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Swinging London – 1

Swinging London : ça balance à Londres !

Ou les belles couleurs de l’Austin Devon Dinky Toys

A l’occasion d’un récent séjour dans la capitale anglaise, j’ai pu constater combien les clichés sur le mauvais goût vestimentaire des anglais étaient dépassés. Si la population de la « City », cœur économique du pays, arbore de stricts costumes aux couleurs conventionnelles, le reste de la population s’affiche dans des harmonies auxquelles nous ne sommes pas habitués.

Austin Devon
Austin Devon

Une différence majeure entre nos deux civilisations semble être le fait que les Anglaises sont totalement décomplexées. Si chez nous l’harmonie du bon goût s’étend du noir au taupe en passant par le gris, de l’autre côté du Channel, on laisse parler ses envies de couleurs. C’est parfois étrange, déroutant, mais c’est toujours innovant et souvent très joyeux ! C’est peut être cette capacité à s’habiller sans se soucier du regard des autres, à arborer des couleurs vives, des textures étranges et des accessoires surannés qui permet à nos amis anglais de garder le moral malgré les soucis qui ne manquent pas outre-Manche.

Peut être suffirait-il de prescrire en France le port des collants orange et de la chemise à pois vert pomme pour voir remonter le moral de la nation.

En voyant le spectacle coloré de la rue et rehaussé par l’éclat du soleil, je n’ai pu m’empêcher de faire un lien avec les fameuses autos bicolores de la série 40, produites par Dinky Toys Liverpool. Dans l’histoire de la production de jouets, il me semble qu’aucun fabricant n’est allé aussi loin dans l’audace des harmonies proposées. Je m’interroge encore : « Comment les gens du bureau d’étude de Binns Road ont-ils pu convaincre la direction d’adopter ce choix de couleurs ? Les Austin Devon fuchsia et vert « Harrod’s » ou orange et bleu France sont une petite provocation : nul n’a pu rester insensible devant ces modèles ; on aime ou on n’aime pas, mais en tout cas on réagit, ou on agit.

J’ai sur ce point une anecdote savoureuse en réserve. Il y a une vingtaine d’années, un monsieur originaire de Versailles me contacte afin de se séparer de la collection qu’il avait constituée alors qu’il était encore adolescent. Grâce à la profession de son père, il avait eu la chance de se rendre assez régulièrement en Grande-Bretagne. Il avait ainsi pu acquérir de nombreuses miniatures originaires de Liverpool. Dans les années 50-60, beaucoup de ses petits camarades ignoraient jusqu’à l’existence de cette production d’outre-Manche : il n’y avait pas d’importation pour ne pas nuire à l’unité de fabrication de Bobigny.

Ainsi, tout jeune homme, il avait déjà accumulé une belle série d’anglaises, qui faisaient à juste titre la fierté de sa collection. Il n’avait bien sûr pas manqué de m’en faire part avant mon déplacement.

Sur place, je pus constater les faits : de belles miniatures, précieusement conservées. Ainsi, outre les inévitables petits fourgons Trojan tellement représentatifs de la Grande-Bretagne, je trouvais des camions Guy et de superbes autos appartenant à la classique série 40, toutes conditionnées en étuis individuels et datant donc de la fin des années 50. En effet, Binns Road avait maintenu un peu plus longtemps que Bobigny, ses anciens modèles en conditionnement par 6, probablement pour des raisons de coût ou par commodité pour l’expédition. Les étuis individuels et la renumérotation indiquent de ce fait, une fin de carrière pour ce type de modèles.

Notre homme, soucieux d’harmonie et de bon goût avait opté pour les couleurs classiques. Ainsi la 40G Morris Oxford était vert anglais, l’Austin Sommerset d’un bleu clair tout simple.

Lorsque je vis le boîtage de l’Austin Devon, arborant les fameuses robes bicolores décrites un peu plus haut, mon cœur s’est mis à palpiter. En effet, ces finitions bicolores sont prisées par les collectionneurs, et pour le marchand que je suis, il est toujours plaisant d’en avoir une à proposer à la vente. Lorsque j’ouvris la boîte, ma déception fut immense. Notre homme m’expliqua qu’à l’époque il avait été dans l’impossibilité de trouver une finition acceptable. Il avait donc acheté la version décadente fuchsia et vert « Harrods », et pour remettre cette miniature dans le droit chemin, l’avait repeinte… en noir !

Certes le travail était de qualité, mais en fait de miniature aux couleurs pimpantes à proposer à mes clients il ne me restait qu’une boîte arborant la pastille bicolore.