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Le mal-aimé.

Le mal-aimé

Un gamin. Avec ses cheveux ébouriffés, il semble se réjouir de la bonne farce qu’il vient de jouer. Parfois le sourire peut virer aux larmes quand on n’a pas bien mesuré les répercussions de sa blague. L’enfance est apprentissage.

C’est l’image qui m’est venue à l’esprit lorsque j’ai vu le Premier Ministre britannique présenter ses voeux pour 2020.

Enfin débarrassé de l’Europe et de Bruxelles, semble-t-il dire.

Il tente dans son allocution de communiquer son enthousiasme à ses compatriotes : « “A fantastic year and a remarkable decade for our United Kingdom”.

Malgré cela, cette année 2020 a été particulièrement difficile pour nos voisins britanniques, entre l’impréparation du Brexit et la crise sanitaire.

Le Premier Ministre fanfaronnait encore début mars dans une conférence de presse « J’étais en visite dans un hôpital où il y avait des patients du Covid et vous serez contents de savoir que j’ai serré les mains à tout le monde » (source Le Monde 12/01/2021 article d’Eric Albert) avant de se retrouver plus tard durant 3 jours en soins intensifs, soigné par des infirmiers étrangers.

Comme le rappelle le journaliste, ceux-là mêmes qui pourraient bien avoir du mal en 2021 à obtenir un visa pour travailler en Grande-Bretagne. Avis de tempête annoncé.

En tant qu’Européens « continentaux », nous voyons dans ce type de comportement au pire, une forme d’arrogance, au mieux une singularité britannique.

Singularité c’est le mot qui me vient à l’esprit. Durant toute ma scolarité, on ma expliqué que nos voisins britanniques ne faisaient rien comme les autres : système de mesure, prises électriques, sens de circulation sur les routes et maintenant claviers d’ordinateurs !

A travers nos collections de jouets nous mesurons aussi cette singularité. La production de Dinky Toys Liverpool est révélatrice plus qu’aucune autre de cet état de fait.

Corgi Toys et Matchbox ont su garder juste ce qu’il faut de singularité britannique dans leur gamme et ont pu ainsi se développer dans le monde entier de façon durable.

 

Les camions anglais équipés d’une calandre en forme de fer à cheval, type Guy ou Foden MK1 ont le charme du passé. Si les marques européennes ont modernisé leur gamme après la seconde guerre mondiale, les anglais sont restés eux très conservateurs. Un Foden MK2 en 1955 semble venir d’un autre âge par rapport aux Mercedes, Volvo, Scania ou Berliet de la même époque.

 

 

Une question me taraude : comment Hudson Dobson a-t-il pu vendre aux USA des Foden type 1, fer de lance des catalogues Dinky Toys de l’après-guerre ?

Jusqu’en 1951-52, afin de faire rentrer des devises, l’exportation vers les USA a été le débouché commercial principal de Binns Road, en attendant que le pays se relève et que la consommation britannique reparte.

Aux USA, ces Foden devaient sembler venir d’une autre planète. Comment les enfants habitués à voir des Mack, Autocar et autres tracteurs à long capot sillonner les highways ont-ils pu accepter de jouer avec des camions porteurs, habillés d’une cabine avancée et équipés de châssis à 4 essieux ?

Ces Foden sont adulés en Grande-Bretagne, comme les Leyland Octopus. Ce sont « leurs camions ».

En fait c’est surtout le type de carrosserie à 4 essieux qui emporte l’adhésion, plus que le nom du constructeur. Nous retrouvons chez les amateurs de Spot-On le même engouement pour les 4 essieux qu’ils soient badgés AEC Mammoth ou ERF 88G.

Il suffit de voir la cote élevée de ces camions à 4 essieux par rapport aux autres, les porteurs simples ou tracteurs semi-remorque pour s’en persuader.

Lorsque nous avons abordé la collection de poids lourds Dinky Toys, nous avons été fort surpris de voir que l’échelle de prix échappait à une certaine logique, qui veut que le prix soit fait en fonction de la rareté et de la demande.

Un Foden MK1 plateau de couleur classique valait beaucoup plus qu’un Leyland Comet rare. Ainsi je me souviens fort bien de l’acquisition du très rare Leyland Comet rouge et bleu aux enchères.

Il reprend la couleur du prototype Austin ridelles qui n’a jamais vu le jour. C’était le premier exemplaire que je voyais, j’avais fait le voyage en Angleterre en grande partie pour l’acquérir, et il fit ce jour là moins cher que tous les Foden Type 1 que l’on voyait pourtant quasiment à chaque vente.

Dans la gamme Dinky Toys, un autre camion bénéficie d’une belle cote d’amour : le Guy, avec sa cabine typée. Sa cote est cependant inférieure à celle des fameux 4 essieux. Le mal-aimé dans cette série de camions, c’est le Leyland Comet !

En y réfléchissant, je ne vois qu’une explication. Trop banal ! pas assez « British » ! Avec son capot long , il ressemble un peu trop aux véhicules européens. Pourtant, il est beau ce Leyland Comet. Je le trouve même majestueux. Sa dimension le place dans les « gros » camions, de la gamme Supertoys. Son empattement long peut déplaire à certains.

Dinky Toys a proposé trois carrosseries afin d’amortir son moule. Ces trois carrosseries sont plus élaborées que celles qui équipent les camions décrits précédemment : la version plateau est habillée de panneaux latéraux verticaux. La version ridelles est équipée d’un hayon mobile et enfin la troisième version est équipée de ridelles ajourées réalisées en tôle épaisse.

Le plateau n’est connu qu’en Portland Cement. Il est fort réussi. Au fil de la production sa couleur jaune évoluera, pour finir dans une nuance plus pâle. Binns Road aurait sans doute gagné à fournir un chargement de sacs de ciment. Le plateau qui équipe le Guy a été calculé pour recevoir le cadre en bois provenant de la gamme Hornby. L’absence de publicité laisse libre cours à l’imagination de l’enfant dans son utilisation ludique. Ce n’est pas le cas avec le Comet et sa publicité « Porland Cement » qui a sûrement bridé son utilisation auprès des enfants.

Celui équipé de ridelles hautes a reçu plusieurs combinaisons de couleurs. Il a d’abord repris la teinte du prototype Austin, prouvant bien que cette harmonie avait plu à la direction. C’est la couleur rare.

Une autre combinaison de couleurs est rare, celle finie en bleu foncé avec les ridelles bleu clair. Très rapidement le bleu layette sera remplacé par un bleu soutenu. Comme mon ami Charles, j’aime ce camion et je n’ai pas hésité à rechercher les variantes de couleurs …de jantes !

Ainsi, celui très classique ayant deux tons de bleu, prend un intérêt supplémentaire si il possède des jantes de couleur crème, rouge et mieux encore jaune. Bien souvent ces variantes correspondent à un moment particulier de la production. Elles possèdent donc des nuances de bleu différentes tout comme la version équipé de la ridelle ajourée.

Les premiers exemplaires  de ce dernier sont finis en bleu, allant du bleu  de saxe au bleu violine et sont équipés d’une caisse couleur caramel censée imiter le bois. Vous pouvez aussi faire les variantes de jantes.

C’est la couleur tardive qui est la plus rare. Elle est finie en jaune et vert pâle, mariage particulièrement heureux pour un jouet à mes yeux.

A ce sujet on peut parler d’une franche réussite au niveau de la gamme des couleurs. Certain Foden Type 1 et Guy sont un peu trop classiques, un peu  trop sages.

La palette des Leyland Comet est somptueuse et j’ai profité de ce désintérêt pour ce camion pour multiplier les variantes. Les choses évoluent d’ailleurs. Désormais, il me semble qu’il suscite plus d’intérêt qu’il ya quarante ans. L’écart s’est tout de même réduit avec les Foden. Profitez-en avant qu’il ne soit trop tard !