Archives de catégorie : souvenirs

les souvenirs de collectionneur de Vincent Espinasse

Un dimanche au terrain d’aviation de Tegel

Chers amis français,

Avions Ernest Plank
Avions Ernest Plank

Afin d’oublier la pesante atmosphère de cet été 1914, nous avons emprunté le bus, en famille, pour rejoindre le terrain d’aviation de Tegel. Nous sommes restés admiratifs devant ces fous volants qui, dans leurs machines, défient les lois de la pesanteur. Les avions Blériot nous ont particulièrement laissés sans voix.
Comment font- ils pour défier les éléments ? Cela semble si facile pour eux. Ces as ont de plus toutes les audaces : ils n’hésitent pas à virevolter et à slalomer entre des mâts dressés sur le terrain. Quelle insouciance !
De retour à la maison, les enfants se prenaient pour des valeureux aviateurs, ils couraient à travers l’appartement en imitant le bruit de ces drôles de machines. Quel beau dimanche avons-nous passé !

Etes-vous déjà allés sur le terrain du Bourget ?

Donnez-nous vite de vos nouvelles.
Hansel und Gretel

les modèles présentés sont tous des productions Plank.

Un Metro chez les Amish

Lancaster, Pennsylvanie. A moins de deux heures de la mégalopole de New York, le contraste est saisissant. C’est la pleine campagne et nous sommes loin de l’agitation de la grande ville. Pour tout dire, nous sommes en pays Amish.

Pays Amish
Pays Amish

Cette communauté originaire de la ville alsacienne de Sainte-Marie-les-Mines qui continue de parler un dialecte allemand vit de façon simple, en retrait de la société de consommation. La vie de ses membres est basée sur la lecture et la mise en œuvre du Nouveau Testament.

Dans les années 1990, la communauté a connu une scission avec l’émergence du courant « new order amish » qui accepte quelques marques du progrès technique, comme l’électricité ou les autos à essence.

Le symbole du pays amish est bien sûr la carriole dite « Buggy ». Il y a quelques années, l’Etat de Pennsylvanie a dû intervenir afin d’obliger les propriétaires de ces Buggy à équiper ceux-ci d’un marquage de couleur rouge afin d’éviter des accidents nocturnes. De nombreux panneaux de signalisation balisent les routes et sensibilisent les usagers à la présence de ces carrioles qui circulent en nombre, surtout le dimanche.

Si la branche moderniste a accepté que les membres de la communauté s’équipent de véhicules à moteur, elle n’a rien cédé sur la couleur : ils sont uniformément de couleur noire. Les modèles, souvent très anciens, sont toujours en excellent état et témoignent du soin et du respect des propriétaires à l’égard de leurs machines. J’ai ainsi croisé dans cette région de superbes autos des années 70, en contraste total avec les critères de design des véhicules américains actuels.

J’ai eu l’occasion de dormir à Lancaster, siège le l’ancienne usine Hubley lors de mon premier séjour en Pennsylvanie, à l’occasion de la bourse d’Allentown. Si j’avais avant mon départ programmé les deux premières journées et réservé les chambres d’hôtel en conséquence, ne sachant pas comment j’allais progresser dans mes visites de marchands et d’antiquaires, je n’avais rien prévu pour la troisième journée. Sinistre imprévision ! Le pays n’a rien de touristique, les hôtels sont rares et connaissent finalement un taux d’occupation élevé. C’est ainsi que j’ai dû, un soir, à Reading, me rabattre sur un hôtel de routiers. Dès 4 heures du matin, j’ai été réveillé par le départ des camions garés devant les chambres du motel. A Lancaster, l’hôtel était certes de meilleur standing, mais l’accueil fut très froid, bien différent de l’ambiance délirante de Las Vegas ! La mentalité amish se faisait sentir. La présence d’un étranger de surcroît ne finissait pas d’intriguer. Comment imaginer qu’on puisse traverser l’Atlantique dans le seul but de dénicher quelques miniatures automobiles !

J’aurais peut être dû entamer la conversation et parler de la grande entreprise que fut Hubley. Car Hubley est bien une des firmes majeures de l’industrie du jouet aux USA, au même titre qu’Arcade ou Tootsietoys.

En qualité de collectionneur français, j’ai ressenti de l’émotion en séjournant dans cette petite ville, berceau de la firme créée en 1894, par John E.Hubley. Elle est demeurée à Lancaster jusqu’en 1966, date à laquelle elle a été reprise par Gabriel Industries dont elle est devenue une des branches. En 1978, Gabriel Industries a cédé Hubley à « The Columbia Broadcasting System » CBS.

Les bâtiments situés à l’angle d’Elizabeth Avenue et de Plum Street existent toujours, malgré un incendie qui a sévi il y a quelques années. Sur ces derniers, aucune trace de la présence ancienne d’Hubley n’est visible. Les bâtiments sont désormais occupés par diverses sociétés. Seul subsiste, à quelques centaines de mètres, un bâtiment sur le fronton duquel on lit l’inscription « Hubley Social Club ». Cette association à caractère social et récréatif, créée en 1934 par les ouvriers de la firme, est toujours active aujourd’hui.

Swinging London – 2

Afin d’avoir, et sans rancune, une pensée pour le collectionneur dont je parle dans l’article précédent, je vous propose de découvrir la gamme des couleurs de l’Austin Devon proposée par Binns Road qu’il aurait tant aimé se procurer.

Austin Devon Dinky Toys pour la Suisse
Austin Devon Dinky Toys pour la Suisse

Les versions de couleur rouge et de couleur caramel sont peu fréquentes. Il en est de même de la version bleu-France. Enfin celle arborant une décalcomanie « PKZ » a pour origine la Suisse. La chaîne de magasin « PKZ », qui existe toujours, distribuait à ses clients des Dinky Toys, principalement d’origine anglaise. Ce sont des codes 2.

J’apprécie cette série publicitaire et je ne manque jamais quand l’occasion se présente d’en acquérir des exemples.

L’idée d’inconnu et par conséquent de découvertes potentielles me plaît beaucoup. En effet, s’il y en a eu assurément un grand nombre, personne ne sait exactement sur combien de véhicules ont été apposées ces décalcomanies.

Nous verrons prochainement avec l’étude d’autres miniatures de la série 40, que les surprises ne vont pas manquer !

Swinging London – 1

Swinging London : ça balance à Londres !

Ou les belles couleurs de l’Austin Devon Dinky Toys

A l’occasion d’un récent séjour dans la capitale anglaise, j’ai pu constater combien les clichés sur le mauvais goût vestimentaire des anglais étaient dépassés. Si la population de la « City », cœur économique du pays, arbore de stricts costumes aux couleurs conventionnelles, le reste de la population s’affiche dans des harmonies auxquelles nous ne sommes pas habitués.

Austin Devon
Austin Devon

Une différence majeure entre nos deux civilisations semble être le fait que les Anglaises sont totalement décomplexées. Si chez nous l’harmonie du bon goût s’étend du noir au taupe en passant par le gris, de l’autre côté du Channel, on laisse parler ses envies de couleurs. C’est parfois étrange, déroutant, mais c’est toujours innovant et souvent très joyeux ! C’est peut être cette capacité à s’habiller sans se soucier du regard des autres, à arborer des couleurs vives, des textures étranges et des accessoires surannés qui permet à nos amis anglais de garder le moral malgré les soucis qui ne manquent pas outre-Manche.

Peut être suffirait-il de prescrire en France le port des collants orange et de la chemise à pois vert pomme pour voir remonter le moral de la nation.

En voyant le spectacle coloré de la rue et rehaussé par l’éclat du soleil, je n’ai pu m’empêcher de faire un lien avec les fameuses autos bicolores de la série 40, produites par Dinky Toys Liverpool. Dans l’histoire de la production de jouets, il me semble qu’aucun fabricant n’est allé aussi loin dans l’audace des harmonies proposées. Je m’interroge encore : « Comment les gens du bureau d’étude de Binns Road ont-ils pu convaincre la direction d’adopter ce choix de couleurs ? Les Austin Devon fuchsia et vert « Harrod’s » ou orange et bleu France sont une petite provocation : nul n’a pu rester insensible devant ces modèles ; on aime ou on n’aime pas, mais en tout cas on réagit, ou on agit.

J’ai sur ce point une anecdote savoureuse en réserve. Il y a une vingtaine d’années, un monsieur originaire de Versailles me contacte afin de se séparer de la collection qu’il avait constituée alors qu’il était encore adolescent. Grâce à la profession de son père, il avait eu la chance de se rendre assez régulièrement en Grande-Bretagne. Il avait ainsi pu acquérir de nombreuses miniatures originaires de Liverpool. Dans les années 50-60, beaucoup de ses petits camarades ignoraient jusqu’à l’existence de cette production d’outre-Manche : il n’y avait pas d’importation pour ne pas nuire à l’unité de fabrication de Bobigny.

Ainsi, tout jeune homme, il avait déjà accumulé une belle série d’anglaises, qui faisaient à juste titre la fierté de sa collection. Il n’avait bien sûr pas manqué de m’en faire part avant mon déplacement.

Sur place, je pus constater les faits : de belles miniatures, précieusement conservées. Ainsi, outre les inévitables petits fourgons Trojan tellement représentatifs de la Grande-Bretagne, je trouvais des camions Guy et de superbes autos appartenant à la classique série 40, toutes conditionnées en étuis individuels et datant donc de la fin des années 50. En effet, Binns Road avait maintenu un peu plus longtemps que Bobigny, ses anciens modèles en conditionnement par 6, probablement pour des raisons de coût ou par commodité pour l’expédition. Les étuis individuels et la renumérotation indiquent de ce fait, une fin de carrière pour ce type de modèles.

Notre homme, soucieux d’harmonie et de bon goût avait opté pour les couleurs classiques. Ainsi la 40G Morris Oxford était vert anglais, l’Austin Sommerset d’un bleu clair tout simple.

Lorsque je vis le boîtage de l’Austin Devon, arborant les fameuses robes bicolores décrites un peu plus haut, mon cœur s’est mis à palpiter. En effet, ces finitions bicolores sont prisées par les collectionneurs, et pour le marchand que je suis, il est toujours plaisant d’en avoir une à proposer à la vente. Lorsque j’ouvris la boîte, ma déception fut immense. Notre homme m’expliqua qu’à l’époque il avait été dans l’impossibilité de trouver une finition acceptable. Il avait donc acheté la version décadente fuchsia et vert « Harrods », et pour remettre cette miniature dans le droit chemin, l’avait repeinte… en noir !

Certes le travail était de qualité, mais en fait de miniature aux couleurs pimpantes à proposer à mes clients il ne me restait qu’une boîte arborant la pastille bicolore.

La dolce vita

La nouvelle édition du festival de Cannes m’offre l’opportunité de rendre hommage au réalisateur italien Federico Fellini. « La dolce vita » présenté à Cannes en 1960 où il reçut la palme d’or, marqua les esprits, notamment en Italie où il divisa la population.

Le film eut un immense succès commercial qui reposait d’ailleurs davantage sur l’intérêt du public pour les scènes érotiques que sur ses qualités intrinsèques. Le Vatican jugea l’œuvre pornographique et blasphématoire !

La dolce vita en Marx
La dolce vita en Marx

Ainsi, dans « Divorce à l’italienne », tourné en 1961 par Pietro Germi, une scène se déroule devant le cinéma d’un village : la projection de « La dolce vita » provoque une émeute, la salle étant trop petite pour accueillir le public dominical tout émoustillé par la réputation du film. Il est amusant de remarquer que le rôle principal de « Divorce à l’italienne » est tenu par Marcello Mastroianni, qui interprète également le rôle principal de « La dolce vita ». Ce sera la première collaboration de Mastroianni avec le cinéaste Federico Fellini.

Cinq autres films réuniront les deux monstres sacrés qui semblent s’apprécier. De construction moderne, le film est une suite de séquences où nous suivons un chroniqueur interprété par Marcello Mastroianni. La scène la plus connue est bien sûr celle où Anita Ekberg se baigne dans la fontaine de Trévi. Cette scène s’est imposée au cinéaste après avoir lu un article de journal relatant qu’au cours d’une séance de photos Anita Ekberg s’était blessée légèrement au pied ; elle était à proximité de la fontaine de Trévi et était allée y nettoyer sa blessure. Le photographe Pierre Luigi avait alors réalisé une série de photos publiée dans le journal Tempo.

De nombreuses scènes du film font partie de l’histoire du cinéma. Federico Fellini nous offre une vision toute personnelle de certains quartiers de Rome, notamment celui de l’EUR, construit sous Mussolini et structuré en grandes artères rectilignes. La vision est assez déroutante pour qui connaît la capitale romaine. Il semble bien que le cinéaste ait cherché à prendre le contre-pied des clichés faciles sur la « douceur de vivre à l’italienne ».

Ainsi, pour en venir au sujet qui nous est cher, l’automobile, le choix du cinéaste est singulier. Il lui aurait été facile de choisir parmi les voitures sportives, de luxe ou populaires, produites par l’industrie italienne. Pour nous, Français, le titre du film peut facilement évoquer une Alfa Romeo Giulietta, une belle Lancia Aurelia et même une Ferrari 250GT.

Fellini choisit de faire rouler son personnage principal en Triumph TR3.

Le photographe qui l’assiste, Pierotto Paparazzo, (à l’origine du mot paparazzi) apparaît en MG TF. Maddalena, interprétée par Anouk Aimée et symbole de la bourgeoisie désœuvrée roule, elle, dans une Cadillac Eldorado Biarritz. Le spectateur est déstabilisé et il y a fort à parier que Fellini a personnellement choisi les automobiles de ses acteurs.

Pour illustrer ce film, j’ai souhaité vous présenter une Triumph TR3 un peu moins connue que celles produites par Corgi Toys ou Spot On. Le modèle a été produit au Japon, par Line Mar, pour la firme Marx sous le nom de « Collectoys ». Compte tenu de la consonance anglo-saxonne, la destination commerciale de ce produit, les Etats-Unis, est évidente. Il faut rappeler que déjà, avant la seconde guerre mondiale, le Japon s’était attaqué au marché américain du jouet. Au départ la qualité de ces jouets était médiocre. Elle s’est vite améliorée.

Après guerre, les jouets produit par la firme Marx ont porté le marquage un brin infamant : « Made in Occupied Japan ».

Les Japonais se sont vite redressés à l’issue du conflit et le marché américain est demeuré leur principale cible. La multitude de belles américaines en tôle à des échelles allant du 1/35 au 1/10 environ en est la preuve. Mais les échelles inférieures n’ont pas été oubliées.

Voici donc une série attachante de cabriolets et de coupé européens, dont la Triumph fait partie au même titre qu’une Jaguar XK120, une Porsche 356 et même une BMW 507. L’échelle choisie pour ces modèles est environ le 1/50. Le fabricant proposera toute une série d’autos américaines, dont une Edsel. Celles-ci seront alors reproduites au 1/66 environ, l’échelle de reproduction étant dictée par les boîtages, tous de même format !

Marx commandera ensuite à son fabricant de jouets japonais une autre série de modèles extrapolés de cette gamme et installera au volant un personnage issu des dessins animés de Walt Disney. Mickey s’assiéra dans la Triumph TR3 et Goofy prendra les commandes de la Jaguar XK120 ou de la « MGA » ! Cette série est également peu fréquente.