En entendant dernièrement la proposition d’Eva Joly, candidate à la prochaine élection présidentielle, de remplacer le défilé militaire du 14 juillet par un défilé citoyen, les paroles d’une la chanson de Georges Brassens me sont revenues à l’esprit. Dans une de ses œuvres de jeunesse, « La Mauvaise Réputation », il entonnait le couplet suivant :
« Le jour du 14 Juillet
Je reste dans mon lit douillet
La musique qui marche au pas
Cela ne me regarde pas »
Il ne m’appartient pas de polémiquer sur la double nationalité franco-norvégienne d’Eva Joly, ni de me prononcer sur l’opportunité de sa proposition. A mon niveau de collectionneur, je me contenterai de rappeler une caractéristique des pays Scandinaves. Lors de mes nombreux voyages, je me suis rendu compte que les Scandinaves n’affectionnent pas les jouets militaires. Ils n’ont pas la culture de ce type de jouets et les amateurs sont marginaux, à l’opposé de pays comme la Grande-Bretagne et les USA, où les amateurs de Dinky Toys militaires et de blindés Solido sont très nombreux. La relative faiblesse des prix demandés pour ce type de jouets sur les étals de bourses d’échange nordiques confirme ce phénomène.
Mes amis scandinaves m’ont expliqué que la vente de jouets représentant des engins militaires et des armes à feu a été interdite à l’aube des années soixante.
Essayant de vérifier cette information, je me suis adressé à l’ambassade du Danemark en France qui m’a très gentiment répondu. Elle m’a procuré les textes actuellement en vigueur qui datent de 2003 et ne concernent plus que l’interdiction de vendre des reproductions exactes d’armes à feu. Il est bien possible que les textes aient évolué au fil des ans. Certes, la firme Tekno a bien produit, juste après guerre, une série de camions Dodge. Mais par la suite, elle se contentera d’adapter aux livrées militaires des camions bien pacifiques : un Volkswagen minibus, un camion Volvo citerne et un Volvo express bâché. La seule exception réside dans un jouet ludique, sur la base de la grande échelle pompier Scania, double cabine, transformé en lance-missiles. Il est important de remarquer que tous ces véhicules sont aux couleurs de l’US Army et ont été destinés à l’exportation. Ils sont donc très rares au Danemark.
Pour le marché local, Tekno contournera la législation en étant le premier fabricant à proposer des versions aux couleurs des Nations-Unies, « UN » de couleur blanche… Ainsi le Volvo express sera accompagné par une Willys dont le conducteur sera équipé d’un « casque bleu » !
Malgré ses accords commerciaux avec Tekno, Solido ne pourra exporter ses blindés. Il y aura sans doute toujours des tentatives d’explications psychologiques pour faire le lien entre jouets militaires et agressivité. En ce qui me concerne, j’ai un souvenir bien précis. Mon approche de la collection, et mes premiers émois de collectionneur, je les ai connus avec des chars Solido. J’ai passé de longues heures à faire défiler ces petits chars accompagnés de figurines Starlux et Airfix. Je ne pense pas que cette activité enfantine ait perturbé mon équilibre. J’avoue quand même un forfait, qui a sans doute constitué le seul acte de violence de ma vie : celui d’avoir lancé à la tête de mon frère un AMX 30 de chez Solido, ce qui m’a valu une confiscation immédiate de l’objet du délit. Depuis, j’ai retrouvé mes jouets et des relations pacifiées avec mon frère. Il nous arrive désormais de chanter de concert cette autre chanson de Georges Brassens « Les deux oncles »
« Que les seuls généraux qu’on doit suivre aux talons
Ce sont les généraux des p’tits soldats de plomb
Ainsi, chanteriez-vous tous les deux en suivant
Malbrough qui va-t-en guerre au pays des enfants »
PS: ce beau coffret a été produit par « Les Incassables RF ». On ne peut exclure que cette firme se soit contentée de commander à un ou à plusieurs fabricants de jouets en aluminium les modèles qui le composent (les autos et le blindé semblent de fabrication différente). Ce type d’assemblage était assez fréquent chez les petits diffuseurs de jouets. La période de fabrication, juste après la seconde guerre mondiale, est sans équivoque. La présentation des Champs-Élysée à nouveau revêtus des drapeaux tricolores a dû être un argument de vente. L’illustration est très réussie.
Il faut bien remarquer la présence d’une auto d’état-major aux couleurs américaines alors que la cocarde tricolore n’est présent que sur le blindé.