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L’odyssée en C4

Episode 3. L’odyssée en C4.

La Citroën C4 marqua son époque. André Citroën qui n’était pas avare dans la communication aurait même pu utiliser l’anecdote que je vais vous conter s’il en avait eu connaissance.

En 1929, Paul Signac est un peintre reconnu.Tout a commencé en 1881, mais c’est la rencontre avec Georges Seurat en 1884, qui va influencer son travail et sa technique qui s’oriente alors vers la division des couleurs. Le succès auprès des collectionneurs va être rapide.

Depuis toujours il est passionné par la navigation. Il possédera d’ailleurs toute sa vie des bateaux.

En 1929, il se lance dans un projet qu’il a en tête depuis longtemps : immortaliser par des aquarelles les principaux ports de France, de la Manche à la Méditerranée, à la manière de la commande que Louis XV avait passée à Joseph Vernet. Il parle de son projet au collectionneur Gaston Lévy, cofondateur des magasins Monoprix. Ce dernier est conquis. Il est convenu que le peintre réalisera dans chaque port deux aquarelles. Gaston Lévy en choisira une et Signac gardera l’autre.

En toute logique on aurait pu penser qu’un amateur de navigation de plaisance comme Signac allait choisir un beau voilier pour effectuer ce grand tour. Lors de l’exposition consacrée au peintre au musée Jacquemart-André, quelle ne fut pas ma surprise d’apprendre que Gaston Lévy avait mis à la disposition de Signac un chauffeur et « la berline la plus élégante de l’époque » (sic) , la Citroën C4 , afin d’effectuer ce périple qui prendra bien plus de temps que prévu. Il devait durer six mois, l’aventure s’étalera sur près de deux ans ! On peut y voir la preuve de l’agrément d’un voyage en C4.

La reproduction miniature de la C4 est éligible à mon panthéon des 10 miniatures ayant marqué l’histoire du jouet français. Et cela à plusieurs titres.

En premier lieu on peut citer l’apparition des jouets commandités par un constructeur automobile.

André Citroën avait le don de la communication et de la publicité. C’est lui qui déclarait que les premiers mots que devaient prononcer un enfant étaient : « papa, maman, auto ! », ce qui devint rapidement : « papa, maman, Citroën ! C’était un précurseur.

Son approche du jouet est assez déconcertante, surtout pour l’époque. Citroën a surpassé tous ses concurrents. Avec son « model A » (1927), contemporain de la C4, Ford, apparaît bien timoré. Certes Tootsietoys et Barclay réaliseront un boîtage spécifique pour Ford avec comme inscription « The new Ford ».

Mais ce n’est rien par rapport à Citroën. André Citroën est conscient qu’il existe deux créneaux dans la vente de jouets. Il y aura donc deux gammes et des C4 pour toutes les bourses : des modèles en tôle, sophistiqués, avec parties ouvrantes et éclairage électrique, de grand format (1/20 environ) et des modèles au 1/43, de fabrication plus simple, plus économique.

Ces derniers possèdent un châssis en tôle, commun à tous les modèles. Pour la carrosserie Citroën opte pour une nouvelle matière : la plastiline (appelée vulgairement plâtre et farine) qui permet d’injecter à faible coût des carrosseries différentes et très réalistes. Ces carrosseries sont maintenues par un astucieux système d’agrafes au niveau des ailes arrière et une patte repliée sur le châssis au niveau du capot avant.

Les détails sont traités de manière artisanale et rendent le jouet vivant : les passagers de la torpédo, les cochons dans la bétaillère, les choux dans la ridelle ou le sable collé dans la benne sont quelques exemples.

Finis les personnages à plat figurés en tôle lithographiée, place aux personnages en trois dimensions. Une première en France.

Pour enfoncer le clou, et donner à son jouet un aspect encore plus réaliste, Citroën fait installer sur ces C4 une calandre en tôle emboutie d’une très grande finesse. Ce modèle marque une étape importante dans l’histoire du jouet français.

La constitution de coffrets contenant 6 modèles différents ouvre une nouvelle page de l’histoire du jouet que nous étudierons la prochaine fois.

Ces C4 étaient des jouets bon marché. Le père d’un ami d’enfance se souvient avoir acquis un camion Rosalie dans un distributeur à tirette en échange d’une pièce de 1 Franc. Nul doute que les C4 furent  vendues dans ce type de présentoir.

 

Il ne faut pas oublier, et là encore c’est une première, celles distribuées dans les concessions Citroën. Elles portent souvent le nom et l’adresse de la concession sur un carton, spécialement conçu qui se plaçait sur le châssis.