Par-delà l’Hudson
Il y a des autos miniatures qui évoquent immédiatement des souvenirs. Collectionneurs, nous avons tous notre jardin secret. Pour ma part, je range dans ces modèles l’Hudson Commodore, et plus particulièrement une couleur peu fréquente de cette dernière.
Si la passion pouvait se mesurer au nombre de kilomètres parcourus afin de ramener un objet convoité, je pense que cette aventure servirait de graduation maximum !
Revenons vingt ans en arrière. L’histoire commence par une simple lettre. Le timbre à l’effigie de la reine d’Angleterre collé dans le coin supérieur droit de l’enveloppe permettait d’en identifier immédiatement la provenance. La lettre était accompagnée d’une photographie en couleur qui lui conférait tout son intérêt. Il faut bien se dire qu’à l’époque, faire une photographie d’un modèle exigeait d’avoir un appareil à objectif macro. Mieux valait s’abstenir en l’absence de cet accessoire, car le résultat annihilait toute envie d’acquisition. Aujourd’hui, avec un téléphone portable, vous pouvez déjà obtenir un cliché très satisfaisant !
L’expéditeur, mon ami Simon Haley, tenait commerce au pays des sœurs Brontë, dans le nord de l’Angleterre entre Manchester et Leeds. Il m’écrivait pour m’informer qu’il avait acquis une surprenante couleur de l’Hudson Commodore.
Le pavillon traditionnellement rouge clair était d’un ton chocolat du plus bel effet. La teinte du bas de caisse semblait également différente. Il me garantissait dans sa lettre d’accompagnement l’authenticité du modèle, ce dont je ne doutais point. Photo en main, j’ai décroché mon téléphone. Après un rapide échange, nous avons vite compris que nos calendriers respectifs ne nous laissaient pas beaucoup d’alternatives pour nous rencontrer.
Avec mon père, nous en avons conclu que nous pouvions aller voir ce modèle en profitant d’une manifestation qui se tenait en Allemagne ! Il suffisait de partir un jour avant, de faire le détour par Calais, monter dans les Highlands, entre Leeds et Manchester, puis redescendre et repartir pour Aix-La-Chapelle ! Et comme disait mon père : « A deux conducteurs c’est plus facile ! ».
Partis dans la nuit, la traversée se fit sans encombre, jusqu’au Dartford Tunnel. Nous avions rendez-vous avec Simon vers la mi-journée, ce qui permettait de rejoindre Douvres en fin d’après-midi. Nous n’avions pas prévu qu’un terrible carambolage impliquant plusieurs dizaines de véhicules surviendrait sur la M25 et qu’il conduirait à fermer totalement cet axe vital de Londres, toute la circulation devant alors s’écouler par une seule sortie.
Un cauchemar qui, dans le contexte routier anglais, prit vite une ampleur inconnue chez nous. A midi, nous étions encore dans la banlieue de Londres au lieu d’être chez mon ami Simon, à plus de 400 km de là ! Nous nous arrêtions régulièrement pour le tenir au courant de notre heure probable d’arrivée, sans cesse remise en cause car les embouteillages se succédaient.
Nous avons finalement touché au but vers 18 heures. Il nous avait gentiment attendus et la miniature était superbe. Munis de notre précieuse acquisition, nous sommes arrivés en Allemagne en pleine nuit et pas très frais.
Une fois rentrés en France et l’auto en vitrine, nous ne gardions en souvenir que les bons côtés de ce périple mais il explique sans doute pourquoi l’Hudson Commodore tient une place particulière dans mes Dinky Toys anglaises.
(lire la suite sur l’Hudson Commodore)