Notre existence est rythmée par l’expérience « des premières fois ». Plus on avance dans la vie et moins ces dernières sont fréquentes. C’est peut-être ainsi que l’on se rend compte que l’on vieillit. Pourtant, au dernier salon « des belles champenoises » à Reims, j’ai réalisé une première.
J’ai acheté mon premier paquet de cigarettes. J’aurai attendu 49 ans pour le faire ! J’ai en effet acquis, au prix semble-t-il d’une cartouche complète, un paquet de cigarettes Gitanes aux couleurs de l’écurie Matra Simca. Ces paquets de cigarettes ont été distribués comme objet publicitaire par la Seita, sponsor de l’écurie Matra, lors de leur dernière campagne au championnat du monde des marques en 1974. J’ai décidé de publier les photos, malgré la loi qui interdit toute publicité pour le tabac.
Toujours lors de ce convivial salon champenois, j’ai acquis une superbe pochette comprenant les deux coqs, symboles de l’écurie Matra (raccourci de la carrosserie Lecoq). On imagine bien l’effet que l’achat de ces stickers devait procurer au conducteur de Simca 1000 ou de Renault 6. Bien en évidence sur les flancs du véhicule, ces deux stickers transformaient de banales routières en bêtes de course. L’étape suivante était sans doute l’acquisition de gants et d’un volant en cuir !
À travers ces objets, on constate que la firme Matra est toujours très populaire chez les amateurs de sport automobile. Nombreux sont les collectionneurs qui ont choisi de reconstituer la glorieuse épopée des voitures bleues. Les miniatures reproduites par Solido sont incontournables. Il semble cependant que les victoires répétées des Matra au Mans aient perturbé le bureau d’étude de Solido ! C’est avec un décalage logique qu’apparaissent en 1973 les vainqueurs de 1972. Cependant, alors que ces modèles étaient à peine disponibles, Matra a doublé la mise ! Sentant les choses bouger, Solido décide alors de mettre en vente un guide et une planche de décalcomanies afin de reproduire les vainqueurs de juin 1973. Un second guide sera consacré à la Porsche 917/10. Ces guides seront un fiasco retentissant. Pour ma part, j’ai souvent rêvé devant le dessin de M. Blanche qui ornait la pochette du guide. Ceux qui ont déjà fait des transformations sur des modèles en zamac savent que ce matériau, contrairement au white métal, est excessivement difficile à travailler. Le capot avant, version 1973 est fort différent de celui de 1972. La transformation passait donc par l’utilisation du Sintofer, utilisation qui requiert les qualités d’un maquettiste professionnel. À mon grand regret, je n’ai pas pu réaliser cette transformation. À cette période Yves Evrat, sur une base Solido, dont il conservera le châssis, effectuera des moulages en résine, permettant la réalisation de petites séries sous le nom Modélisme. Il prit soin d’appliquer les décorations Solido. Pour les versions 1974, Yves Evrat créera un moule de toutes pièces, y compris le châssis. La filiation avec les modèles 1973 est évidente. C’est le début des petites séries industrielles. On ne peut que constater que les deux premières autos de course de la gamme Eligor, sont des dérivées des guides Solido : Matra 670C et Matra 680 ainsi que les Porsche 917/30 Can- Am. Je me souviens combien l’attente fut longue, entre les dessins de ces bolides dans le premier catalogue Eligor, et leur apparition dans les vitrines des magasins. Le prix de vente, nettement plus élevé que celui d’une Solido, ciblait la clientèle des collectionneurs. Ce n’était plus un jouet mais une petite maquette exclusive. De nombreux collectionneurs reprocheront à ces miniatures leur roulement chaotique, oubliant qu’elles n’avaient pas vocation à rouler dans les cours d’école !
Afin d’illustrer cet article, j’ai choisi les deux modèles distribués par Eligor, représentant les autos de 1974. Pour le plaisir j’ai rajouté une version que le talentueux maquettiste Italien Ugo Fadini réalisa sur la base d’un modèle Solido. Superbe travail pour l’époque. Sur la photo centrale les deux versions du Mans, la 670 et la 680 (n° 6 et 7) sont encadrées par les rares versions courtes qu’Yves Evrat produira en toute petite série. (n° 6 et 2)