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Comme un éléphant dans un magasin de porcelaine.

Comme un éléphant dans un magasin de porcelaine.

Avez-vous déjà aperçu des éléphants en ville ? Depuis Hannibal, cet animal n’est plus utilisé dans nos contrées, sauf dans les zoos et les cirques où il continue à faire recette.

Dans les années cinquante, les cirques qui arrivaient dans les villes où se tenaient les représentations n’hésitaient pas à parader avec chars et animaux pour annoncer leur spectacle. Les éléphants remportaient évidemment un franc succès.

Le pachyderme impressionne le plus blasé des spectateurs. Sur les affiches de cirque, cet animal est donc très souvent représenté.

La ville de Nice a régulièrement accueilli les plus grands cirques. Après la seconde guerre mondiale, la cavalcade du cirque Pinder marqua les esprits. En plus de ses superbes chars, le cirque n’hésita pas à faire remonter la Promenade des Anglais à ses éléphants au milieu de la circulation automobile.

Sur certains clichés, on voit les pachydermes en désordre et le cornac qui essaie de les remettre dans le droit chemin.

On sent que l’animal est plus familier avec la brousse, qu’avec la ville. Il lui manque l’espace, la liberté.

Plus tard, dans les années soixante-dix le cirque Jean Richard fit de même. J’ai capté ces images appartenant à l’INA et diffusées en boucle lors de la splendide exposition consacrée au monde du cirque du docteur Frère à Nice.

Une jeune femme promène son éléphanteau dans Nice. L’animal avale quelques fruits Cours Saleya, se désaltère à la fontaine de la place Massena et n’hésite pas à rentrer dans un magasin d’articles de vaisselle devenant l’illustration même de l’expression « un éléphant dans un magasin de porcelaine ».

La nonchalance de l’animal, sa masse tranquille le rend sympathique, si gauche au milieu des automobiles.

 

Cela me fait penser aux gros 4×4 ou aux SUV qui aujourd’hui essaient de se de frayer un chemin en ville. Comme les éléphants, ils ne sont pas dans leur élément, coincés dans la circulation urbaine.

Il faut dire que désormais, en ville, même avec une auto de petite taille, il est parfois délicat de se mouvoir : entre les bus, les camions, les vélos et les trottinettes, la largeur des voies disponibles pour les autos n’a cessé de diminuer.

Paradoxalement, au même moment, les utilisateurs choisissent des autos de plus en plus imposantes. Cette même tendance, toujours plus gros, se constate pour les motos, les scooters et désormais même pour les vélos. Cela ne passe plus : nous sommes tous en ville comme ces éléphants dans un magasin de porcelaine.

Les éléphants du cirque Pinder en balade dans Nice (archives INA)
Les éléphants du cirque Pinder en balade dans Nice (archives INA)

J’aime beaucoup la photographie prise sur le quai des Etats-Unis à Nice. Les éléphants sont majestueux au milieu des Renault 4cv, des tractions, et des Simca Aronde. Ces autos semblent bien modestes, leurs dimensions sont raisonnables. Elle représentent une grande partie du parc automobile de l’époque.

Dans les années cinquante, les 4×4 en milieu urbain sont très rares. Il existait cependant une auto très chic produite par le constructeur Willys, celui qui se fit connaitre en fabricant la fameuse Jeep.

Il s’agit de la Willys break woody. Une « sorte » de véhicule tout terrain urbain. Je dis une sorte, car dans la réalité, seule la version tôlée était réellement équipée d’une transmission intégrale. La version Woody se contentait d’une transmission simple.

Peu importe, à l’époque, c’était déjà l’image qui primait. Perchée sur de grandes roues, sa taille était imposante.

Cette auto a eu un étrange destin en miniature. Quelques fabricants, dont certains étaient célèbres se sont intéressés à elle. Pourtant elle manque à de nombreux collectionneurs.

Il y a eu la version américaine de Wannatoy. Ce fabricant a proposé un modèle en plastique fort sympathique. Celui-ci n’est pas très rare. Sa fabrication en trois parties a permis de reproduire la caisse « façon bois » de manière convaincante. Je connais au moins deux combinaisons de couleurs. Celle que j’ai gardée est rouge et jaune. Il en existe une bleue et jaune.

La plus connue est celle que Gasquy a proposé en Belgique. Les Belges ont toujours eut des liens étroits avec l’industrie automobile américaine. Le modèle Gasquy est superbe. Le pare-chocs est fragile. C’est la seule Gasquy a ne pas être équipée des fameux pneus belges « Englebert ».

La firme liègoise a dû adapter un pneu de section plus grande que celui qui équipait ses modèles de base pour que le rendu visuel soit conforme à la réalité. Il existe de nombreuses déclinaisons de couleurs. Laquelle choisir ? J’aime celle de couleur bordeaux et chamois.

La Mercury est une énigme pour moi. Le modèle appartient à la série classique. C’est ce que laisse supposer sa numérotation. Pourtant, l’échelle choisie par le fabricant turinois se situe au 1/25. Le modèle est un brin pataud. Il existe deux variantes qui ne peuvent se deviner sur les photos. Le modèle a été injecté en zamac ou en aluminium. Le modèle en aluminium est plus rare. Malgré l’échelle de reproduction, bon nombre d’amateurs recherchent cette miniature. Elle constitue pour beaucoup d’entre-nous une exception dans les collections dites de 1/43. (voir le blog consacré  au modèle Mercury)

La troisième vient d’Amérique du Sud, continent très friand de ce type d’automobiles, surtout lorsqu’elles sont équipées en 4×4. C’est Buby, la célèbre firme argentine qui l’a reproduite. Elle est très rare. Quand M. Dufour m’avait expliqué qu’il avait eu connaissance de trois variantes, les bras m’en sont presque tombés. En trouver une relève déjà de l’exploit.

J’ai mis trente ans à trouver deux variantes. Elles diffèrent au niveau  du châssis mais aussi de la carrosserie et du traitement  de la face avant. En comparant les deux variantes, on pourrait penser qu’il y a eu deux moules.

De petits fabricants locaux se sont librement inspirés du modèle Buby.

Je ne peux finir ce texte sans citer les superbes versions de Gamda. La firme israélienne n’a pourtant pas réalisé de version civile.

A ma connaissance et jusqu’à preuve contraire, le break vitré n’a été fait qu’en version de la police israélienne. Il existe deux variantes : avec ou sans sirène sur le pavillon. Une version pick-up de l’armée israélienne et une version utilitaire tôlée ont été également produites.

PS: voir le blog consacré à l’histoire du cirque et à la collection du Docteur Frère.L’arrivée du cirque en ville.

Mystères à Buenos Aires

Mystères à Buenos Aires.

L’industrie automobile française s’est peu exportée. C’est une réalité que les collectionneurs de jouets automobiles peuvent aisément constater en regardant les vitrines de miniatures. C’est éloquent. Les représentations de marques françaises sont assez rares chez les fabricants de jouets étrangers.

A l’inverse, le succès commercial allemand depuis les années 50 se traduit par un nombre très important de reproductions miniatures de Mercedes et de Volkswagen et ce dans tous les pays du monde. On peut faire le même constat avec les autos de fabrication américaine, sur cette même période, car à compter des années 70, elles n’ont plus la même aura.

Les autos françaises sont bien présentes, concentrées sur les marchés moyen et bas de gamme. Prenons l’Espagne. La FASA (fabrication d’automobiles société anonyme) est créée en 1953. Petit à petit Renault deviendra en Espagne le premier constructeur devant Seat.

De la 4cv à la Dauphine, toutes les Renault ont été fabriquées en Espagne, sauf les R15, 16, 17 et 20. On comprend que Renault n’a pu s’implanter sur le marché qu’en créant une entité locale. A l’image de très nombreux pays, l’Espagne a favorisé le montage sur place en taxant fortement les importations. Il fallait fournir du travail à la population pour développer le pays. Cette même logique économique s’applique à l’industrie du jouet.

Poch a réalisé la peinture, le montage, et la distribution en Espagne d’un certain nombre de Dinky Toys françaises, reproduisant des modèles de la régie Renault. Jefe a fait de même avec les Renault 4cv et les Dauphine de chez Lion Car en louant l’outillage à l’entreprise implantée aux Pays-Bas. (voir le blog consacré à ces autos)

On retrouve le même schéma en Argentine. C’est en 1955 qu’est créée l’usine de Santa Isabel. La Dauphine y est assemblée dès 1960.

Buby, qui est le fabricant de miniatures argentin le plus renommé ne manque pas d’inscrire la voiture à son catalogue, pour le plus grand plaisir des collectionneurs et occasionnellement des petits Argentins.

Ces derniers pourront reproduire les dérapages « sauvages » de l’auto sur les trottoirs de Buenos Aires, surtout si leur papa conduit la version « Gordini ».

Comme la plupart des Buby de cette époque, la miniature est réduite à une échelle légèrement supérieure au 1/43. C’est un modèle peu fréquent.

Cependant la Volkswagen 1200 de 58 sortie peu de temps avant chez Buby est bien plus rare encore. Je peux avancer une explication : le modèle Buby devait être confronté à une telle concurrence que la firme argentine a arrêté sa fabrication bien avant celle de la Dauphine qui a connu, elle, une belle carrière et un grand nombre de variantes, dont les versions « course ».

La Renault 4L est le deuxième modèle produit sur les chaines de Santa Isabel, mais Buby ne l’inscrira jamais à son catalogue.

Le modèle suivant est la R6, en 1969. Renault est désormais majoritaire dans le capital de l’entreprise de Santa Isabel, et depuis 1967 l’entité a changé de nom. De Kaiser Argentina Renault, elle est devenue IKA .

Et la miniature ? Grâce à José Andrade, je viens de faire une découverte des plus intéressantes. Sachant que j’étais amateur de Buby, ce dernier m’a proposé il y a quelque temps une R6 en boîtage promotionnel.

Bien que la boîte soit incomplète, son authenticité ne fait aucun doute. La vraie surprise vient de la miniature qu’elle contient, et d’abord de sa couleur : caramel.

Comme le modèle photographié sur la boîte. Cette couleur ne vous rappelle pas quelque chose ? Cherchez bien. Il s’agit d’une autre Renault, produite aussi en 1969 à….Bobigny ! Oui, la Renault 12, mais aussi la fameuse Renault R8S.

Mon premier réflexe fut d’ouvrir le capot. Et là j’ai eu la confirmation du lien avec Bobigny, grâce à la couleur vert foncé du bloc moteur, identique à celui du modèle produit en série

Pour l’article j’ai sorti une version qui provient de M. Malherbe du bureau d’études. Sur les modèles de présérie le moteur  est fini de couleur brique satiné.

La finition au pochoir de ce dernier ainsi que la calandre ne laisse planer aucun doute sur l’authenticité du modèle. De plus, l’année 1969, date de sortie chez Meccano de la R12 et donc de l’utilisation de cette teinte très à la mode à cette période correspond à celle du lancement en Argentine de l’auto.

Nous connaissions tous la Renault 6 de chez Buby. Depuis très longtemps nous avions remarqué la grande similitude avec le modèle Dinky Toys.

L’œil du collectionneur avait remarqué que Buby avait gravé sur la malle arrière le logo Ika Renault.

J’avance l’idée selon laquelle Renault Argentine, pour le lancement de sa R6, aurait commandé en France un petit nombre de modèles finis de couleur caramel et avec ce boîtage particulier.

Les droits de douane ont sûrement conduit à limiter cette importation au strict nécessaire, destinée peut-être à la presse pour la présentation du modèle. Dans un deuxième temps, on peut penser que Buby et Dinky Toys se sont rapprochés afin de trouver une solution. Dinky Toys ayant par la suite envoyé le moule en Espagne, on peut imaginer que Buby avait commandé une sorte de duplicata de moule à Bobigny.

J’écarte l’hypothèse d’une copie sans autorisation du modèle Dinky Toys. La régie Renault pourrait avoir participé à cette opération, en rapprochant les deux parties. Le mystère demeure.

les autos sont quasiment identiques. On ne voit que deux différences : les clignotants latéraux et les grilles d’aération sur le montant arrière du hayon qui peuvent s’expliquer. En effet, la vraie R6 produite par IKA Renault en Argentine semble en être dépourvue.

La petite encoche découpée devant le pare- brise s’explique par le fait que Buby avait abandonné le système d’ouverture du capot créé par Bobigny ( il fallait pousser le volant pour activer l’ouverture du capot sur le modèle français).

La seule variante importante, qui ne se voit qu’en ouvrant les portes, est le système de fixation par deux points de sertissage des portières sur les articulations.

Pourquoi Buby a- t’-il fait si compliqué ? C’est ici que réside pour moi le second mystère. Car l’étude des châssis est confondante, ils sont strictement identiques. Même la correction faite chez Meccano, surcharge sur le chiffre 6, apparaît sur le modèle Buby.

C’est le genre de découverte qui fait le bonheur du collectionneur.

Pour l’occasion j’ai sorti quelques variantes de la R6 Buby. J’avais évoqué la fantastique version «carrera» (voir le blog consacré à ce modèle).

Le premier boîtage, sur fond rouge est moins fréquent que celui sur fond jaune et rouge. Les premiers modèles reçoivent des jantes en plastique chromé. Ensuite, ces dernières sont injectées de couleur noire.

Un détail mérite d’être mentionné. Si vous ouvrez les portes et le capot , vous serez surpris de constater que les intérieurs des portes et du capot moteur reçoivent une finition noir mat. C’est tellement surprenant que sur le premier exemplaire approché j’ai cru à une finition « main » du précédent collectionneur. Pas du tout. Les exemplaires du début sont ainsi finis, une finition « luxe » sur une miniature populaire en quelque sorte.

 

J’ai fait un rêve.

J’ai fait un rêve.

C’est une petite photo couleur, en bas de page. Curieusement, cette photo n’a aucun lien avec le sujet de la rubrique principale intitulée « made in Argentina » et consacrée à la firme Buby.

Plus précisément, elle porte sur une nouvelle gamme de miniatures reproduisant les autos s’étant illustrées dans les rallyes argentins et les courses de la « Temporada ». Nous sommes en avril 1971. Il s’agit du mensuel « L’automobile » qui consacrait régulièrement quelques pages au modélisme automobile.

Le regretté Christian Moity, auteur de la rubrique en question, explique que le premier article qu’il a consacré à la marque Buby, dans ce même magazine lui a valu un important courrier de lecteurs mécontents de n’avoir pu se procurer les modèles photographiés.

Il justifie son nouvel article en expliquant que sa fonction de journaliste est d’informer et non pas de passer sous silence l’existence de certaines productions, quitte à frustrer les amateurs.

En effet, au moment de la publication de l’article, ces Buby ne sont pas disponibles à la vente sur notre marché national pour cause d’absence d’importateur. (voir l’article consacré à ce sujet).

Nous sommes exactement dans ce cas de figure pour les deux modèles de l’ intrigante photo couleur décrite plus haut.

« Faisons un rêve » .

Voilà comment Christian Moity introduit le second sujet relatif aux deux miniatures de sa rubrique modélisme. Le journaliste explique qu’un groupe de quatre amateurs anglais a décidé de reproduire au 1/43 les autos ayant marqué l’histoire du sport automobile. La marque portera le nom d’un des leurs : John Day.

Ce qu’il y a de nouveau, c’est que ces autos sont destinées uniquement aux collectionneurs. Christian Moity n’a d’ailleurs pas relevé dans son compte rendu ce point fondamental.

Pour résumer, disons qu’à l’aube des années soixante, le monde de la collection des miniatures automobiles est composé en grande majorité d’amateurs qui se contentent de rassembler les modèles du commerce. Ils sont une minorité à s’aventurer dans des transformations, voire mieux, des créations.

Pour les pionniers de la collection, l’objectif est de recréer chez soi un musée imaginaire retraçant l’histoire de l’automobile.

J’aime beaucoup le début de la préface signée du Comte Hadelin. de Liedekerke-Beaufort dans le Premier Répertoire  Mondial des Automobiles Miniatures , édité pour l’exposition de 1959 du C.I.A.M . Ce dernier était le président de l’ Automobile Club de France.

« Toutes les voitures du monde »

« Nous avons tous rêvé d’un musée de l’Automobile assez grand pour contenir un modèle de tous les véhicules qui ont circulé dans le monde depuis que l’ingéniosité des hommes a su mettre un moteur sur des roues. Ce Musée idéal n’existera jamais car il faudrait une ville entière pour l’abriter, si même on pouvait encore retrouver une voiture de toutes les marques et un exemple de toutes les carrosseries suscitées par tant de modes et destinées à de si multiples usages.

Mais ce rêve se réalise sous une autre forme et bientôt nous pourrons dire en effet que toutes les voitures construites depuis les inventions de Cugnot et de Beau de Rochas seront sous nos yeux.

C’est le modèle réduit qui nous offre cette possibilité, la seule, d’embrasser d’un seul regard ce gigantesque panorama, et de rassembler dans un même lieu tout le parc automobile mondial. »

Tout est dit dans ces quelques lignes sur la motivation des amateurs : recréer chez soi l’histoire de l’automobile.

A dix ans d’écart, le comte H. de Liedekerke-Beaufort et Christian Moity ont utilisé le même mot : rêve.

Or, en 1960, les productions industrielles ne suffisent pas à combler ce rêve. Alors, comment faire ? Voilà bien la question que se sont posée les amateurs d’automobile soucieux de constituer un musée de miniatures et nous verrons la semaine prochaine les solutions qu’ils ont trouvées.

En attendant, et pour illustrer cette première partie j’ai choisi de vous faire partager la solution de Raymond Daffaure à cette équation. En 1960, l’histoire de la course automobile passionne les amateurs.

Connaissez-vous beaucoup d’autos de courses d’avant 1914 ? C’est loin me direz-vous, plus d’un siècle en effet !

Serge Pozzoli, rédacteur en chef du fameux « Album du fanatique de l’automobile » est un des premiers à avoir consacré des articles à ce type d’autos dans sa rubrique « Les tiroirs de l’inconnu ».

Ce sont des hommes comme lui qui ont permis à Raymond Daffaure de nous laisser d’émouvants témoignages et de satisfaire ses clients qui lui en faisaient le demande. Les modèles sont approximatifs, mais quel intérêt historique !

A suivre.

 

 

Un autre regard

Un autre regard

Au coin d’une rue,  garée le long du trottoir, une 404. Elle est superbe. Nous avons quitté la capitale, et désormais l’action se situe en pleine campagne. Le contraste est saisissant. L’architecture baroque de la capitale et ses larges avenues à l’européenne sont bien loin. Les maisons sont modestes, les rues poussiéreuses. Une 504  de couleur ocre arrive à l’angle de la rue où la 404 est en planque. Détail singulier, elle est équipée de phares doubles.

Nous sommes en Argentine. Le film c’est « Dans ses yeux » de Juan José Campanella.  Film prenant,  qui une fois commencé vous hypnotise  jusqu’au bout. Il reçut l’oscar du meilleur film étranger à Hollywood en  2010.

La vue de ces autos  sur l’écran m’a instantanément fait plongé dans un autre film. Un film plus personnel. C’est la similitude  des lieux , le contraste de la capitale et de la pampa et bien sûr  la 404 qui m’ont plonger dans une autre histoire.  Un film dans le film en quelque sorte.

Il y a une vingtaine d’années, un fidèle client de la boutique s’en est allé faire un long voyage en Argentine. Plein d’espoir , il partit avec l’  objectif de trouver des miniatures. Le pays est grand. Très grand. Il me décrivit à son retour ce contraste entre la très grande ville et la campagne. En ville, il fit chou blanc. Rien. Comme le  héros du  film qui comprend que son enquête avancera à la campagne, il partit  donc dans la pampa. Il me raconta que dans un village isolé il repéra un petite échoppe, où en vitrine trônaient des Buby. Problème, la boutique était fermée, et rien n’indiquait qu’elle allait réouvrir. Persévérant, il interrogea  des gens dans le village. Au bout d’un moment , on trouva une personne qui avait les clefs et il put acheter plus d’une centaine de Buby, toutes des 1/60 , dont près de 80 Peugeot 404 !

Le film, « Dans ses yeux » se passe en 2009, mais une grande partie du film se déroule en flashback.  En 1975, pour être précis. De nombreuses autos qui  le jalonnent ont été produites par Buby.  La Peugeot 404 par qui ses souvenirs sont remontés à la surface a été reproduite au 1/60 par Buby. La miniature est réussie.  Comme pour toutes les versions de cette époque, la marque en a extrapolé une version « carrera » des plus parlantes. Pour l’occasion, Buby a découpé les ailes arrières.

La Peugeot 504, que l’on voit aussi dans le film, a eut les honneurs  à deux échelles  différentes, le 1/43 et le 1/60. Elles sont fidèlement reproduites. . Le très regretté Christian Moity, dans un article daté de mars 1971 dans la revue L’automobile déplora que Buby n’ait choisi la version équipée des doubles phares, comme celle que l’on voit dans le film d’ailleurs.Cet équipement  permettait de la différencier  au premier regard de la version européenne. Pourtant José Andrade en a depuis trouvé un exemplaire.

Une autre auto, qui nous est familière en Europe, apparait dans la dernière partie du film.   Le mari, dont la femme a été sauvagement assassinée, raconte à un magistrat qu’il a enlevé le meurtrier pour se venger. C’est dans la malle d’ une Fiat 1500 qu’il a placé le meurtrier avant de l’abattre le long d’une voie de chemin de fer. Buby nous a gratifié  d’une magnifique reproduction. L’échelle est comme souvent avec ce fabricant légèrement supérieure au 1/43. Pas de parties ouvrantes. Cela confère au jouet un aspect compact qui lui va bien.

Plus tard, Buby  proposera une extraordinaire version pick-up sur cette même base réservée au marché argentin. Je ne peux m’empêcher de vous la présenter.

Assurément, ce type de carrosserie , très populaire en Amérique du Sud  aurait été  plus commode, pour, dans le film,  transporter le corps de l’assassin !

Enfin, comment ne pas évoquer les fameux taxis de Buenos Aires ainsi que les autos de police. Elles jalonnent le film, bien sûr. Nous autres amateurs d’automobiles, nous guettons à chaque plan l’apparition de ces autos. Elles sont comme des marqueurs à notre propre collection.

Le catalogue Buby est révélateur de la culture automobile en Amérique du Sud.  Si toutes les miniatures ou presque ont trouvé un débouché en version  course, les versions police ont également eu un petit succès, et ce dès  le début. (voir le blog deux poupées dans la pampa).

Ford Fairlane, Chevrolet Impala, Ford Falcon ou Torino elles sont superbes.

Profitant d’un cycle sur le cinéma argentin sur la chaîne Arte, j’ai  donc guetté l’apparition de véhicules  représentatifs du paysage local.

Vivement un cycle de films provenant de Nouvelle-Zélande, d’Australie ou du Japon, afin de mettre des images  concrètes sur mes miniatures . Quel plaisir de voir une station service au Japon, une Holden Utility  en Nouvelle Zélande ou un taxi australien en plein Sidney.

L’oiseau éphémère, la Chaparral 2F

Il y a des véhicules qui sont hors du commun. On peut justifier ce qualificatif lorsque les fabricants de miniatures en ont proposé de nombreuses reproductions. Encore faut-il relativiser ce phénomène. Ainsi on ne peut s’étonner de voir un grand nombre de reproductions d’autos dont les durées de vie sur les chaines de production ont été longues. Le meilleur exemple est bien sûr la Volkswagen Coccinelle qui est née à la fin des années trente dont l’existence s’est étirée sur plus de cinquante ans et qui a été distribuée sur plusieurs continents. Il n’est pas étonnant de voir des milliers de reproductions, plus ou moins heureuses de cette auto. Il est plus intéressant de se pencher sur des autos éphémères mais qui ont donné lieu à un très grand nombre de reproductions en miniature.

Solido Chaparral 2 F
Solido Chaparral 2 F

En 1967, deux autos exceptionnelles vont connaître le succès auprès des décideurs des fabricants de miniature. Un tel engouement ne peut laisser indifférent les amateurs de l’histoire de la miniature automobile car il fallait vraiment qu’elles soient hors du commun pour que les fabricants investissent dans des moules onéreux. On imagine également la frénésie dans les bureaux d’étude afin être les premiers à proposer ces modèles.
Si vous ne l’avez pas deviné, je veux parler de la Lamborghini Miura et de la Chaparral 2F.

Pour la belle italienne, la ligne intemporelle créée par Bertone lui a valu la une de tous les magazines. Elle a fait fantasmer bien des conducteurs malgré des qualités routières qui n’étaient pas au même niveau. Près de cinquante ans après, elle n’a rien perdu de ses charmes, bien au contraire. On comprend alors le choix des fabricants de jouets qui l’ont inscrite à leur catalogue.

Pour la Chaparral c’est un accessoire qui lui vaut les honneurs. La ligne de l’auto tout en coins tranche avec celle des autos de course de l’époque. La Ferrari 330P4 tout en rondeurs est diamétralement opposée à cette conception. Mais l’élément déterminant est bien son grand aileron mobile. Cette Chaparral 2F a également fait la une des magazines et a intrigué la presse. Il ne faut pas oublier que nous sommes en pleine période de conquête spatiale et que l ’Europe est admirative de la puissance américaine.

La liste des fabricants ayant proposé une Chaparral 2F au 1/43ème ou assimilé est longue : Mebetoys, Mercury et Politoys en Italie, Märklin, Gama, Schuco en Allemagne, Joal en Espagne, Marx et Ideal à Hong Kong, Jouef en France. Parmi les très nombreuses reproductions, une se détache du lot. Il s’agit de la reproduction faite par Solido, en France. C’est cette dernière qui va retenir notre attention. Solido vient à peine de proposer une magnifique Chaparral 2D à sa clientèle, lorsqu’elle se lance dans l’élaboration du moule de la 2F. Si dans la réalité la 2D est convertie en 2F, il n’en est pas de même s’agissant des miniatures. C’est bien un moule nouveau qui est conçu. Il faut dire que les deux autos ont une esthétique très différente, et cela n’est pas dû uniquement à la présence du grand aileron. La forme en coin de la 2F tranche avec celle plus conventionnelle, plus galbée de la 2D. Elles ont en commun les portes papillons et bien sûr le moteur Chevrolet. Solido, toujours en avance va être le seul fabricant à proposer un aileron mobile, comme sur la vraie voiture. La seule infidélité sera l’adjonction d’un troisième mât actionnant le cabrage de l’aileron. Dans la réalité le système actionnant l’aileron passait à l’intérieur des deux mâts, ces derniers étant même profilés. Je me souviens encore du plaisir que j’avais à appuyer sur l’essieu arrière pour actionner l’aileron. Dans la réalité, la transmission semi-automatique avait permis de substituer à la pédale d’embrayage celle servant à braquer l’aileron: elle était en permanence enfoncée et, en la délestant, le pilote actionnait l’aileron. Pour la petite histoire, au Mans, ce dernier se bloquera sur l’auto numéro 7 en position « freinage ».

Afin d’illustrer mes propos, j’ai choisi quelques versions moins fréquentes. Elle ont pour point commun d’être toutes des productions étrangères de chez Solido : Dalia en Espagne, Buby en Argentine et Brosol au Brésil. Seule la Brosol bénéficie d’un marquage spécifique au niveau du châssis. Ses feux arrière, en strass de couleur rouge sont une caractéristique de l’ensemble des productions brésiliennes. La Dalia est reconnaissable à ses numéros de course en papier et la Buby à ses jantes très particulières.