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De la rigueur Allemande

Avec mon épouse, nous aimons flâner dans les musées. Nous éprouvons un plaisir commun à admirer des peintures, à les commenter. Parfois cependant, nous nous chamaillons sur la description d’une couleur, d’une nuance.

Coffret Wiking Volskwagen
Coffret Wiking Volskwagen

L’exercice qui consiste à donner la dénomination exacte d’une couleur est loin d’être facile. Il faut déjà constater que la perception des couleurs dépend de la vue de chacun. Au magasin, les clients me surprennent quelquefois par l’appellation qu’ils donnent à certains coloris.

Je me garderais bien de leur jeter la pierre ayant moi-même un jour décrit sur le site, de bonne foi, une voiture de couleur « faune ». Seuls mon fils et un client ont relevé l’erreur. J’avais inconsciemment mixé la couleur « fawn », issu de l’anglais et la couleur fauve… le mot m’avait semblé représentatif de la couleur.

Sur ce point, j’ai souvent vanté dans ma boutique la rigueur allemande. Il y a de nombreuses années, j’avais fourni à Johannes Schwörzer des documents et un listing des couleurs de miniatures que nous avions en vue de l’élaboration de son livre sur les Wiking au 1/40ème. En retour, ce dernier m’avait offert son ouvrage ainsi qu’un superbe nuancier contenant toutes les teintes utilisées par Wiking pour ses productions. Cela permet d’être précis dans les descriptions : il n’y a ainsi aucun risque de confondre le bleu K408 « adriablau » et le bleu K418 « lilablau ». Le recours à un nuancier aurait ainsi évité les erreurs qu’on a pu relever dans le livre sur les Solido. Cependant, si les ouvrages germaniques relatifs à la firme Wiking sont des petits bijoux de précision en ce qu’ils alignent colonnes, tableaux et chiffres, je préfère finalement un ouvrage avec du texte, vivant, comme celui qu’à écrit Jean-Michel Roulet sur les Dinky Toys . Il me semble que l’on mémorise mieux un texte émaillé d’anecdotes que le contenu de tableaux Excel.

Wiking a trouvé avec Volkswagen un important marché. J’ai choisi de vous présenter aujourd’hui la gamme de 1953, celle qui a vu l’introduction de la vitre ovale, sous la référence 210 et des premières versions cabriolet, sous la référence 151 apparues quasi simultanément en 1954 chez Wiking. A l’origine, les véhicules sont dépourvus de vitrages. La vitre arrière rectangulaire n’apparaît chez le fabricant berlinois qu’en 1959. Les deux premières années des productions issues du nouveau moule se font sans vitrage. Ce choix, délibéré de la part du commanditaire Volkswagen, s’explique par une préoccupation publicitaire : Volkswagen souhaite que les enfants, destinataires du produit puissent s’imaginer au volant et contempler l’aménagement intérieur fort détaillé pour l’époque.

La version injectée en plastique transparent, Das Glaserne Auto, pousse la logique à l’extrême. Ces autos sont démontables afin de faire apprécier leur intérieur. Un geste très précis, une légère pression sur le bas du capot vers l’intérieur permet de désolidariser une petite excroissance en plastique située à l’extrémité du capot.

J’ai souvent réalisé cette opération devant des gens ne connaissant pas la flexibilité du plastique. C’est toujours un peu impressionnant. Il faut savoir que Wiking ne maîtrisait pas l’injection du plastique teinté métallisé dans la masse et qu’il a réalisé des versions peintes. On remarque sur les voitures de cette période des traînées donnant aux véhicules une allure de finition médiocre. Elles sont bien moins fréquentes. Il y a de longues années certains collectionneurs allemands doutaient de l’existence de ces versions. C’est d’ailleurs en parlant de ces dernières que j’ai sympathisé avec l’auteur du livre. En effet, c’étaient vraisemblablement des versions export.

Au cours de mes voyages en Scandinavie et aux USA j’ai pu découvrir de nombreuses variantes intéressantes que j’ai pu identifier grâce au nuancier offert par mon ami allemand.

Hotchkiss Grégoire et les filles

C’est l’ouverture de l’exposition sur les jouets au Grand Palais qui m’a inspiré cette chronique. Les organisateurs ont établi le parcours de visite en fonction du destinataire du jouet. Ainsi, les jouets pour les filles et ceux qui sont pour garçons ont été séparés.

palette de couleur d'Hotchkiss Minialuxe
palette de couleur d’Hotchkiss Minialuxe

Je me suis alors posé cette question. Qu’est-ce qu’un jouet pour fille ? Qu’est-ce qu’un jouet pour garçon ? Quels sont les critères à la base de cette classification ? Certes, instinctivement je n’ai pas acheté de poupée à mon fils et je n’ai pas offert de petites autos à ma fille. Nous sommes ainsi conditionnés. Les dinettes, les poupons et les aspirateurs miniatures sont-ils obligatoirement réservés aux petites filles et les autos, les armes à feu ne sont-elles destinées qu’aux petits garçons ?

En y réfléchissant, c’est vrai que dès la naissance, notre société nous conditionne. Par exemple, prenons la couleur des layettes. Chaque sexe a sa couleur. Le rose aux filles et le bleu aux garçons. Et gare aux inversions.

Pourtant, il me semble que certains fabricants de miniatures automobiles ont cherché à s’attirer les faveurs des petites filles. La firme Dinky Toys a-t-elle un jour cherché à élargir sa clientèle ? S’est-elle au moins questionnée sur le sujet ?

J’ai interrogé les femmes qui m’entourent. Deux caractéristiques les attirent : la présence de petits accessoires amovibles et les couleurs acidulées. La firme qui paraît satisfaire au mieux ces critères est Corgi Toys. Ce n’est certainement pas un hasard si cette firme a eu un succès planétaire.

A l’échelle nationale, je songe à une petite firme française, plus anecdotique. J’ai choisi de vous présenter des Hotchkiss Grégoire de chez Minialuxe. Si l’auto n’est pas franchement féminine, Minialuxe a su la revêtir de couleurs déroutantes.

Il en sera d’ailleurs ainsi de toute la production de la gamme Minialuxe de la même époque. Il est intéressant de constater que son grand concurrent, Norev, également positionné sur le créneau de l’auto en plastique, suivra la voie ouverte par Minialuxe. Ainsi aux teintes assez fades du début de la production Norev succèderont des couleurs vives. Les couleurs adoptées par Minialuxe ne sont pas réalistes.

Faut-il y voir la raison pour laquelle la contemplation de ces jouets procure du bonheur ? Un état proche du ravissement s’empare de nous. Nous regardons ces couleurs improbables le sourire aux lèvres. Je suis tenté de faire un parallèle avec le vernis à ongle de nos compagnes. A des années lumière du vernis rouge ou incolore de nos mères, elles s’émerveillent désormais devant des teintes étranges. J’avoue ressentir quelquefois de l’incompréhension devant l’extravagance de certaines nuances. Pourtant, certaines teintes semblent sortir de chez Minialuxe. J’ai ainsi vu ma fille et ma femme arborer fièrement un jaune canari, un rouge orange et même un bleu moyen…des teintes que n’aurait pas renié le responsable du nuancier chez Minialuxe. L’autre critère, permettant d’attirer le regard des petites filles, c’est celui des accessoires. Il est également présent chez le fabricant français, notamment dans la version présentée qui est équipée d’une galerie et de bagages.

Vous allez me dire, et vous aurez raison, qu’il y a quelque chose de sexiste dans le fait de considérer que les valises c’est une affaire de femmes. Il n’en reste pas moins que cette série de Minialuxe mérite d’être découverte et même montrée à vos compagnes. C’est le moment de partager avec elles votre passion de la collection.

Une Volkswagen au pays de Shéhérazade

Je n’aurais jamais imaginé, le jour où j’ai acquis cette miniature, qu’elle m’aurait fait autant voyager. Voilà un bon slogan pour la firme de Wolfsburg, jamais à court d’idées pour ses campagnes publicitaires !

Volskwagen Magasin Ferdowsi
Volskwagen Magasin Ferdowsi

L’histoire commence dans une salle des ventes de province, où, au milieu de lots hétéroclites contenus dans des sacs plastiques, j’ai été attiré par un objet me rappelant les miniatures produites par Wiking pour le compte de Volkswagen. Volkswagen était en effet en relation avec Wiking pour la production de modèles à usage promotionnel. La marque a par ailleurs toujours accordé de l’importance à la publicité. Pour mettre en évidence la simplicité de la conception de la vraie voiture, il avait paru judicieux de proposer des miniatures en plastique transparent. Ce principe a inspiré de nombreux petits fabricants de jouets. Nous connaissons notamment une Ford Vedette 1949 de fabrication française « la voiture démontable «  et une étrange berline anglaise produite par « PR » et vendue dans un très beau coffret intitulé « The Glass Car ». La présentation de cette dernière ressemble étrangement aux coffrets produits par Wiking.

Toute la gamme Volkswagen a été déclinée selon le même principe par Wiking. De très nombreux autres petits fabricants reprendront l’idée de la carrosserie transparente et s’inspireront même directement de la reproduction de la Volkswagen de Wiking. Ainsi, Boco au Danemark, proposera des coffrets avec la petite berline de Wolfsburg. Par la suite, ce même Boco inspirera d’autres fabricants anonymes en Scandinavie. Il est très difficile de dresser une liste des productions de cette nature.

Comme je suis très intéressé par la découverte de variantes de ce type de véhicules, j’ai été naturellement attiré par l’objet. La surprise fut de taille.

La reproduction était de belle qualité, mais c’est surtout l’inscription sur le pavillon qui rendait l’objet intéressant. Son côté exotique et mystérieux m’incite à vous la présenter aujourd’hui. J’ai cherché un certain temps un support permettant de la mettre en valeur sur les clichés. Mon choix s’est finalement arrêté sur trois petits porte-clefs aux allures d’Afrique du Nord découverts tout récemment. Il ne restait plus qu’à traduire l’inscription du pavillon. J’ai commencé par saisir de la question la mère d’une amie de ma fille qui pensa y lire le nom d’un prophète du Coran, mais j’ai cherché sans succès des renseignements complémentaires au sujet de ce prophète. Mettant à profit mes trajets de banlieusard, je me suis permis d’interroger lors d’un voyage en RER mon voisin qui lisait consciencieusement un ouvrage en langue arabe. Je lui ai présenté les clichés de la voiture, mais malgré sa bonne volonté, il n’a pas réussi à traduire les signes énigmatiques. Devant mon air dépité, il m’a conseillé d’aller à la grande mosquée. J’ai envoyé un courriel mais il est demeuré sans réponse.

Nullement découragé, j’ai voulu frapper à la porte de l’Institut du Monde Arabe. Mon jour de congé coïncidant avec la fermeture de l’établissement, j’ai d’abord trouvé porte close.

A ma seconde tentative, un autre jour de la semaine, j’ai rencontré un monsieur charmant qui, après un examen attentif des photos a conclu, sans aucune hésitation, que le message du pavillon était écrit en Persan. Il a réussi grâce à ses connaissances personnelles à déchiffrer de manière phonétique la seconde partie du texte. Par contre, la Perse n’étant pas reliée en matière culturelle au monde arabe, aucune autre personne de l’institut ne semblait capable d’effectuer une traduction aboutie.

Il m’a donc invité à m’adresser à l’ambassade de la République Islamique d’Iran. Un premier courriel est demeuré sans réponse. J’ai réitéré ma demande auprès de plusieurs services différents de l’ambassade. C’est finalement le service économique qui m’a répondu, m’indiquant qu’il s’agissait d’un grand magasin de Téhéran du nom de « Magasin Ferdowsi ». Ce nom est également celui d’un célèbre poète iranien.

Je remercie donc l’ambassade de m’avoir accordé un peu de son temps pour me permettre de vous offrir cette explication. L’aventure aura duré en tout six mois. Elle ne fait que renforcer le plaisir de posséder cette miniature malgré son caractère anodin.

Oxford Street – Morris Oxford

L’arrivée de la finition bicolore va donner un vrai renouveau à ce beau modèle. Il me semble que dans le choix des finitions bicolores proposé par Dinky Toys, il y a toujours une version sage et une version extravagante.

Concernant la Morris Oxford, la version framboise et crème est plus déroutante que la version crème et vert.

Dinky Toys Morris  Oxford
Dinky Toys Morris Oxford

Pour les amateurs de variantes, il faut signaler la présence de deux découpes de peinture différentes car la délimitation va évoluer au fil de la production. Ce phénomène touchera tous les modèles de cette période finis en deux tons. Il est fort probable que cette évolution résulte d’une modification du gabarit servant à délimiter les deux couleurs et non d’un mauvais positionnement de ce dernier.

Dans le cas de la Studebaker Land Cruiser on dénombre trois découpes différentes. C’est certainement la nécessité d’obtenir un maniement plus aisé pour le personnel préposé aux finitions qui entraînera ces modifications.

Enfin, une dernière et assez énigmatique variante vous est présentée. De finition bicolore, le modèle reçoit une découpe proche de celle réalisée par le concurrent Corgi Toys sur la Morris Cowley. Le capot et la malle de l’auto ont été surchargés d’une couche de couleur crème qui recouvre la peinture verte. Cette couche a été appliquée à l’usine.

La découverte d’autres exemplaires pourrait laisser penser à l’existence d’une série. Si vous possédez des variantes similaires, n’hésitez pas à me contacter.

Du Devon au Sommerset

Quelle bonne idée a eu la firme Austin de donner à sa gamme automobile le nom de régions anglaises! L’Austin Sommerset est apparue dans la gamme Dinky Toys en 1954 sous la référence 40J. C’est la dernière série 40. Il y a fort à parier que les premiers exemplaires sous cette référence ne furent livrés qu’en conditionnement par 6 avant de recevoir, sous la référence 161, un étui individuel.

Austin Austin Sommerset reprenant la couleur de l'Austin Devon. Rare !
Austin Sommerset reprenant la couleur de l’Austin Devon. Rare !

L’Austin Sommerset a d’abord adopté des couleurs classiques : bleu pâle ou rouge. Il faut cependant signaler que pendant une très courte période, la version bleu pâle a été équipée de jantes de couleur crème et qu’elle est beaucoup moins fréquente avec cette caractéristique. Il a également existé une nuance bleu foncé qui elle aussi est plus rare.

Ultérieurement, à l’instar d’autres modèles de l’ex série 40, les Austin Sommerset ont reçu une finition bicolore. Comme pour les Austin Devon, les teintes retenues ne laissent pas insensibles.

En effet, en comparaison de son nouveau concurrent qu’est Corgi Toys, et qui présente aussi des autos dotées de cette finition bicolore, il est certain que le fabricant de Liverpool a utilisé une gamme de couleurs très tranchées. Si j’ai actuellement un regard bienveillant sur ces autos, je ne suis pas certain que cela fut le cas pour les acheteurs potentiels de l’époque. Il est probable que les tons plus sourds adoptés par le fabricant de Swansea ont eu la préférence des consommateurs.

Enfin, il me faut vous présenter un essai de couleur intéressant en ce qu’il emprunte la finition bleu et jaune finalement retenue par l’Austin Devon. Cela m’amène à avancer une hypothèse. Dans la fiche sur l’Austin Devon, j’avais fait observer que le bureau d’étude avait sans doute dû déployer des trésors de persuasion pour convaincre la direction. On peut imaginer que pour parvenir à son but le bureau d’étude proposa une palette de couleurs très étendu pour la finition de ces autos miniatures bicolores. Cet exemplaire pourrait en être la preuve. On peut donc penser qu’il y a eu aussi une Austin Sommerset fuchsia et vert « Harrod’s ». Ainsi, imaginons qu’une fois définies les harmonies de couleur, les gens du bureau d’étude les ont appliquées sur les modèles destinés à recevoir cette finition bicolore. Malheureusement, il semble que la version bleu et jaune que nous possédons soit le seul survivant de ces essais.

Signalons pour les amateurs que cette auto possède un châssis dépourvu d’inscription et une finition au pochoir des plus classiques. Nous découvrirons peut-être un jour d’autres essais de cette fantastique série.