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1936, un souffle de modernité à Sochaux

Dans son ouvrage consacré à la firme sochalienne, René Bellu est catégorique : c’est la plus jolie et la plus originale de toutes les Peugeot jamais produites. Il faut avouer que la ligne « fuseau Sochaux » tranche radicalement avec ce qui a déjà été fait.

Peugeot 402 JRD: l'élégance française
Peugeot 402 JRD: l’élégance française

Moderne, aérodynamique, ces carrosseries s’inscrivent dans un courant apparu au milieu des années 30.

Elle sera produite en plusieurs versions : coach, cabriolet décapotable, cabriolet transformable (avec système de décapotage électrique !), roadster, commerciale et bien sûr en conduite intérieure.

Pour cette dernière version, il faut même parler de deux variantes, l’une normale et l’autre longue. Celle-ci servira de base au modèle taxi. De profil, la différence entre les deux est visible au niveau de l’extrémité du pavillon. Sur la version longue, la carrosserie se prolonge après la troisième baie vitrée. Ceci offrant bien évidemment plus d’espace aux passagers arrière. L’empattement est bien sûr plus important. C’est cette version longue que JRD a choisi de reproduire. Pour l’histoire, on peut donc considérer que la version offerte par Dinky Toys dont le pavillon plonge immédiatement après la dernière vitre est peu réaliste.

Nous devons cette reproduction de la Peugeot 402 aux déboires de Citroën ! En effet, c’est bien de l’éclatement des jouets Citroën qu’est né JRD. Messieurs Rabier et Douat vont diversifier leur production et nous offrir cette fantastique série de modèles réalisés en plastiline à une échelle voisine du 1/43. Le coach et la commerciale qui ont réellement existé sont les deux seules versions qui n’ont pas été reproduites. JRD produira par contre des versions utilitaires, notamment un plateau brasseur. Les modèles présentés ce jour sont différents.

Les premiers modèles de Peugeot 402 produits par JRD, bien difficiles à se procurer, sont ornés d’une calandre en tôle fixée à l’aide d’une patte dans un orifice prévu à cet effet dans la carrosserie ; l’axe arrière est maintenu à la carrosserie à l’aide de pattes en tôle. Enfin, observez les ailes arrière. Elles sont découpées. Le dessin et les courbes des ailes avant sont également différents par rapport à ceux du second modèle possédant la calandre moulée. Nous n’avons jamais rencontré d’autres versions proposées par JRD qui auraient été équipées de la calandre en tôle. Nous pensons donc que seule la berline a été affublée de cet accessoire trop fragile. Le cabriolet et le roadster ont été également moulés avec des ailes arrière découpées, ce qui tendrait à prouver que la fabrication des moules pour produire des objets dans cette matière qu’est la plastiline devait être bien moins contraignante que la fabrication des moules servant à injecter du zamac.

De cette période novatrice restent ces beaux jouets qui sont le témoin des dernières années d’insouciance avant le conflit mondial qui se profile.

Et l’automobile bascula dans la modernité

C’est le 18 avril 1934, dans son grand hall d’exposition place de l’Europe, qu’André Citroën choisit de dévoiler la traction avant.

En vérité, les concessionnaires avaient été conviés dès le 23 mars à une présentation privée. A la mi-avril, la production commence au rythme de cent voitures par jour. La production passe très vite à deux cents exemplaires par jour. Il s’agit de la « 7 ».

Traction Citroën JRD
Traction Citroën JRD

Dès le début du mois de mai 1934, les heureux privilégiés commencent à prendre possession de leur véhicule. Ce sera le commencement de la fin pour le créateur de la marque. Même si les qualités qui feront plus tard le succès de l’auto sont déjà là, les premières voitures ne sont pas au point, elles manquent de fiabilité. En fait, André Citroën, cerné par les créanciers tente un dernier coup de poker. Cela ne suffit pas, il doit céder son entreprise à son principal créancier, la firme de pneumatiques Michelin. C’est ainsi que Pierre Boulanger arrive à la tête de Citroën. Au prix d’une gestion rigoureuse la firme se redresse.

Mais André Citroën devra quitter son entreprise qui était sa raison de vivre. Il décédera un an plus tard, en 1935, sans avoir vraiment assisté au succès de cette auto. Cette période troublée pour la firme du quai de Javel aura des répercussions sur nos petites reproductions miniatures

Le budget consacré à la reproduction en miniatures des automobiles Citroën n’est pas épargné par la rigueur et le contrat liant Citroën à la firme de Briare ne sera pas reconduit. C’est notamment pour cette raison que la C-I-J se tourne vers Renault.

Monsieur Rabier issu des jouets Citroën, en profite pour créer la JRD. Celle-ci continuera à s’intéresser aux reproductions Citroën, mais pour ne pas revivre les mêmes déboires, JRD refuse de s’enfermer à nouveau dans une logique de monopole

Ainsi verra-t-on une magnifique série de Peugeot, mais également des autos de course (tank Bugatti, Bluebird et autres Delahaye du million). C-I-J au contraire, souhaitera avoir le monopole des reproductions de Boulogne-Billancourt. Renault avait toujours jalousé Citroën. L’opportunité d’avoir, comme André Citroën un label « Jouets Renault » a dû fortement peser dans la balance. Ce monopole ne cessera qu’avec la Dauphine !

Cette reproduction de la traction peut être interprétée à nos yeux comme une reproduction « post Jouets Citroën ». Le jouet n’emporte pas le succès escompté. Les modèles de la série des tractions sont difficiles à se procurer. En dehors de la berline, il existe un cabriolet, et des versions militaires (mitrailleuse et projecteur). Au final, on peut légitimement s’interroger : s’agit-il d’une 7 ou d’une 11 ? bien que de bonne facture, la reproduction n’autorise pas à trancher.

Nous laisserons donc aux spécialistes de la marque aux chevrons le dernier mot. Observez pour finir le nom figurant sur les pneumatiques ce sont des Michelin, bien évidemment !

Lloyd et serpent de mer

Lloyd est une marque très ancienne dans le monde de l’automobile. Ses origines remontent à 1906. Au départ, c’est une compagnie maritime qui se diversifie en développant une unité de production automobile qui fabrique des voitures électriques sous licence de la marque Krieger.

Lloyd Tekno rare calandre
Lloyd Tekno rare calandre

En 1908, Lloyd crée sous son propre nom une auto fonctionnant à l’essence dont le succès est très limité. En 1914 la société fusionne avec Hansa. La restructuration se poursuit et en 1929 c’est la société Borgward qui reprend les rênes de la firme moribonde. Après plusieurs années de sommeil, Borgward remet en 1950 la marque Lloyd au goût du jour avec une auto de petite taille équipée d’un moteur bi-cylindre. Au milieu des années 60, c’est la fin de Borgward qui entraîne dans sa chute la firme Lloyd.

La petite Lloyd Alexander a été fabriquée de 1953 à 1961. La version que propose Tekno en 1958 sous la référence 819 est équipée d’une calandre à barres horizontales, assez discrète et ornée en son centre du logo en forme de triangle.

La version « TS » équipée d’une calandre plus moderne, de forme ovale apparaît en 1958. Cette éphémère calandre ne comporte plus le logo de la marque, si caractéristique. Le reste de la carrosserie est identique, comme la motorisation. Mais il est indéniable que cette transformation donne au modèle davantage de modernité.

Le premier modèle Tekno est une réussite. Les formes sont bien rendues. Les amateurs ont dû accueillir ce modèle avec plaisir, car au moment où il est sorti, aucun fabricant ne l’avait inscrit à son catalogue, horSikumis Siku, mais à l’échelle du 1/60.

Siku a d’ailleurs proposé un grand choix de Borgward, Hansa et autres Lloyd, marques du même consortium. Tekno ne se contentera pas de la berline, mais proposera également un break vitré et un break tôlé. Borgward avait l’habitude de produire beaucoup de versions différentes à partir d’une même base. A titre d’exemple, la Borgward Isabella que Dinky Toys a reproduit en coupé a également existé en berline, en cabriolet mais aussi en break vitré, break tôlé et en pick up !

Cette deuxième mouture de la Lloyd Tekno est excessivement rare. On peut dire que c’est même la Tekno la plus rare. Son histoire est obscure. Le premier ouvrage danois sur la firme Tekno qui date du milieu des années 80 ne mentionne pas ce modèle. Il faut attendre les années 90 (et le second ouvrage) pour que la littérature scandinave cite notre modèle. Malheureusement, le modèle photographié dans l’ouvrage est repeint et réparé et les auteurs, peu perspicaces, lui attribuent la même année de création que l’autre modèle ce qui n’est pas plausible.

En effet, la voiture réelle est de 1958 et il faut tenir compte des presque deux ans de gestation nécessaires à l’époque pour mettre au point l’outillage : le modèle ne peut donc être sorti avant 1960.

Cette thèse est confortée par le rapide abandon de la production de cette miniature qui coïncide avec l’arrêt de la production de la vraie voiture dès 1961. Ce modèle repeint et réparé est longtemps resté le seul modèle connu jusqu’à ce que nous ayons la chance d’acquérir trois modèles auprès d’un vieux marchand danois qui en avait trouvé une dizaine neuves en boîte ! On constate que la boîte est identique à celle du modèle antérieur. Les couleurs retenues sont plus nombreuses que celles vues pour le premier moule et nous nous souvenons très bien que les autos de notre marchand étaient toutes différentes : il devait en avoir six ou sept. On peut légitimement penser que ces autos reprenaient les teintes du constructeur. Il est tentant d’y voir un modèle à usage promotionnel.

En effet, Tekno travaillait avec Lloyd et lui fournissait des autos destinées à être présentées sur des palettes distribuées dans les réseaux de revendeurs pour faciliter les choix des futurs acheteurs (voir la fiche sur Saab /Tekno). Les palettes connues sont toujours équipées de premiers modèles. Pour la petite histoire, comme le marchand danois ne parlait pas l‘anglais, et comme nous ne parlions pas le danois, les négociations ressemblèrent quelque peu à un spectacle du mime Marceau. Heureusement les chiffres sont universels…. et j’ai commencé mon apprentissage du danois !

En voyant ces autos je ne peux m’empêcher d’avoir une pensée pour la cordialité de ce marchand danois, mélange de rudesse et de bonne humeur. C’est un des charmes de la collection que ces rencontres éphémères et improbables.

Déesses au pays des Aztèques

Politoys est une firme italienne, d’origine milanaise fondée en 1955. Très vite, grâce à une politique commerciale agressive elle se développe, en Italie bien sûr, mais aussi hors des frontières transalpines. Cette gamme se positionne dans le créneau des articles bon marché : l’Italie mettra plus de temps que ses voisins à se redresser de la guerre.

DS Mc Gregor
DS Mc Gregor

On peut facilement faire un parallèle avec notre fabricant national Norev en raison de deux points communs : les années de lancement et l’utilisation du plastique. Celui employé par Politoys s’avère avec le temps de meilleure qualité ; sa résistance est excellente et les couleurs vives perdurent. Les modèles sont assemblés par vis contrairement aux modèles Norev. Par contre, globalement, notre fabricant national a souvent reproduit de manière plus fidèle les autos que son concurrent milanais. A titre d’exemple, la reproduction de certaines Alfa Roméo est approximative.

Les Citroën DS Politoys que nous vous présentons ne sont pas non plus des modèles d’exactitude. L’ensemble de la gamme dégage un charme certain. Nous avouons avoir un faible pour les poids lourds, particulièrement réussis notamment les Fiat 682N et les utilitaires légers de marque Romeo. Ces modèles sont reproduits au 1/43, ce qui fait un autre point commun avec notre fabricant villeurbannais.

La similitude des deux camions semi remorque porte autos, le Fiat (Politoys) et le Berliet (Norev) est intéressante. Grâce à des prix de vente assez bas, ces miniatures s’imposeront rapidement. Lorsque, au milieu des années 60, le niveau de vie s’élèvera en Italie, Politoys passera à la production de miniatures en zamac. Avant cela, elle produira une étrange série dénommée « fibre glass ». L’idée était de proposer des autos injectées en plastique, puis peintes et équipées d’un châssis en zamac, donnant du poids à l’auto. On peut penser que Politoys a utilisé cette technique après avoir tiré les leçons du résultat peu convaincant des teintes métallisées injectées dans la masse. Les peintures métallisées, signe d’un certain luxe (!!!?) commençaient alors à envahir les catalogues des fabricants de jouets. Le résultat, flatteur dans un premier temps montra vite ses limites. En effet les parties ouvrantes équipant ces miniatures en plastique avaient tendance à écailler très rapidement les parties voisines de la carrosserie.

La firme Norev tentera l’expérience, avec plus de succès car elle n’utilisera cette technique que pour des autos… sans partie ouvrante ! Norev produira aussi à cette époque une série dénommé Cométal. Il s’agit de modèles avec la traditionnelle carrosserie en plastique injecté et teinté dans la masse, mais équipés d’un socle non plus en plastique mais injecté en zamac. Nous voyons bien qu’il y a bien plus de points communs avec ces deux firmes que l’on ne l’imagine.

Le succès international pour Politoys sera au rendez vous avec la série 500 qui est une série injectée entièrement en zamac.

Le plastique va être abandonné progressivement. Les dirigeants milanais se sont alors demandé que faire des moules obsolètes et ont trouvé une solution originale à leur problème.

Une entité Mexicaine va être créée en association avec un industriel local du nom de Mc Gregor : tous les moules partent pour Mexico, tous les châssis sont regravés avec l’inscription : « Mc Gregor Politoys made in Mexico ».

La finition des modèles Mc Gregor se singularise par le fait que la plupart des carrosseries sont injectées en plastique de couleur blanche puis peintes. En cela, cette firme se servira de l’expérience acquise par Politoys avec ses modèles en fibre glass. Ainsi les modèles que nous vous présentons sont peints. Aucune Citroën DS sortie de l’usine milanaise n’avait connue cette technique, le plastique étant alors teinté dans la masse. Autre différence notoire, les jantes : celles-ci sont issues de modèles plus récents créés par Politoys. Il faut bien avouer que le choix de jantes à rayons pour un break ID est discutable ! Nous avons trouvé ces autos aux USA, il y a une vingtaine d’années. A cette époque, ces productions exotiques n’intéressaient que très peu de collectionneurs. Nous avions déjà connu ce phénomène avec les Dalia et les Brosol.

Cette collection Mc Gregor est très riche car au fur et à mesure que les moules étaient retirés de fabrication en Italie, ils partaient connaître une deuxième vie sous le soleil de Mexico. Ainsi, après les Politoys, suivirent les Polistil.

Ernst Plank et le jouet devint vivant – 1

Il y a une quinzaine d’années alors que nous étions chez Monsieur Scherpereel, pionnier et grand marchand parisien, nous sommes tombés en arrêt devant deux objets : un petit hangar en tôle et la limousine qu’il abritait. Nous avons tout de suite été séduits par la qualité d’exécution de ces jouets et leur poésie, et nous avons souhaité avoir davantage d’informations sur ces jouets Ernst Plank de provenance germanique.

Le monde poétique des Ernst Plank
le monde poétique des Ernst Plank

Nous avons interrogé différents marchands allemands. A l’évocation du nom du fabricant, venait immanquablement la même réponse : nos interlocuteurs citaient le même collectionneur, Rolf Naskret, qui acquérait tous modèles de la marque, sans même leur donner une chance d’être proposés sur le marché. Il avait à cette fin tissé un réseau de marchands et de collectionneurs.

De mémoire, nous n’avions jamais vu un collectionneur tenir un secteur du marché de la miniature comme le faisait Rolf Naskret.

Pour plus d’efficacité, il passait des encarts publicitaires dans différentes revues spécialisée sur le jouet ancien. Rolf Naskret était tombé littéralement amoureux de cette firme : il ne se contentait pas d’acquérir des modèles, mais faisait des recherches avec des catalogues d’époque afin d’établir ou de tenter d’établir une liste de la production. Nous sommes donc entrés en contact avec lui. Il avait accumulé un nombre important de doublons qu’il présentait dans les bourses d’échange à seule fin de faire découvrir ces modèles aux collectionneurs et de faire partager sa passion. Il ne les vendait pas, bien entendu. Il arrive cependant un moment où l’acquisition du quatrième exemplaire d’un modèle similaire doit logiquement conduire à une forme d’interrogation. Il est du principe même de la collection de s’enrichir régulièrement de nouveaux spécimens. Il est parfois important de savoir élargir son domaine de prédilection, afin de ne pas sombrer dans la monotonie. Bien sûr, chaque collectionneur trouve son équilibre personnel entre la contemplation des modèles déjà acquis et l’excitation des acquisitions projetées. C’est une alchimie mystérieuse.

Bref, notre ami d’outre Rhin commençait à tourner en rond. Il s’était décidé à nous céder, au compte goutte, quelques doubles. Survint alors un élément imprévisible. A l’aube, lors d’un déballage à Bruchsal en Allemagne, nous trouvâmes un très beau tracteur agricole. Comme nous avions bien retenu les leçons de M. Naskret, nous avons reconnu sans peine la patte du fabricant Allemand : il s’est trouvé que ce fameux petit tracteur était en fait un des derniers modèles que M. Naskret cherchait encore. Il en connaissait l’existence pour l’avoir vu sur un catalogue, mais ne l’avait jamais rencontré en vrai. Il nous proposa un échange assez avantageux.

Notre logique de collectionneur nous incita cependant à le conserver et il accepta de bonne grâce notre choix malgré une ultime surenchère. Quelques mois plus tard, il nous contacta pour nous céder l’intégralité de sa collection. Sans doute le fait de savoir que nous la conserverions intégralement dû peser dans son choix.

Nous récupérâmes également la documentation, les personnages, les trains et autres aéronefs et dirigeables. Nous y reviendrons plus tard.