaient à une telle vitesse qu’il était impossible de les fixer du regard. En fait, l’emplacement devant les stands permettait surtout d’admirer le départ et les arrêts au stand , qui sont assez rares juste après le départ. Francis Reste était lui aussi enfant. Pour qu’il puisse jouir confortablement du spectacle, son père l’avait installé sur un petit escabeau, près du restaurant « le Welcome », à l’intérieur de la courbe Dunlop. Le départ de la vrombissante Ford MK2 bleu pâle Nr57 suivie de la Ferrari 412P de Pedro Rodriguez parties en tête le déstabilisèrent et il tomba de son piédestal. Il est vrai que le départ de toute compétition automobile est un moment à part, et celui des 24 heures du Mans sûrement l’un des plus impressionnants.

Pour illustrer cette histoire, j’ai choisi une auto que mon ami Jean n’aura pas eu le loisir de voir passer correctement. En effet après trois tours, John Surtees rangera sur le bas-côté sa belle Lola T70 coupé, à moteur Aston Martin.

Cette maquette en bois au 1/3 est celle qui a servi, après avoir été réduite au pantographe, à réaliser le moule du modèle produit par Champion. C’est une pièce unique. Je reviendrai plus tard sur la marque Champion afin de vous présenter d’autres projets ou modèles ayant servi à la réalisation de ces miniatures qui connurent un immense succès commercial dans les années soixante-dix. M. Jean-Paul Juge qui gérait la conception et la fabrication des miniatures Champion fut un des pionniers sinon le pionnier de la déclinaison de variantes de livrées de voitures de course.

Admirez la petite vignette en haut à gauche. Il proposera 6 variantes exactes de ce beau coupé.

Modelisme Porsche 908

Quand le Modélisme fit son apparition – 2

Les miniatures présentées ce jour ont plus d’intérêt qu’il n’y paraît de prime abord. Le fabricant de ces modèles, ou plutôt leur distributeur a pour nom Modélisme. « Modélisme », c’est également le nom de la célèbre boutique du boulevard Sébastopol où ces miniatures furent distribuées.

Modélisme Porsche 908. Chassis différent.
Modélisme Porsche 908. Chassis différent.

Le succès de la boutique fut très rapide. Monsieur Greilsamer a vite compris la nécessité de favoriser la création de liens entre les amateurs. Pour atteindre cet objectif, il va publier une revue du même nom que sa boutique, puis, en 1967, un des premiers ouvrages consacrés au sujet, riche de photos et de listes de recensement de marques et de productions. Etant lui-même un collectionneur passionné, il a été sensible aux demandes des autres collectionneurs. Dans sa revue, il ne manquera jamais d’interpeller les fabricants pour leur soumettre des idées mais aussi pour les critiquer sur la qualité d’exécution de leurs produits.

Lorsqu’à l’aube des années 70 apparaissent en Grande-Bretagne les premiers kits en white métal, il va bien sûr les importer. Au regard de la difficulté du montage, ces kits ne sont pas à la portée de tout le monde. Pour de nombreux collectionneurs, le résultat final n’est pas à la hauteur des espérances. Il fallait effectivement du talent pour assembler les premières John Day. Si les photos de modèles montés présentés par la revue Modélisme ont fait rêver de nombreux amateurs, elles ont également suscité beaucoup de frustration. Notons qu’à l’époque il n’y avait pas de monteur professionnel. Par ailleurs, le white metal nécessitait un important travail de préparation, ce qui excluait la rentabilité d’un montage en petite série. Jacques Greilsamer comprit que pour satisfaire sa clientèle, il se devait d’offrir des produits finis. C’est grâce à sa parfaite connaissance du milieu des maquettistes qu’il a trouvé une solution. Deux maquettistes de talent, Messieurs Dubray et Evrat qui présentaient régulièrement leurs propres réalisations dans les pages du magazine lui présentèrent une solution envisageable : utiliser de la résine. Le matériau permettait d’échapper à l’investissement du moule en acier indispensable pour injecter du zamac. Au regard des quantités prévues, ce matériau permettait une gravure fine, et des carrosseries plus faciles à travailler. L’histoire était en marche, et c’est ainsi que naquit la gamme « Modélisme ». La finition très soignée ne permit qu’une micro production, bien inférieure à la demande.

Les maquettes ont très bien passé l’épreuve du temps, signe d’une qualité parfaite. Les gens qui ont connu cette époque fantastique regardent encore maintenant ces modèles avec désir. Comme ils ont été difficiles à obtenir !

Pour Jacques Greilsamer, le constat s’imposait : celui de l’existence d’un nouveau marché à destination des collectionneurs adultes. Les « miniatures maquettes » allaient supplanter les « miniatures jouets » et il allait créer Eligor. Contrairement aux industriels, il a anticipé ce phénomène. Bien sûr, avant lui, des firmes comme Rio s’étaient orientées sur ce créneau mais elles étaient restées prisonnières d’un marché à bout de souffle, celui des automobiles classiques d’avant la seconde guerre. Il en fut de même pour Solido et ses Age d’or. Pour avoir souvent travaillé avec des gens de chez Solido, j’ai constaté qu’ils avaient beaucoup de mal à croire au marché des collectionneurs.

Il est regrettable que Monsieur de Vazeilles ait vendu son entreprise à la période où naissait Eligor. Un visionnaire comme lui aurait sans doute mieux réagi que ses successeurs