Ersatz à Ibiza

Ersatz à Ibiza

Le moule de l’Aston Martin Solido connaîtra une brillante carrière à l’étranger. C’est notamment en Espagne, avec Dalia qu’il donnera naissance à de nombreuses versions.

Solido Dalia
le chassis regravé par Dalia

L’une d’elles mérite qu’on en conte l’histoire symbole de la débrouillardise ibériques, et du sens de l’improvisation. Afin de favoriser sa production locale et de limiter les importations, l’Espagne imposera des taxes douanières importantes aux fabricants de jouets étrangers. Pour contourner ces taxes, une chaine de fabrication de Dinky Toys voit le jour de l’autre côté des Pyrénées. Solido avait déjà établi de solides liens avec Dalia avant la dernière guerre mondiale et c’est en toute logique que la fabrication de la série 100 est délocalisée en Espagne. Dalia semble avoir eu une totale liberté sur le choix des versions qu’elle choisit de produire. C’est d’ailleurs là que réside, à mes yeux l’intérêt de cette série. C’est un dépaysement garanti que de voir des miniatures de la série 100 arborer des décorations « bomberos », « urgencias », « Ibéria » ou « telegrafos ».

L’Aston Martin DB5 va aussi connaître « sa » version spéciale. A cette époque, c’est à dire au début des années 60, Corgi Toys a lancé une série de miniatures reproduisant les autos de héros du cinéma (James Bond) ou de séries télévisés (Le Saint, Uncle…). Cette série aura un succès mondial et constituera un vecteur de développement pour la firme de Swansea. Si la législation relative au droit de reproduction n’était pas aussi développée qu’aujourd’hui, il est évident que les firmes anglo-saxonnes avaient déjà pris des précautions pour protéger leurs créations. Pour Dalia qui avait en mains le moule de la DB5, il devait être tentant de reproduire « son » interprétation de la célèbre auto de l’agent 007. Ne voulant pas provoquer frontalement les dirigeants de Corgi Toys, Dalia va contourner le problème. Continuer la lecture de Ersatz à Ibiza

La caravane et l’Aston Martin

La pérennité de la série 100 est à mettre à l’actif de Jean De Vazeilles. Lorsque le père de ce dernier avait créé Solido, il avait pour ambition de proposer des jouets démontables. Les reproductions d’automobiles tenaient alors une grande place dans les catalogues. Le coté ludique du jouet résidait dans la possibilité pour l’enfant de construire son propre modèle.

La caravane et l’Aston Martin
Face avant et arrière

Il avait à sa disposition un châssis, des capots, et des éléments de carrosserie variés. Il ne restait plus qu’à les assembler au gré de son imagination. L’enfant pouvait ainsi passer d’un coupé chauffeur à une pointe de course. Le passage à la série 100 n’a pas totalement supprimé cet esprit de jouet démontable. Mais il s’agit désormais de proposer des autos fidèles et ce critère impose de réaliser des châssis aux cotes de chaque auto : c’est la fin des châssis standardisés.

Jean de Vazeilles ne souhaita jamais se séparer de ce qui avait fait le premier succès de la marque : les autos démontables, transformables, ludiques. Il adapta le concept à ses nouvelles productions. Il choisit deux modèles de la série 100, la Ford Thunderbird et l’Alfa Romeo 2600 Bertone.

Le moule fut modifié de manière très simple. Du sertissage comme moyen de maintenir le châssis à la carrosserie, on passa au vissage grâce aux fameuses vis Solido qui n’avaient guère évolué depuis le début de l’histoire de la Solido. Deux tailles de coffret furent proposées : Caravaning 1 et Caravaning 2. L’enfant qui recevait le second coffret pouvait choisir d’assembler, à l’aide d’un châssis très simple qui avait été créé au milieu des années 50, la caravane ou la remorque pour véhiculer le hors-bord. L’enfant qui recevait le petit coffret ne pouvait accrocher à son Alfa Romeo que la caravane. Il est bien clair que l’intervention de l’imagination est désormais très cadrée. Plus tard, l’opération sera renouvelée avec des modèles du milieu des années 70, preuve qu’il y avait là un petit marché laissé vacant par les autres fabricants.

Vous allez me dire, mais quel rapport y a t-il avec notre Aston Martin DB5 ? Le voici. Solido a eu une grande carrière à l’international. Les moules ont voyagé en Espagne, en Argentine, au Brésil, et se sont parfois un peu détériorés. Ainsi notre Alfa Romeo 2600 a dû partir en Espagne alors qu’il y avait une livraison de coffrets Caravaning 1 à honorer.

La direction conclut bien vite que la seule auto présentant des caractéristiques similaires était l’Aston Martin DB5.

La caravane et l’Aston Martin
La caravane et l’Aston Martin

Il fallut juste modifier le châssis. Un pas de vis remplaça le sertissage pour permettre de fixer la carrosserie au châssis. Cette modification fut conservée jusqu’à la fin de production du modèle. Cette version, peinte d’un beau vert cru est toujours équipée de jantes en acier, ce qui en fait une exception pour une Aston Martin DB5 « made in France ». A contrario, l’Alfa Romeo 2600 partie en Espagne et vendue en étui individuel sera produite vissée !

Là aussi ce sera une exception. Au retour de l’outillage en France, l’Alfa Romeo réintégrera les coffrets caravaning jusqu’au milieu des années 70.

La bonne inspiration de Solido

La bonne inspiration de Solido

J’ai un faible pour Solido, pour ses produits mais également pour la manière dont M. De Vazeilles a géré cette firme jusqu’à son départ au milieu des années 70.

Aston Martin Solido
variantes de chassis Aston Martin DB5

A la succession de son père, il a donné à cette firme une dimension internationale. Le choix judicieux et inspiré des modèles reproduits y est pour beaucoup. Je n ‘hésiterai pas à dire qu’entre les années 60 et 70, Solido est la firme qui a le mieux reproduit les plus belles autos du moment.

Prenons la firme Aston Martin. Voilà bien une marque automobile racée. En l’espace de quatre ans, Solido a inscrit trois autos de Newport Pagnell à son catalogue.

C’est bien là une marque du goût de son dirigeant. Il était également important d’être le premier « à sortir » la reproduction de l’auto. Ce critère avait beaucoup d’importance pour M. De Vazeilles. Etrangement, le modèle du jour, la DB5, n’attira personne. Corgi Toys sera la seule marque à en offrir une reproduction avec la fameuse version de Goldfinger. Dinky Toys passera à travers et essaiera de se rattraper avec une version cabriolet et plus tard un coupé DB6.

Solido mettra en œuvre tout son savoir-faire au service de la reproduction de l’Aston Martin DB5. Les modèles bénéficient de la suspension, présente depuis la première référence de la série 100.

Solido les dote également de portes ouvrantes : elle a été la première à proposer cette caractéristique sur la Lancia Flaminia portant la référence 121. En fait Solido a habilement retravaillé le moule de sa DB4 sortie quelques années plus tôt. Ceci est bien visible notamment au niveau du châssis. La transformation a été réalisée de main de maître. Le résultat est excellent et la ligne de l’auto très bien rendue. A l’exception d’un modèle particulier, elle est toujours équipée de jantes à rayons injectées en zamac. Au départ de la production, ces jantes sont brutes. Elles recevront au milieu de l’année 1965 un traitement chromé qui améliore le rendu. C’est à ce moment que le châssis sera peint de couleur noire en place de la couleur grise. Au cours de sa carrière l’Aston Martin recevra de nombreuses couleurs.

Cette auto peut constituer un thème de collection à part entière. On peut y ajouter aussi pour une couleur identique les variantes de couleurs de sièges. Ainsi, une version dans une couleur de base, turquoise ou vert métallisé, prend une saveur particulière lorsque l’intérieur est de couleur rouge et non de couleur blanche. La rareté n’est plus du tout la même. Comme très souvent, les couleurs tardives, toujours équipées d’un châssis de couleur noire sont les plus rares. Je signalerai la version rouge sang et celle de couleur bleu foncé métallisé comme étant moins fréquentes. La version rouge métallisé, peu courante également, semble avoir été principalement distribuée à l’exportation.