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La pinte,Bruxelles et le tracteur.

La pinte, Bruxelles et le tracteur.

Ce titre surréaliste pourrait être celui d’un tableau de l’artiste belge René Magritte. Il n’en est rien. C’est encore une fois le Premier ministre anglais qui m’a inspiré, mais il est vrai que ce dernier verse parfois dans le surréalisme. Tout est parti de la lecture de la chronique d’Eric Albert dans le journal « Le Monde » du mercredi 12 janvier 2022.

Le journaliste rappelle que depuis trente ans le premier ministre anglais en exercice a toujours su très habilement déformer des faits relatifs à la question européenne.

Il cite dans le désordre la demande italienne de fabriquer des préservatifs plus petits, de raser le bâtiment actuel du parlement au profit d’une tour immense ou encore le souhait par les bureaucrates de Bruxelles d’imposer un test d’odeur au fumier…Boris Johnson a l’art de détourner les informations pour conforter les certitudes de son électorat euro-sceptique.

Dernièrement, afin de montrer tout l’intérêt du Brexit il a expliqué que les producteurs de Champagne allaient, pour le marché britannique, sortir des « règles européennes » en vigueur et re-fabriquer des bouteilles d’une contenance d’une pinte (0,57 litre).Celles qu’appréciait paraît-il,  Sir Winston Churchill : « assez pour deux au déjeuner et une au dîner ». Comme relève le journaliste: « l’information a fait le tour du monde : elle est drôle, simple, et le 23 décembre 2021, il ne se passait pas grand-chose d’autre. »

Il semble cependant que dans le monde viticole aucun producteur n’ait envisagé ce type de contenance.

Eric Albert conclut sa chronique par une interrogation  » Cinq ans de crise politique et institutionnelle pour en arriver là, cela en valait-il la peine ? »

Vous connaissez mon attachement à la Grande-Bretagne. Nos amis anglais ont une approche de l’univers de la collection de miniatures automobiles que j’apprécie, leurs manifestations sont conviviales et bien organisées, leur sens de l’humour et leur grande connaissance des modèles réduits m’ont toujours séduit.

J’ai là-bas beaucoup d’amis et nous évitons soigneusement de parler du Brexit, laissant cela aux grandes personnes.

EuroTunnel : en route pour la Grande -Bretagne !
EuroTunnel : en route pour la Grande -Bretagne !

Je me suis souvenu que dans les années cinquante, bien avant de rejoindre le marché commun en 1973, les fabricants anglais de miniatures automobiles avaient su faire preuve d’une véritable indépendance par rapport aux autres fabricants européens. 

Je m’explique. Nous avons vu précédemment (lire d’où venons nous?) que les premières reproductions de machines agricoles en jouets le furent à l’échelle du 1/32. Cette échelle correspondait à celle des figurines agricoles fabriquées par Britains en Grande-Bretagne, Quiralu en France ou Elastolin en Allemagne.

Cette échelle a été conservée partout en Europe, sauf en Grande-Bretagne ! Les deux grands fabricants, Dinky Toys et plus tard Corgi Toys, se sont affranchis de cette échelle pour adopter celle de leur gamme existante (1/43 pour les automobiles et le 1/50 pour les utilitaires).

Cette décision me paraît des plus logiques. Enfant j’ai personnellement dû me rabattre sur les miniatures agricoles de chez Corgi Toys. Solido n’avait d’yeux que pour les miniatures associées à la vitesse, tandis que Dinky Toys France et Norev ne juraient que par les berlines familiales.

Les fabricants français ont laissé le champ libre aux fabrications de jouets agricoles britanniques.

Vous connaissez tous la grande variété des produits proposés par Corgi Toys. La lecture des catalogues prouve l’intérêt de la firme de Swansea pour le monde agricole.

Elle veillera d’ailleurs à rajeunir constamment son offre. Le Massey- Ferguson type 65 sera remplacé par le célèbre et universel 165 . Les Fordson connaitront aussi, comme les vrais, des cures de rajeunissements au fil des ans. Corgi Toys a complété ses tracteurs avec une très belle gamme d’accessoires, preuve que la marque a pris ce marché au sérieux .

C’est pourtant Dinky Toys Liverpool qui fut le premier à produire des tracteurs miniatures à l’échelle du 1/43, et ce dès le début de l’aventure, en 1933. La raison est bien connue. Cette échelle correspondait à celle des trains Hornby.

Cependant, la firme de Liverpool n’affichera pas le volontarisme de son concurrent Corgi Toys. Elle peinera à offrir une offre élargie, renouvelée et modernisée. Il faudra attendre le milieu des années soixante pour voir de nouveaux tracteurs au catalogue, les David Brown.

Pourtant tout avait bien commencé pour Dinky Toys. La firme avait même dédié un numéro de code désignant la série agricole, le 27. Au début de l’aventure, elle attribuait à chacune de ses branches un numéro spécifique : berlines (40), cabriolets (38), voitures américaine (39) etc….

Chaque produit numéroté 27 était suivi d’un suffixe composé d’une lettre de l’alphabet. Le 27 A Massey Harris fut le plus célèbre. Il eut une vie très longue …trop longue même ! Imaginez que ce tracteur était encore en vente en 1970. Il avait été rebadgé « Massey Fergusson » du fait de la transformation de la société.

Les vénérables roues en zamac brut avec moyeux peints de couleur jaune avaient fait place à des jantes plastique/zamac montées sur pneus en caoutchouc. Le personnage était désormais en plastique comme le pot d’échappement.

Pour l’occasion, Liverpool avait créé un coffret et avait attelé à son tracteur une remorque de type rateau.  Une façon de se rappeler qu’il y a très longtemps elle avait proposé un superbe coffret cadeau contenant plusieurs miniatures de la gamme 27. Plus tard un autre coffret « supertoys » dans lequel le Massey Harris était attelé à une remorque de type rateau sera proposé.

Pour être le plus complet possible, n’oublions pas le très rare coffret conçu en France de type « importation » avec étiquette en langue française. De couleur rouge, dans l’esprit de ceux créés pour les camions laitiers Nestlé, Meccano France avait choisi l’épandeur pour être attelé au tracteur.  L’attache permettant à l’ensemble d’être fixé sur le socle manque très souvent.

Pour les amateurs de variantes de boîtes, l’intérieur du coffret peut être de couleur jaune ou de couleur rose, comme sur les camions laitiers d’ailleurs, et ce en fonction de la période de production. Les intérieurs roses ont précédé les jaunes.

Ce beau et symbolique tracteur a même fait un grand voyage en Afrique du Sud. Pour l’occasion il a reçu un marquage (Diesel Harris) et bien sûr une boîte spécifique. Ce dernier est très rare.

Le deuxième tracteur de la gamme 27 a été le Field Marshall. Il porte la référence 27 N. Lui aussi connaîtra une interminable carrière. Equipé de roues en zamac avec moyeux peintes de couleur argent, puis vert il finira comme le Massey Fergusson avec des jantes plastique/zamac et un personnage en plastique.

Un véhicule possède un charme certain et l’on aurait aimé d’ailleurs que Dinky Toys poursuive dans cette voie : le motocart. D’abord livré en boîte de 4 pièces, il recevra plus tard une boîte individuelle. Trois nuances de vert existent. Le vert foncé est rare comme le vert très pâle d’ailleurs.

Je passe sur les accessoires, ils figurent dans le coffret cadeau. Une mention spéciale, pour le plus rare à mes yeux, la triple tondeuse qui fut livrée en étui individuel. Ses couleurs chamarrées et sa conception ingénieuse marquent le sommet de gamme. On peut d’ailleurs l’atteler à la Land Rover, autre incontournable de la série 27. (voir le blog consacré à ce modèle)

Dans la gamme 27, figure enfin un break woody. On retrouve là toute la singularité britannique : le nom de l’auto reproduite ne figure pas, ni sur les boîtes de 6 pièces ni sur l’étui individuel ! Il s’agit en fait d’une Plymouth. Mais dans une logique ne pouvant appartenir qu’à une firme anglaise, les dirigeants de Meccano avaient décidé qu’il fallait un break pour compléter l’offre « agricole ».

Un break en finition « bois », donnant un côté rustique au modèle leur semblait la meilleure idée, au point de faire l’impasse sur le nom du constructeur !

Mes amis anglais, ne changez rien ! C’est comme cela que l’on vous apprécie. Il faut aussi savoir cultiver sa différence. Jusqu’à un certain point cependant !

Rendez-vous début septembre pour le prochain article.

 

 

Habits de noce.

Habits de noce.

Les photos de jeunes mariés, immortalisés en studio, ont une dimension particulière. Ces derniers comprennent que l’instant est important et que, durant des décennies, cette image servira de repère, pour le meilleur ou peut-être pour le pire.

Ils posent fièrement et n’ont pas peur de défier le temps et les événements à venir, comme les jeunes matelots qui se faisaient photographier avant leur départ pour Terre-Neuve, encore inconscients de ce qui les attendait.

J’ai retrouvé cette dimension dans les clichés de Yann Arthus-Bertrand. Une exposition à Nice était consacré à ce photographe-réalisateur.

Le personnage est atypique, sa vie pleine de rebondissements. Un brevet de pilote d’avion, l’amour de la nature, des animaux, et la passion de la photographie ont façonné l’artiste que nous connaissons. Nous avons tous en mémoire les images aériennes de la planète qu’il a publiées dans son livre « La terre vue du ciel » en 1992.

Les photos aériennes ne sont pas le seul centre d’intérêt du photographe. Il peut aussi se mettre au niveau de son sujet et immortaliser sur la pellicule la complicité entre l’homme et l’animal.

Il utilise pour ce travail un accessoire, une bâche tendue, qui lui sert de studio. Cet accessoire deviendra sa marque de fabrique, et dès lors il l’utilisera pour tous ses portraits. Pour l’occasion il travaille avec de la lumière artificielle et des assistants.

Ces clichés ne peuvent laisser indifférents. On perçoit la force de la relation entre l’homme et l’animal. On devine la fierté, mais aussi la tendresse. Pour l’occasion, comme on le fait pour toute photo importante, les protagonistes ont revêtu des vêtements qui les mettent à leur avantage et honorent leur compagnon. L’un et l’autre s’en trouvent magnifiés.

J’ai retenu six photos que le conservateur du musée de la photographie Charles Nègre à Nice a judicieusement accrochées. Ces clichés qui se mettent en valeur les uns les autres ont pour point commun le cheval et son cavalier.

L’artiste a choisi un cadre très large, qu’il a dénommé « bâche décalée » montrant l’installation de la fameuse bâche mais au milieu d’un décor naturel, immédiatement identifiable. Ainsi « Parouss » étalon karatchaï monté par Roussian Liskanitch est photographié au milieu d’un décor moscovite tandis que « Valur » étalon islandais monté par Linda Run est au centre d’un paysage volcanique.

On se sent tout petit au milieu de ces photos. L’adage qui dit que le cheval est la plus noble conquête de l’homme semble ici prendre tout son sens.

Mais pour assouvir sa soif de conquête, l’homme a trouvé un autre moyen, plus rapide, plus fiable pour se déplacer. Et petit à petit, le chemin de fer a supplanté le cheval.

Au point que l’homme a conçu des wagons pour le transporter, d’un point à un autre, comme une simple marchandise. Aurait-on imaginé au milieu du 19eme siècle ce type de transport ?

Le transport des chevaux apparaît comme une nécessité pour consolider la conquête de l’Ouest américain. Mais lors de la première guerre mondiale, il faudra aussi emmener rapidement les équipages sur les champs de bataille.

La paix revenue, les courses hippiques vont conduire l’homme à carrosser de beaux et luxueux camions. Les anglais se sont montrés experts dans cet art et cela s’est traduit dans les reproductions de camions miniatures.

Le camion Maudslay de chez Dinky Toys, luxueusement carrossé en transport de chevaux est somptueux. Il est le parfait exemple du soin que l’homme a pris pour concevoir des véhicules « confortables » pour déplacer les chevaux.

La première mouture du jouet est aux couleurs de la British Railways, l’équivalent de notre « SNCF » en Grande-Bretagne, prouvant bien toute l’importance du ferroviaire pour ce type de transport. Le camion ne vient qu’au bout de la chaîne du transport.

Ce formidable jouet a une histoire singulière. Le début de sa production coïncide avec la guerre de Corée (1950-1953). Quel rapport me direz-vous ? le gouvernement anglais impliqué dans les forces onusiennes va, temporairement, rationner l’utilisation du zamac dans l’industrie britannique.

C’est d’ailleurs pour cette raison que les Matchbox ont vu le jour : Lesney a utilisé astucieusement sa ration de matière première (le zamac) pour fabriquer des modèles au 1/75 au lieu des modèles au 1/43 ou au 1/20. Dinky Toys, lui, expérimentera l’aluminium.

Notre Maudslay servira avec le camion Studebaker citerne, et l’Avro Vulcan à l’expérimentation de l’aluminium afin de combler le manque de zamac. En main le camion est très léger. Un des inconvénients de l’aluminium est la mauvaise tenue de la peinture aux chocs car elle n’accroche pas aussi bien que sur le zamac.

Ce camion est aussi singulier pour une autre raison. Une version sera réalisée pour le marché américain, sans la mention « British Railways » qui n’évoque pas grand chose pour le petit américain mais avec celle d’ « Express Horse Van Hire Service ». Il conserve cependant sa belle robe bordeaux. Fait très rare chez Dinky Toys, une autre numérotation sera appliquée et une boîte spécifique sera créée avec la nouvelle numérotation. Cela se reproduira aussi pour la MG TF.

Ce camion marque le point culminant de la relation entre le mythique importateur américain Hudson Dobson et la firme de Liverpool.

Je m’explique. Après guerre en 1946-1947, à la reprise de l’ activité économique, une très grande partie de la production est envoyée outre-Atlantique. La Grande-Bretagne, comme l’Europe, est économiquement sinistrée. Il faut faire rentrer des devises.

Outre-Atlantique, les importateurs savaient déjà,  négocier durement et tordre le cou aux fabricants. L’importateur exigeait des conditions tellement avantageuses qu’il devenait difficile pour Dinky Toys de produire une boîte spéciale et une décoration spécifique tout en préservant son profit.

Bien plus tard, Dinky Toys relancera son modèle selon une technique qui semblait inusable, mais qui finira par trouver ses limites : une finition bicolore, certes du plus bel effet, gris perle et jaune pâle, et deux chevaux …en plastique ! le tour était joué.

Dinky Toys avait créé avant guerre, puis repris après, un petit coffret d’animaux de ferme avec deux superbes chevaux que l’enfant pouvait placer dans son Maudslay à la sortie du wagon à bestiaux Hornby.

Ce beau Maudslay fut si célèbre que d’ autres fabricants anglais, lui consacrèrent une reproduction. Tout d’abord Charbens. L’échelle est plus proche du 1/55. Il n’a certes pas l’élégance du Dinky Toys mais il est bien plus rare. Le trouver avec une boîte peut demander du temps. De plus, il souffre parfois de métal fatigue.

Morestone livrera également une version, mais à l’échelle du 1/87 qui n’est pas très fréquente.

Preuve que ce type de transport a toujours passionné nos amis anglais, Budgie proposera lui un Bedford TK équipé d’une carrosserie spécifique. Il se caractérise par sa capucine et ses portes latérales et arrière ouvrantes permettant à l’enfant de faire descendre les petits chevaux en plastique.

J’ai gardé pour la fin ce modèle de fabrication inconnue. Il est réduit au 1/50. C’est aussi une carrosserie spécifique qui ne pourra resservir à une autre déclinaison. On devine l’attachement du fabricant envers ce type de véhicule !

J’ai laissé de côté les tracteurs semi-remorque et leur remorque spécifique simulant de vrais « box ambulants ». Ils sont bien sûr de conception plus moderne, un peu trop moderne pour moi.

Citons Matchbox dans sa gamme au 1/60 qui proposa un beau Dodge aux couleurs de la fameuse course d’Ascot avec ses inévitables petits chevaux en plastique qui devaient bien souvent être l’élément déclencheur du choix de l’enfant.

Et enfin, le plus spectaculaire, le Bedford TK, tracteur de Corgi Toys aux couleurs du cirque Chipperfields qui sera ensuite décoré aux couleurs de « Newmarket racing stables ». Ce dernier sera ensuite remplacé par un Berliet. Mais nous approchons des années 80.

Vous avez aimé John and Betty. Vous adorerez José y Carmen !

Vous avez aimé John and Betty. Vous adorerez José y Carmen !

Ma première méthode d’Anglais racontait la vie quotidienne d’un frère et une soeur. Ils s’appelaient John and Betty. Je me souviens de la prédominance de la couleur verte dans les vignettes. On retrouvait tous les clichés relatifs à la société anglaise. Je suis né en 1963.

Au petit déjeuner, les « baked beans » (haricots blanc sauce tomate) trônaient sur la table avec les céréales, les oeufs au bacon, les toasts et la marmelade.

Je ne me souviens plus s’il y avait un ordre à respecter dans la dégustation, mais la famille était réunie comme pour une cérémonie. Les enfants ne tenaient pas leur bol d’une main et le téléphone portable de l’autre. C’était une autre époque.

Les parents allaient à l’opéra et leur progéniture n’écoutait ni les « Clash » ni les « Sex pistols »mais des disques de Haendel pour les plus roturiers, de John Dowland, célèbre joueur de luth de l’époque Elisabethaine pour les plus mélomanes (petit extrait musical )

Ils étaient bien peignés et habillés avec chic. Je me suis souvent demandé même comment ce grand pays avait pu voir naître la vague punk.

Côté boisson, je me souviens du whisky, bu avec modération, recueillement et régularité, mais uniquement par le papa, installé dans son fauteuil. La bière, il n’en était pas question.

J’ai découvert bien plus tard l’existence des « pubs », totalement absents des vignettes de ce livre.

Moi, j’avais bien apprécié les dessins représentant le laitier qui déposait la bouteille devant la maison avec son traditionnel camion électrique.

Amateur de véhicules industriels, les formes particulières de la camionnette électrique du laitier m’avaient séduit. Elles représentaient la singularité britannique la plus marquante, bien plus que les bus à deux étages et le traditionnel taxi Austin.

Je n’ai pas appris l’Espagnol mais je me suis toujours demandé si l’ouvrage avec John and Betty avait un équivalent ibérique, un « José y Carmen ».

Les deux pays ont des points communs. Ils ont une monarchie qui n’a aucun pouvoir politique. Ils se déchirent aussi depuis 300 ans pour un territoire de 6,8km2, le rocher de Gibraltar. C’est à peu près tout.

Quand John passe méticuleusement sa tondeuse dans le jardin, José cueille les oranges. Quand Betty s’abrite sous un parapluie dans les brumes londoniennes, Carmen joue de l’éventail dans les ruelles de Séville.

En Espagne, pas de bus à deux étages pour aller à l’école mais le scooter du père. Il peut emmener les deux enfants grâce à sa selle biplace. Lorsqu’ils seront plus grands, il devra s’équiper d’un side pour emmener toute la famille.

Comme la Grande-Bretagne, l’Espagne regorge de véhicules typés associables au mode de vie.

Après la guerre civile de 1936, le pays a été plongé dans une léthargie économique. Il s s’est donc tourné vers des véhicules économiques. Le laitier espagnol est ainsi équipé d’un triporteur Lambretta avec une caisse à l’avant, comme le livreur de bouteilles de gaz ou de boissons.

L’entrepreneur local se sert d’un dérivé du Biscuter Voisin en version fourgonnette ou de l’Isetta équipée d’un plateau. Les rues espagnoles sont ainsi envahies de véhicules simples, aux couleurs bigarrées, dont la motorisation deux temps laisse échapper des gaz d’échappement bleutés.

On imagine la cacophonie régnant dans les ruelles encombrées de ces engins pétaradants.

J’ai un faible pour ces véhicules aux formes simplistes. Le grand fabricant ibère, Dalia, a su capter le charme des versions tricycle. La firme de Barcelone a décliné une multitude de versions, au point qu’on s’y perd.

Au début de ma collection, devant l’ampleur de la tache, je m’étais contenté d’en garder quelques-uns. Et puis j’ai eu l’opportunité d’ acquérir un lot qui en comprenait plus de 40 différents. Je n’ai pas laissé passer cette chance.

Désormais, les Lambretta, les Vespa aux couleurs Obras publicas, Butano, Cruz Roja, policia, Coca Cola animent mes vitrines, et me transportent en Andalousie en quelques secondes.

On peut s’interroger sur la réalité de certaines versions comme Cruz Roja . On imagine l’équipage assumant les urgences en triporteur ou en scooter avec side-car.

Il faut prendre ces versions comme des jouets. Ils établissent combien ces petits véhicules faisaient partie de la vie de tous les jours au point d’en multiplier les variantes même les plus improbables.

les versions « militar » sont là pour nous rappeler la présence du Général Franco à la tête du pays jusqu’en 1975. Certaines versions sont décorées aux couleurs « policia ». La police a toujours eu, en Espagne, ce type de véhicules.

Les Lambretta triporteurs ont permis à Dalia de multiplier les chargements. Lait, vin, soda Coca Cola, bouteilles de gaz et chargements variés sont au catalogue. Pour chaque version Dalia a pris soin de réaliser une cale en carton à la dimension des accessoires contenus dans la benne du triporteur.

Cette astuce des fabricants de jouets consistant à décliner un grand nombre de variantes leur permettait de gonfler leur catalogue à peu de frais et donc d’accroître les commandes des revendeurs. Ces petits modèles fort attrayants devaient être vendus bon marché.

Le scooter c’est aussi l’image de la jeunesse, donc de l’insouciance. Comment interpréter autrement la version »rallye » qui emprunte à la Porsche GT  et l’Aston Martin DB5 leur numéro de course et leur bande tricolore?

Il y a là quelque chose de prémonitoire, comme si Dalia pressentait l’émergence en 1980 de la « Movida » et la sortie du franquisme. Il fallait oser proposer un scooter rallye à côté de la version kaki militaire. Laquelle eut le plus de succès ? il me semble que la version militaire est bien plus fréquente que l’autre, et qu’elle a été produite en plus grand nombre.

Merci à José Andrade pour son aide dans l’acquisition  de ces miniatures. Prochain blog le 25 Janvier 2021.

Jour de fête

Jour de fête.

Vous avez sûrement en tête les images du film « Jour de fête » de Jacques Tati, avec l’arrivée joyeuse du petit cirque dans le village de Sainte-Sévère-sur -Indre. Les enfants du village courent derrière les roulottes. C’est la fête, les forains arrivent.

On retrouvera cette même joie liée à l’arrivée des forains plus tard, dans le film de Jacques Demy, « Les demoiselles de Rochefort » . (voir l’extrait de l’arrivée des forains avec les camions Saviem et les bateaux Rocca !) 

L’arrivée des roulottes symbolise ce moment de fête, de rupture avec le quotidien, comme carnaval au Moyen Âge.

C’est en 1779 que l’on trouve la trace des premiers spectacles de cirque, en Grande-Bretagne en plein air. Puis des structures en dur ont été construites afin d’assurer le spectacle quelque soit le temps. On parle ici de spectacles d’une certaine envergure.

Plus tard, grâce à la traction hippomobile, de toutes petites structures ont sillonné les routes de Grande-Bretagne puis de France. En France, des décrets sont venus réglementer les déplacements et le stationnement des gens du voyage, des saltimbanques.

Pas de chapiteau bien sûr, mais des bancs, une estrade. parfois quelques animaux, un montreur d’ours par exemple. Quelques numéros de jonglage, de clown au son d’un ou deux instruments de musique. Cela suffit pour apporter joie et divertissements dans les petits villages.

Nous sommes bien loin du gigantisme du cirque à l’américaine. Les saltimbanques arpentent les routes toute l’année.

En parallèle, les femmes exercent parfois leurs dons de voyance. Roulottes et diseuses de bonnne aventure vont de pair. Les peintres se sont emparés de cette image d’Epinal.

Certains artistes ont su saisir sur la toile les deux facettes de la vie des gens du voyage : le divertissement et les prédictions d’avenir. Lucien Simon qui était professeur à l’Ecole des Beaux-Arts de Paris a réalisé une série de toiles mettant en scène un petit spectacle sur une estrade et une diseuse de bonne aventure.

Les scènes croquées par Lucien Simon se déroulent le 15 août dans le Finistère. Chaque année, au jour du pardon de la chapelle Notre Dame De La Joie, un petit cirque, mais aussi des manèges venaient s’installer à Penmar’ch.

Le plus intéressant est celle où le peintre représente à l’arrière plan une petite estrade où quelques clowns amusent la galerie. Au premier plan des bigoudènes se font lire l’avenir dans les cartes par une diseuse de bonne aventure. Les enfants sont apprêtés et fixent le spectateur. Les chevaux sont au repos. La scène contraste avec l’agitation et le brouhaha du fond du tableau.

On y trouve le mélange du profane et du sacré. Ces fêtes du 15 août sont bien sûr d’ordre religieux. Après les célébrations religieuses, les participants assistaient à ces petits spectacles qui permettaient sans doute le temps de quelques heures d’oublier les rudes conditions de vie en Bretagne à cette époque.

On notera la roulotte de couleur verte, le fronton de la scène, les drapeaux tricolores que l’on retrouve sur plusieurs tableaux et sous différents angles, confirmant qu’il s’agit bien du même lieu.

Les cirques de taille importante ont eux aussi développé leurs numéros de voyance et de magie et ce dés le début de la création des premiers cirques. Ces numéros ont toujours fasciné le public. Pour s’en convaincre, il suffit de regarder les belles affiches de la collection du Docteur Frère qui illustrent cette page. Qui n’a pas redouté, un jour, au cirque, d’être choisi par l’artiste pour servir de cobaye ?

Les fabricants de jouets anglais ont toujours montré de la bienveillance envers ce monde ambivalent, n’hésitant pas à proposer à leurs petits clients des reproductions de roulottes de gens du voyage.

La vie de bohème et le monde des saltimbanques n’a pas de connotation péjorative outre-Manche. Ils jouissent d’une certaine reconnaissance, les jouets décrits ci-dessous en sont la preuve. La frontière entre gens du voyage, petits cirques ambulants et cartomanciennes est très mince.

Charbens a crée un magnifique ensemble, au 1/32. Les éléments sont injectés en plomb. La roulotte est d’une taille respectable. l’ensemble se compose d’un gitan, debout, d’une gitane assise tenant un enfant au creux de ses bras, d’un brasero et d’une corde à linge avec des vétements suspendus, donnant vie à l’ensemble. C’est une pièce rare. Nos amis anglais vous expliqueraient que le plus rare, à, part la corde à linge, c’est la boîte, ce qui pour ce type de jouets est une réalité. Il en existe au moins deux, de couleurs différentes.

L’ensemble proposé par Morestone est aussi reproduit à la même échelle, le 1/32, échelle de reproduction la plus usitée en Grande-Bretagne pour ce type de jouets. L’ensemble est splendide. Les couleurs très représentatives. je ne ne connais qu’une couleur. L’ensemble est injecté en zamac, comme tous les modèles de cette firme. Ce qui manque très souvent, lorsque l’on croise ce jouet, ce sont le gitan et la pièce rapportée figurant les petites marches à l’arrière de la roulotte.

En France, il n’en a pas été de même. Si les grands cirques sont adulés, les petites structures sont bien souvent mises à l’index. Il suffit de lire les différents arrêtés pris par les maires ou les préfets.

Pour s’en convaincre regardez comment Minialuxe a traité son sujet. La boîte est certes bien décorée. L’artiste a eu cette belle idée de faire figurer le nom du coffret sur les vêtements étendus sur une corde à linge.

Cela nous renvoie à l’image que Charbens véhiculait plus haut. Le linge au vent, en pleine nature symbolise la vie nomade, la liberté mais aussi le lien avec la civilisation.

Le coffret se nomme : « LES ROMANIS ». Cela se disait autrefois, puis en 1974 c’est le terme « Rom » qui a été adopté. Il est composé de peuples nomades (bohèmiens, tsiganes, gitans).

La roulotte est assez précaire, simpliste. L’illustrateur a choisi de représenter un fer à cheval sur les languettes de la boîte symbolisant la bonne aventure, les cartomanciennes. L’allusion au cirque a disparu totalement.

Cette réalisation n’a pas rencontré un franc succès. Minialuxe réutilisera vite cette petite roulotte en accessoire servant à accueillir les cantonniers entretenant les routes. Le clou sera l’utilisation d’un boîtage accueillant les deux thèmes dans un même coffret. Inutile de préciser la rareté de ce dernier.

Au milieu des années soixante, la série de marionnettes d’animation « Kiri le clown  » créée par jean Image , fut diffusée à la télévision française. Elle synthétise  l’image du petit cirque, de la roulotte, de la vie itinérante. Le bruit des sabots du cheval et le déhanchement de la roulotte m’ont beaucoup  marqué. J’avais oublié. Au moment d’écrire ces lignes, ce souvenir bien enfoui m’est revenu. (voir la vidéo du premier épisode…uniquement pour ceux qui ont connus cette période !) 

Petit bonheur

Petit bonheur

Le contraste est saisissant. Violent même. La lumière artificielle et surexposée des spots renforce cet effet. C’est presque aveuglant.

Vous avez passé non sans mal le contrôle de sécurité de l’aéroport et vous débarquez dans le royaume du « Duty free ». Tout y est luxueux, cela brille, l’or jette ses feux.

A ce moment vous vous demandez même si vous ne vous êtes pas trompé de chemin. Mais non, la route est imposée. Obligé de traverser ce pays de Cocagne pour rejoindre l’avion.

Comme Ulysse vous devez résister aux sirènes du monde du luxe. Elles sont toutes là, plus belles les unes que les autres, rivalisant d’ingéniosité afin de se démarquer des voisines.

Je résiste à la tentation de m’arrêter quand soudain j’entrevois comme une échappatoire, une faille, une ouverture… Une pancarte indique que l’entrée est libre : j’y vais.

Vous n’avez pas rêvé, des oeuvres d’art sont là. Offertes au regard des voyageurs, comme une récompense après les différentes épreuves que vous venez de traverser. Un vrai bol d’air. Je m’y engouffre avec délice.

Cette petite exposition est consacrée à Dina Vierny. Elle fut le modèle d’ Aristide Maillol puis de Bonnard, Matisse et Dufy.

C’est beau et c’est touchant de découvrir la même femme à travers le regard de plusieurs artistes. Chacun avec le style qui lui est propre. Plus tard cette femme ouvrira une galerie à Paris. Saluons donc cette heureuse initiative des aéroports de Paris. Cette exposition était visible dans le terminal 2E hall M.

Vous l’avez compris c’est ce hall que j’ai emprunté afin d’embarquer pour la bourse d’Allentown aux Etats-Unis comme chaque année à pareille époque.

La-bas j’ai eu aussi,  comme à l’aéroport mon lot de désagréments avant l’éclaircie.

Deux camions semi-remorque couchés sur la chaussée, dont un coupé en deux, bloquant le Highway. Plus de 3 heures d’embouteillage pour rejoindre mon hôtel en Pennsylvanie. Plus de connection avec mon téléphone. Puis plus tard une panne de secteur éléctrique : plus de lumière, plus d’ascenseur, d’internet ni de feux de  circulation ! Bref, il a fallu faire face.

Tout est déjà oublié quand la bourse débute ce vendredi. Beaucoup de tables sont encore vides, la bourse commence lentement. Soudain, un éclair. Un exposant que je n’ai jamais vu. La présence devant sa table d’un collectionneur américain de 1/43 de mes connaissances me fait comprendre que le marchand propose sûrement ce type de produits.

J’en ai la confirmation en m’approchant. Dans une vitrine plate sont placées des miniatures de qualité. Ce sont toutes des Corgi Toys. Au vu des prix demandés, le vendeur est un connaisseur.

Placé dans le coin inférieur de sa vitrine plate j’aperçois un intrigant tube en carton  gris. Je n’y aurais sûrement pas prêté attention, s’il  n’avait choisi de le placer avec ses modèles de premier choix. C’est ce détail qui m’a poussé à être curieux et à lui demander ce que contenait le tube.

Le cylindre de  carton est fermé par deux couvercles métalliques. Rien d’excitant. Un papier collé à en-tête commercial et le nom d’un destinataire me font comprendre qu’il s’agit d’un emballage d’expédition.

En l’ouvrant, la surprise est de taille. Le tube coulisse et à l’intérieur se trouvent une Corgi Toys, une petite boite ronde et surtout un ensemble de papiers, catalogues et documents enroulés autour de l’étui du modèle réduit. Une lettre accompagne l’ensemble.

Il s’agit du modèle que Corgi Toys envoyait en cadeau à tout nouveau membre de son club, section américaine. Un certificat numéroté officialisait l’entrée du nouveau membre dans la communauté Corgi Toys.

Sans oublier un catalogue (1969) afin que ce dernier ne se trompe pas de marque de miniatures lors de son prochain achat.

La petite boîte ronde contient le badge que l’heureux propriétaire pouvait arborer à l’école. Un petit livret explique, entre autres, le cheminement d’un modèle, du bureau d’étude à la production.

Venait enfin une petite lettre de bienvenue du secrétaire du club expliquant le choix de la Ford Mustang comme cadeau de bienvenue. Ce dernier rappelait à juste titre, les deux succès de l’auto en championnat Trans-Am (qu’il a rebaptisé Trans America) .

C’est la période d’or des « muscle cars ». Tous les constructeurs automobiles possédant ce type d’auto à leur catalogue  participeront à ce championnat qui intéressa un très large public.

C’est un superbe ensemble. Bien que n’étant pas un grand amateur de Corgi Toys, j’ai été sensible à ce produit, à son exceptionnel état de conservation et à surtout à sa fonction.

C’est un produit des plus originaux. Je ne le connaissais pas .

Il faut reconnaître que commercialement parlant, Corgi Toys était extrêmement habile. Le voyageur que je suis le confirme. C’est le seul fabricant de miniatures automobiles à avoir diffusé ses produits dans le monde entier. Il suffit de regarder les catalogues : la production pouvait s’adapter à tous les marchés. Le succès que rencontre la firme auprès des collectionneurs du monde entier en est la meilleure preuve.

J’en profite pour mettre en avant d’autres types de boîtage  originaux qui, comme ce tube en carton, donnent un intérêt supplémentaires à des modèles classiques.

Voici par exemple quelques variantes de boîtage concernant la série des Morris Mini Cooper Monte Carlo. j’apprécie aussi beaucoup ce boîtage promotionnel pour Dunlop  et cette boîte « temporaire » réalisée en attendant que le réassortiment n’arrive. C’est à ce genre de détails que l’on comprend le succès des Corgi Toys !