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Porsche F2

Porsche F2

La belle opportuniste

La firme Porsche est née juste après la seconde guerre mondiale. Dans cette période troublée, le pari consistant à proposer des autos à vocation sportive pouvait paraître risqué. Le succès ne s’est pourtant pas fait attendre. La firme de Züffenhausen a bien évidemment choisi le vecteur de la compétition automobile pour promouvoir ses produits. La 356 s’est très rapidement forgé un palmarès qui mettait en lumière ses qualités routières.

cendrier humoristique BP avec Porsche 718
cendrier humoristique BP avec Porsche 718

Porsche a donc inscrit son coupé dans les grandes compétitions automobiles de l’époque. La direction avait compris que ce choix constituait le moyen le plus efficace pour faire connaître ses produits auprès du grand public. A l’origine l’usine préparait des 356 allégées qui remportèrent de beaux succès dans la catégorie où elles étaient engagées, notamment aux 24 heures du Mans.
Puis, très vite, la firme de Stuttgart s’est enhardie et a développé un modèle destiné à la compétition, la 550 (voir blog précédent).

Dans le domaine de la compétition automobile, Porsche  a su faire preuve d’un bel opportunisme.

En 1956, les règlements de la commission sportive internationale (CSI) ont instauré pour la formule 2 des moteurs de 1,5l de cylindrée. Porsche y a vu l’occasion de concourir dans une nouvelle catégorie à peu de frais. Elle a donc engagé dans la catégorie » Sport », avec ce type de motorisation, le modèle 718.

Pour les courses de Formule 2, le règlement de l’époque autorisait encore les monoplaces avec des carrosseries couvrant les roues, comme les voitures de sport dont le modèle 718 faisait parti.

Il suffisait donc aux ingénieurs de supprimer un des deux baquets, d’installer la colonne direction au centre et le tour était joué.

Ces autos s’illustrèrent surtout sur le circuit de l’Avus à Berlin. A partir de 1958, ce type de carrosserie couvrant fut interdit. Qu’à cela ne tienne, Porsche adapta son nouveau châssis de 718 millésime 1958 à la Formule 2. L’empattement fut conservé, identique à celui du modèle sport. Pour réaliser cette monoplace, il a suffi à Porsche d’installer le poste de conduite au centre et de réduire la voie. On fabriqua ensuite une vraie carrosserie de monoplace répondant aux nouveaux règlements, avec les roues découvertes.

La Porsche 718 monoplace n’est donc qu’un dérivé d’un modèle « Sport » et non une monoplace conçue à partir d’une feuille blanche comme les Cooper ou Lotus. Cela se ressentira dans les performances.(voir l’histoire des Cooper).

Les règlements internationaux évoluèrent. Ainsi une formule 2 année 1959 (monoplace équipée d’un moteur de 1,5l ) devient en 1961 rien moins qu’une Formule 1 ! En effet pour la catégorie reine des monoplaces, la CSI n’admit que des moteurs de 1,5l. Notre Porsche 718 concourut ainsi en Formule 1. Mais le quatre cylindres devenait vraiment trop juste pour pouvoir lutter avec les autres modèles.

Commence alors une escalade à la puissance. Porsche se décide à créer un 8 cylindres et l’adapte aux modèles « Sport”, en faisant passer la cylindrée à deux litres.

De l’opportunisme du départ qui avait consisté à transformer son modèle « Sport « , Porsche s’est trouvé entrainé dans une course à la dépense, afin de rester compétitif dans un domaine où Ferrari et les Anglais possédaient une bien meilleure expérience. Dans son livre « Les années Clark » qui m’a servi de support pour étayer mes propos, Gérard Crombac explique que durant la saison 1961,Porsche a dépensé dans ce cadre 3% de son chiffre d’affaires, une somme élevée et bien supérieure à celle des autres écuries. Le succès n’a pas couronné cet effort financier, et Porsche a jeté l’éponge.

Pour illustrer cette première partie, voici des reproductions qui sont contemporaines de l’engagement de cette auto en compétition. Cette partie première est consacrée aux firmes Clé, Ingap, Politoys et à d’autres firmes de Hong Kong. Dans une seconde partie nous verrons la reproduction offerte par Solido et ses dérivés.

Ingap Ferguson P99 formule 1

Quelle barbe la Formule 1 !

Les vieux collectionneurs sont souvent désabusés. On les entend se plaindre qu’ils ne trouvent plus rien à mettre dans leurs vitrines. Pourtant les objets insolites ne manquent pas. Il faut juste savoir ouvrir les yeux.  La preuve avec cette Ingap Ferguson P99, dans une variante un peu spéciale…

Pour preuve, voici le récit d’une rencontre que j’ai faite lors d’une bourse milanaise. J’ai découvert sur une table un incroyable coffret. C’est l’association des éléments qui le composaient qui était des plus étranges.

La marque Kaloderma envisageait de conquérir de nouveaux clients pour sa mousse à raser et son après-rasage en intégrant dans un petit coffret une formule 1 de la marque Ingap. Le raccourci est facile.

Si j’ai trouvé un intérêt à suivre les compétitions de formule 1 jusque dans les années soixante-dix, elles n’ont aujourd’hui pour moi plus aucune saveur. Les plateaux sont maigrelets et les règlements incompréhensibles pour le grand public. Les courses ne sont plus qu’une longue procession. Bref, le monde actuel de la formule 1 nous gratifie d’un spectacle rasant. Ce coffret de crème à raser pourrait être actualisé avec des monoplaces 2015, en provenance de chez Spark et Minichamps.

Durant les années soixante, les courses étaient disputées. Les résultats le prouvent. Rares étaient les pilotes qui sur une saison de Grand Prix remportaient plus de quatre ou cinq courses.

trois déclinaisons à partir du moule Ingap
trois déclinaisons à partir du moule Ingap

 

L’auto du jour est un cas à part, et c’est sa singularité qui m’a incité à acquérir l’ensemble. Il s’agit de la Ferguson P99. Mon ami Marco Benisi qui vendait ce coffret m’a indiqué que tous les coffrets avaient été dotés d’une des six autos de la gamme Ingap. Le mien contient donc cette Ferguson. Il s’agit bien du Ferguson du monde agricole. Ce n’est pas un cas isolé. Lamborghini et David Brown sont aussi des marques de tracteurs. Cette monoplace avait été construite pour faire valoir la technologie des quatre roues motrices, empruntée bien sûr au monde rural. Elle souffrira du changement de réglementation lorsque la cylindrée autorisée passera de 2,5 litres à 1,5 litre. Le handicap résultant du surpoids engendré par ce mode de traction intégrale devenait insurmontable. Pourtant elle gagnera un Grand Prix, hors championnat, mais qui réunissait tout le gratin de l’époque. Cela c’est déroulé lors de l’International Gold Cup à Oulton Park. Stirling Moss profitera des conditions climatiques et de la pluie pour s’imposer sur Jack Brabham. Déjà, au Grand Prix de Grande-Bretagne 1961, dans les mêmes conditions de course, elle avait dévoilé un potentiel certain. Elle remportera ensuite le championnat de courses de côtes britanniques en 1964.

Je suis devenu un inconditionnel de cette auto, qui a été la dernière monoplace à moteur avant à s’imposer dans une compétition.

 

La reproduction la plus connue de cette Ferguson est celle d’Ingap. Le modèle connaitra une diffusion sous plusieurs formes : en étui neutre individuel, en coffret avec les autres modèles de la gamme et au milieu des tubes de crème à raser de la marque Kaloderma crema per barba. Je connais au moins deux formes distinctes de coffret : en carton de forme allongée, avec les modèles alignés côte à côte ou sur un carton avec les modèles présentés côte à côte et maintenus par une bulle en plastique thermoformée. Je n’exclus pas la possibilité de découvrir une autre forme de présentation.

Les modèles Ingap seront repris par la firme française Clé qui y vit l’occasion d’introduire à peu de frais des autos de course dans sa gamme bon marché. Les jantes sont typiques de cette firme.

Moins connue, peut-être produite sans autorisation, une troisième déclinaison verra le jour à Hong Kong. C’est le jeune collectionneur Arnaud Guesnay qui m’a fourni cette variante. Il semble bien que les six modèles aient connu une variante en Asie. Les deux Ferrari et la Porsche ont été répertoriées. Elles se caractérisent par des couleurs chamarrées et l’adjonction d’un numéro de course en papier.

Toujours en Asie, mais pour le marché anglo-saxon, la firme Marx décida de reproduire des monoplaces des années soixante. Marx a choisi aussi de reproduire une Ferguson. L’échelle choisie est le 1/41 environ. Cette gamme de monoplaces existe au moins en deux échelles de reproduction. Ainsi j’ai eu le loisir de voir une Ferguson de chez Marx au 1/25. Même couleur, même type de boîte, tout est identique sauf l’échelle. La reproduction n’est pas exceptionnelle. Le jouet est équipé d’une friction. Ce qui est frappant ce sont les pneumatiques qui équipent le jouet et qui semblent davantage conçus pour un tracteur que pour une monoplace.

La dernière reproduction nous vient d’Allemagne. C’est la firme AK qui proposera, elle aussi une gamme de monoplaces dont une Ferguson. Pour ce modèle également, la fidélité de reproduction n’est pas au rendez-vous. Ce fabricant germanique se démarquait des autres par l’utilisation de teintes métallisées qui constituent sa marque de fabrique. On appréciera le coffret de détaillant dont le couvercle est décoré de stand dignes du Nürburgring avec beaucoup de publicité pour la marque d’essence germanique « Aral ».

Le trait commun de toutes ces reproductions est le fait que ces fabricants ont voulu inscrire à leurs catalogues une série de monoplaces. Bien évidemment après les incontournables vedettes qu’étaient les Cooper, Ferrari, Porsche et Lotus à l’époque il fallait bien remplir les coffrets. C’est comme cela que cette Ferguson s’est retrouvée à compléter des séries, ce qui est une belle performance pour une auto aussi éphémère. Elle n’a pas brillé sur les pistes, mais elle est fort bien représentée dans nos vitrines.

Cooper et samba n° 2

Dinky Toys a proposé une reproduction de cette glorieuse auto. Le traitement de l’auto est assez médiocre, elle est bien trop plate. Les deux bandes blanches permettent de l’identifier. Le choix de la couleur est surprenant.

Cooper 2,5 Dinky Toys et catalogue Cooper
Cooper 2,5 Dinky Toys et catalogue Cooper

Si les deux bandes blanches sont bien empruntées aux autos de l’usine Cooper, dans la réalité, ces autos étaient vert foncé. Remarquons d’ailleurs que mon ami Dirk n’avait pas identifié l’auto dépouillée de ses bandes et de sa couleur bleue.

Cette auto au palmarès brillant va inspirer bon nombre de fabricants en Europe. Isat, en Italie a choisi la version de Stirling Moss, reconnaissable à sa couleur bleu-foncé et à la bande blanche qui ceinture le capot avant. Toujours en Italie, Ingap propose une série de 6 monoplaces qui comprend une Cooper. Au milieu des années 60, Ingap cède son outillage à Clé en France, ce qui conduira les petits garçons des années soixante-dix à recomposer des grilles de départ de Grands Prix des années soixante !

Ils pourront même étoffer la liste des partants avec les versions glanées dans les paquets de lessive : en effet, Clé fournira des monoplaces estampillées Bonux.

Crio, autre fabricant de lessive proposera également des répliques de Cooper. Il s’agit de reproductions simples en plastique soufflé. Il ne faut pas mépriser ces jouets qui sont le témoin d’une époque et dont le prix raisonnable constitue un atout incontestable.

Nous restons dans le domaine des primes en citant la version de Muovo, en Finlande, distribuée avec les chocolats Panda. L’auto est très correctement restituée. La reproduction offerte par Wrenn, est également très correcte : ce fabricant de circuit électrique a réussi à loger un moteur électrique et l’environnement nécessaire à une miniature de circuit électrique sans déformer les lignes de l’auto. Finissons par la version proposée par Marx qui, elle, est approximative, alors que le dessin de la boîte avait restitué la ligne de la monoplace.

Une Ferrari chez les Aztèques

Le titre est justifié par la provenance de notre Ferrari 246SP. Les amateurs éclairés que vous êtes auront reconnu le modèle produit par Ingap. Pourtant si l’outillage provient bien de chez Ingap en retournant le modèle, c’est l’inscription « Mac Gregor made in Mexico » qui apparaît, firme plus connue pour avoir récupéré l’outillage de Politoys, autre fabricant transalpin.

Coffret illustré Ingap
Coffret illustré Ingap

Il est fort probable que Mac Gregor a commencé son activité avec les moules de chez Ingap avant de tisser des liens plus étroits avec la firme Politoys.

J’avoue qu’avant de trouver ce modèle j’ignorais qu’Ingap avait envoyé des moules au Mexique. J’ai trouvé cette auto à Milan. Paolo Rampini présent sur place lors de cette édition de la bourse de Novegro ignorait également l’existence de ce lien commercial.

Quelle curieuse idée que de choisir cette teinte pour un jouet! Le culte voué par la civilisation aztèque au métal précieux pourrait à lui seul justifier le titre de notre chronique.

Cette couleur est peu fréquente dans les productions en zamac (coût de la peinture), et bien plus fréquente pour les réalisations en plastique teinté dans la masse. Ingap firme Italienne basée à Padoue a eu une intense activité dans le domaine de la production de jouets. Elle a produit des articles de qualité, utilisant des matériaux aussi différents que la tôle lithographiée ou le plastique injecté. Cette Ferrari en plastique fait partie d’un petit coffret joliment illustré comprenant six autos. Curieusement, le coffret contient 5 monoplaces et cette barquette, ce qui a permis au fabricant italien de glisser deux Ferrari… qui se sont illustrées en étant championnes du monde en 1961!

Mais ce qui a le plus motivé la présentation de ce modèle Mac Gregor, outre une certaine rareté, c’est l’histoire de cette auto, qui a une place dans l’histoire de Ferrari beaucoup plus importante qu’il n’y paraît. C’est en effet la première sport prototype de Maranello, avec le moteur placé en position centrale. Elle fut présentée le 13 février 1961 comme nous l’explique avec force anecdotes Christian Moity dans son superbe et très complet ouvrage paru chez Etai « Endurance, 50 ans d’histoire 1953-1963 ». Comme la monoplace, elle reçoit un moteur V6. C’est la première fois qu’Enzo Ferrari consent à utiliser une soufflerie pour l’étude aérodynamique, d’où la présence d’une dérive sur le capot arrière, un peu à la mode des Jaguar type D. C’est bien cette version qu’Ingap puis Mac Gregor ont reproduit. Pourtant, l’auto ne participera à aucune compétition dans cette configuration ! En effet, dès les premiers essais, elle se révélera très instable, aux dépens de Wolfgang Von Trips notamment qui ne pourra éviter de faire un tonneau ! C’est Richie Ginther qui trouvera la solution en faisant monter une lame d’aluminium sur la bordure du capot arrière…ce sera la naissance du becquet ! L’autre caractéristique de cette production de Maranello est la présence de calandre « à narines ».Carlo Chiti, l’ingénieur de l’époque l’imposera sur toute la gamme. En 1961 les versions TR 12 cylindres, moteur avant s’imposeront dans 3 manches (Sebring, Le Mans et Pescara) laissant à notre petite 246SP la Targa Florio tandis que la Maserati Birdcage s’impose au Nürburgring. Ce modèle servira de base à la future génération de sport prototype.

Mais je ne peux terminer cette petite histoire sans une pensée pour les deux grands champions natifs du Mexique comme notre petite miniature : les frères Rodriguez. Ils se font connaître au début des années 60. Un de leurs premiers faits d’arme sera l’édition des 24 heures du Mans 1961 où ils donneront bien du fil à retordre à l’usine Ferrari avec leur Ferrari TR du Nart. C’est sûrement en pensant à ces deux champions que les gamins de Mexico jouaient avec notre petite Ferrari.