C’est en écoutant l’opéra de Mozart, Don Giovanni, que m’est venue l’histoire du jour. Dans le premier acte le valet de Don Giovanni, Leporello, énumère à Donna Elvira toutes les conquêtes féminines de son maître. La liste est impressionnante.
Leporello annonce par pays le nombre de femmes ayant succombé aux charmes de Don Giovanni. On imagine aisément le valet notant sur son calepin les faits d’armes de son maître. Dans la version filmée de cet opéra réalisée par Joseph Losey, Leporello déploie un parchemin d’une longueur infinie qui se déroule du haut des marches d’un palais. C’est une scène d’une esthétique soignée.
Cette aria, je n’ai pu m’empêcher de la transposer dans notre modeste univers de la collection. Nous avons souvent été questionnés sur le nombre de modèles que nous avions réunis. Or nous n’avons jamais vu la collection sous cet aspect comptable. Il faut bien avouer que je suis fâché avec les chiffres, les mathématiques n’ont jamais été mon fort.
J’ai cependant connu des collectionneurs qui numérotaient pièce après pièce leurs nouvelles acquisitions et qui étaient ainsi en mesure d’indiquer au modèle près le nombre de miniatures qui composaient leur collection.
Cet exemple illustre à nouveau le fait que chaque collectionneur est différent des autres. Chacun privilégie l’aspect de la collection qui, primordial de son point de vue, est secondaire pour les autres. A mes yeux une collection ne s’apprécie pas en rapport avec la quantité de modèles qu’elle rassemble mais pour la personnalité du collectionneur qu’elle révèle. Au final, la seule chose qui importe, est que chacun y trouve du plaisir et conserve ce plaisir, longtemps après l’acquisition de la pièce convoitée.
Ce dernier point me rappelle une anecdote. Alors que j’étais adolescent, Jean-Michel Roulet nous avait invités à son domicile mon père et moi afin de nous présenter sa superbe collection. Nous étions des collectionneurs débutants. Je me souviens très bien d’une de ses remarques. Il indiquait que pour lui, le plus important était la prochaine miniature qui allait enrichir sa collection. Celles qui étaient déjà acquises avaient perdu une partie de leur intérêt. Cela m’avait troublé et je guettais le moment où je n’allais plus avoir d’intérêt pour les miniatures déjà accumulées. Cela ne s’est jamais produit, j’ai toujours autant de plaisir à regarder les modèles acquis il y a près de quarante ans. Mais je comprends très bien cette volonté d’aller toujours de l’avant qu’avait Monsieur Roulet.
A suivre