English panel van

J’ai le souvenir d’avoir été réellement enchanté par le livre que Cecil Gibson, un des pionniers de la collection a publié au milieu des années soixante. Cet ouvrage nous entraînait dans l’univers des véhicules industriels réduits dont l’échelle allait du 1/43 au 1/60.

Dinky Toys English panel van
Dinky Toys English panel van PKZ

L’auteur avait choisi des thèmes qui lui étaient chers, au sein desquels se trouvaient notamment les fourgons français. La page qui leur était consacrée, intitulée en français « fourgons français », tranchait avec le reste du livre, car elle mettait à l’honneur des camionnettes 2cv de chez JRD et des Renault 1000Kgs de chez CIJ. Pour un anglo-saxon, il est évident que l’apparence de ces modèles leur confère une place à part. En tant que français, nous ressentons le même étonnement devant la merveilleuse série des Trojan, Austin et Morris de chez Dinky Toys.

Voilà pourquoi aujourd’hui, en réponse à la page « fourgons français » de Cecil Gibson, j’ai décidé de consacrer une page du blog aux « English panel vans » et d’y parler du Trojan de chez Dinky Toys. Il faut avouer que ce petit fourgon a un charme fou. Il symbolise à merveille l’univers des fourgonnettes que l’on pouvait croiser outre-Manche dans les années cinquante. Je doute que Trojan ait d’ailleurs tenté d’exporter son véhicule. Ce dernier est apparu en 1948, et c’est cette version qu’a immortalisée Dinky Toys. C’est un fourgon de 1 tonne. Lorsque la motorisation deviendra vieillissante elle sera remplacée par un moteur Perkins. L’usine Trojan sera rachetée en 1959 par Peter Agg qui préfèrera consacrer toute la force de production de l’usine à la fabrication de scooters Lambretta sous licence, avant d’acquérir les droits pour fabriquer la Heinkel (micro car).

Dinky Toys a proposé plusieurs déclinaisons de ce modèle, toutes réussies. D’abord distribué en boîte de six, le Trojan recevra ensuite un étui individuel, sauf l’Oxo ; c’est d’ailleurs le moins fréquent de la série. C’est du moins ce que je croyais jusqu’au jour où, en Suisse, j’ai trouvé une version « PKZ ». Sous ce sigle qui pourrait désigner un produit chimique se cache une chaîne de magasins de vêtements. Selon toute vraisemblance, il s’agit d’un code 2 ; si la peinture est d’origine Meccano, le décalcomanie a été apposée ailleurs. La version que j’avais trouvée était en fait un modèle prévu pour recevoir la décoration Esso. Un client suisse m’a confirmé que les modèles étaient offerts pour l’achat de vêtements dans cette chaîne de magasin. Ce client m’a également raconté que PKZ, profitant de l’engouement qu’il suscitait auprès de ses petits clients, avait tellement majoré ses prix qu’il était plus économique d’emmener l’enfant dans un autre magasin de vêtements et d’aller ensuite acheter une Dinky Toys chez Franz Carl Weber.

Dernièrement, j’ai pu acquérir une autre version assez intéressante : sûrement pour des raisons d’économie, un seul décalcomanie a été apposée, sur le pavillon, à la place des deux positionnés de chaque côté des flancs du fourgon. Le plus curieux est ailleurs : une observation attentive montre que ce fourgon est rouge unicolore. Or, il n’y a que la version « Dunlop » qui réponde à ce critère, mais ce dernier a reçu une tampographie. Il est donc évident que PKZ a commandé une certaine quantité de fourgons unicolores sans marquage. Il est très difficile de dresser une liste des modèles Dinky Toys ayant reçu le décalcomanie PKZ. Il faut juste mentionner que deux types distincts de décalcomanie ont été fabriqués. Le premier est celui que l’on trouve sur le Trojan. C’est un ovale cerclé avec les lettres PKZ. Le second est composé des trois lettres PKZ de couleur blanche sur un fond transparent. PKZ appliquera alors sur les miniature de couleur blanche le décalque sur le pare brise !

Mea Culpa

J’ai été contacté il y a quelque temps par Claude Thibivilliers. C’est toujours un plaisir de s’entretenir avec une personne qui a travaillé chez Meccano France. M. Thibivilliers a tenu un rôle important au bureau d’étude entre 1965 et 1971. Il a un avantage par rapport aux autres personnes que j’ai eu la chance de rencontrer : c’est un passionné qui possédait à son entrée chez Meccano une culture automobile solide. Il suffit de voir ses créations personnelles dans la revue Modélisme pour le comprendre.

Portes-clefs Stradair
Essayez la gamme stradair

Pourtant, l’appel de M. Thibivilliers fut comme une douche froide pour moi. Le ton était sec, il souhaitait aborder deux sujets : la Citroën DS19 présidentielle et son cortège et le Berliet Stradair, deux modèles dont j’avais parlé dans dans les blogs 205, 206, 207 et 35.

S’agissant de la Citroën DS19 présidentielle, il contestait l’authenticité du modèle présenté dans le blog. Claude Thibivilliers possèdait encore l’exemplaire photographié dans Modélisme, et pensait qu’il n’existait qu’un seul exemplaire. Il estimait que le blog remettait en question l’authenticité de son modèle. J’ai bien relu ce texte, pour vérifier qu’il ne lui portait pas préjudice. Or, j’avais bien signalé que manifestement deux autos au moins existaient. La seule chose que je pouvais affirmer était que celle en ma possession venait de la rue du Maroc. Je n’ai jamais eu l’intention de contester l’authenticité de la DS de M. Thibivilliers.

Beaucoup plus intéressantes furent les précisions qu’il m’apporta au sujet du Berliet Stradair. J’avais écouté les commentaires de Robert Goirand et d’autres collectionneurs de la première heure et j’en avais déduit que ce Stradair benne, comme l’autobus Berliet parisien ou le Saviem porte-fer avaient été injectés en plastique pour tester le moule avant d’éventuelles corrections. Il n’en est rien. M. Thibivilliers m’a expliqué en détail le procédé de fabrication. Je lui ai offert de publier un texte qu’il écrirait sur le sujet mais il ne l’a pas souhaité. Je me propose donc de vous livrer aujourd’hui toutes les précisions qu’il m’a données.
Pour cela, il faut se pencher sur la carrière de M. Thibivilliers. Elle commence chez Gilac, au bureau d’étude. Il connaissait donc la technique de fabrication des moules destinés à injecter du plastique. Fort de cette expérience, il est parti aux USA où vivait un membre de sa famille. Il y a trouvé du travail dans une entreprise qui fabriquait des maquettes plastiques. Là-bas, il a appris à travailler le polystyrène étiré. De retour en France, il est aussitôt embauché par Meccano. La direction a été séduite par ces nouvelles techniques d’ébauche des prototypes, elle y trouvait son intérêt. En effet, cela coûtait bien moins cher de payer un salarié que de devoir retoucher les moules une fois gravés lorsqu’ils présentaient un défaut. Il faut aussi comprendre que cette époque est favorable aux modèles sophistiqués. M. Thibivilliers m’expliqua qu’il avait réalisé le Stradair benne présenté dans le blog 35 avec des feuilles de polystyrène étiré d’épaisseurs diverses et de couleur blanche, le tout avec une tolérance de 0,5 mm par rapport au plan définitif. Cette réalisation révéla un défaut de fabrication qui empêchait la benne de bien fonctionner. Il précisa que sur le bus Berliet ce fut bien pire.

Il s’agit donc d’un véritable travail d’orfèvre, et non comme je l’ai indiqué par erreur d’une injection en plastique. C’est également Claude Thibivilliers qui a réalisé la version teckel, celle du Stradair surbaissé. Un document paru dans le « Charge Utile » hors série Berliet 1967 montre des photos du camion. Sur l’une d’entre elles, mon regard a été attiré par un détail : l’adresse de l’entreprise inscrite sur les portes du véhicule. Cette dernière, spécialisée dans les transports spéciaux, était établie avenue Henri-Barbusse à Bobigny. Claude Thibivilliers à qui je rapportais cette précision se souvint qu’un collègue lui avait suggéré cette déclinaison après avoir vu ce camion tout près de chez Meccano. Le projet a tourné court. D’ailleurs, la cabine n’a même pas été modifiée alors que ces « Teckels » avaient un capot moteur bien plus court que les autres modèles. Je profite de la présentation de ce prototype pour vous montrer une autre couleur qui ne fut pas retenue par Meccano. Il existe aussi une version de couleur bleue. J’adresse tous mes remerciements à M. Thibivilliers pour ces intéressantes précisions et les rectifications qu’il m’a permis d’apporter.