Norev

No Rêves !

Récemment, une journaliste préparant un sujet sur les Dinky Toys est venue me trouver afin de finaliser son reportage. Au cours de l’entretien, nous en sommes arrivés au fait que les Dinky Toys étaient des jouets onéreux qui étaient offerts aux enfants lors d’occasions très particulières : un anniversaire, Noël, la Saint-Nicolas ou un bon bulletin scolaire.

Norev
Harmonieuses couleurs de Simca Versailles

Au cours de mes trente années passées à la boutique, j’ai pu constater que pour certains clients, issus de milieu peu favorisés ou d’une famille nombreuse, l’accès aux Dinky Toys n’était pas possible. Pour ces derniers, il fallait se contenter des Norev. Certains en gardent une petite frustration et se rattrapent en tant que collectionneurs. D’autres, qui n’ont connu les Dinky Toys qu’à travers les vitrines de magasins de jouets, devenus adultes et collectionneurs, retournent naturellement vers les Norev, comme si les Dinky Toys leur étaient définitivement refusées.

Il faut avouer que depuis un certain temps, les productions de Villeurbanne rencontrent un succès populaire et ont vu leur cote s’envoler. Les différents ouvrages consacrés à la marque participent au phénomène. On est admiratif devant le succès du livre de Ms. Botté, Beaujardin et Darotchetche. Possédant quelques Norev, j’avoue que je me suis également pris au jeu.

Il me semble également important de relever que les Norev ont acquis leurs lettres de noblesse en entrant au musée.

Mon épouse et moi-même aimons les œuvres de la plasticienne Niki de Saint Phalle. De passage à Nice, nous en avons profité pour découvrir le Mamac (Musée d’Art moderne et d’Art contemporain de Nice), qui consacre une large place à cette artiste qui appartient au courant dénommé « nouveau réalisme ». Vous pouvez facilement admirer deux de ses œuvres à Paris : la fontaine Stravinsky près du centre Beaubourg ou la « nana » de l’opéra Bastille, au premier étage visible de l’extérieur.

En ce jour d’avril, nous sommes devant les premiers travaux de l’artiste : des montages, des collages, des tirs à la carabine. L’artiste intitulera cette série d’œuvres « peinture assemblage ». Ces travaux consistent à assembler dans un plâtre coulé des objets hétéroclites dont l’un donne au tableau son titre. L’ensemble est ensuite recouvert d’une couche de peinture, monochrome ou non. Enfin, des ballons gonflables emplis de peinture sont placés au dessus de l’œuvre. Celle-ci se trouve finalisée après que l’artiste, armée d’une carabine à plomb a crevé les ballons qui déversent son contenu au hasard, sur l’œuvre. On appellerait ceci aujourd’hui un geste ou une performance artistique.

Me voici donc, surpris et un brin hilare devant une œuvre dénommée « Tir à la raquette » (séance galerie 30 Juin 12 Juillet 1962). L’œuvre est composée d’une compression d’objets d’où émergent un petit marteau et un petit cavalier en plastique. La partie inférieure est occupée par une raquette de tennis d’enfant et une pelote de laine qui se dévide et dont un fil relie la compression. L’ensemble a été recouvert d’une couche de peinture or, avant que deux balles de carabine libèrent de la peinture bleue et rouge au niveau de la compression. Mais ce qui a attiré mon attention c’est la miniature en bas du tableau. L’artiste a introduit dans son œuvre une rare version mécanique de la Citroën 15cv de chez Norev.

Norev
Norev

Une autre construction présente à côté et dénommée « Plastics Circles and Rectangle » de 1961, met en scène une Peugeot 403 toujours de chez Norev. C’est une version simple, équipée d’une grande antenne. Sacrilège pour les uns, œuvre d’art pour les autres je vous laisse méditer sur ces collages. Le visiteur sera au choix surpris, enchanté, chagriné devant ces tableaux. Il ne peut demeurer indifférent à cet univers où l’enfance semble avoir gardé une grande place.

Les œuvres de Niki de Saint Phalle côtoient celles des représentants de l’école de Nice qui nous livrent une belle leçon de poésie, d’autodérision et de légèreté.