Et Delahaye s’attaqua à la compétition.
Comme la 135 est une auto bien plus sportive que celles produites précédemment, il faut trouver un vecteur publicitaire qui lui corresponde .
La marque s’est-elle souvenu de ses débuts, lorsqu’elle participait aux compétitions automobiles pour se faire connaître du grand public ou s’est-elle laissé influencer par la conquête des records de vitesse très en vogue dans les années trente ?
Une chose est sûre, Delahaye va se donner une nouvelle image à travers la compétition automobile et les records de vitesse.
La firme de la rue du Banquier investit donc dans la construction d’une auto de record, comme le font notamment depuis 1933 Yacco pour Citroën et Peugeot, Renault et Hotchkiss.
En cette année 1934 c’est Renault qui le premier tente sa chance. L’entreprise engage une Nervasport de 28cv carrossée par Riffard, ingénieur issu de l’aéronautique. La voiture bat le record du monde des 48 heures en couvrant 8037,341 km à la moyenne de 167,455km/h. La tentative victorieuse s’est effectuée du 3 au 5 avril 1934. Sur sa lancée le prototype de Boulogne-Billancourt bat également le record des 4000 miles puis des 5000 miles.
Un peu plus d’un mois après, le 8 mai 1934, Delahaye lance à son tour sur la piste de Monthléry une 135 très spéciale. Le record des 48 heures est battu. C’est l’ouvrage de François Jolly « Delahaye sport et prestige » sur les Delahaye 135 aux éditions Jacques Grancher qui m’a servi de support pour cet article.
François Jolly explique comment toute l’équipe s’est mise à fêter l’événement sur place, jusqu’à ce qu’un membre de cette équipe s’interroge : « Pourquoi ne pas continuer ? » L’auto reprit donc la piste et malgré les deux heures perdues dans la petite réception, elle réussit à battre les records que la Renault venait de s’approprier sur les distances plus longues.
Cette petite mise en scène avec les journalistes est à mettre en parallèle avec celle qui s’est déroulée avec la Citroën Rosalie de record. Nous étions en 1933, André Citroën était venu à Montléry féliciter l’équipe pour les records battus. C’est lui qui le premier lança lors de la réception célébrant ces records l’idée de repartir à l’assaut d’autres records.
On reconnaît bien là tout le génie de Citroën capable de s’approprier un record dont il n’était même pas à l’origine. En effet c’est Yacco qui avait acheté l’auto sur ses fonds propres et l’avait préparée pour l’épreuve.
Quand Citroën comprit comment le public s’intéressait à l’aventure, il intervint. Il reprit à son compte ces records, se mettant en première ligne et proposant même un million de francs (qu’il ne devait pas avoir d’ailleurs) à tout constructeur qui serait capable de battre le record avant la fin de l’année. Au jour de la proposition, il ne restait d’ailleurs plus que six mois, dont les mois d’automne et d’hiver. Or, pour une auto qui tourne 24 heures sur 24, les conditions sont moins favorable qu’au printemps. A moins d’avoir une auto déjà prête, il était impossible pour un constructeur de relever le défi.
Dinky Toys a immortalisé une de ces voitures de record sous la référence 23B. Comme le souligne Jean-Michel Roulet, Dinky Toys a surtout cherché à reproduire une de ces autos qui battaient des records d’endurance à Monthléry et qui étaient fort populaires à cette époque. Les formes étudiées par des aérodynamiciens sont fluides, similaires aux fuselages des avions, mais sans les ailes. Ces carrosseries devaient intriguer et faire rêver les enfants. Si Jean-Michel Roulet a vu dans cette miniature une Renault, reprenant en cela l’identification de M. Greilsamer ou de M. Rampini, pour ma part, je penche très nettement pour notre Delahaye décrite plus haut. En effet, la Renault était habillée d’une carrosserie bénéficiant d’un profilage horizontal derrière le poste de pilotage.
La C-I-J en donnera d’ailleurs une excellente réplique. Au contraire la carrosserie profilée de la Delahaye descend en pente douce derrière le poste de conduite. Je pense donc que Dinky Toys a pris pour modèle une Delahaye, même si on ne peut nier qu’il s’agit d’un jouet et non d’une reproduction fidèle, comme avait pu le faire C-I-J avec la Renault Nervasport.
C’est peu dire que les versions produites par Dinky Toys avant guerre sont rares.
La version la plus répandue est celle d’après-guerre, de couleur rouge et argent. Ces exemplaires sont exempts de problèmes de metal fatigue.
La version en plomb ci- dessus d’origine française est assez énigmatique. On ne connaît pas son fabricant. Mais là aussi, la Delahaye est identifiable. Elle est fabriquée de manière assez grossière, artisanale.
Enfin, on ne peut passer sous silence un drôle d’oiseau. La ressemblance avec la vraie Delahaye de record est lointaine. Il s’agit plutôt d’un habile carrossage d’une Delahaye 135 sport, homologuée dans la catégorie sport par l’ACF. Ces autos pouvaient concourir dans les épreuves de Grand Prix homologué ACF mais aussi aux 24 heures du Mans. C’est pourquoi elle est équipée de phares. Pour cette épreuve, elle devait également être équipée d’ailes. Elle remportera l’épreuve en 1938.
Pour l’occasion, JRD ou la firme qui fabriquait pour cette dernière les modèles en plastiline a équipé la monoplace Delahaye 135 qu’elle venait de produire, d’un poste de pilotage caréné et d’un empennage fantaisiste. On peut y voir une Delahaye 135 avec un arrière de Nervasport. C’est bien sûr une auto imaginaire qui n’a de Delahaye que la calandre. Je l’ai placée dans cet article, afin d’être le plus complet possible. Elle est d’une grande rareté.