Archives par mot-clé : Juan-Manuel Fangio

Reims, 4 Juillet 1954, Mercedes 196

La Mercedes 196 carénée symbolise à elle toute seule une période de la course automobile. Lors d’une discussion avec Monsieur Dufour, nous avons convenu que la reproduction en miniature de cette auto est un thème de collection à part entière. Elle n’a pourtant participé, avec cette carrosserie fermée qu’à quatre Grands Prix en deux saisons (France 1954, Grande-Bretagne 1954 et Italie 1954 et 1955).

rare diorama Dinky Toys
rare diorama Dinky Toys

Pour les puristes ajoutons qu’au Grand Prix d’Allemagne de 1954, Mercedes avait fait courir une quatrième auto pour le pilote allemand, Hans Hermann. N’ayant que trois châssis avec roues découvertes, elle le dota d’un modèle caréné. Dinky Toys ne pouvait ignorer un tel modèle. C’est la version du Grand Prix de Grande-Bretagne qui est reproduite : on la reconnaît à un petit détail. C’est en effet la seule course où l’auto sera équipée d’une étoile au centre de la calandre en plus de celle apposée sur le bout du capot avant. Crescent Toys reproduira aussi la version de Silverstone, bien plus fidèlement que Dinky Toys. L’étoile était montée sur une barre horizontale qui lui servait de support. Sans qu’on connaisse les raisons d’une telle réalisation, il est clair qu’il y avait là comme un brin d’arrogance. Nous sommes encore très près de la fin du conflit armé, et l’auto symbolise la renaissance de l’industrie allemande. Ce fut malheureusement un échec cuisant pour Mercedes, et à voir dans quel état le pauvre Fangio amena l’auto à l’arrivée, on se doute que la course ne fut pas une partie de plaisir.

Tout l’intérêt de la version Dinky Toys réside dans son rare diorama promotionnel ! Le revendeur pouvait choisir de masquer grâce une languette en carton la référence de la Mercedes et faire apparaître la référence de la Jaguar Type D.

Ce modèle adopte la couleur blanche qui est la couleur attribuée aux autos courant sous la bannière Allemande. On peut s’interroger sur le fait que Dinky Toys ait opté pour le blanc plutôt que l’argent, d’autant qu’une variante produite peu de temps après sera de couleur ivoire, très différente du blanc classique. Elle sera équipée de jantes en zamac de couleur rouge, puis en aluminium et enfin en plastique, également de couleur rouge. Pour cette dernière version, le pilote sera vêtu d’une combinaison jaune en remplacement de la combinaison bleue des versions précédentes. La boîte vitrine est peu fréquente, il est difficile de la trouver en bon état ! Le dessin sur le diorama me fait penser aux belles tribunes du circuit de Reims. Il est bien dommage que les pouvoirs publics n’agissent pas plus efficacement pour sauver ce patrimoine de renommée internationale.

Lors de mon dernier voyage à Copenhague, un collectionneur danois est venu me voir muni d’une feuille de papier sur laquelle étaient inscrits les mots « Muizon », « Gueux » « Thillois » qu’il m’a demandé de lui prononcer …j’ai tout de suite reconnu les noms des virages du circuit de Reims. Il m’a alors expliqué qu’il était venu spécialement en vacances du Danemark pour aller voir les vestiges des circuits de Reims et de Rouen !

Circuit de Reims 15, Décembre 2011

Le circuit de Reims aura toujours une place à part dans mon cœur, car c’est le premier circuit que j’ai connu. Je venais de Compiègne en passant par Soissons et je descendais la ligne droite. Jamais je n’oublierai la vision des tribunes et des stands à droite, à travers les champs de blé. Ce moment a été magique. Certes, le circuit avait déjà cessé toute activité mais je voyais grandeur nature ce lieu mythique où tant de duels acharnés avaient eu lieu.

Tribune du Circuit de Reims
Tribune du Circuit de Reims

Aujourd’hui encore, bien des années après cette première visite il m’est difficile de ne pas sortir à Tinqueux pour prendre la nationale vers Soissons. Des ronds-points ont un peu dénaturé l’endroit, mais de courageux passionnés s’escriment à remettre en place ce formidable patrimoine. Je salue ici leur entreprise.

Bien entendu, lorsque ma fille est partie faire ses études à Reims, je n’ai pas manqué lors de son premier voyage en terre champenoise de lui faire découvrir cet endroit.

Reims n’était pas, de loin, le circuit le plus technique. Par contre, très rapide, il a longtemps rivalisé avec Spa et Monza pour l’affichage de la moyenne horaire la plus élevée.

L’auto qui symbolise pour moi le mieux ce circuit est la Mercedes carénée. Un aérodynamisme poussé la favorisait sur les tracés rapides et c’est ainsi qu’elle s’est montrée sans rivale à Reims. Si l’on met de coté la prestation malheureuse en 1951 lors du Grand Prix d’Argentine avec les autos d’avant-guerre, le Grand Prix de Reims de 1954 marque le retour de Mercedes en Grand prix après le conflit mondial. Pourtant, Mercedes n’était pas prête pour le début de la saison, et Fangio s’est adjugé les deux premiers Grands prix au volant d’une Maserati.

C’est sur le circuit de Reims, au cours d’une course limpide, que les flèches d’argent ont fait leur grand retour. Elles ont réalisé le doublé, non sans avoir causé quelques frayeurs aux ingénieurs. Lors des essais, ces derniers se sont aperçu que si leurs moteurs étaient performants, ils étaient aussi très gourmands. Gourmands à un point tel que la capacité des réservoirs était insuffisante pour couvrir la distance du Grand prix. Il a donc fallu fabriquer durant la nuit des réservoirs supplémentaires pour les trois autos, et faire l’aller-retour jusqu’à Stuttgart pour les ramener. Ces derniers ont été montés juste à temps pour le départ. Quinze jours plus tard à Silverstone, lors du Grand Prix d’Angleterre, l’écurie Mercedes est tombée de haut. Fangio, malgré tout son talent n’a réussi qu’à prendre une quatrième place. La carrosserie aérodynamique ne procurait plus l’avantage rencontré sur le rapide circuit de Reims. Pire, il est apparu que la conception même de l’auto était à revoir : le châssis et l’empattement, tout était à corriger.

Le succès de la firme à l’étoile réside dans sa capacité à réagir. Comme pour le problème des réservoirs d’essence à Reims, la firme a fabriqué une carrosserie avec roues découvertes pour le Grand Prix national au Nürburgring. Tout cela n’a été possible que parce que Mercedes disposait de capacités financières bien supérieures à celles des autres écuries. Continental, le fournisseur des pneumatiques qui s’étaient révélés peu efficaces sous la fine pluie britannique a également été prié de revoir sa copie après la piètre prestation de Silverstone. Grâce à ces modifications, Juan Manuel Fangio a pu s’imposer au Nürburgring, puis de nouveau à Monza, où il a repris l’auto carénée. Il dominera totalement ses coéquipiers et Mercedes lui doit ainsi une fière chandelle pour l’obtention du titre de champion du monde en 1954.

Les trois grâces

Je rassure les lecteurs du blog, ce titre ne m’a pas été inspiré par la vision de ces miniatures Charbens, ni même par les Dinky Toys qui les accompagnent. C’est simplement, le titre d’un magnifique tableau de Cranach l’ancien, peintre de la renaissance dont vous avez peut-être récemment entendu parler.

Charbens : Alfa Romeo 152
Charbens : Alfa Romeo 152

Actuellement dans une collection privée, ce tableau est à vendre. L’Etat français a refusé de signer son autorisation de sortie du territoire et Le Louvre dispose d’un droit de préemption. La somme demandée par le propriétaire, 4 millions d’euros, n’a pu à ce jour être réunie. Le musée qui fait souvent appel à la générosité des entreprises n’a pas réussi, en cette période de crise, à réunir les fonds demandés. 3 millions ont été trouvés. Il manque 1 million.

Alors, à tableau exceptionnel, méthode exceptionnelle. Le Louvre a lancé un appel à la générosité du public, afin de réunir la somme manquante avant la fin du mois de janvier.

Je vous communique l’adresse internet du site www.troisgraces.fr) afin que vous puissiez, au lieu d’acquérir la sixième variante de jantes de la Citroën GS Norev, consacrer le budget que vous alliez y affecter à l’acquisition d’un chef-d’œuvre. Certes, vous différerez votre achat sur le site de l’Auto Jaune, mais vous aurez le plaisir d’admirer ce joyau, de petite dimension, dans ce fantastique lieu qu’est le Louvre.

Quittons les chefs d’œuvre pour notre petit monde de la miniature automobile. Charbens, fabricant anglais, commença par produire des attelages (voir La caravane de gitans, chronique n° 99) et des figurines avant de s’intéresser aux véhicules motorisés. Nous nous situons bien avant la seconde guerre mondiale.

Cette petite firme connaîtra une existence chaotique. Après la Guerre, elle se convertira au zamac. C’est de cette période que sont issues les trois monoplaces présentées. Elles ne devaient être disponibles qu’en coffret cadeau dont j’ai eu la chance de voir, il y a bien longtemps la photo !

Curieusement, la Cooper Bristol m’a été présentée plusieurs fois alors que je n’ai rencontré qu’une seule et unique fois l’Alfa Roméo et la Ferrari. Ces modèles sont rares, je peux le dire en toute objectivité. A l’origine, la notion de rareté est subjective. Ce n’est qu’avec l’expérience qu’elle prend une consistance objective. Ainsi, sur les quelques 7000 pièces disponibles du site, le qualificatif « rare » apparaît je pense moins d’une vingtaine de fois. Le fait de n’avoir croisé ces objets qu’une seule fois en plusieurs décennies de collection m’autorise à l’employer dans le cas présent, sans risque de le galvauder comme le font certains catalogues de salles des ventes qui l’utilisent à tout bout de champ.

D‘ailleurs, je souhaiterais bien pouvoir améliorer l’état de la Ferrari 500F2 présentée.

Un premier coup d’œil pourrait laisser penser à des copies de Dinky Toys. Mais un examen plus approfondi démontre le contraire : je vous présente la photo des deux productions, vous pouvez ainsi vous rendre compte de ce fait.

On peut raisonnablement penser que Charbens a cherché à introduire une certaine confusion chez les éventuels acheteurs. Je me base pour ce dire sur une évidence. Malgré toutes mes recherches, je n’ai pas trouvé trace d’une Ferrari 500F2 de la même période qui aurait arboré les couleurs argentines. Les fabricants auraient pu la reproduire de couleur bleu France. En effet, Louis Rosier, vainqueur aux 24 heures du Mans en 1950 avec son fils sur une Talbot) en posséda une, qui courut en France. Nous retenons donc l’hypothèse selon laquelle Dinky Toys chercha surtout à présenter des reproductions de monoplaces attrayantes, de couleurs différentes.

J’ai de nombreuses fois entendu dire, que c’est pour rendre hommage au grand Fangio que la firme de Liverpool avait décoré sa monoplace aux couleurs Argentine. Cette affirmation ne tient pas. Le seul Argentin à avoir piloté cette auto fut Froilan Gonzalez, mais l’auto, engagée par la Scuderia Ferrari, était de couleur rouge. Il faut avouer qu’elle a beaucoup d’allure dans cette livrée argentine et Charbens, jouant la confusion, s’est empressé d’offrir la même livrée. Cependant la gravure est beaucoup moins fine, les autos sont moulées en une pièce et les détails beaucoup plus grossiers (observez les calandres et les ouies d’aération).

On peut déduire de la rareté de ces pièces que le succès n’a pas été au rendez vous.